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déchets radioactifs

2.8 Modèles de comportement

La modélisation du comportement mécanique des argiles fait intervenir de nombreux phénomènes couplés et permet, lorsque l’on arrive à reproduire les comportements expérimentaux, de s’assurer que la description mathématique des phénomènes est correcte. Une argile étant très complexe et les couplages possibles étant nombreux, on trouve bon nombre de modèles de comportement. Toutefois, certains d’entre eux sont récurrents dans la littérature et servent de base à beaucoup d’autres. Vu notre axe de recherche, nous proposons ici un aperçu de quelques modèles de la littérature sans trop nous attarder sur cette partie.

Le modèle de l’école de Cambridge couramment appelé CamClay et dont la version modifiée par Roscoe et Burland [164] est la plus célèbre, décrit le comportement de l’argile dans le cadre de l’élastoplasticité avec écrouissage. En effet, dans ce modèle sont définis une surface de charge (el-liptique dans la version modifiée), une règle d’écrouissage permettant de faire évoluer la surface de charge et une règle d’écoulement plastique permettant de définir la direction des déforma-tions plastiques. Ce modèle est basé sur la description du comportement de l’argile en terme de contraintes effectives et ne prend pas en compte la succion. Il ne permet alors pas de reproduire le phénomène d’effondrement observé lors de cycles hydriques sous fortes contraintes. Se basant sur le CamClay modifié, Alonso et al [6] rajoutent une variable d’état de contrainte plutôt que de décrire le problème uniquement d’un point de vue des contraintes effectives. Ainsi, le problème est abordé en considérant les paramètres indépendants que sont la succion (s = pa− pw) et la contrainte nette (σij = σij − δijpa).

Le seuil plastique décrit par une courbe dans le CamClay devient une surface dans le modèle d’Alonso et al [6]. De plus, des lignes particulières permettent de décrire le phénomène d’ef-fondrement (ligne LC : Loading Collapse) et les déformations irréversibles engendrées par une augmentation de succion (ligne SI : Suction Increase). La figure 2.33 offre un aperçu de la surface plastique dans l’espace (p, q, s) du modèle d’Alonso et al [6].

Fig.2.33 – Surface plastique du modèle de Barcelone dans l’espace (p, q, s) d’après Alonso et al [7].

Ce modèle permet de reproduire l’augmentation de résistance du matériau lorsque la succion aug-mente et le phénomène d’effondrement lors des cycles hydriques sous fortes contraintes. Depuis, cette équipe a amélioré son propre modèle pour décrire le comportement des argiles gonflantes. Ils proposent le modèle BExM (Barcelona Expansive Model) (Alonso et al [7]) basé sur un couplage entre une description microstructurale et une description macrostructurale de l’argile. On trouve bien d’autres modèles dans la littérature mais nombreux sont ceux qui utilisent le principe de la

ligne LC développé dans le modèle de Barcelone pour reproduire correctement le comportement mécanique expérimental de l’argile. On pourra trouver d’autres références de modèles dans les ouvrages [39] et [5].

2.9 Etudes d’interactions

La bentonite n’est pas le seul matériau prévu dans les différents concepts de sites de sto-ckage de déchets nucléaires. On y trouve également la roche hôte et différentes structures en béton. De nombreuses interfaces résulteront de cette diversité de matériaux (béton/roche, bé-ton/bentonite, roche/bentonite entre autres) et de la mise en oeuvre de la bentonite (interfaces bentonite/bentonite si on utilise des blocs précompactés). Cet état de fait motive notre étude et celles d’autres auteurs.

D’une façon générale, nous entendons, par interaction, un contact mécanique plus qu’une inter-action de phénomènes. Ainsi, on recense les études de Marcial et al [123] ou Borgesson et al [26] qui font part d’essais de cisaillement entre la bentonite et différents matériaux sans rentrer véritablement dans le détail des essais réalisés. Borgesson et al [26] observent que la résistance au cisaillement des différents contacts testés (bentonite/cuivre, bentonite/granit, bentonite/acier) est de l’ordre de 60% de celle de la bentonite dans la masse, les surfaces utilisées pour le contact étant peu rugueuses.

