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ci-dessus, mettent également en relief l’impact de la modernisation de la technologisation

des dispositifs de surveillance dans la collecte de données et le renforcement des mesures de contrôle par les organes de sécurité (inclus la police et les services de renseignement). Nombre de chercheurs soutenant dans ce sens que, ces pratiques ciblent un groupe spécifique de migrants (entre autres, les travailleurs migrants, les clandestins/sans-papiers), et qu’elles répondent à une logique foncièrement sécuritaire (cf. travaux de D. Lyon, 2006, 2004, 2003, 2001 ; Bigo, 2003, 2005 ; Agamben, 1998 ; Bauman, 1998, etc.). En ce sens, nous dit (Lyon 2003 : 81), les mécanismes de contrôle interne s’inscrivent comme une stratégie « d’exclusion » et « d’inclusion » des migrants, au regard notamment des distinctions opérées entre les migrants « légaux » et « illégaux ». Ceyhan (2002) précisant pour sa part que, ces pratiques

175 participent à une catégorisation négative des migrants sous des labels divers et selon le contexte ; conditionnant ainsi leur intégration dans les sociétés d’accueil. Entre autres, l’étiquette de migrants « à risque ou sûrs » ; « bon et mauvais musulman » etc. Concernant les politiques d’intégration, celles-ci sont appréhendées et définies par l’UE comme des mesures « neutres » visant à régir les avantages accordés aux migrants. Nombre de chercheurs considérant toutefois que, la volonté permanente des gouvernements européens d'intégrer les migrants témoigne d’une vision nationaliste d’aboutir à l’avènement d’une société culturellement homogène ; dans le cadre duquel les migrants sont considérés comme un obstacle à la réalisation de cet objectif (Carrera 2006 ; Huysmans 2000 ; Wæver, 1993 ; Buzan et al. 1998 ; Blommaert et Verschueren 1993, 1998 ; Balibar 1994, etc.). Les politiques d'intégration, comme l’a si bien souligné Huysmans (2000 et 2006b), supposant qu’avant il existait une société homogène dont l’uniformité a été perturbée par l'arrivée des migrants. La logique sous-jacente de l'intégration, étant assimilée ici aux pratiques d'exclusion ; en ceci qu’elles opèrent une catégorisation péjorative des migrants considérés dans l’ensemble comme un risque et une menace pour la stabilité des communautés d'accueil, et qui par conséquent devrait être contenu ou éliminé. Certains tenants de l'Ecole de Paris développent des arguments similaires, et voient les politiques d’intégration comme un processus ayant participé à la construction de la figure du migrant en tant qu’ennemi et comme une menace pour la cohésion sociale et la stabilité des pays d’accueil (Bigo 2005 ; Tsoukala 2005 ; Carrera, 2006). Pour finir, nous avons les pratiques liées au refoulement des migrants qui témoignent d’un parallèle opéré la migration et la sécurité » ; en ceci qu’elles définissent les critères/modalités d’entrée et de séjour sur le territoire (Friedman, 2006). Le prisme sécuritaire des mesures implémentées dans le cadre de cette démarche recouvrant des manifestations diverses sur le terrain, liées antre autre à l’expulsion forcée des migrants clandestins et des demandeurs d'asile déboutés (Fekete 2009a). Cette logique est également manifeste, mais de manière plus subtile, dans les programmes de retour « volontaires » qui au

176 final visent à se défaire d’une catégorie spécifique de migrants et contribuer ainsi au mieux-être économique et social des communautés d’accueil.

Au regard de tous les éléments ci-dessus, le cadre analytique de la sécurité nationale et de la politique migratoire dans l’UE (applicable également au cas de figure des Etats-Unis) pourrait être t appréhendé comme suit (cf. Figure 9 ci-dessous).

Figure 9 Cadre analytique de la sécurité nationale et de la politique migratoire dans l’UE (et également applicable aux Etats-Unis)

Source : Réalisation d’auteure

Sécurité Militaire et économique

• Contrôle et sélectvité des flux par le biais de politiques migratoires restrives et au mieux des intérêts propres de l'UE (visas, immigration sélective, protection du marché du travail) • Compétitivité militaire et économique

• Sécurisation et Militarisation des frontières

Politique étrangère

• Externalisation des frontières européennes dans les pays tiers • Sous-traitance dans le contrôle et la gestion des flux

• Conditionnalité de l'aide au développement à des fins migratoires

• Conclusion d'alliances, de traités et d'accords internationaux divers

Sécurité intérieure ou

Publique

• Lutte conttre: le terrorisme; l'immigration clandestine; le trafic de drogue; La crimminalité internationale; traite et trafic des êtres humains etc.

