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E MISSIONS D ’ AMMONIAC ET DE GAZ A EFFET DE SERRE ASSOCIEES A L ’ ELEVAGE EN GROUPE DE TRUIES GESTANTES SUR CAILLEBOTIS

Comparison of ammonia and greenhouse gas emissions during the fattening of pigs kept either on fully slatted floor or on deep litter

2. E MISSIONS D ’ AMMONIAC ET DE GAZ A EFFET DE SERRE ASSOCIEES A L ’ ELEVAGE EN GROUPE DE TRUIES GESTANTES SUR CAILLEBOTIS

OU SUR LITIERE DE PAILLE ACCUMULEE

Depuis 2013, la législation européenne (Directive 2008/120/CE), en intégrant des considérations de bien-être animal, impose de loger les truies gestantes en groupe depuis 4 semaines après l’insémination jusqu’à une semaine avant la mise-bas. Cette législation exige également l’accès permanent pour les animaux à des matériaux permettant des activités de recherche et de manipulation. Dans ce contexte, l’élevage de truies gestantes sur litière paillée pourrait susciter un regain d’intérêt. Alors que les attentes sociétales en terme environnemental sont grandissantes, peu d’études traitent de l’impact de ce type d’hébergement sur le milieu. C’est pourquoi cette étude a pour objectif de comparer les émissions de NH3 et de GES (N2O, CH4 et CO2) lors de l’élevage

en groupe de truies gestantes sur sol à caillebotis total ou sur litière de paille accumulée. Pour cette étude, deux locaux identiques en volume (103 m³) et en surface (30 m²) ont été équipés d’une loge permettant d’héberger un groupe de 5 truies gestantes. Les loges étaient composées d’une zone d’alimentation et d’une zone de repos. La zone d’alimentation consistait en 5 cages individuelles (1,2 m²/truie) disposées sur un sol bétonné et dont l’accès était limité aux périodes de repas (1 repas d’une heure par jour). La zone de repos avait une surface de 12,6 m² (2,5 m² truie-1) dont le sol était constitué

d’un caillebotis total en béton (pourcentage de vide 15%) dans un local, et d’une litière de paille accumulée dans l’autre. Avant l’arrivée des animaux, 700 L d’eau ont été déversés dans la fosse à lisier afin d’éviter la formation précoce d’une croûte et de faciliter l’évacuation des lisiers en fin d’engraissement ; et 100 kg de paille de blé entière ont été disposés sur le sol de la loge paillée afin de constituer la couche initiale de litière d’une épaisseur de 25-30 cm. Par la suite, 25 kg de paille ont été apportés une fois par semaine pour atteindre 300 kg en fin de gestation. Trois bandes successives de 10 truies gestantes de race Landrace belge, réparties uniformément en deux groupes en fonction de la parité, du poids et de l’épaisseur de lard dorsal, ont été hébergées dans ces locaux depuis 7 semaines après insémination jusque 7 jours avant la date prévue de mise-bas. Le temps de séjour des truies a été de 65,3 jours en moyenne. Après le départ de chaque bande de truies, les effluents (lisiers et fumiers) étaient évacués et les loges étaient

nettoyées. La ventilation des locaux se faisait au moyen de ventilateurs extracteurs (un par local) et de manière contrôlée avec adaptation automatique du débit de ventilation en fonction de la température, ces deux paramètres étant mesurés et enregistrés en continu (Fancom, Panningen, Pays-Bas). Les concentrations en gaz ont été mesurées dans les locaux expérimentaux et dans le couloir d’apport d’air par détection photo- acoustique infrarouge au moyen d’un moniteur équipé pour la mesure simultanée de NH3, N2O, CH4, CO2 et H2O (1412 Photoacoustic Multi-Gas Monitor, Innova Air Tech

Instruments, Nærum, Denmark). Trois séries de mesures de six jours consécutifs réparties de manière homogène sur la période de gestation ont été réalisées pour chaque bande de truies. Les émissions (Egaz) ont été calculées sur base horaire grâce à

l’équation suivante : Egaz = D x (Ci – Ce),

avec D, le débit de ventilation (kg air h-1), et Ci et Ce, respectivement la concentration en

gaz dans l’air du local expérimental et du couloir d’apport d’air (mg kg-1 air). Les

résultats d’émissions ont été testés au moyen d’un modèle mixte pour données répétées (SAS, Mixed Proc) en incluant l’effet du type de sol (1 dl), de la série de mesure (2 dl), de l’interaction sol-série (2 dl) et du lot comme effet aléatoire (2 dl) avec 144 données (24 heures x 6 jours) par série de mesure.

