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Approvisionnement en eau à Carrefour-Feuilles : entre informalité et

violence urbaine

Anie Bras1, Neptune Prince1, Osnick Joseph2 et David Telcy3

1Université Quisqueya, Centre de Recherche et d’Appui aux Politiques Urbaines, 218 Ave-

nue Jean Paul II, Haut de Turgeau, Port-au-Prince, Haïti

2Université Quisqueya, Laboratoire de Qualité de l’Eau et de l’Environnement, 218 Avenue

Jean Paul II, Haut de Turgeau, Port-au-Prince, Haïti

3Centre National de l’Information Géo-Spatiale (CNIGS), Impasse Baron # 13 bis, Turgeau

Port-au-Prince, Haïti Résumé

Cette recherche sert de base à une analyse du contexte social économique et environnemen- tal entourant l’accès à l’eau et l’assainissement des habitants de Carrefour-Feuilles. Pour la mener à bien, hormis l’étude de la bibliographie existante, la démarche méthodologique adoptée a été fondée sur des entretiens exploratoires, une enquête de terrain conduite au moyen d’un questionnaire administré à un échantillon de 285 chefs de ménage. Les résultats montrent que plus de 60% des chefs de ménage résidant à Carrefour-feuilles, en majorité des femmes, exercent une activité dans l’informel. Le service public peine à fournir le service, 23.2% des ménages seulement affirment y avoir recours exclusivement. En d’autres termes plus de 75% des ménages ont un pied dans l’informel en ce qui a trait à l’approvisionnement en eau. Cette forte tendance vers l’offre de service informel n’est pas sans conséquence, outre le manque à gagner pour le secteur public, l’accent a été mis sur le niveau élevé et l’instabilité des prix, incertitude quant la qualité de l’eau fournie, l’exposition de la popula- tion à certaines maladies d’origines hydriques et enfin les actes de violences urbaines.

1. Introduction

Dans l’histoire des pays industrialisés, la fourniture des services de base (eau, assainis- sement, déchets, énergie, transport, santé et éducation…) s’est progressivement imposée comme une des tâches auxquelles devaient répondre les pouvoirs publics [1]. La généra- lisation de ces services essentiels est devenue un des moteurs de la construction des États modernes, et une source de légitimité du pouvoir politique. D’ailleurs, les Objectif du Dé- veloppement durable ont fait de la fourniture de ces services un engagement collectif inter- national.

Cependant dans les Pays en Développement, comme Haïti, la fourniture des services de base est réalisée dans un contexte de forte croissance démographique juxtaposée à des conditions de pauvreté socio-économique et urbanistique alarmantes. Moins de 50% de la population

a accès à l’eau potable et l’assainissement, soit l’un des taux moyens d’accès les plus bas de l’Amérique Latine et de la Caraïbe. En effet, loin de s’améliorer, l’accès à des systèmes d’assainissement décroît d’année en année en termes relatifs passant de 19% en 1990 à envi- ron 10% en 2008 pour le milieu rural, et de 44% à 24% pour le milieu urbain pour la même période33. Après le séisme du 12 janvier 2010, les infrastructures d’eau et d’assainissement, déjà très insuffisantes, se sont retrouvées détruites ou souvent non fonctionnelles, amplifiant du coup les défis dans ce sous-secteur et de façon beaucoup plus accrue dans les quartiers précaires et fortement urbanisés. A Carrefour-Feuilles, par exemple, vaste regroupement de quartiers de la commune de Port-au-Prince dont la population dépasse les 200.000 habitants, le service public peine à alimenter la population en eau et assainissement. Cette situation qui se traduit par une distribution inégale des services publics – lorsqu’ils existent -, des taux de couverture très faible au regard des besoins [2] a ainsi amené la population à trouver d’autres sources d’approvisionnement, notamment auprès d’une offre informelle souvent caractérisée par des comportements anomiques allant de l’incivilité aux violences urbaines. Notons que les « violences urbaines » sont un phénomène très fréquent dans les sociétés modernes [3].

On peut alors se demander : Dans quelle mesure l’offre de service informel permet de com- penser le déficit du secteur public à Carrefour Feuille ? En quoi l’eau peut-elle être consi- dérée comme un facteur de cohésion sociale ou de violence urbaine ? Cette recherche vise à réaliser une analyse non exhaustive du contexte social économique et environnemental entourant l’accès à l’eau et l’assainissement des habitants de Carrefour-Feuilles.