177 D’un point de vue politique, on ne saurait parler d’une véritable politique commune européenne en matière d’immigration et d’asile. Comme l’avait si bien spécifié Robert Del Picchiadans son rapport d’information en date du 08 juin 2005 adressé au Sénat :

[…] La politique européenne d’immigration n’a aujourd’hui de « commune » que le nom ; parce qu’il n’existe pas de consensus suffisant entre les États membres sur le contenu même d’une politique européenne d’immigration (Sénat, Rapport n° 385, 8 juin 2005, Pp.25).

La résolution du Parlement Européen (PE) sur la politique commune d’immigration du 28 septembre 2006 (Pt. 22, P6_TA (2006) 0386), s’accordera également sur les mêmes conclusions que celles de Robert Del Picchia. Toutefois, comme l’a si bien constaté Labayle (2004), on peut reconnaitre d’un point de vue juridique, l’existence d’un embryon qui fait office de politique migratoire commune européenne ; mais qui cependant n’est pas facile à saisir du fait qu’elle se situe sans cesse à cheval entre les aires de compétence relevant des politiques nationales – pilier 3 – et celles communautaires – pilier 1 – (Labayle, 2005 : 11). Autrement dit, la politique européenne initiée dans le domaine de l’asile et de l’immigration nous donne l’image d’une politique communautaire graduelle – car en partie marquée par des

périodes transitoires ; segmentée - car se situant à cheval entre le 1er et le 3e pilier ; et

différenciée – notamment du fait de l’existence d’un régime dérogatoire accordé à certains

États comme c’est le cas pour la GB et le Danemark – ; mais surtout, aux compétences

partagées – si l’on s’en tient à la prééminence des logiques nationales. Parmi les indices attestant de l’émergence d’une politique migratoire commune, nous avons les critères basés sur : (1) sa cohérence, dont les fondements attestent du primat des enjeux migratoires dans l’agenda politique européen actuel, au point de déterminer ses orientations stratégiques dans ce domaine ; (2) le renforcement sans cesse graduel des compétences de l’UE en la matière ; (3) sa relative généralisation ; (4) son intensité variable du fait qu’elle se place sans cesse à

178 cheval entre son échelle fonctionnelle (normative, opérationnelle) et sectorielle (choix de secteurs bien précis) ; et pour finir, (5) sur le principe de solidarité mutuelle qui sous-tend l’action de l’UE dans le cadre de cette démarche. Cette solidarité mutuelle au sein de la communauté se traduisant notamment par le partage des charges financières liées à la mise en œuvre de la politique européenne d’immigration et d’asile (ex : la création des fonds spécifiques comme ceux du Fond Européen pour les Réfugiés à hauteur de 628 millions d’Euros – le Fond Européen d’Intégration des Pays Tiers (2007-2013) à hauteur de 625 millions d’Euros, Le Fond Européen de Retour (2008-2013) à hauteur de 676 million d’Euros, le Fond Européen pour les Frontières extérieures (2008-2013) à hauteur de 1820 millions d’Euros. Sans oublier les autres instruments financiers tels que MEDA ou le Fond Européen de Développement (Berramdane & Rossetto, 2009 : 42-51).

La construction de l’espace migratoire européen trouve ses fondements dans les principes relatifs à la libre-circulation des travailleurs européens édités en 1968 ; mais dont l’application ne sera cependant effective qu’en 2002 avec la définition d’un espace communautaire sans frontières pour l’ensemble des Européens. Cette dernière mesure sera renforcée par la décision du Conseil européen des chefs d’État et de gouvernement (créé en

1974), portant sur la fermeture des frontières septentrionales de l’Union afin de la préserver

des effets désastreux de la crise économique née du récent choc pétrolier. Ceci se fera par la cessation brutale de l’immigration de travail choisie et régulée avec les conséquences que l’on sait sur le statut migratoire des pays de l’Europe méridionale (Espagne, France, Portugal,

Italie, Grèce etc.) ; dont les statuts migratoires connaitront une évolution significative allant

de pays traditionnels d’émigration à celui d’immigration et de transit pour les migrants. En effet, la fermeture des frontières septentrionales de l’Europe va se faire contre l’intérêt des régions méridionales de l’Europe du Sud, qui malgré eux, vont devenir des pays-relais pour les migrants clandestins en raison notamment de leur proximité géographique avec le continent africain, de leur récent essor économique qu’ils devaient pour l’essentiel aux fonds

