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4. Résultats de l’analyse

4.19 Mesures positives (Q 33)

Sur les 190 décisions analysées, seules 3 faisaient référence à des mesures positives (art. 3 al. 3 LEg).

Les 3 décisions ont été rendues dans le cadre d’une même affaire relative à la plainte d’un candidat à un poste de professeur à la faculté de médecine de l’Université de Genève54.

50 Selon l’article 336c al. 1 let. c, « après le temps d’essai, l’employeur ne peut pas résilier le contrat (…) pendant la grossesse et au cours des seize semaines qui suivent l’accouchement ».

51 HAUSAMMANN/DE PIETRO, Teilstudie 2, p. 52.

52 1 cas portait sur une discrimination directe et sur une discrimination indirecte. Il est donc compté dans les deux catégories.

53 HAUSAMMANN/DE PIETRO, Teilstudie 2, p. 42.

54 L’affaire a donné lieu à un arrêt du Tribunal fédéral 2P.277/2004 du 19 janvier 2006.

19 4.20 Type de discrimination (Q 37)

Sur 190 décisions, la répartition par type de discrimination est la suivante : Tableau n° 10 Type de discrimination

Nombre de cas (total supérieur à 190 car il peut y avoir plusieurs types par décision)

0 Aménagement des conditions de travail

0 Formation

Lors de l’évaluation de la loi sur l’égalité en 2004, les cas de discrimination salariale étaient les plus fréquents (154 cas sur 296). Venaient ensuite les affaires de harcèlement sexuel (57 cas sur 296). Les licenciements discriminatoires ne figuraient qu’en troisième position (50 cas sur 296, soit 16.8%)56. Le classement figurant dans le tableau n° 10 est différent puisque les licenciements discriminatoires figurent désormais, avec les discriminations salariales, en première position (67 cas sur 190, soit 33.3%

pour les deux types de discrimination). La présente étude met en évidence une augmentation des cas de licenciement discriminatoire, souvent liés à la maternité (voir supra 4.16 et 4.17).

Les discriminations à l’embauche sont rarement invoquées en justice (11 cas sur 190, soit 5.7%).

4.21 Congé de rétorsion (Q 38-39)

Sur 190 décisions, 12 portaient sur une plainte pour congé de rétorsion (art. 10 LEg).

Dans 6 cas, la personne licenciée demandait explicitement l’annulation de son congé (art. 10 al. 1 LEg).

Dans 7 cas, elle demandait un réengagement provisoire pour la durée de la procédure (art. 10 al. 3 LEg).

Dans 5 cas, une indemnité monétaire était demandée, à titre subsidiaire, dès le début du procès.

La présente étude n’a permis de recenser aucun cas dans lequel la partie employée aurait renoncé, au cours du procès, à poursuivre les rapports de travail et aurait demandé une indemnité (art. 336a CO) en lieu et place de l’annulation du congé (art. 10 al. 4 LEg).

Dans la quasi-totalité des cas à notre disposition (11 cas sur 12, soit 91.6%), l’existence d’un congé de rétorsion n’a pas été admise, pour différentes raisons.

Dans 5 cas, les tribunaux ont considéré que le congé reposait sur un « motif justifié » (au sens de l’art.

10 al. 1 LEg), comme une restructuration de l’entreprise ou des prestations de travail insuffisantes.

Dans 1 cas, la période de protection (prévue à l’art. 10 al. 2 LEg) était échue.

55 Ce chiffre n’inclut pas les 9 cas où l’action est intentée par l’auteur-e présumé-e du harcèlement sexuel.

56 Rapport CF évaluation LEg, 3070. Voir aussi STUTZ, Baustein 2, p. 12-13.

20 Dans une autre décision, la partie employée n’était pas parvenue à prouver qu’il y avait eu réclamation (au sens de l’art. 10 al. 1 LEg).

Enfin, à l’occasion de 2 décisions, rendues dans le cadre de la même affaire, les juges ont considéré que la partie salariée n’avait pas prouvé que le licenciement survenu trois semaines après une plainte pour discrimination était un congé de rétorsion. Les considérants de ces décisions laissent penser que le tribunal ignorait qu’un licenciement prononcé après une réclamation (au sens de l’art. 10 al. 1 LEg) est présumé être un congé de rétorsion. La partie employeuse peut renverser cette présomption en prouvant que la résiliation des rapports de travail reposait sur un motif justifié57.

4.22 Harcèlement sexuel (Q 40-42)

Sur 190 décisions, 3558 avaient pour objet une plainte pour harcèlement sexuel (art. 4 LEg). 23 d’entre elles provenaient du canton de Genève.

30 décisions donnent des informations sur la forme du harcèlement sexuel. Dans une majorité des cas (17), le harcèlement sexuel se manifeste à la fois par des paroles et par des gestes. Souvent (10 cas), le harcèlement sexuel revêt une forme uniquement verbale. En revanche, rares sont les situations où la partie demanderesse invoque avoir subi uniquement des gestes déplacés (3 cas).

