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CHAPITRE 1 REVUE DE LA LITTÉRATURE

1.5 Modélisation de la turbulence de l’écoulement de la CLA

1.5.1 Modèle de Reynolds moyenné RANS

Les modèles RANS simulent de façon statistique l’écoulement turbulent. Ce type de modèle est le plus populaire et reconnu pour la simulation de l’écoulement atmosphérique. Les équations de Navier-Stokes sont moyennées temporellement. Toutes les structures turbulentes sont modélisées. Les propriétés turbulentes de l’écoulement sont décomposées en une partie moyenne et une partie fluctuante et injectées dans les équations fondamentales de conservation. Les moyennes des fluctuations des vitesses, appelées contraintes de Reynolds, apparaissent dans les équations moyennées de Reynolds. Comme elles sont inconnues, des équations supplémentaires sont nécessaires pour la fermeture du système des équations fondamentales.

L’approximation de Boussinesq pour les effets de la variation de la flottaison qui considère une masse volumique constante est utilisée. Le système d’équations fondamentales obtenu avec la procédure de moyenne de Reynolds possède alors six inconnues supplémentaires. Il

peut être réduit à une seule inconnue lorsque l'approximation de Boussinesq pour la turbulence est appliquée. On utilise l'approximation de Boussinesq pour la turbulence, car les contraintes turbulentes (les composantes du tenseur de Reynolds, aussi nommées contraintes de Reynolds) sont alors proportionnelles au taux de déformation, et la constante de proportionnalité est la viscosité cinématique turbulente ν . Il est alors nécessaire de déterminer la viscosité cinématique turbulente, qui est une caractéristique de l’écoulement. Il existe plusieurs modèles de fermeture dans la littérature qui ont pour objectif d’évaluer le tenseur de Reynolds.

L'approximation de Boussinesq pour la turbulence implique que la viscosité turbulente est isotrope. Lorsque les échelles de la turbulence sont petites, elles peuvent effectivement être considérées comme isotropes. Cette approximation n’est pas parfaitement valide pour les grandes structures turbulentes présentes dans l’écoulement.

Pour modéliser les contraintes turbulentes, plusieurs modèles de fermeture ont été développés. Ces modèles contiennent des constantes généralement déterminées expérimentalement. Afin d’adapter ces modèles à des simulations de la couche limite atmosphérique, les constantes du modèle de fermeture doivent être modifiées.

Parmi les modèles de fermeture les plus utilisés pour la simulation de l’écoulement de la couche limite atmosphérique sur couvert forestier, on trouve les modèles à zéro, à une et à deux équations. Le nombre d'équations correspond aux équations de transport utilisées par le modèle de fermeture.

1.5.1.1 Modèle à zéro équation

Pour caractériser la turbulence, les modèles à zéro équation établissent une corrélation liant la longueur de mélange et le gradient de vitesse à la viscosité turbulente. On peut citer à titre d’exemple le travail entrepris par Li et al. (1990). La longueur de mélange proposée par Li et al. (1990) dépend principalement de l’altitude, de la vitesse géostrophique, de la hauteur de la

forêt et de la masse volumique de surface foliaire α. Ce modèle à zéro équation est simple et donne de bons résultats seulement lorsque la longueur de mélange est évaluée correctement.

Les équations fondamentales de conservation qui en résultent pour décrire l’écoulement turbulent du vent tenant compte de la présence de la forêt sont facilement résolues numériquement. Ce modèle à zéro équation n’est pas adapté à un changement brusque de rugosité, en particulier lorsque l’écoulement est sur un terrain complexe. Les résultats sont généralement de faible précision.

Cependant, la comparaison des profils de vitesse du vent simulés par Li et al. (1990) avec les mesures de Raynor (1971) pour un écoulement de la CLA entrant dans la forêt n’indique qu’une faible différence.

1.5.1.2 Modèle à une équation

Dans ce modèle, l’équation de l’énergie cinétique de la turbulence par unité de masse est ajoutée aux équations de conservation. Le taux de dissipation par unité de masse ε apparaissant dans l’équation de l’énergie cinétique est évalué à l’aide d’une expression algébrique. La viscosité turbulente est calculée à partir de la longueur de mélange et de l’énergie cinétique.

