• Aucun résultat trouvé

En plus des réponses décrites précédemment, on peut également observer dans le cer-veau des réponses non-asservies en phase ou réponses induites qui sont des synchronisa-tions ou des désynchronisasynchronisa-tions d’un ensemble de neurones en réponse à des événements

(en anglais on les nomme ERS ou ERD d’après Related Synchronization et Event-Related Desynchronization). Ces réponses sont mises en évidence par le calcul de la puis-sance spectrale dans certaines bandes de fréquence particulières relativement à un état de repos. Ainsi, si la puissance spectrale dans la bande α (alpha) augmente (resp. diminue) après un événement, on parle d’ERS (resp. ERD). C’est Berger qui le premier a observé de tels phénomènes quand il s’aperçut que certains événements pouvaient « bloquer » le rythme α (Berger, 1929). Il est souvent admis que les ERSs correspondent à un état inac-tif d’une population cérébrale et, qu’inversement, les ERDs correspondent à une activité accrue d’une population neuronale : l’idée étant que lorsqu’une zone se met à être très active, les neurones ont une activité très erratique et s’écartent de leur fonctionnement en régime de repos, or ce régime de repos est une activité quasi-périodique à une fréquence qui dépend des interconnexions du groupe de neurones en jeu. En réalité, ceci n’est vrai que pour certaines fréquences et certaines zones cérébrales (Lopes da Silva, 2006). Les choses apparaissent en effet plus compliquées que cela : Lopes da Silva (2006) rappelle par exemple qu’une grosse part de la difficulté provient de l’hétérogénéité des types de neurones dans une zone cérébrale et de plus de la complexité des interconnexions entre les différents neurones (connexions excitatrices ou inhibitrices par exemple). L’interprétation de ce type de réponses dans le cas de l’EEG est de plus rendue très compliquée en raison de la faible résolution spatiale. Une description complète des différents types d’ERD-ERS qui peuvent être observés dans le cerveau est en-dehors de la portée de cette thèse, mais nous voulons cependant décrire succinctement les différentes fréquences qui peuvent être rencontrées dans les enregistrements EEG (Niedermeyer et Lopes da Silva, 2004, Cha-pitre 9) :

δ (delta) : oscillations très lentes (0,1 à 3,5 Hz) d’amplitude importante principalement observées chez l’adulte pendant le sommeil profond ;

θ (theta) : rythme légèrement plus rapide (4 à 7,5 Hz), il a été observé dans les processus émotionnels et cognitifs ;

α (alpha) : oscillations entre 8 et 13 Hz souvent associées à des états de relaxation. Il est particulièrement visible dans les parties occipitales et a l’amplitude la plus importante des différents rythmes connus ;

µ (mu) : ∼ 10 Hz, ce rythme se distingue du rythme α par les zones cérébrales qu’il implique : le cortex sensori-moteur. Pour cette raison, on l’appelle aussi le rythme sensori-moteur. Il est bloqué lors de la préparation d’un mouvement ;

β (beta) : oscillations relativement rapides (entre 13 et 30 Hz) observées chez l’adulte éveillé. Il est particulièrement impliqué dans l’exécution des mouvements ;

γ (gamma) : oscillations rapides (> 30 Hz) souvent associées aux processus cognitifs supérieurs.

Le lecteur intéressé pourra trouver une description beaucoup plus complète dans Niedermeyer et Lopes da Silva (2004). La figure II.8 présente le spectre typique d’un EEG et résume les différentes bandes de fréquences les plus utilisées (le sujet était éveillé, en période de concentration juste avant une expérience d’ICM).

L’utilisation de ce type de réponse cérébrale dans le cadre des ICM repose sur une idée assez simple : il existe des tâches cognitives particulières pour lesquelles on sait qu’elles engendrent des ERDs-ERSs dans des zones cérébrales distinctes. Le sujet doit donc choisir différentes tâches mentales facilement « séparables »1 et associer à chacune de ces tâches une commande (e.g. bouger un curseur de souris à droite ou à gauche).

Ce terme sera précisé dans la suite de la thèse.

Figure II.7 Unité de temps en abscisse : seconde, en ordonnée : unité arbitraire. Elec-troencéphalogramme humain lors de différents états de conscience. (a) état d’excitation, (b) état relaxé, (c) état d’endormissement, (d) sommeil et (e) sommeil profond. Figure issue des travaux pionniers de H.H. Jasper sur l’électroencéphalogramme de l’homme (Jasper, 1941).

Fréquence [Hz]

Densité spectrale de puissance [dB]

Spectre typique d'un EEG (5000 pts, Fs==250 Hz, Cz)

0 5 10 15 20 25 30 35 40 −20 −10 0 5 10 15 20 δδ θθ αα ββ γγ Intervalle de confiance à 95 %

Figure II.8 Densité spectrale de puissance typique d’un EEG. Le spectre est estimé par la

méthode du périodogramme et a été lissé à l’aide d’un noyau de Daniel.

3.3.1 Rythmes sensorimoteurs

On sait que les rythmes µ et β sont modulés au niveau des régions sensori-motrices lorsque les sujets réalisent ou imaginent un mouvement. Nous reviendrons plus en détail sur les principes neurophysiologiques sous-jacents à ce phénomène dans lechapitre III. De plus, on sait que ces modifications sont observées dans des zones organisées de manière so-matotopique (une zone du corps correspond de manière unique à une zone cérébrale). C’est principalement cette dernière propriété qui permet de discriminer entre différentes tâches d’imagerie motrice. Ainsi, on peut par exemple discriminer entre une imagerie du bras gauche par rapport à une imagerie du bras droit. Les systèmes ICMs basés sur l’imagerie motrice ont été largement répandus par l’équipe du Prof. Pfurtscheller (Graz, Autriche). Les paradigmes utilisés ont d’abord considéré deux tâches distinctes (Pfurtscheller et al.,

1996), mais les avancées technologiques ainsi que les progrès dans les méthodes de trai-tement mises en œuvre ont récemment permis d’étendre ces systèmes à des paradigmes dans lesquels les tâches mentales étaient plus nombreuses (Pfurtscheller et Neuper, 2001). Le groupe du Prof. Wolpaw aux États-Unis a également mis au point des systèmes basés sur ce type de réponse cérébrale pour le contrôle « rapide » d’un curseur en deux dimen-sions (Wolpaw et McFarland, 2004). De nombreux groupes travaillent aujourd’hui sur ce type de systèmes en utilisant différents systèmes de mesure : la SPIR (Coyle et al., 2004et Sitaram et al., 2007), l’ECoG (Graimann et al., 2004 etLeuthardt et al., 2006) ou encore la MEG (Kauhanen et al., 2006 etKübler et Neumann, 2005).

3.3.2 Rythmes « cognitifs »

On observe une modulation des rythmes cérébraux principaux (α et β) dans d’autres situations que dans l’imagerie motrice. Plusieurs exemples de telles tâches cognitives ont été utilisés dans des paradigmes ICMs. Dans la mesure où il suffit que les distributions spatiales de telles tâches soient facilement séparables, on peut envisager un grand nombre de tâches cognitives possibles. Des succès ont été rapportés (Curran et al., 2004) avec la rotation de lettres, le calcul mental et la navigation spatiale. Les méthodes de traitement utilisées dans ce type de systèmes sont semblables à celles qui ont été mises en œuvre pour l’imagerie motrice et les réponses sensori-motrices.