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CHAPITRE 1 : ETUDE BIBLIOGRAPHIQUE

IV. Modèles animaux et bioéthique

IV.1 Modèles animaux

Concernant la douleur neuropathique, il existe différents modèles animaux permettant d’induire des lésions des nerfs périphériques et centraux, afin de comprendre les mécanismes responsables de cette douleur et de développer de nouvelles stratégies thérapeutiques plus ciblées (Wang and Wang, 2003). Le choix d’un modèle entraine une différence dans les expressions des biomarqueurs potentiels suivis. En effet, les modèles sont classés en cinq catégories et induisent une douleur inflammatoire, neuropathique, viscérale, postopératoire ou cancéreuse (Hogan, 2002). Les modèles de constriction chronique du nerf sciatique et de gènes knock-out seront décrits, car ils ont été utilisés pour étudier la douleur neuropathique lors de ce projet.

IV.1.1 La constriction chronique du nerf sciatique

La CCI a été mise au point par Bennett (Bennett and Xie, 1988). Quatre ligatures lâches sont placées autour du nerf sciatique du rat, tel qu’illustré sur la Figure 58, sans affecter le flot sanguin. L’animal développe des comportements nociceptifs assez marqués, tels que la protection du membre atteint, une paralysie partielle et la réduction de l’appui. L’hypersensibilité et l’allodynie sont évaluées au moyen de tests thermiques et mécaniques. Elles se développent en 10 à 14 jours et persistent environ 8 à 12 semaines. Des réactions anormales au niveau du membre controlatéral peuvent également être observées. La CCI provoque aussi la perte des grosses fibres myélinisées alors que les fibres myélinisées de plus petit diamètre ou les fibres amyélinisées sont moins atteintes. Mais ce modèle ne permet pas de savoir la contribution des fibres endommagées par rapport aux fibres intactes dans le

développement de la douleur neuropathique (Kim et al., 1997). Par ce modèle, la douleur neuropathique est développée et maintenue, permettant la mise en route de toutes les cascades d’évènements menant à la transmission du message nociceptif, dont la biosynthèse et la libération des neuropeptides de la famille des tachykines et leurs interactions avec les différents récepteurs mentionnés précédemment.

Figure 58 : Schéma du modèle chirurgical de constriction chronique du nerf sciatique (d’après Bennett et Xie, 1988).

IV.1.2 Le modèle de souris knock-out

Le modèle KO est un génotype de souris génétiquement modifié. Durant nos études, nous avons utilisé des tissus de souris déficientes du gène TRPV1 (TRPV1-/-) afin d’étudier la modulation d’expression des tachykinines, et plus particulièrement SP et NKA, en fonction de la présence ou non du gène exprimant le récepteur TRPV1. En effet, d’après plusieurs études, il semblerait que l’expréssion des tachykinines et l’activation du récepteur TRPV1 soient liées. L’utilisation d’un génotype sans expression du gène TRPV1 devrait permettre de pouvoir conclure de façon fiable l’existence d’un lien étroit, sans perturbation des résultats par le développement d’inflammation souvent présente lors de douleur neuropathique. De plus, il est parfois difficile et subjectif d’utiliser des tests comportementaux sur des animaux. Les modèles KO permettent d’observer et de comparer les phénotypes de souris possédant un gène volontairement altéré, par rapport aux souris normales (type sauvage ou wild-type).

Pour réaliser ce modèle, un gène modifié est introduit dans des cellules souches embryonnaires de souris. Cette manipulation résulte en une mutation qui empêche, prévient ou modifie l’expression d’un gène qui est alors incapable de produire une protéine fonctionnelle, entrainant une altération du phénotype. Il existe plusieurs types de souris KO concernant la recherche sur la douleur comme, par exemple, l’étude du système opioïde (Kieffer and Gaveriaux-Ruff, 2002), l’identification de nouveaux facteurs biochimiques agissant au niveau de la douleur neuropathique, de la SP et du récepteur NK1 (Malmberg and Basbaum, 1998), ou encore la compréhension du gène TAC1 (Hökfelt et al., 2001; O'Shaughnessy et al., 2006).

IV.2 Tests comportementaux

Actuellement, l’évaluation de la douleur reste complexe. En effet, la douleur est un phénomène multidimensionnel qui, étant une perception, peut être liée à des facteurs physiques et psychologiques chez les animaux. L’évaluation de la douleur peut être réalisée à l’aide de différents tests comportementaux. Durant cette étude, deux tests ont été utilisés pour établir la ligne de base avant et après la CCI pour s’assurer du développement de la neuropathie.

Le test avec les filaments de von Frey (Figure 59) est un test de sensibilité mécanique utiliser chez l’humain et les animaux pour détecter l’allodynie lors de neuropathie. L’association internationale qui étudie la douleur (IASP) définit l’allodynie comme une perception douloureuse en réponse à un stimulus non nociceptif. Lors de ce test, des filaments de nylon de différents diamètres sont appliqués sur la surface plantaire de la patte de l’animal. Le seuil de retrait de l’animal par rapport à la force exercée par le filament est mesuré. Ce test permet de mesurer la sensibilité au toucher, et donc d’évaluer l’allodynie mécanique (Chaplan et al., 1994).

Figure 59 : Photographies de l’évaluation de la douleur par les filaments de von Frey.

Le test de Hargreaves (Figure 60) permet la mesure de la sensibilité thermique douloureuse de l’hyperalgésie cutanée suite. Selon l’IASP, l’hyperalgésie est une réponse exagérée à une stimulation normalement douloureuse. Lors de ce test, la surface plantaire de la patte de l’animal est chauffée par un rayon lumineux. Le temps de réaction que met l’animal pour retirer sa patte est mesuré et permet l’évaluation de la douleur. Le résultat de ce test est moins affecté que d’autres car des tests répétés ne contribuent pas au développement de l’hyperalgésie (Mogil et al., 1999). Le membre atteint par la douleur conduit à un temps de latence beaucoup plus court. Les changements du temps de latence correspondent à la diminution du seuil de nociception thermique. Cette méthode permet donc d’évaluer l’hyperalgésie thermique (Hargreaves et al., 1988).

Ces tests comportementaux sont de bons indicateurs de l’établissement de la neuropathie mais restent subjectifs, car ils sont sujets à l’interprétation et à l’expérience des manipulateurs et au fait que l’animal subit un certain stress quand il est amené dans la pièce d’expérimentation.