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Chapitre 3 Techniques expérimentales de caractérisation

3.5 Microscopie Électronique en Transmission (TEM)

La Microscopie Électronique en Transmission (TEM) est la technique la plus souvent utilisée pour la caractérisation structurale à l’échelle nanométrique [3.1, 3.2]. Avec le microscope en mode image il est possible d’observer des détails de la structure du matériau incluant les dislocations et parfois les défauts ponctuels dans un réseau cristallin. Avec le microscope en mode diffraction on peut aussi investiguer la structure cristalline à l’échelle nanométrique.

Dans nos mesures nous avons utilisé un microscope JEOL 2100F, équipé d’une source d’électrons à émission par effet de champ, ayant un voltage d’accélération de 200 kV. À part l’imagerie conventionnelle et la diffraction, cet instrument peut faire aussi des mesures EDS (« Energy Dispersive Spectrometry »), EELS (« Electron Energy Loss Spectrometry ») et imagerie STEM (« Scanning Transmission Electron Microscopy »). L’imagerie électronique nous permet de voir les détails de la structure d’un échantillon d’une manière semblable au microscope optique, mais avec une résolution beaucoup plus grande. Dans le mode de fonctionnement « haute résolution », même les colonnes atomiques des cristaux sont visibles quand les matériaux ont des orientations bien définies. Dans un microscope électronique, par rapport à un microscope optique, la lumière est remplacée par un faisceau

d’électrons, les lentilles optiques par des lentilles électromagnétiques et les images sont formées sur un écran fluorescent.

Un outil très puissant pour la caractérisation structurale est la diffraction électronique. Les clichés de diffraction sont spécifiques à chaque structure cristalline et peuvent être utilisés pour l’identification des cristaux. Il est possible de faire de la diffraction sur des régions ayant la grandeur d’une centaine de nanomètres, en utilisant des diaphragmes pour réduire la taille du faisceau électronique sur l’échantillon. À l’aide des diaphragmes mis dans le plan focal, où le cliché de diffraction se forme, on peut sélectionner soit le faisceau transmis soit un faisceau diffracté pour former l’image. Dans le premier cas on obtient une image en champ clair, et dans le deuxième on obtient une image en champ sombre.

À la figure 3.3 est esquissé un schéma avec le mécanisme de formation d’image dans un microscope électronique en transmission, ainsi que les différentes modes de fonctionnement du microscope.

Figure 3. 3 : Modes de fonctionnement d'un microscope électronique en transmission:

a) Mode Image: le plan image et l'écran fluorescent occupent des plans conjugués, et b) Mode Diffraction: le plan focal image de l'objectif est conjugué avec l'écran d'observation.

Sur le même écran fluorescent on peut former une image en champ sombre ou en champ clair ainsi que des clichés de diffraction; il faut simplement ajuster la distance focale de la lentille de l’objectif pour former dans le plan de l’écran, soit les images, soit les clichés de diffraction. Cela équivaut à passer du mode de fonctionnement image en mode diffraction. Quand le microscope fonctionne en mode STEM, le faisceau d’électrons est focalisé et balaye la surface de l’échantillon. Le contraste dans l’image vient de la variation du courant électronique (mesuré sur un détecteur annulaire placé sur l’axe du microscope, derrière l’échantillon) en fonction de la position du faisceau. Ce mode de fonctionnement est de plus en plus populaire parce qu’il permet d’obtenir une très bonne résolution et aussi un contraste Z (contraste de masse) ou contraste de diffraction en fonction de l’emplacement du détecteur.

Dans le mode haute résolution, le diaphragme de sélection d’aire est assez large pour laisser passer plusieurs faisceaux qui vont interférer entre eux: le faisceau transmis et un ou plusieurs faisceaux diffractés correspondant à certaines familles de plans. Les interférences créent une alternance de franges sombres et claires qui possèdent la même périodicité que les plans et les colonnes atomiques. Cette méthode présente toutefois d’importantes limites: la première est de satisfaire aux conditions d’orientation relativement strictes pour qu’il n’y ait pas superposition entre les projections de colonnes atomiques adjacentes et la seconde est que le microscope soit capable de résoudre les distances inter-atomiques concernées. Il y a aussi des inconvénients reliés à la microscopie électronique en transmission :

• la techniques est destructive parce qu’il faut amincir l’échantillon jusqu’à une épaisseur de moins de 100 nm pour que le faisceau d’électrons passe;

• la préparation d’un échantillon est un processus qui requiert beaucoup de temps et d’attention : il existe plusieurs méthodes de préparation; dans notre cas l’échantillon est aminci d’abord par polissage aux poudres de plus en plus fines et à la fin il est amené à l’épaisseur voulue par pulvérisation avec un faisceau d’Ar à 5 keV en angle rasant; • dans le processus de préparation il faut faire attention pour ne pas modifier les

propriétés de l’échantillon à caractériser; dans la méthode que nous avons utilisés, cela peut arriver facilement surtout dans la dernière étape de préparation qui consiste dans

une pulvérisation par faisceau ionique; il est ainsi possible de créer des défauts, et modifier la structure et les liens chimiques dans le matériau.

