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A. Dynamique de l’infection par le VIH-1 et le VIS

2) Mise en place de la réponse à l’infection

L’infection par le VIH-1 génère une réponse immunitaire qui contient le virus mais qui ne l’élimine jamais. Deux types de réponses sont mis en place pour le contrôle de l’infection : la réponse à médiation cellulaire et la réponse à médiation humorale.

a) la réponse à médiation cellulaire

i) la réponse CD8

Les CTLs sont des effecteurs essentiels de la réponse immunitaire antivirale. Des CTLs spécifiques du VIH-1 ont été trouvés en grand nombre et dans une multitude de compartiments anatomiques (sang, rate, ganglions lymphatiques, muqueuse vaginale et gastrointestinale, peau, espaces bronchoalvéolaires…), aussi bien chez des patients infectés par le VIH-1 que des macaques infectés par le VIS (Bachelez et al., 1998; Cheynier et al., 1994; Lohman et al., 1995; Plata et al., 1987; Veazey et al., 2001a; Walker et al., 1987). Ces CTLs sont dirigés contre des épitopes de différentes protéines du VIH et du VIS (Gag, Pol, Tat, Nef, Vif ou Env) (Nixon et al., 1992).

Le contrôle partiel de la réplication du VIH-1 a lieu précocement après l’infection, et

corrèle avec l’émergence de la réponse CTL CD8+

spécifique du VIH-1. Une association semble donc possible entre l’apparition de populations cellulaires effectrices qui lysent les cellules infectées par le VIH-1 et le déclin de la charge virale en ARN plasmatique durant la période de primo-infection (Borrow et al., 1994; Koup et al., 1994; Regoes et al., 2004). Des

populations oligoclonales de LT CD8+

apparaissent rapidement après l’infection par le VIH-1 dans le sang périphérique des individus infectés, au moment où le virus est contenu (Pantaleo et al., 1994). Des études menées chez des macaques infectés par le VIS montrent également une corrélation claire entre l’expansion des CTLs et l’élimination du virus (Chen et al., 1995;

Kuroda et al., 1999; Yasutomi et al., 1993). De plus, la déplétion in vivo de LT CD8+

chez le macaque, par infusion d’anticorps monoclonaux anti-CD8, induit des changements profonds sur la réplication du VIS, comme une charge virale plus forte, une déplétion plus marquée des

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déplétion en LT CD8+

perdure au-delà de 28 jours (Matano et al., 1998; Schmitz et al., 1999). Ainsi, les CTLs jouent un rôle essentiel dans le contrôle de la réplication du VIS durant la primo-infection.

Les LT CD8+ sont également importants lors de la phase asymptomatique. Ainsi, bien

que la charge virale soit faible, les réponses CTLs se maintiennent in vivo durant cette phase (Harrer et al., 1996a; Harrer et al., 1996b). Chez le macaque infecté par le VIS et en phase asymptomatique, la déplétion de ces cellules par infusion d’anticorps anti-CD8 donne lieu à une remontée rapide et forte de la charge virale, qui est à nouveau contrôlée lors d’une

ré-émergence d’une population de LT CD8+ (Jin et al., 1999; Metzner et al., 2000; Schmitz et al.,

1999). De plus, chez l’homme infecté par le VIH-1 et le macaque infecté par le VIS, la fréquence en CTLs est inversement corrélée à la charge virale ARN plasmatique et à la progression de la maladie (Ogg et al., 1998; Riviere et al., 1995; Villada et al., 1997). Lors

d’un rebond de la virémie ou lors d’une interruption de la trithérapie chez des patients VIH+

,

de nouvelles cellules ou des cellules préexistantes T CD8+

spécifiques du VIH-1 peuvent être activées et s’expandre (Mollet et al., 2000).

En addition d’une activité de lyse des cellules infectées, les LT CD8+ peuvent inhiber

la réplication du VIH-1 in vitro (Walker et al., 1986). Des mécanismes cytolytiques et non cytolytiques sont ainsi associés à cette activité antivirale. La voie cytolytique consiste soit en l’exocytose calcium dépendante des protéases granzyme et perforine, soit en la mort cellulaire programmée médiée par Fas. La voie non cytolytique implique le relargage de facteurs solubles prévenant notamment l’entrée virale, comme des chimiokines. Les chiomikines " MIP-1#, MIP-1" et RANTES, ligands du corécepteur CCR5, ont des activités anti-VIH-1, colocalisent avec les granzymes et les perforines, et sont sécrétées par les CTLs après la rencontre avec l’antigène viral (Cocchi et al., 1995; Wagner et al., 1998). Le CAF (CD8 Antiviral Factor) est un autre facteur soluble ayant une action inhibitrice sur la réplication du VIH-1 (Levy et al., 1996). C’est une protéine, encore non identifiée, produite seulement par

les LT CD8+ activés (HLA-DR+). Son mécanisme d’action n’est pas encore bien connu, mais

il semblerait qu’il bloque la réplication virale en inhibant la transcription des gènes viraux au

niveau du LTR, la prolifération, l’activation, le phénotype et la viabilité des LT CD4+

n’étant pas touchés (Levy, 2003; Mackewicz et al., 1995).

