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4.3 Application au 2024

4.3.1 Modélisation métallurgique

Dans la section 1.1.1, nous avons vu que la séquence de précipitation dans le 2024 est complexe et encore sujette à controverses. Comme [Khan et al., 2008], nous avons simplifié la séquence en :

solution solide sur-saturée → co-clusters → S (4.16) où les phases co-clusters et S sont deux phases qui apparaissent indépendamment l’une de l’autre.

Solution solide

Les principaux éléments d’alliages, le cuivre et le magnésium, sont en quantité pratri- quement égale. De plus, le cuivre diffuse bien plus lentement que le magnésium (figure 4.9), limitant ainsi toutes les étapes de la précipitation. Au vu de ces éléments, nous considérons le 2024 comme un quasi-binaire, et nous ne raisonnons que sur l’élément cuivre. Nous supposerons de plus que tout le cuivre introduit participera à la formation des fins précipités, bien que dans la réalité une fraction non négligeable de cuivre soit piégée dans de gros intermétalliques (voir section 4.3.3). Cette hypothèse est faite pour pouvoir comparer par la suite les résultats des simulations avec ceux précédants de la bibliographie qui s’appuyaient sur cette hypothèse [Genevois, 2004, Khan, 2007].

La valeur du coefficient de diffusion du cuivre à la température T est donnée par la loi [Gale et al., 2004] :

D = 6.47 10−5m2 s−1exp  −135 kJ/mol R T  (4.17) La concentration volumique du cuivre en solution solide Css est reliée à la fraction

Fig.4.9: Coefficients de diffusion de différents éléments d’alliages dans l’aluminium [Hatch, 1984].

volumique des co-clusters fcl v et de la phase S fvs par : Css= C0− Cpclfvcl− CpSfvS 1 − fcl v − fvS (4.18) avec : C0 la concentration volumique initiale ,

Cpcl la concentration volumique dans les co-clusters, CS

p la concentration volumique dans la phase S.

Phase S

Pour suivre l’évolution du rayon moyen et de la fraction volumique de la phase S, l’approche de Myhr & Grong (2000) par classes de tailles est utilisée. Dans les paragraphes suivants, nous détaillons les paramètres métallurgiques nécessaires à cette approche.

Cristallographie Comme vu dans la section 1.1.1, la phase S a pour composition chi- mique Al2CuMg. Sa structure cristallographique est orthorombique, de groupe d’espace

Cmcm, ayant pour paramètres a=0.400 nm, b=0.923 nm, et c=0.714 nm, et contenant 16 atomes par maille. Le volume atomique moyen dans la phase S (VS

at=1.65 10−2nm3)

est presque le même que celui de l’aluminium (VAl

at =1.66 10−2nm3). Le volume mo-

laire de la phase S VS

m sera donc le quadruple de celui de l’aluminium qui est de

VmAl=10−5 m3/mol. Finalement, la concentration volumique de cuivre dans la phase S

CS

p sera de 25 103 mol/m3.

Morphologie La phase S a une forme en batônnet. Son volume est donc évalué en prenant en compte un facteur de forme (ar = 2rl ) entre la longueur du précipité l et

le rayon du cylindre r. La valeur de ce facteur de forme a été prise constante dans le modèle et évaluée égale à 10 à partir de clichés MET [Khan, 2007]. Le volume de chaque précipité est donc égale à :

V = πr2l = 2πr3ar (4.19)

Solvus Il a été prouvé que le cuivre et le magnésium sont suffisamment dilués dans le 2024 pour que le modèle de la solution régulière soit valable [Sigli et al., 1998]. Le produit de solubilité associée à la réaction de dissolution de la phase S Al2CuM g →

2Al + Cu + Mg s’écrit donc :

0 500 1000 1500 2000 50 100 150 200 250 300 350 400 450 500

Concentration volumique du cuivre (mol/m

3 ) Température (°C) ThermoCalc sans θ Khan ThermoCalc avec θ solvus utilisé

Fig.4.10: Solvus de la phase S dans le cas où la phase θ est exclue de l’équilibre thermodynamique (en rouge) et dans le cas où elle ne l’est pas (en vert). avec K suivant une loi d’Arrhenius A exp−∆HRT où A et ∆H sont des constantes.

Avec l’hypothèse supplémentaire de pseudo-binarité de l’alliage, la limite de solubilité du cuivre s’écrit : CCu= A′exp  2RT∆H  (4.21)

Les valeurs prises par [Khan et al., 2008] pour A’ et ∆H sont respectivement de 920 103mol/m3

et de 75 kJ/mol. Ce solvus est proche de celui fourni par ThermoCalc en utilisant la base thermodynamique établie lors du projet européen COST 507 [Buhler et al., 1998] et en excluant la précipitation de la phase θ (Al2Cu) (figure 4.10). Lors de l’utilisation

de ce solvus, nous avons été confrontés à des instabilités numériques lors de simulations à des températures supérieures à 450C. Pour remédier à ce problème, nous avons uti-

lisé le solvus calculé à l’aide de ThermoCalc à partir de la base citée précédemment en n’excluant pas la précipitation de la phase θ, représenté en vert sur la figure 4.10. Les valeurs de A’ et ∆H sont respectivement 707 103mol/m3 et 76 kJ/mol. Pour ce solvus,

la phase S est plus stable aux hautes températures.