2. Méthodologie

Hormis l’analyse de la bibliographie existante, ce travail de recherche est fondé sur des entretiens exploratoires avec les acteurs, une enquête de terrain conduite à l’aide d’un ques- tionnaire [5] lequel a été administré à un échantillon d’environ 285 chefs de ménages. Le terrain d’étude étant à la fois grand et hétérogène, il a été divisé en trois blocs.

3.

Résultats et discussions

3.1. Caractéristiques socioéconomiques et urbanistiques de la zone de Carrefour- feuilles

Carrefour-Feuilles, zone fortement urbanisé et populaire de la Capitale d’Haïti, est située en périphérie de Port-au-Prince, du côté sud, au pied du Morne l’Hôpital. Elle est très vaste, elle s’étale sur trois sections communales de la Commune de Port-au-Prince : la 6èmeTurgeau, la 7ème Morne l’Hôpital et la 8ème Martissant. Le quartier s’étend depuis le Morne-à-Tuf, au pied du Morne l’Hôpital, et est limité au nord par le quartier de Bas Peu-de-Chose. Il existe plusieurs propositions de délimitation du quartier dont la plus répandue, celle du Ministère des Travaux Publics, Transports, Communications et de l’Énergie (MTPTCE) (BMPAD, 2012). Dans le cadre de ce travail de recherche, est pris également en compte les quartiers ou sous-quartiers avoisinant Descayettes, Fort-Mercredi, etc. À la fin des années 1980, Carre- four-Feuilles a commencé à connaître une extension spatiale sur les fortes pentes du Morne

l’Hôpital qui s’est accélérée durant les années 1990 jusqu’à la situation actuelle, avec une accélération particulière du phénomène suite au séisme du 12 janvier 2010.

Les données collectées dans le cadre de ce travail montrent que plus de 60% des chefs de ménage résidant à Carrefour-feuilles sont des « actifs-occupés », c’est-à-dire, en âge de travailler et exerçant une activité en majeure partie dans l’informel. Ils sont en majorité des femmes (52%), dont la moyenne d’âge est de 44 ans. La taille moyenne des ménages est de 5 personnes dont plus de 90% sont des locataires.

4.02%, 4% 45.23%, 45% 21.11%, 21%

12.06%, 12% 17.59%, 18%

Répartition des chefs de ménage occupés selon leur secteur d'activité (formel ou informel)

Informel/pour compte d'autrui Informel/pour son compte Privé/formel Public Non précisé

Figure 1: Secteur d’activité des chefs de ménage actifs-occupés

3.2. L’approvisionnement en eau à Carrefour-feuilles ou le marché de l’informel Globalement, les données recueillies permettent de mettre le doigt sur le caractère insuffi- sant de l’offre formelle par rapport à la demande de la population. Le déficit est donc comblé par l’offre informelle de service, notamment par les particuliers qui revendent l’eau par seau (bokit ou par drum).

Figure 2: conduites visibles sectionnées (secteur public) :  File d’attente devant un  kiosque

En effet, 51% des ménages interrogés ont accès à l’offre de service public direct, c’est-à- dire un branchement privé ou indirect qui renvoie à l’utilisation des kiosques. Notons tout de même que 39% des habitants disposent d’un branchement privé. D’un autre côté, bon nombre de ceux qui ont accès au service public formel, surtout en saison sèche, font eux aussi appel au système informel, notamment par le biais des marchands ambulants. Ainsi, lorsque l’offre formelle connait régulièrement des variations dans la fréquence de distribu- tion, cela introduit une incertitude au sujet du temps qu’il faudra attendre pour avoir accès au service ; dans un tel cas tout besoin urgent devient automatiquement une demande à satisfaire par l’offre de service informel. Ce déficit du secteur public se traduit notamment par le fait que les kiosques d’eau, déjà insuffisants, sont la plupart du temps dysfonctionnels (cf. Figure 2).

