• Aucun résultat trouvé

3.1 Milieu d'étude

3.1.2 Milieu cultural : aspects des vignobles et de la viticulture

Autour de 70% de la surface de la vallée est cultivée en vigne. Pour les trente pour-cent restants, la majorité a soit été abandonnée (garrigue sur lithosols en coteaux), soit délaissée temporairement (jachère enherbée). On trouve aussi des cultures comme le blé dur, le colza et l'asperge.

3.1.2.1 Les vignes méditerranéennes et leur mode de conduite

La première chose qui nous frappe si nous survolons la plaine côtière est la nature morcelée du milieu viticole. Les parcelles agricoles y sont généralement petites (variant de 0.05 à 3 ha) et de forme irrégulière (de compacte à très allongée). En se rapprochant du sol on s'aperçoit d'une autre caractéristique du milieu viticole méditerranéen : la grande variété des modes de conduites et des couvertures végétales résultantes. A ces deux niveaux donc, notre milieu n'est pas comparable à d'autres grandes régions viticoles comme le bordelais ou le val de Loire.

Champagnol (1984) distingue neuf types principaux de modes de conduite, dont quatre sont communs en région méditerranéenne. Du point de vue hydrologique, on peut regrouper trois modes de conduite parmi ces quatre (cylindre, cône inversé et hémisphère) sous le dénominateur gobelet. Il s'agit d'un motif de ceps individuels sans tuteur distribués sur une grille régulière. C'est le mode de conduite traditionnel en Méditerranée, les ceps y sont espacés dans les deux sens perpendiculaires d'une distance autour de 1.5 mètres. L'autre groupe de modes de conduite actuellement très commun est dénommé palissé. Il s'agit de ceps plantés en rangs droits et dont les pampres sont conduits le long d'au moins deux fils de fer dans le sens du rang, produisant ainsi un couvert végétal continu dans le sens du rang. L'écartement entre ces rangs est généralement de 2-2.5 mètres. Actuellement les parcelles en gobelet sont encore relativement nombreuses (autour de 40%) dans la région. Seuls les cépages comme le mourvèdre et la grenache en situation de pente sont encore plantés en gobelet (Boursiquot, 1999). Pas plus de 20 à 30% des parcelles seraient encore vendangées à la main, i.e. même les parcelles en gobelet sont parfois vendangées à la machine.

Après ces généralités il faut revenir à la variabilité qui caractérise la région. D'abord on constate la présence de nombreux modes de conduites "intermédiaires". Les ceps de parcelles en gobelet peuvent être plantés de façon à faciliter le passage des engins et notamment afin de permettre la récolte mécanique, dans ces cas les ceps sont plus rapprochés dans un sens et plus écartés dans l'autre. Ainsi le motif spatial se rapproche d'une parcelle palissée. De la même façon on trouve d'anciennes parcelles en gobelet actuellement palissées par l'introduction de la conduite sur fils sans pour autant avoir adapté le motif de plantation des vignes palissées. La géométrie du motif de plantation est également influencée par la combinaison sol-microclimat-cépage. Pour le Midi de la France les recommandations

de densité de plantation varient en fonction de ces facteurs entre 3.500 et 7.000 souches par hectare (Champagnol, 1984).

