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I.3 La modélisation : une alternative pour l’estimation de l’évapotranspiration et

I.3.2 Les modèles double-source

Compte tenu des contributions des différentes composantes (sol/végétation) dans les flux d’énergie totaux, les modèles d’évapotranspiration à double source ont été proposés pour décrire plus précisément les transferts d’eau et de chaleur au sein des canopées éparses ou hétérogènes. Le terme "double source" renseigne sur les flux provenant du couvert végétal et du sol nu. En se basant sur les différentes méthodes de partition de l’énergie et les différents agencements des résistances, les modèles SVAT double source peuvent être subdivisés en trois catégories : le modèle couplé ou série, le modèle découplé ou parallèle et le modèle mixte.

Le modèle couplé ou série

Les modèles série également connu sous le nom de modèle couplé repose sur le fait que chaque source de flux d'eau et de chaleur est superposée et couplée, comme le modèle double-source de Shuttleworth et Wallace (le modèle S-W) (Shuttleworth and Wallace, 1985). Ce modèle considère la surface comme étant deux couches (une de sol et une de végétation) différentes mais en interaction. Le rayonnement solaire incident arrive ainsi en premier lieu sur la couche de végétation, puis pénètre à travers la canopée jusqu'à la surface du sol. La quantité de rayonnement intercepté par la végétation est généralement calculée à l’aide de la loi de Beer-Lambert (Figure I. 5).

25 Figure I. 5 : Comparaison des transferts dans les modèles couplés (a) et découplés (b) Dans un tel modèle, les flux d'énergie provenant du sol traverseront d'abord la canopée et interagiront avec elle et non directement avec l'atmosphère.

Le modèle S-W a été largement utilisé pour estimer l’évapotranspiration sur une large gamme de couverts végétaux. Notamment, Ortega-Farias et al. (2010) l’ont appliqué avec succès pour évaluer l’évapotranspiration d’un vignoble conduit en irriguée par goutte-à- goutte au Chili. Zhang et al. (2008) ont aussi rapporté une bonne performance du S-W model appliqué à un vignoble au Nord-West de la Chine. Les travaux de Hu et al. (2008) sur quatre sites de prairie ont donné une marge d’erreur d’estimation de l’évapotranspiration par le modèle de S-W admissible. Par ailleurs, dans le cadre du projet (African Monsoon Multidisciplinary Analysis, AMMA), la modélisation de l’évapotranspiration des savannes ou des jachères africaines a été faite à travers le modèle (SImple Soil-Plant-Atmosphere Transfer Model, SISPAT), décrit par Braud et al. (1995), et un modèle de Suivi de l’Etat Hydrique des Sols, (SEtHyS), développé par Coudert et al. (2006) et adapté par (Saux-Picart et al., 2009) en insérant une couche supplémentaire de végétation (le modèle SEtHyS_Savannah).

Le modèle découplé ou parallèle

Dans le cas de mosaïques paysagères et de couvert épars, l’interaction entre les différents «patch2» peut souvent être ignorée, en particulier lorsque la distance entre les surfaces couvertes de végétation est importante. Dans un modèle découplé, la surface d’intérêt est divisée en autant de mailles élémentaires que de types de culture. Les mailles sont traitées séparément et parallèlement sans aucune interaction entre elles dans le modèle. Cette méthode se base sur l’hypothèse de l’homogénéité des conditions aux limites dans le sol et dans l’atmosphère. Chaque patch reçoit la même quantité de rayonnement (les rayonnements solaire et atmosphérique incidents totaux) et agit indépendamment des autres « patch » (donc indépendemment d’éventuels effets d'advection). À l’aide d’un jeu de paramètres adéquats, le flux total de chaleur sensible ou latente par unité de surface de sol est considéré comme une moyenne de flux des

26 différentes composantes pondérés par leur surface relative (par exemple, la fraction de couverture de la végétation). On obtient ainsi un flux global à partir de ces flux élémentaires.

Le modèle couplé a été largement utilisé dans la modélisation des surfaces terrestres à grande échelle et associé aux modèles climatiques régionaux. Citons le modèle développé par Norman et al. (1995), qui a été mis en œuvre en intégrant des données de télédétection pour cartographier l’évapotranspiration à une échelle régionale. De plus, Noilhan et al. (1989) ont aussi développé un schéma de surface intermédiaire (ISBA pour Interaction Soil-Biosphere-Atmosphere) avec cependant un seul bilan d’énergie. La particularité de cette approche est que, au final, la partition des flux est obtenue par pondération par la fraction de couverture de la végétation. Le modèle a également évolué pour incorporer un transfert radiatif multi-couche et une résolution de plusieurs bilans énergétiques à la surface d'un patch suivant les différentes sources, couplées entre elles et avec l'atmosphère. Cette version, appelée Multi-Energy Budget (MEB), a été développée par Boone et al. (2017).

Le modèle mixte

Des études antérieures (Lhomme et al., 2012) ont montré que le modèle couplé fonctionnait mieux sur les surfaces plus homogènes et ayant des fractions de couverture de végétation assez importantes. Le modèle découplé était, néamoins, plus adapté aux couverts très épars. En d'autres termes, ces modèles couplé et découplé, sont applicables uniquement pour des types de couverts bien définis. Cependant, certains cas tels que les milieux naturels qui présentent généralement une diversité de la végétation à diverses échelles spatiales et temporelles (changements saisonniers), s'écartent fortement des conditions de couverture végétale idéales requises par les modèles couplé ou découplé (cas théoriques idéaux). Par conséquent, l’utilisation de l’un ou l’autre modèle pour estimer l’ET sur une plus grande surface présentant des caractéristiques différentes de répartition de la végétation peut entraîner des erreurs considérables. Le défi, ici, consiste à combiner les deux modèles couplé et découplé pour mieux décrire la transition entre les deux extrêmes (Figure I. 6) pour obtenir un modèle qui peut s'appliquer à un large éventail de couverts végétaux.

27 Pour résoudre ce problème, Guan and Wilson (2009) ont développé un modèle double source hybride, TVET pour Topography-Vegetation-EvapoTranspiration. Ce modèle permet d’estimer l’évaporation et la transpiration potentielles, en supposant un contenu en eau de sol illimitée et représentant les effets des conditions atmosphériques et de surface. Le TVET utilise l’approche couplée pour répartir l'énergie disponible entre les différents composants et estimer les résistances aérodynamiques, et utilise l'approche découplée pour calculer l'évaporation potentielle et la transpiration potentielle. De ce fait, l’évaporation provenant à la fois du sol nu sous le couvert végétal et celle provenant du sol exposé au soleil sont prises en compte de façon plus détaillée et sont nettement distinguées. Cette simple combinaison des deux approches classiques pourrait fournir de meilleures estimations de l’évaporation potentielle et de la transpiration potentielle sur une vaste gamme de couverts végétaux. La comparaison des résultats de modélisation avec l'ET observé est basée sur les hypothèses suivantes: (1) Lorsque l’humidité du sol n’est pas un facteur limitant pour ET (par exemple, juste après un événement pluvieux important), l’ET observé est proche de d’ET potentielle. (2) Lorsque la surface du sol est sèche, mais que l’humidité du sol dans la zone racinaire est abondante (un cas répandu pour les forêts riveraines ou les zones à climat de mousson), la végétation transpire au taux potentiel et l’évaporation du sol est proche de zéro.

Une description plus détaillée du modèle TVET ainsi qu’une comparaison avec les modèles SW et PM est fournie par Guan and Wilson (2009).