Figure 3: Localisation des kiosques à Carrefour-feuille et dans les localités avoisinantes

23.2% des ménages interrogés disent avoir recours exclusivement au service public. Il s’agit habituellement de propriétaires disposant d’un réservoir. Ainsi, près de 75% des ménages ont un pied dans l’informel. Cette situation introduit la question du manque à gagner enre- gistré au niveau des recettes du secteur public en charge de la gestion de l’eau dans la cité, du fait de la faiblesse des investissements publics dans le domaine de l’eau.

Le secteur informel se présente sous plusieurs formes, allant de l’achat de seau d’eau chez des particuliers, dans la rue, ou directement dans des camions transportant des drums. Souli- gnons le fait que pour les ménages qui résident dans les lieux d’accès très difficiles, (hauteur de carrefour-feuille) l’offre de service informel reste la seule option. Cette forte tendance vers l’offre de service informel n’est toutefois pas sans conséquence, outre le manque à gagner pour le secteur public, il convient de mettre l’accent sur le niveau élevé et l’instabi- lité des prix, incertitude quant la qualité de l’eau fournie, par conséquent l’exposition de la population à certaines maladies d’origines hydriques et enfin les actes de violences urbaines.

3.3. Le coût de l’eau

Les résultats des entretiens et de l’enquête par questionnaire ont montré que les ménages achètent en moyenne 121.8 litres d’eau par jour et le cout de l’approvisionnement en eau peut représenter entre 15 à 20% du panier de la ménagère. Le prix moyen par seau de 18.9 litres particulièrement en période d’étiage peut varier entre 10 à 38 gourdes dans le secteur informel. Il est important de remarquer que dans un rayon de 50 mètres, 56.57% des mé- nages trouvent un particulier où ils peuvent acheter de l’eau. En ce sens, l’offre informelle n’est pas plus accessible financièrement à ‘tous’, mais la demande rencontrant cette offre vient d’un choix entre pouvoir d’achat et distance c’est-à-dire d’un choix guidé par le be- soin à satisfaire et son délai qui conduit un ménage à prioriser une consommation présente à coût plus élevé que d’attendre une consommation future à un coût moindre.

3.4. Eau à Carrefour-Feuille : facteur de violence urbaine

Face à la nécessité de satisfaire leurs besoins en eau, des habitants à Carrefour-Feuilles affichent plusieurs comportements anomiques. Les témoignages sont divers et révélateurs de plusieurs facteurs desquels émanent les violences urbaines. En témoignent les entretiens exploratoires de certains habitants de la zone où ils évoquent un épisode de violence faite sur la population par un groupe armé qui se requièrent comme étant les gérants d’une source d’approvisionnement d’eau dans la zone.

Par ailleurs, les irrégularités enregistrées en lien avec la disponibilité de l’eau au niveau des kiosques créent souvent des situations de panique donnant lieu à des échauffourées entre riverains. Ces scènes de violences se caractérisent souvent par des injures, voie de fait, coup et blessures à la tête sous l’effet des tirs d’objets de toute sorte, voire l’exhibition d’armes à feu. L’eau devient dans ce contexte une marchandise au plus offrant, et loin d’être un élé- ment de cohésion sociale devient selon toute vraisemblance un facteur de violence urbaine.

3.5. La question de la qualité de l’eau : entre prises clandestines et environnement insalubre

Dans le domaine de l’assainissement, plus précisément, en matière d’évacuation des dé- chets solides, 82% des chefs de ménages interrogés déversent leurs déchets dans « un lieu quelconque » (ravine, terrains vagues, voie publique…). Ce qui traduit que l’offre de service de collecte des déchets solides, qu’elle soit formelle ou informelle, est quasi-inexistante.

2.807, 3%

81.754, 82% 4.211, 4%

7.719, 8%

3.509, 3% Lieu d'évacuation des déchets

Compagnie privée Déversement dans un lieu quelconque Incinération Particulier

SMCRS

Figure 4: Lieu d’évacuation des déchets

Des animaux domestiques en élevage libre, expression de la rencontre du mode de vie cita- din avec les pratiques du monde rural, se nourrissent et prolifèrent au gré de la persistance des tas d’immondices dans l’environnement immédiat des zones de captages. Lors des épisodes pluvieux, le lessivage des ordures ménagères, des déjections humaines et animales ne constitue pas uniquement une source potentielle de contamination des eaux de ruisselle- ment, mais aussi des eaux souterraines et du réseau de distribution d’eau potable. La popu- lation dans ce contexte court un réel danger sur le plan sanitaire car, le réseau de distribution d’eau subit des actes de vandalismes, avec des conduites visibles sectionnées.