Peu intéressants du point de vue hydrologique, d'autres paramètres interviennent cependant dans l'aspect du couvert végétal de la vigne et à travers cela dans notre étude. En fonction des objectifs de production la végétation peut être plus ou moins bien entretenue et donc être plus ou moins régulière. Aussi peut-il y avoir des ceps manquants ou moins vigoureux augmentant cette irrégularité. Il y a également le "sous-type" de mode de conduite qui intervient, souvent en fonction du cépage. Dans les parcelles en gobelet on rencontre les cépages à port dressé, taillés plus ou moins courts, mais aussi de "nouveaux" cépages (syrah, cabernet, merlot, chardonnay) à port naturel retombant avec souvent une taille longue préconisée. Le contour de la projection au sol du couvert de ce dernier est souvent plus irrégulière. Dans les parcelles palissées - seul le palissage plan (Champagnol, 1984) est pratiqué - les ceps sont conduits en royat double, guyot ou guyot double (Goma-Fortin et al., 1998) et la hauteur du palissage varie de 1.20 à 1.80 mètres (Boursiquot, 1999). Ceci a des conséquences au niveau de la morphologie du couvert et de la taille de l'ombre portée. En dernier lieu on remarque qu'en Méditerranée, beaucoup plus qu'ailleurs, on laisse la vigne exprimer sa vigueur - optimale sous ce climat - car un rognage trop sévère ne fait que stimuler la croissance et risque de trop exposer les grappes au soleil (risque de brûlures, (Boursiquot, 1999). Encore une fois, l'irrégularité du couvert s'en retrouve augmentée.

3.1.2.2 Les exploitants viticoles et les objectifs de production

Parmi les cinq communes principales de la vallée (Pézenas, Roujan, Alignan du Vent, Neffiès et Caux, figure 3.1 et annexe 1A) on compte quatre caves coopératives (celles de Pézenas et de Caux ayant fusionné). Chaque coopérative a sa propre politique et ses objectifs ce qui s'exprime sur le terrain. Les viticulteurs appartenant à la coopérative de Pézenas/Caux ont le plus de terroirs classés en AOC (Appellation d'Origine Contrôlée). On y exploite de plus en plus cette possibilité de production haut de gamme (Argillier, 1991) par des efforts d'encépagement et de choix de modes de conduites adaptés (réduction de production). Ailleurs on produit généralement du vin de pays ce qui peut localement faire diminuer l'intensité du soin consacré à la vigne. Il semble que la cave d'Alignan soit plus dynamique que les deux autres (Tondu, 1998), ce qui se traduit sur le terrain par un soin plus intensif, régulier et homogène des parcelles. Le palissage y est préconisé. La coopérative de Neffiès au contraire favorise le gobelet et la vendange manuelle.

Sur la plaine alluviale et les terrasses du Pléistocène de la vallée on rencontre plusieurs domaines particuliers. Ici les parcelles sont généralement de taille beaucoup plus grande que la moyenne et le gobelet y est absent.

3.1.2.3 L'itinéraire technique – l'entretien du sol

Si nous reprenons notre vol au dessus de la plaine côtière, on est frappé par une troisième particularité. Après l'aspect morcelé du milieu et la grande variété des modes de conduites, c'est la variation des pratiques culturales formant un patchwork aux apparences quasi-aléatoires qui saute à l'œil, car elle se traduit par un très grand nombre d'états de surface contrastés que l'on peut rencontrer à courte distance dans le temps et dans l'espace. Vu qu'il s'agit ici de l'objet même de cette étude il faut détailler au mieux cette variabilité et les grandes lignes que l'on peut quand même y discerner.

Chaque viticulteur choisit son propre itinéraire technique, bien sûr en fonction des caractéristiques de la parcelle, de son sol et de la météorologie, du cépage, mais aussi en fonction de la main d'œuvre disponible, du matériel dont il peut disposer et de sa propre conviction. Il en résulte plusieurs points concernant le travail du sol et la fertilisation.

