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Partie III Définition d’actions, d’interactions et d’instruments avec Malai

6.2 Modèles conceptuels

6.2.4 Modèles centrés sur les outils

Les modèles centrés sur l’interaction s’appuient sur ceux centrés sur les objets du domaine en apportant une contribution importante : pour manipuler les données sources, l’utilisateur doit avoir à sa disposition un ensemble d’outils, comme dans le monde réel. Ces outils établissent le lien entre les interactions utilisateur et les objets du domaine. Nous présentons dans cette section le modèle de l’interacteur, l’interaction instrumentale et le modèle DPI.

L’interacteur

La notion d’interacteur a été introduite par Myers lors du développement du système Garnet [Myers, 1990; Myers et al., 1990]. Un interacteur peut utiliser les interactions usuelles fondées sur l’usage du clavier et de la souris, ou des interactions spécifiques à un système donné. Par exemple, les poignées de contrôle, permettant de déplacer ou de transformer une forme d’un dessin vectoriel, sont des interacteurs. Pour l’utilisateur, les interacteurs apportent les avantages suivants :

– plusieurs actions peuvent être associées à un même objet d’intérêt ; – plusieurs instruments physiques peuvent être utilisés en parallèle ;

– ils permettent le feed-back sémantique ; c.-à-d. qu’un évènement doit être analysé en fonc-tion de son contexte et de paramètres pour savoir quel feed-back doit être utilisé.

L’utilisation d’interacteurs par le développeur de SI présente les bénéfices suivants :

– un interacteur est indépendant du système et de l’interface, et peut donc être développé séparément ;

– le détail de la gestion des évènements en entrée n’est pas visible par le développeur d’un interacteur ;

– ils favorisent la réutilisation de code puisqu’un même interacteur peut être employé pour différents systèmes. Cette propriété permet également un rapide prototypage d’un système.

La figure 6.4 présente des exemples d’interacteurs, tels que l’ascenseur et les poignées de contrôle.

Outside Start Start-action Running Outside-action

Running-action

Start-event over

start-where running-wherenot-over

Stop-action Abort-action Stop-event Abort-event Back-inside-action Back over running-where Abort-action Abort-event Abort-action

stop-event if outside-control = Abort

Abort-action

stop-event if outside-control = Last

Fig. 6.5: Machine à états décrivant le fonctionnement d’un interacteur, extrait de [Myers, 1990]

Le fonctionnement d’un interacteur se base sur la machine à états décrite par la figure 6.5. Elle définit notamment qu’un instrument démarre lorsqu’un évènement initial survient, et s’arrête lorsqu’un évènement terminal ou annulateur se produit. Ce processus est à la base du fonctionnement de notre modèle d’interaction.

L’interaction instrumentale

L’interaction instrumentale est un modèle fondé sur la notion d’instrument, qui prolonge et généralise le principe de l’interacteur [Beaudouin-Lafon, 2000]. Beaudouin-Lafon (1997) définit un instrument de la manière suivante :

« [Un instrument joue] un rôle de médiateur entre l’action de l’utilisateur et les

ob-jets de l’application. [...] Il est composé d’une partie physique et d’une partie logique. La partie physique comprend les transducteurs d’entrée-sortie utilisés par l’instru-ment, en entrée pour capter l’action physique de l’utilisateur et en sortie pour lui présenter un retour d’information. [...] La partie logique de l’instrument comprend en entrée la méthode de transformation des actions de l’utilisateur sur l’instrument logique et en sortie la représentation de l’instrument. »

La figure 6.6 illustre un exemple d’interaction instrumentale : l’utilisateur effectue un glisser-déposer sur la barre de défilement à l’aide d’une souris (action). L’instrument retourne un feed-back permettant à l’utilisateur de visualiser le déplacement de la barre. L’instrument transforme ensuite l’interaction de l’utilisateur en une action (command) de navigation. Lorsque l’action est appliquée sur la présentation, ces dernières répondent en faisant défiler le document.