Les transferts d’eau géologique entre la roche et le matériau de remplissage sont abordés par plusieurs équipes de recherche. Gens et al [78], Rutqvist et al [165] ou encore Chijimatsu et al [40] se sont intéressés à l’évolution du degré de saturation en différents points de de la roche et du remplissage de bentonite, notamment à l’interface. Il ressort de ces études que la bentonite tend à se saturer en "pompant" l’eau contenue dans la roche mais ce phénomène reste très superficiel, du moins aux échelles de temps étudiées. L’expérience de l’AECL (Atomic Energy of Canada Limited) appelée TSX, vise également à soumettre la chambre contenant le colis à des gradients de pression et à suivre les écoulements en résultant. Dixon et al [62] imposent alors une pression de fluide allant jusqu’à 4 MPa engendrant un débit de 1.1 l/j. Ils observent que les écoulements sont localisés à l’interface roche bentonite, ce qui confirme le fait que notre étude répond à des interrogations quant aux écoulements possibles in situ. Quel que soit le laboratoire de recherche souterrain, les conditions hydrauliques in situ ne semblent pas entièrement cernées. Il est alors délicat de réaliser des essais de laboratoire avec des paramètres hydrauliques proches des conditions attendues in situ...

Mentionnons également les travaux de Pusch [155], Grindrod et al [87] et Missana et al [130] concernant l’érosion possible de la bentonite. Pusch réalise des contacts entre la bentonite et des échantillons de granite dans lesquels sont creusées des fentes de différentes dimensions. Il s’intéresse à la pénétration de la bentonite compactée dans ces dernières lors du gonflement et en observe ainsi la modification superficielle (modification mentionnée au paragraphe 2.6). Il aborde également, à travers son étude, le problème de l’érosion de la bentonite lorsqu’un fluide circule dans les interstices existant entre le granite et la bentonite. Comme nous l’avons dit précédemment, la formation de gel est mentionnée par de nombreux auteurs tandis que le phénomène d’érosion est un sujet plus rare, du moins dans le cadre du stockage de déchets nucléaires. Précisons d’ailleurs, que si l’érosion est localisée à l’interface roche/bentonite dans les travaux de Missana et al [130], de Grindrod [87] et de Pusch [155], Chapuis [38] observe quant à lui, un délavage de la masse de bentonite constituant un tapis d’étanchéité.

Les paramètres pilotant l’érosion diffèrent selon les auteurs : Missana et al [130] l’étudient en fonction du débit, Chapuis [38] la paramètre en fonction du gradient hydraulique tandis que Pusch [155] se place à une autre échelle et considère les forces d’entraînement des particules par le fluide. Il s’appuie pour cela sur les travaux de Yong [196] et Nickel [141] qui considèrent que les suspensions de bentonite sont des fluides à seuil de type Bingham. La valeur seuil de cisaillement correspond aux forces interparticulaires et lorsque ce seuil est dépassé, la bentonite est érodée (Pusch [155]).

2.10 Conclusions

Tout d’abord, ce chapitre nous a permis de faire le point sur la structure des argiles et d’aborder les particularités des bentonites. Nous sommes ainsi en mesure de comprendre les modifications à l’échelle du feuillet lorsque l’on parle de gonflement ou d’adsorption de cations. Par ailleurs, cette étude bibliographique nous permet d’éclaircir le terme "bentonite", courant mais rarement explicité.

Au delà des considérations générales sur la problématique du stockage des déchets nucléaires et sur le cahier des charges que doivent suivre les matériaux employés, cette revue des connaissances sur la bentonite nous a permis de mettre en avant les paramètres ayant une influence sur son comportement hydromécanique. Ainsi, nous avons vu comment le compactage, le degré de satu-ration et la fraction massique de bentonite peuvent modifier la réponse mécanique et hydraulique d’une bentonite compactée.

Les études d’interaction entre la bentonite et les matériaux environnants sont plus rares que les études concernant les matériaux considérés. Certaines d’entre elles soulignent l’importance des phénomènes de gonflement et d’érosion au voisinage de la roche. Ces phénomènes seront observés lors de nos essais et étudiés par la suite. D’une façon générale, l’étude d’une interaction argilite bentonite, si elle se veut complète, doit prendre en compte de multiples aspects et devient de ce fait très complexe. C’est une des conclusions auxquelles arrivent Gens et al [78] suite aux investigations in situ à Grimsel.

Si nous nous intéressons aux éléments pouvant affecter le comportement de la bentonite, c’est qu’il est important de savoir à quelles sollicitations peuvent être soumises les interfaces que nous étudions. Notre étude est simplifiée dans la mesure où elle omet tous les aspects chimiques, le vieillissement et la température. Malgré cela, avoir un aperçu des phénomènes importants permet de faire le bilan des processus affectant la bentonite et de s’interroger sur leur pertinence au regard de nos essais. Ainsi, nous sommes en mesure de déterminer quels phénomènes sont prédominants durant nos essais.

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