le travail du sol

Pratiquement toute implantation d'une nouvelle parcelle de vigne, ou nouvel encépagement après arrachage, est précédée par un défoncement au ripper (à 1 dent, figure 3.3), notamment dans des substrats a priori peu favorables à la vigne (Argillier, 1991). Après implantation, autour de 40% des parcelles (moins en pourcentage de surface) ne subissent aucun labour, mais sont plus ou moins intensivement désherbées chimiquement. Il s'agit surtout des petites parcelles et celles en forte pente. Sur ces parcelles, les cailloux, lorsqu'ils sont présents, sont très visibles car jamais enfouis et enrichis par départ des particules fines. Toutes les grandes et moyennes parcelles sont labourées (Boursiquot, 1999). Les méthodes d'entretien du sol ont fortement évolué dans les années quatre-vingts (Heinzle, 1995). Ainsi les labours traditionnels : buttage, débuttage et décavaillonnage sont abandonnés par beaucoup de viticulteurs au profit de façons superficielles et de l'utilisation des herbicides chimiques. Ces deux techniques peuvent d'ailleurs être, soit combinées dans le temps, soit associées dans l'espace. Dans les vignes à écartement supérieur à 1.50 mètres, le désherbage chimique est souvent localisé sous le rang, le centre de l'interligne étant entretenu par façons superficielles ou faisant l'objet plus rarement d'un enherbement permanent ou temporaire. On note deux désavantages des façons aratoires classiques par rapport aux herbicides chimiques : la lenteur et la difficulté de travail de la ligne des souches. De plus, l'absence de façons aratoires augmente la portance des sols et rend plus commodes les interventions phytosanitaires urgentes et la récolte mécanique.

Pour le labour on emploie surtout des dents (Boursiquot, 1999). Là où il n'y a pas de cailloux l'utilisation du rotovator est un peu plus fréquente. La distinction entre les deux est importante car ce dernier pulvérise en grande partie les mottes de terre. La rugosité s'en retrouve donc fortement réduite. D'autres outils comme la charrue (labour plus profond) et la houe rotative (autour des pieds) ne sont guère utilisés dans le midi de la France (Vernet, 1998).

Certains interrangs peuvent être écartés du labour, souvent afin de permettre le passage des engins. Le nombre d'interrangs travaillés entre deux interrangs non travaillés dépend souvent de l'appareil de traitement (fumigation contre des maladies). On note d'ailleurs que le passage des engins dans des parcelles ayant subi un labour a un fort effet sur l'aspect du sol.

Il n'existe pas de calendrier de périodes précises, mais généralement les parcelles sont labourées trois fois dans l'année : en automne, au printemps (après le risque de gelée) et en début d'été. Aucun labour

est donc effectué de mi-juillet à mi-octobre, et de décembre à février. La date précise est souvent fonction de la pluie et en automne on donne la priorité à la taille (Boursiquot, 1999). Louchart et al. (1997) constatent, après enquête, que ces recommandations ne sont pas toujours très strictement suivies. Il en résulte un fort étalement des labours au cours de l'année (tableau 3.1).

L'engazonnement de vignes, absent dans la vallée de la Peyne, est pour l'instant quasiment inexistant dans la région, à l'exception de quelques exemples dans les grandes plaines humides. Il n'y est souvent employé qu'un rang sur deux (Goma-Fortin et al., 1998). Par contre l'enherbement naturel des vignes en septembre, octobre et novembre, préconisé par la Chambre d'Agriculture (Argillier, 1999), semble de plus en plus pratiqué.

la fertilisation

On trouve localement des fertilisations organiques (fumure, compost), mais la fertilisation est surtout minérale. Souvent on utilise une dent injecteur pour introduire la matière à une profondeur de 15-20 cm dans le sol au milieu du rang (Boursiquot, 1999). Si l'écartement est important, il est préférable d'en introduire de chaque côté de l'interrang (c'est pourtant peu employé). La fertilisation se fait pendant le repos végétatif, surtout en fin d'hiver.

L'irrigation est officiellement interdite en France pour les appellations. Même dans les zones à vin de pays ou vin de table, l'irrigation n'est guère pratiquée. On l'a rencontré sur quelques parcelles de domaines particuliers dans la vallée de la Peyne.