3.5.1 Diffraction des électrons

Comme dans le cas des rayons X, l’équation de Bragg régit la diffraction électronique inter-planaire d’un cristal. La configuration expérimentale est schématisée dans la figure 3.4. Ici, les angles θ sont très petites, permettant l’approximation, sinθ ~ θ et donnant :

L d

Dhkl =λ⋅ (3.5)

où d est la distance inter-réticulaire, λ, la longueur d’onde des électrons, D, la distance dans le plan focal entre le faisceau transmis et celui diffracté et L, la longueur entre le spécimen et le plan focal ou le patron de diffraction se forme. On appelle L, la «longueur de la camera», et sa grandeur dépend du pouvoir de focalisation des lentilles du microscope.

Figure 3. 4 : Schéma de la configuration pour obtenir le diagramme de diffraction.

La longueur d’onde des électrons dépend du voltage d’accélération V et est calculée avec l’équation 3.6, qui tient compte des effets relativistes:

(3.6) où h est la constante de Planck, e, la charge de l’électron, m0, sa masse au repos et c, la

vitesse de la lumière dans le vide. Pour des électrons, accélérés a 200 kV on obtient une valeur de 0,00251 nm.

L’allure d’un diagramme de diffraction est caractéristique de la nature de l’objet diffractant: • si l’objet est mono-cristallin, le cliché de diffraction est un ensemble de points représentant le réseau réciproque de la face observée. La structure cristalline et l’orientation peuvent théoriquement être déterminées à partir de deux diagrammes de diffraction obtenus pour deux inclinaisons de l’échantillon.

• si l’objet est polycristallin, les plans qui respectent la condition Bragg sont orientés dans toutes les directions, les points forment un continuum. Alors, on obtient un ensemble d’anneaux concentriques de diamètre 2D qui sont utiles pour en déduire les distances interréticulaires.

• si l’objet est amorphe, il n’y a pas de direction privilégiée et les électrons sont émis dans toutes les directions produisant un diagramme d’anneaux diffus.

3.5.2 Spectroscopie de dispersion en énergie (EDS)

En traversant le nuage électronique de l’atome, un électron incident cède une partie de son énergie aux électrons de l’atome par collision, et subit une diffusion inélastique (c’est à dire avec perte d’énergie). Sa trajectoire est alors légèrement déviée, mais surtout il perd de la vitesse. Suite à cette interaction, l’atome se trouve ionisé. La désexcitation se fait par des sauts électroniques, de façon à ce que l’atome retrouve sa configuration stable. L’atome restitue ainsi l’énergie acquise sous forme de photon X quand un électron retombe sur son orbitale initiale, mais aussi sous forme d’émission d’électrons Auger et ce, principalement, dans le cas des éléments légers.

Il est possible de mesurer les énergies des photons X réémis par l’échantillon pour en déterminer sa composition chimique (spectrométrie de perte d’énergie, EDS). Avec le

microscope en mode STEM on peut balayer une certaine surface, enregistrer les spectres de rayons X dans chaque point et ainsi créer une carte chimique du matériau.

Le spectre EDS de la figure 3.5 montre les positions énergétiques des pics les plus intenses des atomes dans un échantillon InP implanté au Mn et au P. Le Mn, le P et l’In sont détectés, comme attendu, ainsi que le C et le Si, ce qui n’est pas étonnant, si l’on tient comte du fait que le faisceau balaye une partie de la couche de C et d’époxy à la surface. À basses énergies il y a un pic très intense qui est produit par les rayons X émis par l’effet brehmsstrahlung (l’émission de rayons X quand les électrons sont freinés par les noyaux atomiques).

Figure 3.5: Spectre d’émission de rayons X pris dans la couche implantée près de la surface de l’échantillon b8e1.

Il est possible d’extraire des informations quantitatives concernant les concentrations des éléments chimiques, a partir des intensités des pics dans le spectre EDS. Pour cela on se sert de l’équation suivante :

(3.7) ou cA et cB sont les concentrations des éléments A et B, IA et IB, les intensités des pics

correspondants et kAB, un facteur de sensibilité qui dépend de la matrice.

Le rapport entre les intensités des pics de Mn et d’In est 0,035. Lorsqu’on calcule le rapport de concentrations moyennes, en tenant compte de la fluence de Mn implantée dans l’échantillon et en considérant que l’In forme 50 % atomiques de la couche, on obtient une

valeur de 0,031, qui est très proche de celle déterminé à partir du spectre EDS. Cela veut dire que le coefficient kMnIn est environ 0,9. Étant donné que le rapport entre les concentrations de P et d’In est 1, on obtient pour kPIn la valeur 0,8.

Dans ces calculs on doit prendre une concentration moyenne pour le Mn puisque la distribution de Mn est non-uniforme. Pour obtenir des résultats quantitatifs par spectrométrie EDS, il faut utiliser des échantillons standard ayant des concentrations connues des éléments chimiques, ou se servir d’autres techniques complémentaires (AES, SIMS, XPS). Ces méthodes permettent de calculer le facteur de sensibilité k et d’obtenir d’autres informations utiles. Finalement, les cartes chimiques du Mn, du In et du P détaillant la distribution spatiale des ces atomes à l’intérieur de la couche ont été produites en enregistrant les intensités des pics kα ou lα de chaque élément en fonction de la position du faisceau.