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Mitigation des effets du gel et du dégel 30

Chapitre 2 : Revue des connaissances 5

2.2   Comportement thermique 5

2.2.3   Mitigation des effets du gel et du dégel 30

Le texte de cette section s’inspire, en grande partie, de la thèse de M. Doré (1997) intitulé « Détérioration des chaussées en condition de gel : une nouvelle approche prévisionnelle. »

Pour faire face au soulèvement différentiel ou à la problématique de la perte de portance au dégel, l’ingénieur a le choix d’adapter la structure de telle sorte qu’elle résiste à l’action du gel ou de chercher à neutraliser l’action du gel. Le Tableau 2-2 présente des exemples d’approches de mitigation pour chaque mécanisme d’affaiblissement au dégel (soulèvement différentiel et perte de portance au dégel) et le niveau d’intervention (adaptation de la structure ou neutralisation du mécanisme).

Tableau 2-2: Stratégies de dimensionnement structure des chaussées pour contrer les effets du gel (Doré, 1997)

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a. Adaptation de la structure

Épaississement de la sous-fondation

Cette technique consiste à placer ou à épaissir un coussin granulaire placé entre la fondation et le sol support. La sous-fondation joue un rôle important pour les chaussées soumises au gel, car elle permet de réduire/retarder la pénétration du gel dans le sol d’infrastructure, de distribuer la charge transmise et d’atténuer les mouvements différentiels. Elle joue aussi un rôle de drain et de filtre dans la structure. Lors de la conception, l’épaisseur des couches de revêtement et de fondation est généralement déterminée en fonction de la sollicitation par le trafic. L’épaisseur totale de la chaussée requise pour contrer les effets du gel s’obtient donc généralement en ajustant l’épaisseur de la sous-fondation qui est généralement constituée du matériau le plus économique.

Amélioration de la flexibilité et de la résistance à la fissuration du revêtement

Certaines dispositions lors de la formulation de l’enrobé peuvent permettre de faire face à la fissuration causée par le soulèvement différentiel et le retrait thermique. La résistance à la fissuration thermique et la résistance à la fissuration par fatigue des enrobés bitumineux sont fonction en partie de la teneur en bitume dans les enrobés et de la teneur en vides interstitiels (Vi) (Langlois, 2005). Il est possible d’utiliser des bitumes plus mous (à pénétration élevée)

sur les routes à faible trafic ou pour des routes à forte circulation, utiliser des additifs tels que les polymères et les fibres permettant de diminuer la sensibilité à la fissuration sans compromettre la stabilité du mélange. Dans certains cas critiques, il est même possible d’envisager l’emploi de géogrilles ou grilles d’acier (Nordal et Refsdal, 1994, tiré de Doré, 1997) à la base ou entre deux couches d’enrobés pour augmenter la résistance du revêtement. Aussi, la méthode LC développée en 1997 conduit à des enrobés généralement plus riches en bitume, donc plus résistants à la fissuration, sans toutefois présenter les degrés de maniabilité excessive observés dans le passé (Langlois, 1997). Depuis 2008, la méthode Marshall est totalement abandonnée pour la méthode LC au Québec (Paradis, 2014).

32 Rigidification de la structure

L’objectif de la rigidification est de réduire au minimum la contrainte transmise au sol d’infrastructure affaibli lors du dégel. Cette technique consiste à utiliser un revêtement bitumineux épais ou une dalle de béton et en stabilisant la fondation. Pour se faire, on utilise généralement des liants hydrauliques ou hydrocarbonés. Il est aussi possible d’utiliser des liants à base de chaux, de chlorure de calcium ou de lignosulfonate. La rigidification de la structure peut paraître attrayante si l’on ne considère que la perte de portance du sol lors du dégel. Or, puisque les réductions importantes de portance et le soulèvement sont généralement associés au même phénomène soit, le gel de ségrégation, il faut considérer que la structure aura également à résister au soulèvement différentiel. L’expérience ayant démontré que les chaussées rigides ou semi-rigides résistent mal à ce genre de sollicitation, les techniques de rigidification devraient être réservées aux conditions où un soulèvement uniforme de la chaussée est anticipé.

b. Neutralisation du mécanisme de gel

Drainage

Les pressions interstitielles, générées au niveau du sol d’’infrastructure par le passage répété des camions, engendre une diminution de contraintes effectives et par conséquent une diminution de la résistance au cisaillement. La capacité de drainage d’une chaussée est donc un moyen efficace pour réduire la teneur en eau dans les sols et matériaux des chaussées. Les systèmes de drainage contribuent d’abord à minimiser la quantité d’eau présente dans la chaussée et dans le sol d’infrastructure lors du gel en rabaissant la nappe phréatique et en minimisant les teneurs en eau du sol soumis au gel de ségrégation. Un drainage efficace contribue donc à réduire le potentiel de ségrégation des sols sous la chaussée, qui est fonction du degré de saturation des sols. Aussi, les systèmes de drainage peuvent jouer un rôle important lors du dégel printanier en favorisant une dissipation plus rapide des pressions interstitielles générées par la fonte de la glace de ségrégation et par l’eau trappée dans les couches supérieures de la chaussée (Konrad 1994, Doré 1997). Ils favorisent le recouvrement