Oct Nov. Déc. Jan Fév Mar. Avr. Mai Juin Juil. Aou. Sep.

arrachage-plantation T taille E palissage-piquetage-remplacement de ceps V ébourgeonnage pré-taille

T labour - décompactage - travail du rang E broyage des sarments

S désherbage chimique

F fumure

P soufrage - sulfatage

C autres traitements phytosanitaires

V vendanges

Oct Nov. Déc. Jan Fév Mar. Avr. Mai Juin Juil. Aou. Sep.

Tableau 3.1 Calendrier cultural typique de la vigne sur le bassin versant de Roujan (d'après Louchart et al.,

1997). TEV : le travail et l’entretien de la vigne ; TES : le travail et l’entretien du sol ; F : la fertilisation ; PC : la protection de la vigne ; V : les vendanges.

3.1.2.4 L'itinéraire technique – l'entretien de la culture

On traite ici brièvement d'un certain nombre d'aspects de la pratique culturale concernant les ceps, susceptibles d'intervenir également sur l'état de surface des sols. Il s'agit notamment d'interventions mécaniques. Cette petite énumération illustre la complexité actuelle des pratiques culturales en viticulture.

les opérations en vert

Les cépages palissés à port retombant sont relevés au moment de la floraison, ce qui se traduit par une diminution du couvert végétal. Le rognage, justifié physiologiquement et nécessaire pour assurer le passage des matériels, est mécanisé depuis longtemps. La pratique de ces rognages est très irrégulière. Relevage, palissage et effeuillage font l'objet de tentatives de mécanisation mais restent encore manuels.

les traitements phytosanitaires

La mécanisation des traitements pour protéger la vigne contre différentes maladies a fait l'objet de nombreuses innovations. Les passages d'engins dans la parcelle pour ces traitement sont nombreux au cours de la saison végétative.

la récolte

En France, la technique de la récolte intégrale mécanisée s'est imposée rapidement depuis 1970, avec pour justification essentielle la réduction des coûts de production. Le travail est réalisé par un secouage latéral des ceps. Sa qualité est fonction du cépage, de la préparation de la parcelle et des réglages adoptés par l'opérateur. Toutefois, le facteur cépage demeure le plus important, l'aptitude des différents cépages à fournir une vendange de qualité avec le secouage latéral est très variable.

la taille

Les pré-tailleuses sont utilisées depuis les années soixante dans les vignes en gobelet pour assurer une approche plus rapide de la souche (Heinzle, 1995). Plus récemment de tels systèmes sont utilisés dans les vignes palissées. La gestion des bois de taille s'est également mécanisée avec le broyage. A part les aspects de mécanisation, le moment auquel intervient la taille est également important dans le cadre de notre étude car les sarments taillés deviennent partie intégrante de l'état de surface. En fonction du cépage et du microclimat (risque de gel) ce moment varie de novembre à mars.

En dernier lieu il est important pour tout suivi de la vigne par télédétection, de mentionner quelques informations concernant la chute des feuilles en automne, qui vont influencer la radiométrie de la vigne :

• l'emploi de la machine à vendanger accélère la chute des feuilles et provoque donc un décalage avec les vignes vendangées à la main ;

• le traitement contre le mildiou après vendange pour favoriser l'accumulation de réserves dans la plante a pour effet que les feuilles restent vertes à peu près un mois de plus que les autres qui sont toutes attaquées par le mildiou ;

• différentes maladies peuvent provoquer un rougissement en automne (p. ex. flavescence dorée) ;

• chaque cépage se décolore à sa façon. L'Alicante-Bouschet a par exemple un jus coloré et donne aussi des feuilles rouges. Les cépages à raisin blanc jaunissent et ceux à raisin noirs donnent un teint rougeâtre ;

• la première gelée d'automne fait tomber les feuilles, généralement 8 à 10 jours après, sauf s'il y a eu beaucoup de vent et de pluie.

Il résulte de ces observations qu'entre le début du mois d'octobre et la fin du mois de novembre, la radiométrie du couvert végétal de la vigne, ainsi que son recouvrement, varient fortement de parcelle en parcelle.