Une réponse T CD8+

se met en place rapidement après l’infection et joue un rôle important dans le contrôle du virus aussi bien en primo-infection que lors de la phase chronique de l’infection. Toutefois, il apparaît que cette réponse n’est pas efficace tant sur le

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INTRODUCTION 46 plan quantitatif que qualitatif, car elle ne permet pas l’éradication du virus et n’empêche pas l’évolution vers le stade SIDA.

ii) la réponse CD4

Les LT CD4+

spécifiques du virus ont aussi un rôle important dans le contrôle de la réplication du 1. En effet, il a été montré que de nombreux individus infectés par le

VIH-1, avec une charge virale faible, possèdent des populations de LT CD4+ spécifiques du virus

(McNeil et al., 2001; Pitcher et al., 1999). Des populations oligoclonales de LT CD4+ sont détectées in vivo dans des singes chroniquement infectés par le VIS (Chen et al., 2000). De

plus, l’amplitude de la réponse lymphocytaire T CD4+

et le contrôle de la virémie corrèlent chez des individus infectés et non progresseurs, ainsi que chez des singes infectés par le VIS ou un SHIV (McKay et al., 2003; Rosenberg et al., 1997a). Toutefois, l’infection par le VIH-1

conduit à une déplétion sélective de la population lymphocytaire T CD4+

, et en particulier les LT CD4+ spécifiques du VIH-1 (Douek et al., 2002). Or, les LT CD4+ sont un élément essentiel du système immunitaire en permettant le développement et le maintien de la réponse CTL et humorale. Leur déplétion influe par conséquent sur la capacité d’élimination du virus (Kalams et al., 1999; Kalams and Walker, 1998).

b) la réponse à médiation humorale

La mise en place d’une réponse à médiation cellulaire est suivie par une forte réponse humorale (Safrit and Koup, 1995). La séroconversion apparaît 3 à 6 semaines après l’infection, mais certaines séroconversions sont plus tardives (au-delà de six mois) (Horsburgh et al., 1989). Elle suit le contrôle de la virémie plasmatique, mais la détection d’anticorps neutralisants est généralement plus tardive que la séroconversion. Les anticorps neutralisants sont principalement dirigés contre l’enveloppe du VIH-1 et agissent soit en bloquant l’infection avant l’attachement du virion à la cellule, soit en inhibant la fusion membranaire, voire l’internalisation du virion (Poignard et al., 1996). Il existe également des anticorps dits facilitants : les virions recouverts de ces anticorps pénètrent dans les cellules par le biais des récepteurs aux immunoglobulines (FcR) exprimés à la surface de ces cellules (Robinson et al., 1988). Ainsi, bien que la réponse humorale ait un rôle central dans l’élimination de nombreuses infections virales, son rôle dans l’infection par le VIH-1 est plus controversé.

En effet, les anticorps retrouvés dans le sérum de personnes VIH+

ont seulement une faible activité de neutralisation contre des isolats primaires du VIH-1 (Moore et al., 1995;

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Poignard et al., 1999). De plus, l’explosion de réplication du VIH-1 dans les premiers jours après l’infection initiale est contenue chez les individus infectés bien avant le développement d’anticorps qui peuvent neutraliser le virus (Pilgrim et al., 1997). Par ailleurs, si la déplétion des cellules B chez des macaques rhésus par infusion d’anticorps anti-CD20 retarde de manière significative l’émergence d’une réponse humorale neutralisante après l’infection par le VIS, elle ne change rien à la cinétique de l’élimination virale précoce (Schmitz et al., 2003). Enfin, les anticorps neutralisants détectés sont souvent spécifiques d’une quasi-espèce virale antérieure à celle majoritairement présente chez un individu, ce qui suggère un temps de maturation trop lent de la réponse humorale pour qu’elle soit pleinement efficace (Von Gegerfelt et al., 1991). Ces observations suggèrent donc que les anticorps neutralisants ne sont pas importants dans le contrôle précoce de la réplication du VIH-1.

En revanche, la présence d’anticorps neutralisants avant l’infection semble avoir un impact important. Ainsi, l’infusion d’anticorps polyclonaux (sérum) ou monoclonaux, qui neutralisent le VIS ou le SHIV, atténue la pathogenèse, voire bloque l’établissement de l’infection par ces virus (Baba et al., 2000; Haigwood et al., 1996; Mascola et al., 2000). Cela suggère donc que ces anticorps neutralisants sont capables de protéger de l’infection initiale et par conséquent sont importants à prendre en compte dans d’éventuelles stratégies de vaccination contre le VIH-1. Enfin, les derniers résultats très prometteurs obtenus par l’équipe de Hovanessian et collègues confirment l’importance d’une réponse humorale neutralisante préexistante avant l’infection (Hovanessian et al., 2004).