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Les modèles de neurones impulsionnels

2.3 Les modèles de synapses

Les modèles de neurones impulsionnels permettent de décrire les variations du po-tentiel de membrane. Il existe cependant un autre paramètre important dans le choix d’un modèle impulsionnel, celui de la modélisation des courants synaptiques. La synapse constitue en fait un système dynamique d’une complexité équivalente à celle du neurone [Tsodyks et al., 1998]. Les courants synaptiques constituent la quasi-totalité des entrées d’un neurone et sont le plus souvent la cause de l’émission de potentiels d’action.

2.3. Les modèles de synapses 2.3.1 Les courants synaptiques

Comme nous l’avons vu dans la partie 1.1.6, les synapses biologiques permettent à un potentiel d’action émis par le neurone présynaptique de causer au niveau du neurone postsynaptique un changement de potentiel qui va se propager jusqu’au corps cellulaire : le potentiel postsynaptique (PPS). Selon la nature de la synapse, ce potentiel peut être excitateur (PPSE) ou inhibiteur (PPSI).

Le modèle d’interaction synaptique le plus simple consiste à considérer que le PPS induit un changement ponctuel instantané sur le potentiel de membrane du neurone postsynaptique i. L’amplitude de ce saut de potentiel est fonction du poids synaptique wij. Ainsi, pour un PPS reçu à tf

j, le potentiel Vi est mis à jour avec :

Vi(tfj) ← Vi(tfj) + wij (2.9)

Il est cependant possible d’utiliser des modèles biologiquement plus plausible pour décrire l’influence d’un PPS sur le potentiel de membrane. Un modèle largement utilisé est appelé fonction α [Rall, 1967] et décrit la transformation réalisée par la synapse, qui va convertir une entrée discrète – le potentiel d’action présynaptique – en sortie continue – le PPS. En un certain sens ce modèle réalise l’opération inverse du neurone, qui convertit une entrée continue en sortie discrète. Cette fonction α, pour exprimer l’influence d’un potentiel d’action sur la synapse j, s’écrit le plus souvent sous la forme :

P P Sj(t) = t τsyn

eτsynt (2.10)

Le courant P P Sj peut par exemple être utilisé avec l’équation2.2 de l’intégrateur à fuite pour donner :

CdVi dt = gl(Vi− El) +X j wij X f P P Sj(t − tfj) (2.11)

Une autre façon de modéliser les courants synaptiques consiste à décrire les mouve-ments ioniques en termes de conductances, hypothèse que nous avons vue dans la

par-tie 1.1.5. Les modèles intègre-et-décharge qui utilisent ce formalisme sont couramment

appelés modèles à conductance, ou conductance-based models [Destexhe et al., 1994;

Chapitre 2 - Les modèles de neurones impulsionnels

une conductance synaptique exponentielle avec les équations suivantes :        τdV dt = −(V − El) −P j,fg(t − tfj)(V − Esyn) τsdgdt = −g g ← g + wj, quand t = tf j (2.12)

avec Esyn le potentiel d’équilibre de la synapse. Quand un potentiel d’action arrive sur la synapse j au temps tf

j, il déclenche un changement instantané de la conductance synaptique g ← g + wj.

Le principal problème de la modélisation des courants synaptiques concerne le coût en termes de temps de calcul. En particulier, dès que l’on cherche à implémenter plu-sieurs types de synapses, qui diffèrent par leur constantes Esyn ou τs, il est nécessaire d’utiliser des méthodes d’approximation coûteuses, du type Newton ou Runge-Kutta, pour intégrer les équations différentielles. Même s’il est possible de faire appel à ces méthodes d’intégration seulement dans les cas où un neurone est susceptible de déchar-ger [Brette, 2006], la modélisation des conductances synaptiques est encore difficilement compatible avec des contraintes sur le temps de traitement par une machine, surtout à l’échelle d’un réseau de neurones de grande taille.

2.3.2 La plasticité synaptique

Les mécanismes de modification des poids synaptiques sont de plus en plus largement utilisés. Ces modifications sont de deux types, selon qu’elles concernent la modélisation de la fatigue synaptique ou bien l’adaptation du poids synaptique en fonction de la différence temporelle entre les temps de décharge des neurones pré- et postsynaptique.