179 communautaires ; mais aussi et surtout, en raison des nombreuses lacunes de leur système juridique et institutionnel dans le domaine migratoire. Ceci s’explique par le fait que les pays de l’Europe méridionale, traditionnellement pourvoyeurs d’émigrants, ne disposaient pas jusqu’alors de structures législatives et encore moins d’institutions adaptées à leur nouveau statut migratoire : celui de pays d’immigration. Sous l’instigation de l’UE, différentes mesures seront mises en place sur le plan communautaire pour pallier les failles de leur système législatif et institutionnel en matière migratoire. Ce sera notamment le cas des pressions faites sur l’Espagne en proie aux flux migratoires Sahariens et Subsahariens, pour la création d’une direction Générale des migrations et d’un Bureau des Étrangers (en 1991) et d’une Commission Intérieure au Ministère des Affaires Étrangères (en 1992). Ajouté à cela l’instauration d’un système obligatoire de visa désormais imposé aux ressortissants maghrébins (1991) quelques années seulement après l’entrée de l’Espagne dans la CEE (1986) et son adhésion à l’espace Schengen. Une initiative qui sera largement soutenue par une politique de visa basée sur les quotas d’immigration situés à 20.000 émigrés par an ; sans compter les flux clandestins sans cesse croissants ainsi que ceux issus des différentes régularisations. Il convient toutefois de faire la remarque selon laquelle, les régulations massives des étrangers en situation irrégulière répondent avant tout aux objectifs nationaux de lutte contre le travail informel et le marché au noir (ex : Espagne, Italie) ; et aucunement à volonté de résoudre le problème de fond qui est le développement des pays du Sud. Il s’agit notamment de répondre à des besoins en main d’œuvre, procéder à des régulations massives sans toutefois procurer de manière définitive des certificats de résidence. Jusque dans les années 80, la question de l’immigration clandestine fera l’objet d’un traitement discrétionnaire. Ce n’est que face à l’urgence de juguler l’énorme pression migratoire qui s’exerce continuellement autour de ses frontières tant orientales que méridionales, que l’UE va prendre conscience de l’intérêt qu’il y a à mettre en œuvre une politique commune en matière d’asile et d’immigration. Les impératifs liés au bon fonctionnement de l’espace

180 Schengen constituant désormais un argument de poids en faveur de la mise en œuvre de celle-ci (C. Escoffier, 2006 : 39-41). L’influence de la question migratoire est également manifeste dans la définition des termes de l’Accord d’Amsterdam (1997) à qui l’on attribue le lancement effectif du processus de communautarisation des politiques européennes dans le domaine migratoire. Le poids des enjeux migratoires est aussi visible dans la vision que se fait l’UE des grands axes de sa coopération migratoire, telle qu’exprimée dans la déclaration de Vienne (1998). Sans oublier son implication majeure dans la déclaration de Tampere, dont le mérite sera de sensibiliser les dirigeants européens sur l’intérêt qu’ils auraient à adopter une politique commune en la matière et à l’intégrer par la suite dans le cadre de sa politique d’élargissement. On relève aussi la responsabilité des enjeux migratoires dans démarche européenne (initiée et soutenue par Romano Prodi) visant la création en 1999 de la Direction générale « Justice et Affaires Intérieure » d’une Unité Spéciale en charge des questions migratoires au sein de l’UE etc.

La volonté européenne d’aboutir impérativement à la construction d’une politique migratoire commune, se justifie donc par ses nombreuses inquiétudes en la matière. Parmi celles-ci, nous pouvons mentionner l’augmentation considérable des flux migratoires à destination d’Europe, notamment ceux en provenance d’Afrique, les aléas de la mondialisation qui obligent l’UE à adopter une politique migratoire sélective pour des besoins sans cesse renouvelés de compétitivité. À cela s’ajoute les préoccupations sur la réalité démographique de l’Europe qui l’obligent à trouver des palliatifs à sa population majoritairement vieillissante et par conséquent peu active. Sans oublier les enjeux liés au processus d’intégration et à la sécurité intérieure de l’UE (Nanga, 2011 : 49). De quoi assimiler les tentatives européennes de communautarisation et d’externalisation dans le domaine migratoire, à une stratégie de contrainte plus qu’à une démarche volontaire (Dumont, 2009 : 11). Des considérations qui visiblement nous éloignent des initiatives communautaires volontaristes qui ont accompagnées le processus de mise en place de l’espace Schengen ou

181 même menées aux conclusions de la Convention de Dublin (I et II) sur l’Asile et celles de Maastricht.

