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9.1 Introduction

9.2.2 Modélisation par la dynamique des systèmes

L'approche de la dynamique des systèmes (SD) fait partie des méthodes de modélisation de la systémique (ST). Cette théorie est utilisée dans diverses disciplines comme la biologie, l'anthropologie, la physique, la psychologie, les mathématiques, le management et l'informatique [125]. Le concept de ST se définit comme une approche holistique centrée sur la manière dont les éléments constitutifs d'un système sont en corrélation et sur le fonctionnement des systèmes dans le temps (dans le contexte de systèmes très vastes et complexes) [126]. La modélisation systémique est en fait une manière de résoudre les problèmes liés au monde réel et s’applique particulièrement lorsque le prototypage ou l'expérimentation avec le système réel est coûteux (voire impossible) [127]. Elle est en outre appropriée lorsqu'une vue d'ensemble du système est nécessaire. L’approche de la SD est apparue en 1956 au Massachusetts Institute of Technology (MIT) et a été développée par l’ingénieur J.W. Forrester [129]. Elle est née de la limitation des méthodes traditionnelles à procurer une compréhension suffisante des processus impliqués dans les systèmes complexes [129]. Cette approche conceptuelle et méthodologique particulière à l’étude de problèmes complexes [130] [131] [132] permet d’étudier les boucles de rétroaction d’informations caractéristiques de l’activité industrielle pour montrer comment la structure organisationnelle, les effets d’amplifications (dans les politiques) et les retards (dans les décisions et les actions) interagissent pour influer sur le succès de l'entreprise [130] [132] [133].

La SD est également définie comme une approche déductive qui adopte une perspective globale en supposant que le comportement complexe d'un système découle de sa propre structure [134]. Cette structure est en réalité composée d'aspects physiques et informationnels ainsi que de politiques et de traditions qui sont cruciales pour les prises de décisions dans tous les systèmes et tous les problèmes complexes [135] [136]. La SD est principalement basée sur les boucles de rétroaction et les temps de retards ainsi que sur les diagrammes de stock et de flux (SFD) utilisant des variables endogènes mises en œuvre sous forme de variables de

niveau (ou variables observables) et représentant l'état dynamique du système. Cette approche permet donc particulièrement d’évaluer la manière dont les changements d’un système (comme par exemple un système soumis à des perturbations) au sein d’une partie de ce système affectent le comportement de l’ensemble. Perturber un système permet également de tester et de simuler la façon dont il va réagir sous diverses conditions afin d’améliorer ou d’atteindre le comportement requis par le biais de ce que est défini en SD comme un scénario.

Bien qu’initialement la méthode de la SD ait été conçue à l’origine comme une discipline de gestion visant à comprendre comment les politiques des entreprises génèrent des succès (ou des échecs), elle traite aujourd’hui presque tous les types de systèmes qui évoluent au cours du temps. En fait, cette approche multidisciplinaire pour décrire, modéliser, simuler et analyser des problèmes complexes peut être appliquée à tout système dynamique ainsi qu’à toute échelle temporelle et spatiale [137]; et ce, pour tout domaine d'application. D'ailleurs, la littérature souligne particulièrement le fait que cette méthode convient à l'évaluation de la durabilité et de l'évolution des systèmes éco industriels ou des parcs éco industriels (EIPs) selon différents scénarios [138]. Les concepts de modélisation de la SD regroupent la construction de diagrammes de boucles causales (CLD) et la construction de SFD qui sont respectivement illustrés dans la Figure 9.1 et la Figure 9.2 (exemple de J.D. Sterman [140]). Le CLD est une représentation qualitative d’un modèle mental reflétant un système réel et centré sur des chaînes causales. Il permet de visualiser comment les variables d’un système complexe sont interconnectées (dépendantes ou indépendantes, organisées ou non organisées). Il s’agit de tracer un ensemble de nœuds et de flèches qui décrivent respectivement l’ensemble des variables d'un système et les liens entre ces mêmes variables au sein de ce même système [139].