La fatigue synaptique permet de rendre compte de la disponibilité des vésicules sy-naptiques au moment où un potentiel d’action atteint la synapse. En effet si un neurone émet plusieurs potentiels d’action en peu de temps, ses synapses peuvent venir à man-quer de vésicules de neurotransmetteurs et donc propager des PPS d’une intensité plus faible. [Markram et al., 1998; Perrinet et al., 2001;Perrinet, 2003].

Le second type de modification des poids est connu sous le nom de plasticité sy-naptique et constitue une réinterprétation de la règle de Hebb [Hebb, 1949]. Les idées proposées par Hebb prennent en particulier un sens nouveau dès lors que l’on considère un codage temporel. Ainsi, si un neurone présynaptique participe de façon répétée ou persistante à faire décharger un neurone postsynaptique, Hebb postule que l’efficacité de la synapse devrait augmenter. Le lien qu’il établit entre croissance synaptique et causalité s’adapte particulièrement bien aux neurones impulsionnels et cette règle est

2.4. Synthèse

Figure2.6 Fenêtre de STDP pour la modification des poids synaptiques. La différence ∆t = tpre− tpost indique l’écart temporel qui sépare l’émission d’un potentiel d’action entre les neurones pré- et postsynaptique. Si ∆t < 0 la valeur du poids synaptique est dépréciée et si ∆t > 0 le poids est ren-forcé, car le neurone présynaptique a participé à faire décharger le neurone postsynaptique. [Source : [Bi et Poo, 1998]]

couramment appelée règle de Hebb temporelle.

Les mécanismes de modification de poids synaptiques qui utilisent cette règle heb-bienne temporelle peuvent prendre des formes différentes [Abbott et Nelson, 2000] : synaptic scaling, synaptic redistribution [Markram et Tsodyks, 1996] ou Spike Timing-Dependent Plasticity (STDP) [Song et al., 2000; Song et Abbott, 2001]. Ce dernier mécanisme, la STDP, permet de réaliser localement une adaptation des poids en fonc-tion de la coïncidence de l’émission des potentiels d’acfonc-tion entre deux neurones [Bi, 2002;

Dan et Poo, 2004]. Les règles de STDP utilisent la différence temporelle δt = tpre− tpost, avec tprel’instant où le neurone présynaptique émet un potentiel d’action et tpostl’instant d’émission du neurone postsynaptique, et une fenêtre temporelle [Song et Abbott, 2001;

Meunier et Paugam-Moisy, 2005] (voir figure 2.6) pour expliciter la modification du

poids de la synapse. La STDP est largement utilisée pour réaliser des apprentissages avec des réseaux de neurones impulsionnels ; voir [Paugam-Moisy, 2006] pour une revue des problématiques d’apprentissage en lien avec les neurones impulsionnels.

2.4 Synthèse

Dans cette thèse nous avons choisi un point de vue intermédiaire, où nous nous sommes inspirés des connaissances sur le fonctionnement des réseaux biologiques sans pour autant chercher à produire des modèles explicatifs pour les neurosciences, c’est-à-dire que nous n’avons pas essayé de reproduire exactement les observations biologiques.

Chapitre 2 - Les modèles de neurones impulsionnels

Les modèles de neurones impulsionnels décrivent l’évolution du potentiel membranaire en fonction des entrées et ils permettent ainsi d’expliciter les temps précis d’émission des potentiels d’action. Il est ainsi possible, en utilisant ces modèles, de recoder les in-formations sous une forme temporelle et discrète. Les neurones impulsionnels peuvent capturer des dynamiques temporelles fines et ne sont pas aussi coûteux en terme com-putationnel que les modèles qui tentent de reproduire le plus fidèlement possible les observations biologiques. Il représentent en cela un compromis intéressant en capturant une partie des propriétés des neurones biologiques, ce qui permet de reproduire des dy-namiques riches et variées, tout en proposant des modèles relativement peu complexes, qui peuvent être implémentés pour simuler des réseaux de grande taille.

Chapitre 3

Les implémentations de mécanismes