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rapide de la portance des matériaux de la chaussée et du sol d’infrastructure. Les concepteurs de chaussées utilisent quelques techniques pour favoriser le drainage soit le fossé conventionnel bordant les routes, les matériaux de fondation plus perméables, une couche drainante entre l’infrastructure et la fondation ou sous le revêtement, des accotements drainants ou des écrans drainants (Girard, 1996). L’efficacité des systèmes de drainage pour mitiger l’action du gel est cependant incertaine. Dysli (1991) a montré sur des essais vraie grandeur exécutés dans des conditions de laboratoire que même en présence de sols très gélifs, cette couche drainante n’était pas d’une très grande utilité. Puisque le drainage ne récolte que très peu d’eau dégelée, il semblerait que la succion capillaire engendrée par le phénomène du gel entraine un écoulement de l’eau de fonte des lentilles de glace vers le bas et qu’aucun flux ne s’écoule vers la couche drainante simulée par une couche de grande perméabilité (Girard, 1996).

Isolation

L’inclusion d’une couche isolante est un moyen de réduire les conséquences des cycles de gel et de dégel au niveau des sols gélifs de l’infrastructure. En effet, cette couche isolante ralentit la perte de chaleur de la structure et diminue par conséquent la pénétration du gel dans la chaussée durant l’hiver, ce qui a donc pour effet de réduire la profondeur maximale de gel. Par conséquent, il y a moins de possibilités de formation de lentilles de glace au niveau des sols gélifs de l’infrastructure et donc moins de risques de soulèvements (Lachance, 1999). Il y a deux catégories d’isolants : les isolants secs et les isolants humides.

- Les isolants secs tiennent leur efficacité de leur faible perméabilité à l’écoulement de la chaleur (faible conductivité thermique), ce qui permet de conserver dans la structure la chaleur géothermique et la chaleur latente extraite lors du gel des matériaux sous-jacents, si applicable. Les principaux isolants secs utilisés sont les polystyrènes.

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- Les isolants humides, aussi appelées couches d’accumulation de gel, sont constitués de matériaux isolants ayant également la propriété d’absorber l’humidité. Leur efficacité est donc le résultat de la combinaison d’une perméabilité relativement faible aux flux thermiques ainsi que du dégagement d’une quantité importante de chaleur latente lors du gel de la couche. Le changement de phase s’effectuant à température constante, la grande teneur en humidité ralentit considérablement la vitesse à laquelle progresse le front de gel dans la structure.

L’isolation de la chaussée est une technique coûteuse généralement réservée à des secteurs limités particulièrement affectés par le gel. Il est considéré généralement que l’efficacité thermique de l’isolant sera maximale s’il est localisé à proximité de la surface de la chaussée (Ladanyi, 1996). Lors d’une réhabilitation, des considérations économiques incitent également à maintenir la couche isolante le plus près possible de la surface. La faible résistance mécanique de la plupart de ces matériaux, ainsi que le risque associé au givrage différentiel en surface, requièrent cependant de placer la couche isolante à une certaine profondeur. Les profondeurs recommandées varient entre 350 et 500 mm sous la surface de la chaussée (Dysli, 1991, MTQ 1995).

Uniformisation des sols d’infrastructure

Cette technique vise surtout à réduire les effets préjudiciables du soulèvement différentiel. Elle consiste à mélanger en place la couche supérieure (épaisseur pouvant atteindre 900 mm) du sol d’infrastructure afin d’homogénéiser le sol et diminuer la variabilité de ses caractéristiques. Les techniques dites d’infrastructure améliorée qui s’apparentent à la couche de forme française (Peyronne et Caroff, 1991 cité par Doré, 1997) sont des techniques qui visent des objectifs similaires, à savoir le contrôle des propriétés d’ingénierie des sols d’infrastructure. Dans ces derniers cas, les sols d’infrastructure sont constitués de matériaux d’emprunt sélectionnés et quelques fois modifiés pour en contrôler les caractéristiques.

35 Traitement chimique des sols gélifs

La stabilisation par traitement chimique permet de diminuer la sensibilité au gel des sols d’infrastructure. Dysli (1991) décrit deux techniques fréquemment employées à savoir : la stabilisation au ciment et la stabilisation à la chaux.

La première technique a pour effet d’agglomérer les particules sans modification des propriétés minéralogiques. Il en résulte une diminution de la perméabilité et une augmentation de la résistance mécanique au gonflement. L’auteur rapporte que des dosages en ciment de 4 à 8% peuvent réduire de 70 et 90% le soulèvement par le gel. La technique convient davantage à des sols gélifs plutôt grossiers (GM ou SM selon la classification unifiée). L’action de la technique est rapide.

La chaux a pour sa part l’effet de modifier les propriétés de la couche d’eau adsorbée par les particules argileuses. Elle agglomère ainsi les particules et réduit la plasticité du sol. Son action s’étend sur plusieurs mois. En raison de la bonne pénétration du soluté actif dans les sols fins, la technique convient bien aux sols fins tels les silts argileux et les argiles. Il est indispensable de procéder à des essais de gel pour déterminer le dosage optimal.

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