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Les modèles animaux expérimentaux adaptés à l’étude de gènes et

4. Nos modèles d’étude et objectifs de la thèse

4.1. Modèles animaux

4.1.2. Les modèles animaux expérimentaux adaptés à l’étude de gènes et

On dénombre un certain nombre de pathologies spécifiques des Primates, ou même de l’Homme seul. Il s’agit en particulier de maladies neurodégénératives. Parmi elles, la maladie de Parkinson n’affecte à l’état naturel que l’espèce humaine et ne présente aucun équivalent dans d’autres espèces. L’étude de cette pathologie, dont la prévalence augmente avec l’espérance de vie, requiert le développement de modèles animaux appropriés.

4.1.2.1. Description de la maladie de Parkinson

La maladie de Parkinson est la deuxième pathologie neurodégénérative la plus fréquente et affecte, selon les estimations, 1 à 2% de la population des plus de 65 ans. Elle se manifeste par une bradykinésie, des tremblements, une rigidité et des réflexes posturaux anormaux. Lorsque les symptômes apparaissent, une large proportion (50 à 70%) des neurones dopaminergiques de la partie compacte de la substance noire est déjà détruite. La synthèse et la libération de dopamine sont alors nettement réduites. La formation de corps de Lewy dans les neurones dopaminergiques survivants signe la pathologie de Parkinson. Il s’agit d’inclusions intracytoplasmiques composées essentiellement d’ubiquitine et d’α- synucléine, mais aussi de parkine (Orth and Tabrizi, 2003).

Des facteurs génétiques et environnementaux sont identifiés qui pourraient participer au développement de la maladie. Différentes mutations, affectant les gènes de l’ubiquitine, de l’α-synucléine, de la parkine et DJ-1, ont été isolées dans des cas familiaux de la maladie de Parkinson. Les toxines environnementales impliquées dans le développement de la maladie sont le monoxyde de carbone, le manganèse et de façon très importante le 1-méthyl-4-phényl-

1,2,3,6 tétrahydropyrimidine (MPTP). Il apparaît clairement que la maladie de Parkinson est une pathologie hétérogène, dont l’étiologie est complexe et multifactorielle. L’administration de L-dopa ou d’agonistes dopaminergiques en substitution de la dopamine permet de faire disparaître les symptômes mais ne freine pas la progression de la maladie.

L’utilisation de modèles animaux est nécessaire à la compréhension de la pathologie afin de pouvoir la dépister plus précocement et la traiter de façon appropriée. De tels modèles doivent reproduire les paramètres cliniques et pathologiques caractéristiques de la maladie de Parkinson, et en particulier des troubles de la locomotion sensibles à la L-dopa, une perte de neurones dopaminergiques progressive et chronique, et des inclusions semblables aux corps de Lewy (Orth and Tabrizi, 2003).

4.1.2.2. Modèles expérimentaux

4.1.2.2.1. Modèles génétiques

Des souris déficientes (knock-out) pour, respectivement, les gènes de l’α-synucléine et de la parkine ont été développées. Les premières ne présentent aucun symptôme objectif de la maladie de Parkinson. Leur développement est normal et elles sont absolument fertiles. Seul le contenu en dopamine dans le striatum distingue ces souris déficientes de souris sauvages, ainsi que le comportement locomoteur en réponse à des stimuli chimiques (administration d’amphétamine) et électriques. Ceci suggère que l’α-synucléine n’est indispensable ni pour le développement du cerveau murin, ni pour le fonctionnement des neurones dopaminergiques. Elle pourrait cependant intervenir dans la libération de dopamine. Des souris déficientes pour la parkine ont été récemment décrites. Elles sont viables et ne présentent, de façon surprenante, aucun phénotype pathologique. Cela pourrait résulter d’adaptations développementales compensatrices, si bien qu’il a été proposé que des souris pour lesquelles le gène de la parkine ne serait éteint qu’après la naissance pourraient présenter un phénotype plus sévère (Orth and Tabrizi, 2003).