Ce modèle de fermeture donne des résultats précis, seulement lorsque la longueur de mélange est évaluée correctement. Il n’exige pas un coût de calcul élevé et le temps de calcul est de trois à quatre fois moins long qu’avec le modèle à 2 équations k-ε. Ce type de modèle est légèrement plus précis que le modèle à zéro équation, mais il nécessite plus de ressources informatiques et se heurte, comme dans le cas du modèle à zéro équation, au défi de l’évaluation de la longueur de mélange. Le modèle à une équation n’est pas très bien adapté au calcul des écoulements sur un terrain complexe.

Katul et al. (2004) ont proposé dans leurs travaux un modèle à une équation qui donne de bons résultats lorsqu’on les compare aux mesures pour huit types de forêt. Pinard et al. (2001), Poggi et al. (2004) et Katul et al. (2004) montrent que l'introduction d'une bonne paramétrisation de la longueur de mélange permet de bien caractériser la turbulence. La diffusion de la turbulence à l’intérieur et au-dessus de la forêt dépend essentiellement de la masse volumique de surface foliaire α de la forêt. Le modèle donne une meilleure corrélation avec les résultats expérimentaux lorsque le coefficient de traînée est évalué correctement.

1.5.1.3 Modèle à deux équations

Les modèles présentés précédemment nécessitent l’évaluation empirique de la longueur de mélange. Ces modèles ne sont pas coûteux numériquement, mais il faut connaître les caractéristiques de l’écoulement pour évaluer correctement la longueur de mélange.

Le modèle k-ε à deux équations est le plus utilisé pour la simulation de l’écoulement turbulent, car il donne de bons résultats avec un coût de calcul plus faible que le modèle LES. Ce modèle est basé sur l’utilisation de l’équation de l’énergie cinétique turbulente par unité de masse et l’équation du taux de dissipation de l’énergie cinétique turbulente par unité de masse pour déterminer la vitesse caractéristique et la longueur caractéristique et donc la viscosité turbulente. Les équations du modèle k-ε seront détaillées dans le chapitre suivant.

Svensson et al. (1990), Kobayashi et al. (1994), Liu et al. (1996) et Liang et al. (2006) ont proposé un modèle k-ε modifié pour la simulation de la CLA sur terrain avec couvert forestier. Ce modèle utilise une analogie entre la forêt et un milieu poreux. L’influence de la forêt est représentée dans les équations fondamentales de conservation et les équations de fermeture par l’ajout de termes sources. Ces termes font intervenir un coefficient de traînée et la masse volumique de surface foliaire α de la forêt. Sanz (2003) montre que ce type de modèle donne des résultats satisfaisants lorsque ses constantes sont évaluées d’une façon appropriée.

Bien que les caractéristiques puissent changer selon le type de forêt, la comparaison des résultats obtenus à l'aide du modèle k-ε modifié avec les résultats mesurés est satisfaisante lorsque les paramètres caractéristiques du modèle sont évalués d’une façon appropriée. Ce type de modèle sous-estime l’intensité de la turbulence dans la partie inférieure de la forêt.

Dans le cadre de travaux plus récents sur l’écoulement complètement développé de la CLA sur terrain plat avec couvert forestier homogène horizontalement, Dalpé et Masson (2008) proposent d’utiliser les constantes modifiées du modèle k-ε de Katul et al. (2004). Ils présentent de nouvelles conditions aux limites et analysent l’influence du coefficient de traînée et de la masse volumique de surface foliaire α sur les résultats à l’intérieur de la forêt. Le modèle peut être amélioré pour obtenir une meilleure prédiction de l’intensité de la turbulence par une correction de l’erreur de discrétisation. Ces corrections ont fait l’objet d’un travail réalisé par Sumner et Masson (2011) sur terrain plat rugueux.

Le modèle à deux équations est le plus utilisé à cause de son coût numérique modeste. Les résultats de ce modèle sont toutefois de faible précision en présence de phénomènes de recirculation et de séparation. C'est pourtant un phénomène très observé lors de l’écoulement de la CLA sur des orographies réelles.

L’inconvénient majeur du modèle k-ε est dû au fait qu’il repose sur l’hypothèse de l’isotropie de la viscosité turbulente alors que la nature turbulente de l’écoulement de la CLA est anisotrope. On ne peut considérer l’hypothèse de l’isotropie que dans la région proche de la paroi.