3.1. SÉCURISATION ET EXTERNALISATION DES POLITIQUES MIGRATOIRES EUROPÉENNES

À ce jour, l’UE a développé et opérationnalisé un large éventail de pratiques (politiques, outils politiques, cadres institutionnels et opérationnels inclus), qui abordent les questions migratoires sous l’angle du prisme sécuritaire. Dans leur grande majorité, les chercheurs s’accordent pour dire que la sécurisation des migrations s’est développée parallèlement à l’évolution du processus d'intégration de l'UE (voir Huysmans 2000, 2006b ; Kostakopoulou, 2011, 2001, 2000 ; Bigo, 2002). Principalement après la mise en œuvre du marché commun et l’application du régime Schengen, qui conjointement vont aboutir à la suppression des contrôles aux frontières intérieures de l’UE ainsi qu’à l’émergence des considérations définissant la migration comme un enjeu sécuritaire. Ceci étant lié à l'hypothèse selon laquelle, la suppression des frontières intérieures de l’UE aurait conduit à un « déficit sécuritaire » l’exposant aux menaces de toutes sortes, y compris celle relative à l’immigration irrégulière (Karanja 2000, 2008) ; la rendant ainsi plus soucieuse de la sécurité des frontières extérieures (Stalker 2002). Les politiques restrictives en matière de visas, la constitution de bases de données biométriques, les mesures strictes concernant l'asile, les pratiques de détention et d'expulsion arbitraires ainsi que la militarisation des contrôles aux frontières, constituant autant d’exemples des mesures appliquées dans ce sens. Auxquelles s’ajoutent également les pratiques récentes portant sur l’externalisation du contrôle des migrations dans les pays tiers ainsi que celles sur la conditionnalité migratoire de l’aide et de la coopération au développement. Le point commun à toutes ces mesures adoptées dans le champ migratoire, étant la perception des flux comme une menace à sa sécurité.

182 Les attaques terroristes survenues le 11 septembre 2001 (11/09) aux Etats-Unis, à Madrid (11 mars 2004), Londres (7 et 21juillet 2005) ; et plus récemment ceux de Paris (13 novembre 2015) et de Bruxelles (22 mars 2016), étant également considérées dans ce sens, comme un facteur majeur dans l’évolution du processus de sécurisation des migrations au sein de l’UE et parallèlement, de l’émergence d’un discours académique et politique dynamiques autour de cette question. D’aucuns s’accordant pour dire que, les attaques du 11/09 ont eu un impact profond sur l’approche et les politiques migratoires européennes concernant l’immigration (Baldaccini 2008 : 31) ; et ont contribué par conséquent, au renforcement du prisme sécuritaire de celles-ci (Brouwer et al. 2003 ; Brouwer, 2008, 2002 ; den Boer, 1998 ; den Boer et Monar, 2002 ; Bigo et Guild, 2003), ainsi qu’à l’établissement d’un lien direct entre sécurité et immigration, dans ce sens que « [T]his process has operationalized through

the « traversal » between policy areas, convergence of agendas, or the « security continuum », gloss over the distinctive dynamics of different parts of the political system »

(Boswell 2007 : 590). Les pratiques migratoires régissant les modalités d’'entrée, de séjour et de sortie des migrants, étant alors considérées dans ce contexte, comme des instruments majeurs dans la lutte contre le terrorisme au sein de l'UE (Spencer 2007 ; Leonard, 2010a 2010b, Crisp, 2003). Une tendance à l’européanisation des politiques migratoires européennes étant déjà certes visible dès les années 90, particulièrement en ce qui concerne le les questions relatives à l’asile et aux visas, et qui plus tard seront étendues au domaine du regroupement familial, de la migration irrégulière et de l’emploi (Geddes, 2003). Tandis que d’autres adoptent une approche historique et contextuelle qui prend en considération les faits antérieurs aux attaques du 11/09 et en rapport avec la sécurité et les migrations. L’intérêt d’une telle approche étant selon eux, d’appréhender aussi bien l’impact des attentats terroristes du 11/09 sur les politiques migratoires européennes, que les phases de ruptures et de continuités visibles dans ce processus. Ceux-ci mettant l’accent sur les objectifs européens en matière de « lutte » contre l'immigration irrégulière et de réduction du nombre de