L’origine de l’interaction instrumentale résulte du constat selon lequel « les applications

6.2 Modèles conceptuels

Fig. 6.6: Principe de l’interaction instrumentale, extrait de [Beaudouin-Lafon, 2004]

efficacité de l’interaction » [Beaudouin-Lafon, 1997]. Ce modèle vise ainsi à recentrer le

dé-veloppement des systèmes sur l’interaction via les instruments, au lieu de se focaliser sur le développement des interfaces [Beaudouin-Lafon, 2004]. Ce modèle d’interaction complète par-faitement celui de l’interface orientée objet : l’OOUI se focalise sur les objets d’intérêt tandis que l’instrument se concentre sur l’interaction que l’utilisateur peut réaliser sur ces objets. De plus, l’interaction instrumentale intègre le polymorphisme par le biais des instruments génériques réa-lisant différentes actions en fonction du contexte. Ce modèle utilise également le principe de la réification dans le sens où un instrument est la représentation d’un concept sous forme d’objet. Ce modèle ne propose cependant pas un modèle d’action qui permettrait aux instruments de générer des actions considérées comme des objets à part entière et, ainsi, de faire le lien entre les interactions (partie physique) et les actions (partie logique). Nos travaux sur l’interaction visent notamment à combler ce manque.

DPI

DPI (Document, Présentation, Instrument) est un modèle conceptuel fondé sur l’interaction instrumentale mais centré sur les documents [Beaudoux et Beaudouin-Lafon, 2001; Beaudoux, 2004b]. Le principe de ce modèle est décrit dans la figure 6.7 : l’instrument transforme les

gestes réalisés par l’utilisateur (étape ¬) en actions, ces dernières étant alors consommées par le document (étape­). Beaudoux (2004c), page 81, classe les instruments en trois catégories :

« Les instruments directs, métaphore de l’outil, sont manipulés en respectant

une certaine forme de continuité entre la main et l’instrument : l’utilisateur agit directement sur l’instrument pour agir directement sur le document. Les instruments

indirects, métaphore de l’appareil, sont manipulés sans continuité directe avec l’objet

d’intérêt : l’utilisateur (inter)agit directement sur l’instrument et indirectement sur le document. Les instruments de perception, métaphore de la lentille optique, sont manipulés comme les instruments directs puisque l’utilisateur agit directement sur l’instrument (déplacement), mais agissent comme les instruments indirects puisqu’ils ne visent pas directement les documents. »

Le document est « un objet persistant et perceptible que l’utilisateur peut lire, écrire et

an-noter » [Beaudoux, 2004b]. Il se compose de deux facettes : la facette persistance correspond

au support physique permettant le stockage de documents ; la facette présentation confère au document une ou plusieurs apparences concrètes pour l’utilisateur. Les présentations multiples permettent de représenter un document sous différents points de vue et autorisent l’édition d’un même document au travers des plusieurs présentations.

Action (système moteur) Niveau utilisateur

Perception (système sensitif)

intention

Edition ou navigation Edition ou navigation Niveau de

l’instrument

Navigation Perception

Interprétation

Instrument indirect Instrument direct Instrument de perception

Représentation alternative

Niveau du document

Persistance de l’action

Document Présentation naturelle

Fig. 6.7: Le modèle conceptuel de DPI, inspiré de [Renouard, 2007]

Nos travaux reprennent le principe de séparation entre les interactions et les actions, ainsi que le concept d’instrument jouant le rôle de médiateur entre les interactions de l’utilisateur et les actions. Nous apportons cependant un modèle d’action plus complet. Notre modèle renforce également la position de l’instrument en tant que médiateur entre les interactions et les actions. L’instrument a pour rôle de créer, mettre à jour, exécuter, avorter ou recycler une action en une autre, en fonction des interactions utilisateur. Cette gestion des actions est facilitée par le feed-back intérimaire fourni par l’instrument, informant l’utilisateur à tout instant des différentes actions qu’il peut réaliser.