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IV- ÉVALUATION DU PROJET

2. B ILAN GÉNÉRAL DU STAGE

1.1. Mise en place de l’évaluation

Au début du stage, une de mes missions est de concevoir un dispositif axé sur la production orale. En collectant des informations sur mes apprenants à travers un questionnaire, je me suis rendu compte qu’il y a deux niveaux : d’un coté, de grands débutants qui viennent juste d’arriver en France et qui n’ont jamais suivi de cours de

français et de l’autre coté, des personnes qui ont suivi 100 heures de cours de français. Et face à des besoins immédiats exprimés par la directrice et des apprenants, j’ai commencé mes premiers cours dès la deuxième semaine de mon stage. C’est pourquoi je n’ai pas eu le temps d’effectuer une évaluation diagnostique au début de mon stage.

Lors de mes premiers cours, j’ai constaté que la plupart des apprenants ne savaient pas lire, ce qui entrave le bon déroulement de mon dispositif oral. Un bon nombre d’entre eux n’ont pas appris à lire même dans leur langue maternelle. Pour tenter de résoudre ce problème, j’ai pris l’initiative de concevoir, outre le dispositif oral mis en place, un autre module d’apprentissage qui présente la correspondance des graphèmes- phonèmes afin qu’ils sachent lire et ainsi deviennent plus autonomes dans leur propre apprentissage.

Même si je n’ai pas eu le temps de faire une évaluation diagnostique, j’ai toujours pratiqué l’évaluation formative à chaque séance pour détecter les difficultés de chaque apprenant, m’adapter à leurs besoins, réajuster l’enseignement, accélérer ou ralentir le rythme de l’enseignement. Pour ma part, l’évaluation formative a été toujours présente tout au long de leur apprentissage. À chaque séance, je commence toujours par une révision de ce que nous avons travaillé auparavant et en fonction des effectifs des apprenants, de leur assiduité en classe, des lacunes et difficultés de chacun, j’adapte le contenu à leur rythme. Je réalise que cela exige de la part de l’enseignant un sens aigu d’observation et une grande capacité d’adaptation.

À l’issue du stage, j’ai réussi à terminer tout le module avec mes apprenants. Mais je n’ai pas eu l’opportunité d’effectuer tout de suite une évaluation finale de ce module pour plusieurs raisons :

D’abord, par manque de temps. Le déroulement du module a été retardé à cause du déménagement de l’association, des jours fériés et aussi des périodes de vacances de leurs enfants. Durant les périodes de vacances, j’assure mon cours différemment. Pour encourager mes apprenants adultes à venir, j’autorise leurs enfants à venir aussi avec eux en cours. Les enfants intéressés suivent le cours avec les adultes et les moins intéressés font des activités de coloriage à côté. Ainsi, toutes ces ruptures ralentissent la progression du module.

Ensuite, par manque d’assiduité de la part des apprenants. La plupart de mes apprenants sont des adultes migrants qui viennent de s’installer en France avec leur famille. Il est tout à fait normal qu’ils aient d’autres préoccupations dans leur vie,

surtout au début de leur installation à Grenoble. Avec l’aide des travailleurs sociaux qui les accompagnent, ils ont beaucoup de rendez-vous à la Préfecture, à la banque, à la CAF, chez le médecin, à l’école etc, d’autant plus que mes apprenants ou les membres de leur famille sont souvent malades. Tout cela justifie leur difficulté à être assidus en classe. Pour tenter de résoudre ce manque d’assiduité, j’ai proposé aux absents de venir plus tôt à la séance suivante pour réviser et rattraper si possible leurs lacunes. S’ils viennent, j’essaie de rattraper leurs lacunes mais s’ils ne viennent pas, cela ne fait qu’aggraver leur retard. Malgré mes efforts pour combler leur retard, la progression du module est lente.

De plus, par les problèmes de mémoire. Du fait de leur âge, de leur vécu douloureux, de leur stress à s’adapter à une nouvelle vie, de leur anxiété face à leur avenir incertain, de leur fatigue, de leur manque de concentration, de leur manque de travail personnel, les apprenants ont d’énormes difficultés à mémoriser. Même s’ils arrivent à retenir le contenu de la séance, ils l’oublient à la séance suivante. C’est pourquoi je commence toujours par une phase de révision pour raviver leur mémoire avant d’entamer de nouvelles choses. Je suis souvent obligée de revenir sur un même point plusieurs séances successives pour la consolidation de la mémoire. Cela ralentit énormément la progression du module.

Enfin, par l’instabilité des entrées-sorties des apprenants. Leur présence est délimitée par leur arrivée et leur sortie à l’association. Chaque contrat est différent. Mon stage s'étant déroulé de janvier à juin, il arrive souvent que certains commencent les cours en janvier mais s’arrêtent en février ou en mars par exemple parce qu’ils sont à la fin de leur contrat. D’autres commencent plus tard, par exemple en avril ou mai parce qu’ils arrivent plus tard. D’autres encore arrivent en mars mais ne viennent plus pour plusieurs raisons : soit ils ont trouvé du travail, soit ils sont malades, soit ils sont occupés par leur déménagement à l’issue de leur contrat avec l’organisme.

Pour les apprenants qui ne sont pas familiarisés avec l’alphabet français, l’apprentissage de la lecture est un processus beaucoup plus lent. Les raisons citées précédemment ne font que ralentir leur apprentissage, notamment l’acquisition de la lecture. Par conséquent, la mise en place d’une évaluation finale à l’issue de mon stage n’a pas été envisagée.

Toutefois, en février 2018, c’est-à-dire sept mois après mon stage, j’ai eu l’opportunité de revenir à France-Horizon pour redonner des cours de français et j’ai eu

l’agréable surprise de revoir certains apprenants que j’avais eus lors de mon stage. Avec plus de recul, je m’aperçois qu’ils ont fait d’énormes progrès en lecture, et qu’ils sont plus autonomes dans l’apprentissage. C’est à ce moment-là que j’ai réalisé une enquête de satisfaction auprès d’eux et un questionnaire auprès de leur référent social. Mes anciens apprenants ne sont plus qu’au nombre de six, soit un tiers environ de mes apprenants.