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6.3 Perspectives sur le monitoring hydro-sismique des versants instables

6.3.1 Monitoring des versants instables: Etat de l’art

Depuis le début des années 1970, la caractérisation mécanique de la dynamique d’un versant instable et de son évolution sont principalement réalisées à travers du monitoring sismique passif, c'est-à-dire par l’écoute en temps réel des signaux sismiques émis naturellement par la zone étudiée [Cadman et Goodman, 1967]. Le principe est d’installer au plus proche de la zone d’étude des capteurs sismiques pour localiser et identifier les processus à l’origine de l’émission des ondes sismiques [Roth et al., 2006; Spillman et al., 2007; Mourot et al., 2008]. La principale difficulté, en plus de la topographie escarpée et du risque que représente l’installation de tels dispositifs sur des zones instables, réside dans le fait que la microsismicité enregistrée au sein d’un versant instable est bien souvent non- conventionnelle [Spillman et al., 2007; Helmstetter et Garambois, 2010 ; Gomberg et al., 2011], et donc très difficile à localiser. De plus, la réalisation d’un modèle de vitesses d’un versant est très compliquée en raison de la très grande hétérogénéité de celui-ci. Les signaux microsismiques sont fortement atténués (principalement dans les hautes fréquences) par la fracturation et l’altération mécanique des zones situées en surfaces du versant, rendant leur identification difficile [Helmstetter et Garambois, 2010 ; Tonnelier et al., 2013]. Pour palier à cette difficulté, différentes configurations géométriques de capteurs sismiques existent, comme par exemple l’installation d’antennes sismiques en étoiles sur et aux bords du versant, où un capteur 3 composantes est situé au centre d’un trièdre constitué de 6 capteurs verticaux mono-composante [Joswig, 2008; Tonnelier et al., 2013]. Cette configuration semble être relativement efficace pour l’évaluation de la microsismicité, comme l’a montré Walter et al.

[2009]dans le cas du glissement de terrain de Super-Sauze. Ces installations, lorsqu’elles sont en nombre insuffisant, ne permettent cependant pas une localisation précise des événements, rendant l’évaluation du mécanisme à l’origine plus complexe [Helmstetter et al., 2010]. Ces nouvelles techniques de monitoring microsismiques dans le cas de glissements de terrain ont cependant permis de discriminer deux principaux types de signaux enregistrés lors d’une crise: des microséismes associées aux zones altérées (et souvent en présence d’infiltrations d’eau), et des chutes de blocs et/ou d’écoulements granulaires le long du versant instable. Même s’il n’est pas toujours facile de discriminer ce type d’événements, les techniques de monitoring utilisées actuellement offrent un bon aperçu de leur emplacement et de leur occurrence temporelle [Tonnelier et al., 2013].

131 En ce qui concerne les déformations lentes associées aux mouvements de grandes ampleurs de la masse instable, beaucoup de dispositifs de mesures existent et apportent des données de qualité quant à la cinématique du glissement et à sa réponse aux forçages naturels (variations de température, cycle gel/dégel, infiltrations d’eau de pluie ou de fonte des neiges). La tachéométrie, l’interférométrie, les techniques d’observations RADAR, le GPS ou encore la vidéométrie sont parmi les plus utilisées pour le monitoring des mouvements lents de versants instables. L’installation d’extensomètres et d’inclinomètres sur des fractures ouvertes en surface ou des arrachements en sommet du glissement permet aussi une excellente évaluation des mouvements en surface [Levy et al., 2011].

Du point de vue hydraulique, l’évaluation de la perméabilité, de la porosité et de l’emmagasinement et de leur évolution au cours du temps est en générale plus délicate à opérer. Le monitoring hydraulique se fait principalement par des relevés météorologiques et par des mesures de niveaux piézométriques en forages. Les relevés météorologiques permettent de connaitre les instants précis où de grandes quantités d’eau sont susceptibles de s’infiltrer dans le massif. Les relevés de niveaux piézométriques permettent d’évaluer les variations du niveau d’eau et d’estimer les propriétés hydrauliques, mais ces mesures nécessitent la réalisation de forages de grandes profondeurs (plusieurs dizaines voir centaines de mètres) à proximité et dans le versant instable. Ces forages sont extrêmement couteux et les déformations qu’ils sont susceptibles de subir peuvent les endommager et les rendre inutilisable à moyen et long terme. De plus, en milieu fracturé discontinu et non saturé, les forages ont peu de chance de recouper les fractures conductrices d’eau, mettant en question la représentativité des mesures qui y sont réalisées. Les exemples à Séchilienne (France), Randa (Suisse), etc. montrent que les forages sont en général secs.

Mieux comprendre les couplages entre les phénomènes hydrauliques, mécaniques et sismiques au sein d’un versant instable nécessite donc de posséder une quantité de données importante pour bien estimer l’évolution du comportement des versants. L’acquisition de ces données ne peut alors se faire que par une instrumentation détaillée en champ proche des versants. Malgré le coût souvent très élevé d’une instrumentation complète composée de capteurs de pressions hydrauliques, sismiques et de déformations, de plus en plus de glissement de terrains de grande ampleur, et d’autant plus s’ils correspondent à un aléa anthropique élevé, sont instrumentés de manière à obtenir une vue d’ensemble des processus sismiques et hydromécaniques en jeu [Guzzetti et al., 2007]. L’intégration et le traitement simultané de ces données ont permis ces dernières années d’observer de manière plus fine la microsismicité produite et ses relations avec les réponses hydromécaniques des versants. Dans ces versants instables, la localisation des événements est cependant difficile en raison de la forte hétérogénéité du milieu et des vitesses sismiques, la forte atténuation et la dispersion des ondes, ainsi que la difficulté à identifier clairement des ondes P- et S- [Spillman et al., 2007].

132 Ainsi, peu d’études présentent une localisation précise des évènements et se concentrent plutôt sur la recherche de précurseurs sismiques avant une rupture brutale du versant

[Amitrano et al., 2005; Levy et al., 2011] et sur les relations existantes entre l’occurrence des événements sismiques, les vitesses de déplacement mesurées en surface, la pluviométrie et la température [Helmstetter et Garambois, 2010 ; Amitrano et al., 2010].

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