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Microstructures des échantillons cométaires de la mission Stardust.

Collaborateurs : P. Cordier (UMET), H. Leroux (UMET), M. Roskosz (UMET), J. Stodolna

(Thèse, UMET).

En janvier 2006, la sonde de la mission américaine Stardust ramène sur Terre des poussières récoltées dans la coma de la comète 81P/Wild 2 (Brownlee et al. 2006, Zolensky et al. 2006). C’est le deuxième retour d’échantillons extra-terrestres d’origine connue après les missions lunaires Apollo. Grâce à Hugues Leroux, responsable de la thématique « Astrominéralogie » de l’équipe, nous avons eu la chance de faire partie des équipes impliquées dans les observations préliminaires des échantillons. La MET, qui, par les dimensions des échantillons observables, arrive généralement en fin de chaîne de caractérisation, est ici l’outil de choix pour les analyses microstructurales de ces poussières micrométriques. Les techniques utilisées sont la microanalyse X pour réaliser des cartographies de composition, l’imagerie conventionnelle et haute résolution pour l’analyse des défauts et la diffraction en aire sélectionnée pour les études structurales. Notons que l’utilisation en « routine » de la précession électronique, donnant des clichés de diffraction en axe de zone symétriques et équilibrés en intensité même si l’échantillon n’est pas parfaitement orienté, est ici d’un intérêt indéniable. Elle facilite en effet grandement la détermination des phases dans ces échantillons constitués de petits cristallites imbriqués et laissant peu de marge de manœuvre pour la recherche des orientations caractéristiques.

Il s’agit donc, à partir de l’observation des microstructures, de renseigner sur les chemins thermiques ayant pu être subis par les particules et ayant abouti à leur formation. Notre contribution a essentiellement porté sur les particules « terminales », retrouvées à l’extrémité des traces de décélération (« tracks ») laissées dans l’aérogel utilisé pour récolter les poussières (Fig. 3.1). Ces particules sont constituées d’assemblages de grains cristallins de quelques centaines de nanomètres. Les phases majoritaires sont des silicates, pyroxènes ((Mg,Fe,Ca)2Si2O6) et olivine ((Fe,Mg)SiO4), s’étalant sur un large domaine de compositions. Les pyroxènes, dont la microstructure est un bon indicateur des événements thermiques et mécaniques expérimentés par le cristal, ont particulièrement retenu notre attention (Leroux et

al. 2008a ; Jacob et al., 2009). Les microstructures sont variables d’une particule à l’autre en fonction des compositions majoritaires et des assemblages.

Fig. 3.1 : Micrographie optique des tracks 32 et 69. Les particules terminales étudiées sont encerclées. Crédits Nasa J.S.C.

Dans une des particules étudiées, un grain riche en Ca (diopside) présentant une exsolution lamellaire de phase pauvre en Ca (pigeonite), révèle une origine ignée (Fig. 3.2), c’est-à-dire par refroidissement depuis un liquide à haute température. La vitesse de refroidissement peut être estimée à partir de la largeur des lamelles exsolvées. Elle est cohérente avec celles des « chondres » retrouvés dans les météorites chondritiques, témoins de processus de fusion et refroidissement rapides des poussières silicatées dans le nuage proto-stellaire. Dans une autre des particules, on observe majoritairement des pyroxènes riches en Fe (pigeonite, de structure monoclinique), présentant de nombreuses macles polysynthétiques (Fig 3.3). Toutefois, dans la majorité des échantillons, les pyroxènes sont riches en Mg (enstatite), et présentent alors des alternances de domaines monocliniques (clino-enstatite) et orthorhombiques (ortho- enstatite) le long des plans (100) communs aux deux structures (Fig. 3.4).

Pour la particule riche en pigeonite, une formation par refroidissement depuis une phase solide haute température (protopyroxène, ortho-rhombique) est probable, tandis que pour les particules riches en enstatite, la microstructure peut être obtenue par refroidissement depuis une phase haute température ou par déformation d’une phase mère ortho-enstatite. Quoi qu’il en soit, la diversité des compositions et des microstructures observées indique des origines variées pour les divers grains formant les poussières récoltées. Ces résultats corroborent la théorie d’un mélange radial, grand brassage au sein du disque proto-planétaire de particules

formées à des distances plus ou moins proches du soleil, avant l’accrétion dans les astéroïdes et les planètes formant aujourd’hui le système solaire.

Fig 3.3 : Echantillon C2027,2,69,1,1. a) Vue générale. Les grains de pyroxènes montrent une structure striée associée à du maclage suivant les plans (100). b) Image en champ sombre d’un grain orienté avec les plans (100) debout révélant le contraste associé aux domaines maclés. c) Diagramme de diffraction associé à b), correspondant à la superposition des axes de zone

!