183 demandeurs d'asile et des réfugiés implémentés dès les années 1970, et qui d’après eux, ont joué un rôle décisif dans le processus de sécurisation en question. L’examen de l’évolution des changements survenus dans ce domaine, leur faisant dire que le processus de sécurisation des politiques migratoires européennes, caractérisé par des pratiques préventives, d'exclusion et d’intolérance, a débuté bien avant les attaques du 11/09 dans l’objectif de contenir les migrants «indésirables» hors du territoire de l'UE; et que le terrorisme international n’a été qu’un catalyseur (mieux, un prétexte) pour justifier la mise en œuvre des pratiques plus strictes (Bigo, 2005; Huysmans, 2006, Boswell, 2007 ; Guiraudon, 2003). Par ailleurs, ils soulignent l’impact significatif du contexte économique et social des années 1970 marqué par la récession et des changements sociaux indésirables, qui selon eux, va impacter de manière significative sur l'immigration à grande échelle (Heisler et Layton-Henry 1993 : 157), suscitant ainsi l’émergence des considérations relatives à la sécurité sociétale, économique et politique. Le sentiment du déficit sécuritaire né de la suppression des contrôles aux frontières intérieures ayant pour sa part, situé l’enjeu relatif au contrôle des frontières extérieures au cœur de la pratique politique et bureaucratique européenne (Huysmans 2006 : 95).

On note l’existence d’une littérature abondante sur la sécurisation de l’immigration dans l’UE et l’externalisation des politiques y afférentes dans les pays tiers. Parmi les travaux les plus notoires réalisés dans ce sens, ceux de Bigo (1994) (2000) et (2002) ; Huysmans (2000) et (2006a/2006b) ; van Munster (2005a, 2005b) et (2009) ; Diez (2006) ; Guiraudon (2001) ; Ceyhan et Tsoukala (2003) ; Tsoukala (2005) ; Baldaccini et Guild (2007) ; Balzacq (2008) ; Chebel d’Appolonia et Reich (2008) ; Givens et al. (2008) ; and Winterdyk et Sundberg (2010). L’essentiel ces recherches se situant au niveau européen et portant principalement sur le développement des politiques et des discours en la matière, au regard de l’évolution du processus d’intégration de l’UE. Malgré leur précieuse contribution à l'élaboration des cadres théoriques et conceptuels sur l'analyse du processus de sécurisation des migrations dans l’UE, la littérature existante comporte cependant encore quelques limites.

184 Particulièrement en ce qui concerne l’élaboration d’un cadre méthodologique rigoureux permettant une «application empirique » de la théorie de la sécurisation. Ajouté à cela, leur focalisation exclusive sur l'UE qui cependant occulte les mécanismes fondamentaux situés à l’origine des processus de sécurisation des migrations dans les contextes nationaux et de leur évolution. Seul un nombre très limité de chercheurs enquêtant sur la sécurisation des migrations dans les Etats-membres, et encore moins de manière comparative. Les travaux les plus notoires menés dans ce sens, étant ceux sur l’Allemagne, voir Diez (2006a, 2006b) ; Diez et Squire (2008) et sur l’Espagne, voir Fernandez Bessa et Ortuno Aix (2006a) et Saux (2007). Sans oublier ceux de Bourbeau (2008) qui portent sur la sécurisation des migrations en France en comparaison avec le Canada ; et ceux de Kaya (2009) sur les cas de l'Allemagne, la France, la Belgique et les Pays-Bas, avec un accent particulier sur les questions de citoyenneté et d'intégration.

3.1.1. Les tout premiers « laboratoires »

Jusqu'à l’avènement du traité de Maastricht en 1992, les questions d'asile et d’immigration étaient traitées en dehors du cadre communautaire, et parallèlement soumis à la juridiction et au contrôle exclusifs des Etats membres. Ce qui n’excluait pas une collaboration en la matière. Les Etats membres ayant par ailleurs développé une coopération précoce dans ce sens, principalement dans le cadre de la mise en œuvre d’un marché commun, qui prévoyait la suppression des contrôles aux frontières intérieures de l'UE. Des mesures qui selon Monar (2001), peuvent être considérées comme étant les « premiers laboratoires » ayant conduit à l’émergence d’un Conseil « Justice et affaires intérieures » (JAI) en faveur d’une coopération et d’une politique commune sur les questions transfrontières, ainsi que l’intégration de l’agenda y relatif, au cœur de la politique européenne.

185 Le premier « laboratoire » voit le jour avec la création du Groupe TREVI lors du Conseil européen de Rome des 1-2 Décembre 1975, avec l’accord de douze pays européens dont l’Allemagne, la Belgique, le Danemark, l’Espagne, la France, la Grande Bretagne, la Grèce, l’Irlande, l’Italie, le Luxembourg les Pays Bas et le Portugal. Initialement, cette rencontre constituait une réponse à l’attaque terroriste de Munich survenue lors des Jeux Olympiques de 1972, et à l'émergence de groupes radicaux de gauche dans différents pays européens (ex : l’'Armée républicaine irlandaise au Royaume-Uni, le groupe Baader Meinhof et plus tard la RAF en Allemagne et le groupe Red Bridge en Italie), alimentés dans l’ensemble par les mouvements politiques anticapitalistes en réaction aux politiques