Le CLD représente donc les chaînes causales d’un système pouvant être soit positives (c.-à-d. des polarités positives marquées d'un "+"), soit négatives (c.-à-d. des polarités négatives marquées d'un "-"). Des polarités positives signifient que les nœuds varient dans les mêmes directions conduisant à un comportement de renforcement (c.-à-d. que si un nœud diminue, le nœud lié diminue également). Des polarités négatives signifient que les nœuds varient dans des directions opposées atténuant ainsi l’effet (c.-à-d. que si un nœud diminue, le nœud lié augmente). Un nombre pair de polarités négatives dans une boucle de rétroaction conduit à

une boucle de renforcement alors qu’un nombre impair de polarités négatives dans une boucle de rétroaction atténuera l’effet. Le type de variables peut ensuite être catégorisé (c.-à-d. les variables de stocks, les variables de flux et les variables auxiliaires) et les liens entre ces mêmes variables peuvent être quantifiés afin de construire un SFD. Ce type de diagramme représente de manière quantitative les effets d’accumulations (c.-à-d. les stocks) et de dispersion des ressources (c.-à-d. les flux) au sein d’un système complexe [142]. Il se construit et s’utilise à l’aide des outils dédiés à la SD tels que les logiciels Vensim, Powersim ou encore STELLA; et permettent de simuler des scénarios.

Figure 9.1. CLD de l’adoption d’un nouveau produit [136]

Figure 9.2. SFD de l’adoption d’un nouveau produit [140]

Comme précédemment indiqué, c’est l’approche de la SD qui est choisie dans ce travail de recherche comme base pour prendre en compte les impacts dynamiques de scénarios de symbioses industrielles sur le fonctionnement d’une usine sidérurgique typiquement intégrée. Pour appuyer ce choix, les tables Table 9.1 à Table 9.4 comparent cette approche avec d’autres méthodologies appartenant aux méthodes de modélisation systémique comme la modélisation à base d’agents (ABM) ainsi que le concept des systèmes dynamiques (DS).

Table 9.1. La méthode de la SD vs. la méthode de ABM [122]

Dynamique des systèmes (SD) Modélisation à base d’agents (ABM) Approche de modélisation :

Déductif : inférence de la structure au comportement du système

Inductif : inférence du comportement des agents au comportement du système

Unité d’analyse :

Structure du système : le comportement du système découle de sa structure

Règles des agents : le comportement du système découle du comportement des agents et de leurs interactions

Bloc de modélisation :

Boucles de rétroaction : représentation des relations de cause à effet

Agents : entités individuelles qui forment le système

Prise en compte du temps :

Continu : la variable temporelle est continue Discret: la variable temporelle est discrète Formulation :

Équations algébriques : définissent des relations variables et des rétroactions

Phrases logiques : définissent les règles de comportement des agents

Représentation du modèle :

Relations causales : relient de manière non linéaire les variables, paramètres et stocks observés, en tenant compte des temps de retards et des échelles spatiales différentes entre la cause et l’effet

Population d'agents : formée d'entités autonomes, hétérogènes et indépendantes ayant leurs propres objectifs, propriétés et capacité sociale d'interagir entre eux et avec leur environnement

Représentation graphique :

Diagramme de boucles causales : base des structures de stock et de flux

Représentation individuelle : agents qui forment le système

Table 9.2. La méthode de la SD vs. la méthode de la DS

Dynamique des systèmes (SD) Systèmes dynamiques (DS) Approche :

Holistique, accent mis sur la complexité Holistique, basée sur le réductionnisme Problème étudié :

Stratégique Phénomène physique

Bloc de modélisation :

Boucles de rétroaction : représentation des relations de cause à effet

Formulation mathématique : équations différentielles

Table 9.3. La méthode de la SD vs. la méthode de la DS (suite) Dynamique des systèmes (SD) Systèmes dynamiques (DS) Unité d’analyse :

Structure du système : le comportement du système découle de sa structure

Variables : le comportement du système découle des variables

Eléments de modélisation :

Lien physique, tangible, de jugement et d'information

Lien physique

Table 9.4. La méthode de la SD vs. la méthode de DES [154]

Dynamique des systèmes (SD) Simulation d’évènement discret (DES) Approche :

Holistique, accent mis sur la complexité Analytique, complexité des détails Résolution de modèles :

Entités homogénéisées, pressions politiques continues et comportements émergents

Entités individuelles, attributs, décisions et événements

Sources des données :

Large champ Principalement numérique avec des éléments de jugement

Problème étudié :

Stratégique Opérationnel

Eléments de modélisation :

Lien physique, tangible, de jugement et d'information

Lien physique, tangible et quelques informations

Agents humains représentés dans le modèle en tant que :

Mise en œuvre de politiques rationnelles Preneurs de décision Résultats du modèle :

Compréhension des sources structurelles des modes de comportement, de la localisation des indicateurs de performance clés et des leviers politiques efficaces

Points de prédictions et mesures de performance détaillées sur une gamme de paramètres, règles de décision et de scénarios

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