Les émissions de NH3 ont été réduites avec le logement sur litière de paille accumulée en

comparaison au logement sur sol à caillebotis (9,05 versus 12,77 g NH3 truie-1 jour-1,

P<0,001). Ce résultat contredit ce qui avait été observé dans l’étude précédente avec les porcs charcutiers. Parmi les facteurs pouvant expliquer cette discordance, on retrouve les effets de la surface disponible et de la quantité de paille apportée. En effet, il est généralement admis que les émissions de NH3 sont proportionnelles à la surface

d’émission (Monteny et Erisman, 1998). Les porcs charcutiers élevés sur litière disposaient de 5 % d’espace en plus en comparaison à leurs homologues élevées sur caillebotis (1,20 versus 0,76 m² par porc) alors que les truies gestantes disposaient de la même surface avec les deux types de sol (2,5 m² par truie). Le taux de paillage différait également entre porcs charcutiers et truies gestantes (390 g jour-1 porc-1 versus 920 g

jour-1 truie-1) alors que la quantité d’azote excrétée par individu est équivalente pour les

deux types d’animaux et estimée à environ 40 g N jour-1. Un paillage plus important

augmente le rapport C/N des fumiers, ce qui favorise la croissance bactérienne et l’assimilation d’azote en protéines bactériennes plus stables, limitant ainsi la synthèse

de NH3 (Dewes, 1996; Sommer et Moller, 2000). La vérification de ces hypothèses fera

l’objet des deux chapitres suivants.

Les émissions de N2O ont été plus élevées avec le sol paillé en comparaison au sol latté

(2,27 versus 0,47 g N2O truie-1 jour-1, P<0,001) confirmant ainsi les résultats précédents

obtenus avec les porcs charcutiers. L’environnement hétérogène rencontré au sein des litières alliant conditions aérobies et anaérobies favorise la production de N2O durant

les processus de nitrification/dénitrification (Poth and Focht, 19 5). A l’inverse, le caractère strictement anaérobie des lisiers limite les émissions de N2O.

Les émissions de CH4 à partir des loges paillées ont été légèrement réduites par rapport

aux loges à caillebotis (9,20 versus 10,12 g CH4 truie-1 jour-1, P<0,001). La production

entérique, qui est fonction de la quantité de fibres ingérées, est évaluée à environ 7,5 g CH4 truie-1 jour-1 pour les deux types de logement (Philippe et al., 2008). Cette

estimation ne tient pas compte de l’ingestion potentielle de paille par les truies élevées sur litière, ce qui augmenteraient la production digestive de CH4. Les émissions totales

étant plus faibles avec le système paillé, cela suppose une production réduite dans les litières en comparaison au lisier. Le caractère plus aéré des fumiers contribue à y limiter la méthanogenèse qui est un phénomène strictement anaérobie (Yamulki, 2006).

Les émissions de CO2 ont été plus élevées avec le système paillé (2,83 versus 2,41 kg CO2

truie-1 jour-1, P<0,001), comme observé avec les porcs charcutiers. La source principale

est le CO2 respiratoire qui est fonction du métabolisme des animaux et donc du taux

d’activité, du poids corporel, des consommations alimentaires et de la température ambiante (CIGR, 2002 ; Pedersen et al., 2008). Ces paramètres ayant été semblables avec les deux modes de logement, on peut estimer que la production respiratoire a été similaire pour les groupes comparés. Les réactions de compostage au sein des fumiers sont proposées comme responsables des niveaux d’émission plus élevés.

En conclusion, pour des truies gestantes élevées en groupe, le système d’hébergement sur litière de paille accumulée testé dans cette étude a été associé à des émissions réduites de NH3 par rapport au système sur caillebotis, ce qui est contraire aux résultats

obtenus précédemment avec les porcs charcutiers. Les hypothèses avancées pour expliquer cette contradiction (effet de la surface et du taux de paillage) seront testées lors des deux études suivantes. Concernant les GES, la légère réduction des émissions de CH4 est largement compensée par une augmentation des émissions de N2O et CO2.

Ammonia and greenhouse gas emission from