Conclusion

A la lumière des données collectées, il ressort que les besoins en eau de la population de Carrefour- Feuilles sont satisfaits grâce à la complémentarité ou la superposition des deux offres de service, l’étatique mais aussi et surtout l’informel. On note ainsi que moins de 35% de la population vivant à Carrefour-Feuilles sont abonnés au service formel de distribution d’eau (secteur public). Ce résultat porte à questionner les pertes en termes de recettes pour l’administration publique mais aussi sur la qualité de l’eau distribuée versus les maladies d’origines hydriques dans cette portion du territoire, puisque la proportion du marché qui échappe au contrôle de l’Etat représente environ 70%, d’autant plus que l’existence de cette situation est liée à un contexte de forte carence en matière de service d’assainissement. Par ailleurs, se pose la question de la gouvernance du secteur de l’eau dans la zone, car d’après les observations, il semblerait que l’eau à Carrefour-Feuilles tend à devenir un facteur de violence urbaine entre deux catégories de consommateurs, les plus forts qui, de fait, de- viennent des gérants du bien public au détriment des plus vulnérables.

Références bibliographiques

[1] Barbier C, Giraud P.N, Ruet J., Zérah M.H 2007. L’accès aux services essentiels dans les pays en développement au cœur des politiques urbaines. Institut du développement du- rable et des relations internationales N° 04/2007, Entreprises et Biens Publics.

[2]. Bras, A., Kern, A. L., Lucien, G. E., & Emmanuel, E. (2016). Poor Neighbourhood and Natural Disaster: The Environmental Situation of the Cité l’Eternel in Port-au-Prince, Haiti. In Learning from the Slums for the Development of Emerging Cities (pp. 81-91). Springer International Publishing.

[3]DUPREZ (D.) et Laurent Mucchielli, « Des discours de la ‘‘violence’’ a l’analyse des désordres urbains » in Déviance et Société, vol. 24, no. 4, Les désordres urbains : regards sociologiques, pp. 327-330.

[4] OUELLET G.,Méthodes quantitatives en Sciences humaines, Ed. Les Griff. D’Arg., Québec, 1989,308 p.

DE L’INFORMALITÉ À LA GESTION ALTERNATIVE

D’UNE VILLE SOUTENABLE : LE CAS DE CANAAN.

Anne-Laurence Verret, Anie Bras, Evens Emmanuel

Université Quisqueya, Centre de Recherche et d’Appui aux Politiques Urbaines, 218, Avenue Jean Paul II, Haut de Turgeau, Port-au-Prince, Haïti

Résumé

La gestion de la ville obéit classiquement à une logique d’administration publique. Elle s’avère un exercice complexe, la ville étant le produit d’une multiplicité d’acteurs aux in- térêts divergents. Dans les pays du Sud économique confrontés à une croissance urbaine galopante, la gestion de l’espace citadin représente un défi considérable pour les politiques urbaines qui ont montré leurs limites dans divers pays. Haïti présente un développement ur- bain non encadré par les autorités publiques, de caractère informel et désorganisé. Le séisme de 2010 a clairement révélé cette faiblesse étatique en termes de gestion et aménagement urbains. En 2010 en effet, le laisser-faire de l’Etat donna naissance à Canaan, aujourd’hui vaste bidonville de plus de 200 000 habitants livrés à eux-mêmes. Ce désengagement éta- tique incita la population à se structurer en associations pour gérer l’organisation spatiale et les besoins des habitants en termes de services urbains. A travers l’étude du cas de Canaan, cet article a pour objectif de montrer comment une communauté organise son cadre de vie dans un contexte de défaillance étatique, de questionner les mécanismes classiques de ges- tion urbaine et de voir les possibilités d’associer une approche alternative de gestion à la démarche de développement « soutenable » de la ville.