Des lignées de souris transgéniques ont été établies pour tenter de modéliser le développement de la maladie de Parkinson. Les souris exprimant le gène sauvage de l’α- synucléine humain développent des inclusions cytoplasmiques et nucléaires dans les neurones du néocortex, du bulbe olfactif, de l’hippocampe et de la substance noire. Les analyses cliniques ont révélé des déficits de performance dans les tests d’équilibre chez ces souris âgées d’un an et surexprimant l’α-synucléine. Dans ce modèle, certaines caractéristiques de la pathologie sont donc reproduites (inclusions, défauts locomoteurs), mais d’autres sont

absentes (mort de neurones dopaminergiques de la substance noire, fibrilles des corps de Lewy, localisation atypique des inclusions dans le noyau cellulaire) (Orth and Tabrizi, 2003).

Ces modèles génétiques de la maladie de Parkinson permettent donc d’inférer le rôle des gènes dont l’expression est modifiée dans le développement de la pathologie. Ils ne constituent en revanche pas de bons modèles pour l’étude de la maladie dans son ensemble.

4.1.2.2.2. Modèles toxicologiques

Il existe trois modèles toxicologiques principaux de la maladie de Parkinson : l’administration de 6-hydroxydopamine (6-OHDA), de MPTP ou de roténone. Tous trois impliquent une mort des neurones dopaminergiques.

Dans le premier modèle toxicologique, l’injection directe, souvent unilatérale, de 6- OHDA dans la substance noire, essentiellement à des Rongeurs, induit un déficit moteur quantifiable, mais les corps de Lewy ne sont pas observables et on constate une atteinte non- spécifique, induite par la toxine, des neurones voisins. Ce modèle a été très utile et utilisé pour les études pharmacologiques, mais ne présente pas certaines des caractéristiques fondamentales de la maladie de Parkinson (Orth and Tabrizi, 2003).

Des rats perfusés quotidiennement avec de la roténone, un inhibiteur potentiel du complexe I de la chaîne respiratoire mitochondriale, développent une hyperkinésie, une instabilité posturale, une démarche hésitante et des tremblements des membres. Ces symptômes sont tous corrélés avec le degré de dégénérescence des neurones dopaminergiques nigro-striataux. On observe en microscopie des inclusions cytoplasmiques semblables aux corps de Lewy. En revanche, moins de la moitié des animaux traités à la roténone développent effectivement ces lésions (Orth and Tabrizi, 2003).

Des cas de maladie de Parkinson ont été rapportés chez des toxicomanes dont la drogue aurait été contaminée par du MPTP, un inhibiteur du complexe I de la chaîne respiratoire mitochondriale. Des modèles murin et de Primate de la maladie utilisant cette neurotoxine ont alors été développés. Chez les Primates non-humains, le MPTP induit des tremblements, une rigidité, une akinésie et une instabilité posturale, symptômes qui disparaissent tous lors de l’administration de L-dopa ou d’agonistes dopaminergiques. Les neurones dopaminergique sont détruits sélectivement dans certaines aires cérébrales, dont la substance noire, conformément à l’idiopathie de la maladie de Parkinson. Néanmoins, la pathologie déclenchée par un traitement aigu au MPTP n’induit pas le développement de corps de Lewy caractéristiques. Une administration chronique de MPTP pourrait cependant

pallier à ce défaut. Le modèle MPTP représente ainsi le modèle de maladie de Parkinson le mieux caractérisé et répond à l’ensemble des critères d’un bon modèle de cette pathologie, à l’exception de la formation d’inclusions (Orth and Tabrizi, 2003).

Nous avons accès, dans le cadre de nos études, et en collaboration avec l’équipe d’Erwan Bézard (CNRS, UMR 5543, Bordeaux), à des macaques crabiers traités au MPTP de façon chronique, pendant 6, 12 ou 15 jours et sacrifiés après 6, 12 et 25 jours respectivement. Ceci permet d’observer les modifications phénotypiques et moléculaires se produisant au cours de la maladie, et notamment lors de la phase asymptomatique.

Ce type de pathologies, spécifiques des Primates ou de l’Homme, pourrait en outre être déterminé, au moins partiellement, par des gènes jeunes, présents uniquement dans ces espèces. L’étude de leurs structures, de leur évolution et éventuellement de leurs fonctions et implication dans des pathologies spécifiques pourrait ainsi constituer une clé de la compréhension des spécificités des Primates et de l’Homme.