Énergie d’interface Khan a d’abord essayé de retrouver les courbes de résistance mécanique en fonction du temps avec une énergie d’interface constante [Khan, 2007]. Dans ce cas de figure, une énergie d’interface marchant bien aux hautes températures donnait des résistances mécaniques trop fortes aux basses températures car le nombre

Fig. 4.11: Limites d’élasticité prédites par le modèle de Khan durant des traitements isothermes avec une énergie d’interface indépendante de la température [Khan, 2007].

de précipités prévus au pic de résistance mécanique était trop important (figure 4.11). Expérimentalement, le pic de résistance mécanique du 2024 lors de recuits isothermes varie peu en fonction de la température. Pour rendre compte de ce phénomène, Khan a été obligé d’introduire une dépendance de la tension superficielle avec la température. Il a essayé plusieurs types de dépendances avec la température, en T, 1/T, T2, T3. La

dépendance donnant les meilleurs résulats est celle en T3, et l’expression de la tension

superficielle utilisée est :

σ = σ0− kT3 (4.22)

avec σ0 et k des paramètres ajustables ayant pour valeurs respectives 0, 1207 J/m2 et

2, 186 10−10Jm−2K−3.

Nous avons repris l’idée de la dépendance de l’énergie d’interface avec la température. Mais à la différence de Khan qui cherchait une loi de la tension superficielle permettant de décrire la limite d’élasticité pour un ensemble d’essais isothermes, nous avons d’abord déterminé la valeur de l’énergie d’interface pour chaque essai isotherme en la bornant (la figure 4.12(a) en est un exemple à 250C) et nous avons cherché ensuite le polynôme

60 80 100 120 140 160 10 100 1000 10000 Dureté (HV) Temps (s) γ=0.0795 J/m2 γ=0.0790 J/m2 γ=0.0800 J/m2 expérience (a) 0.06 0.065 0.07 0.075 0.08 0.085 0.09 0.095 0.1 200 250 300 350 400 Énergie d’interface (J/m 2 ) Température (°C) σ ajustée interpolation Khan (b)

Fig.4.12: (a) Exemple d’un encadrement de la valeur de la tension superficielle pour un recuit isotherme à 300C. (b) Dépendance de l’énergie d’interface avec

la température ajustée pour mon alliage 2024-T3 et celui de Khan. 4.12(b)). En suivant cette procédure, l’énergie d’interface est bien décrite par la loi :

σ = a0+ a1T + a2T2 (4.23)

avec a0 =−0, 10985 Jm−2, a1 =8, 3074 10−4Jm−2K−1, a2 =−8, 7143 10−7Jm−2K−2.

Une autre difficultée rencontrée par Khan concerne la valeur de l’énergie d’interface en régime de coalescence. Il a constaté que les valeurs de la tension superficielle étaient trop petites pour donner un régime de coalescence raisonnable. La solution adoptée par Khan est d’augmenter la valeur de l’énergie d’interface en régime de coalescence de ∆σ = 0, 2 J/m2. Cette augmentation est réalisée de manière brutale lorsque le flux de

germination s’annule. Pour résoudre cette difficulté, nous avons choisi la même solution. La figure 4.13 présente l’évolution de la dureté en fonction du temps sans que l’énergie d’interface soit augmentée en régime de coalescence. On constate que la dureté présente un palier pendant lequel elle ne diminue pas, qui n’est pas observé durant l’expérience. Cette énergie d’interface isotrope est une moyenne de l’énergie d’interface sur toutes les facettes du précipité, et est de plus apparente, c’est à dire qu’elle prend en compte les aspects chimiques, de cohérence de l’interface et principalement l’aspect hétérogène de la précipitation sur un défaut de taille fixe. En effet, au début de la germination, l’aire de contact entre le précipité et le défaut est importante au regard de l’aire to- tale du précipité, d’où la faible énergie d’interface apparente. Plus le précipité croît,

60 80 100 120 140 160 10 100 1000 10000 Dureté (HV) Temps (s) sans augmentation de σ expérience

Fig. 4.13: Simulation de la dureté lors d’un essai isotherme à 300C sans augmenter

la tension superficielle lors du régime de coalescence.

plus la part de l’aire de contact entre le défaut et le précipité dans l’aire totale du précipité diminue, et donc plus l’énergie d’interface augmente. L’augmentation pro- gressive de l’énergie d’interface avec le rayon du précipité nécessite de modifier la loi de germination en conséquence. Il a été choisi finalement de conserver l’augmentation brutale de l’énergie d’interface. Par ailleurs, la diminution de l’énergie d’interface avec la température témoigne de la plus grande efficacité de germination sur le défaut avec la température.

Co-clusters

L’approche pour suivre les paramètres moyens de la distribution est celle à rayon unique.

Informations structurales L’analyse à la sonde tomographique 3D suggère que le ratio atomique Cu|Mg dans les co-clusters est approximativement de 1|1 et que la concen- tration atomique en cuivre est de 10 % [Starink et al., 2005]. La formule chimique des co-clusters serait donc Al8CuMg. Les co-clusters seront supposés être sphériques.

Solvus Pour les mêmes raisons que la phase S, la limite de solubilité du cuivre suit une loi exponentielle :

CCu= A exp 

−∆H2RTcl



(4.24) Les valeurs du facteur pré-exponentiel et de l’enthalpie molaire de dissolution ∆Hcl

choisis par Khan sont respectivement de 141 103 molm−3 et de 38 kJ/mol. Ce solvus

a été choisi de telle façon que les co-clusters se dissolvent complètement pour une température de 250C. L’utilisation de ce solvus nous donnait des courbes de DSC

aberrantes, nous avons donc légèrement modifié celui-ci. Il a été construit de telle façon qu’il donnât la même concentration en cuivre à la température ambiante, point qui nous satisfaisait, et nous avons augmenté la température de dissolution complète des co- clusters de 20C. Les valeurs de A et de ∆H

cl attachés à ce solvus sont respectivement

100 103 molm−3 et 36 kJ/mol.

Énergie d’interface L’énergie d’interface a été prise égale à 2 mJ/m2. La germination

des co-clusters est considérée comme homogène.