Introduction

La gestion de la ville obéit classiquement à une logique d’administration publique. Elle s’avère un exercice d’autant plus complexe que la ville est, d’une part, le produit d’une mul- tiplicité d’acteurs aux intérêts divergents et, d’autre part, le sujet d’inéluctables mutations socioculturelles, économiques et spatiales. Les politiques des gouvernements, à l’échelle

étatique ou municipale, ont montré leurs limites face à la complexité du phénomène urbain. Dans les villes Sud qui sont, de surcroit, confrontées à la pression d’une croissance urbaine galopante, au chômage et la pauvreté, la gestion urbaine représente un défi encore plus considérable pour les politiques urbaines qui se sont révélées inefficaces dans nombre de pays. La Région Métropolitaine de Port-au-Prince fait nettement montre d’un développe- ment de son territoire non encadré par les pouvoirs publics en dépit des mesures légales pré- vues. Si le séisme de 2010 a mis en exergue la faiblesse des autorités publiques en termes de gestion, planification et aménagement urbains, il a grandement contribué à renforcer le caractère largement informel et désorganisé du développement de la ville. Le laisser-faire de l’Etat haïtien dans cette situation de post-catastrophe donna naissance au quartier de Ca- naan, aujourd’hui vaste bidonville de plus de 27 km2 et de 200 000 habitants livrés à leur compte. Mais que faire lorsque la passivité de l’autorité étatique prend des proportions de démission nationale? Quelle alternative de gestion reste-t-il face à la défaillance de l’Etat? La réponse de la population de Canaan fut de se structurer en organisations communautaires de base dont la mission consiste à veiller à l’organisation de l’espace et aux besoins des habitants en termes de services urbains essentiels. Cette autoprise en charge d’une com- munauté de la gestion de son cadre de vie, aussi informelle soit-elle, renvoie à des notions de démocratie participative, de citoyenneté active. Cet article, à travers l’étude du cas de Canaan, a pour objectif de montrer comment une communauté organise son milieu de vie dans un contexte de défaillance étatique, de questionner les mécanismes classiques de ges- tion urbaine (et d’urbanisme) et d’examiner in fine les possibilités d’intégrer une gestion alternative bottom-up dans la recherche d’un développement plus « soutenable » de la ville. Matériel et méthodes

Présentation du site d’étude

Situé au nord-est de la Région Métropolitaine de Port-au-Prince, Canaan est un quartier de la commune de Croix-des-Bouquets qui elle même revêt une importance stratégique en reliant la capitale au nord du pays et à la République dominicaine.

En 1971, la vaste étendue désertique qu’était Canaan fit l’objet d’une première déclaration d’utilité publique à des fins touristiques. En effet, un plan directeur de tourisme du Bureau d’Aménagement Touristique de l’Ouest était en cours d’exécution avant le séisme. Par ail- leurs, un certain nombre de projets privés d’envergure étaient également considérés dans le cadre du Plan Directeur du Pôle Nord de Développement Urbain.

Carte HT 1 - Limite administrative, quartier de Canaan 2012. Base de données SILQ 2012

Suite au séisme, une seconde déclaration d’utilité publique via l’arrêté du 22 mars 2010 retint la zone de Canaan « à des fins de relocalisation des victimes du séisme du 12 janvier 2010 34». S’en suivit, en peu de temps, une fulgurante transformation de l’espace: la création

d’une nouvelle « ville » de 27 km2, 200 000 habitants (victimes du séisme et migrants de divers horizons) et plus de 10 millions de dollars américains d’investissement (ONU-Habi- tat, 2015).

Carte HT 2 - Vue aérienne, quartier de Canaan, 2014

34 Le Moniteur (2010). Arrêté déclarant d’utilité publique les propriétés s’étendant de l’angle de la Rivière Bretelle à la Route

nationale numéro 1 en passant par Bon Repos et Corail-Cesselesse formant un polygone avec la zone communément ap- pelée Concombre, article 1, 22 mars, p. 3.

Méthodes

De nature exploratoire, cette étude s’est basée sur une approche principalement qualitative. La collecte de données a notamment fait l’objet de l’application de trois méthodes: l’observation, les entretiens semidirectifs et l’analyse documentaire (arrêtés, lois, actes, études, rapports). Deux autres méthodes sont toutefois venues compléter les données, à savoir: une enquête par questionnaire permettant de mieux appréhender la composition sociodémographique de Canaan, et un travail de photo- interprétation d’images aériennes permettant d’apprécier l’évolution spatiale de la

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