[010]et

!

[01 0] mis en parallèle par le maclage. (Jacob et al. 2009)

a)

b)

c)

Fig. 3.2 : a) Image en fond clair d’un grain de pyroxène riche en Ca présentant des lamelles d’exsolution (échantillon C2027,2,69,2,2). b) Diagramme de diffraction correspondant, axe de zone

!

[11 0] . Les taches de diffraction le long de la direction [110]* sont dédoublées, ainsi que le montre clairement l’agrandissement reproduit en c). (Leroux et al., 2008a)

Fig 3.4 : Echantillon C2027,2,69,2,2. Image haute résolution d’un grain d’enstatite. Les franges à 1,8 nm correspondent à l’ortho-pyroxène, celles à 0,9 nm au clino-pyroxène. Un contraste de déformation résiduel associé aux dislocations partielles est observé à la fin des domaines de clino-enstatite. (Jacob et al. 2009).

Un autre enjeu dans l’analyse des échantillons consiste à reconnaître dans les microstructures observées, ce qui a été préservé dans son état original, de ce qui a été affecté par la récolte, cette dernière ayant consisté en une décélération quasi-instantanée dans un aerogel de très faible densité depuis une vitesse relative de 6,1 kms-1

. Au cours du choc, les particules, constituées d’agrégats faiblement cohésifs, se sont dispersées le long des traces de décélération. Les plus petits grains ou les plus fragiles ont fondu sous l’effet de la brusque élévation de température associée à la décélération et se sont mélangés à l’aérogel pour donner un verre de composition mixte. L’analyse des profils de composition dans ces parties vitreuses permet de remonter à la température atteinte pendant le choc et à la vitesse de refroidissement (Roskosz et al., 2008). La modification de la chimie et de l’état redox des grains thermiquement affectés par la récolte a également été mise en évidence (Leroux et al., 2008b ; Leroux et al., 2009, Stodolna et al., 2009). Concernant les particules terminales, nous avons observé des dislocations en configuration de glissement dans l’ensemble des échantillons analysés (Fig. 3.5). Alors que des études théoriques suggèrent que l’intensité moyenne du choc associé à la capture était insuffisante pour déformer plastiquement les grains récoltés (Trigo-Rodriguez et al., 2008), les observations réalisées sur des échantillons provenant de tirs expérimentaux (Stodolna et al., 2010 ) montrent au contraire qu’un tel choc peut produire le déplacement des dislocations. Dans ces conditions, il est difficile de conclure sur l’origine des dislocations dans les échantillons Stardust.

Fig 3.5 : Echantillon C2027,2,69,2,2. Images en champ faible des dislocations présentes dans un grain d’orthoenstatite (a) et dans le grain exsolvé (b). (Jacob et al. 2009).

Publications concernées par ces études (les travaux précédés d’un astérisque sont reproduits à la fin de ce mémoire) :

1. Brownle D. et al. (2006) Comet 81P/Wild 2 Under a Microscope. Science, 314(5806), 1711-1716.

2. *Jacob, D., Stodolna, J., Leroux, H., Langenhorst, F., and Houdellier, F. (2009) Pyroxenes microstructure in comet 81P/Wild 2 terminal Stardust particles. Meteoritics & Planetary Science, 44(10), 1475-1488.

3. *Leroux, H., Jacob, D., Stodolna, J., Nakamura-Messenger, K., and Zolensky, M. (2008a) Igneous Ca-rich pyroxene in comet 81P/Wild 2. American Mineralogist, 93, 1933-1936.

4. Leroux, H., and Rietmeijer, F.J.M.M.A.V., A. J. Brearley, D. Jacob, F. Langenhorst, J. C. Bridges, T. J. Zega, R. M. Stroud, P. Cordier, R. P. Harvey, M. Lee, M. Gounelle, M. E Zolensky. (2008) TEM study of thermally modified Wild 2 dust particles by interactions with the aerogel matrix during the Stardust capture process. Meteoritics & Planetary Science, 43(1/2), 97–120.

5. *Leroux, H., Roskosz, M., and Jacob, D. (2009) Oxidation state of iron and extensive redistribution of sulfur in thermally modified Stardust particles. Geochimica et Cosmochimica Acta, 73(3), 767-777.

6. Stodolna, J., Jacob, D., and Leroux, H. (2009) A TEM study of four particles extracted from the Stardust track 80. Meteoritics & Planetary Science, 44(10), 1511-1518. 7. *Zolensky, M.E. et al. (2006) Mineralogy and Petrology of Comet 81P/Wild 2

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