L’existence d’un harcèlement sexuel a été retenue dans 14 cas sur 35 (40%). Dans 9 décisions, le caractère importun du comportement a été admis sur la base du ressenti de la demanderesse (subjectif) et d’une « personne raisonnable du même sexe » placée dans des circonstances similaires (objectif)59. Parfois, le harcèlement sexuel a été retenu uniquement sur la base d’un examen objectif (3 cas) ou sur la seule base du ressenti subjectif (2 cas).

Dans une nette majorité des cas (21 sur 35, soit 60%), la partie demanderesse n’est pas parvenue à établir l’existence d’un harcèlement sexuel (non soumis à l’allégement du fardeau de la preuve prévu à l’art. 6 LEg) et a été déboutée de ses prétentions y relatives. 4 décisions concluent à l’inexistence d’un harcèlement sexuel au motif que l’auteur présumé ne cherchait pas à obtenir des faveurs sexuelles.

Illustration n° 2 – Tribunal des prud’hommes du canton de Genève, jugement du 23 mai 2011, TRPH/331/2011, extrait du considérant 3b : « En l’espèce, le Tribunal retient que la demanderesse a échoué à démontrer qu’elle avait été victime de harcèlement sexuel. Il ne ressort en effet ni des pièces, ni des enquêtes que T se soit vu promettre des avantages, notamment de la part de B [supérieur hiérarchique de T], ou imposer des contraintes en vue d’obtenir d’elle des faveurs de nature sexuelle. Le seul élément à connotation sexuelle au dossier est un courriel reçu le 24 septembre 2009 de B. Ce message comportait une annexe contenant sept dessins représentant un sexe masculin en train d’être lavé, accompagnés de commentaires à connotation sexuelle (pièce 7 dem.). Si ce message était certes un envoi inapproprié dans le cadre d’une relation de travail, ce que la défenderesse [ici la partie employeuse] a d’ailleurs admis, il n’en demeure pas moins qu’il ne peut constituer à lui seul un acte de harcèlement sexuel. […] ».

Pourtant, l’intention d’obtenir des faveurs sexuelles – comme du reste la répétition du comportement – n’est pas une condition nécessaire à l’admission d’un harcèlement sexuel au sens de l’art. 4 LEg. Selon le Tribunal fédéral :

« Bien que les exemples cités dans cette disposition ne se réfèrent qu’à des cas d’abus d’autorité, la définition n’exclut pas d’autres actes portant atteinte à la dignité du travailleur et ne relevant pas d’un

57 Voir RIEMER-KAFKABERSCHLAG, N 13-14 ad art. 10 LEg.

58 Sans compter les 9 cas où l’action était intentée par un-e auteur-e présumé-e de harcèlement sexuel.

59 Voir LEMPEN, N 10-11 ad art. 4 LEg.

21 abus d’autorité, mais contribuant à rendre le climat de travail hostile, par exemple des plaisanteries déplacées ou l’affichage de photos indécentes »60.

Parmi les 35 décisions portant sur une plainte pour harcèlement sexuel, 3 concluaient que la partie employeuse avait fait preuve de la diligence nécessaire (au sens des art. 328 CO et 5 al. 3 LEg) et déboutaient la partie salariée de ses prétentions sans se prononcer sur l’existence d’un harcèlement sexuel.

En Suisse alémanique, un seul tribunal s’est demandé si la partie employeuse avait pris les mesures nécessaires pour prévenir la survenance du harcèlement sexuel invoqué par la partie salariée. Déjà lors de l’évaluation de la loi sur l’égalité, « la question de savoir si l’employeur a pris des mesures préventives n’apparaît que dans une minorité de jugements, et même dans ces cas, il n’est pas explicitement dit si une preuve de leur réalisation a été demandée et sous quelle forme »61. La présente étude révèle que cette question est principalement examinée dans le cadre de procédures pour licenciement abusif (art.

336 CO) ou injustifié (art. 337c CO) intentées par des auteurs présumés de harcèlement sexuel.

4.23 Maxime de procédure (Q 44)

Les procès fondés sur la LEg sont soumis à la maxime inquisitoire, en vertu de laquelle le tribunal établit

« les faits d’office » (art. 247 al. 2 let. a CPC, art. 12 PA), sans être lié par les allégations ou les offres de preuve des parties.

L’évaluation de la loi sur l’égalité réalisée en 2004-2005 avait montré que cette maxime n’était guère appliquée par les tribunaux cantonaux62. La présente étude a permis d’identifier seulement 24 décisions (sur 190) où le procès était régi par la maxime inquisitoire, pure (7 cas) ou sociale (17 cas)63. Toutefois, les jugements indiquent rarement quelle maxime procédurale a été appliquée. Dès lors, ces chiffres ne permettent pas de tirer des conclusions confirmant ou infirmant les résultats obtenus en 2004-200564. De même, cette étude ne permet pas de confirmer le constat, fait à l’époque de l’évaluation, selon lequel « certains juges semblent ignorer que cette maxime s’applique également là où l’allégement du fardeau de la preuve n’est pas applicable, soit dans les cas de discrimination à l’embauche et de harcèlement sexuel »65. Relevons cependant que, parmi les 24 cas où il a été possible d’établir que la maxime inquisitoire avait été appliquée, aucun ne portait sur une discrimination à l’embauche ou un harcèlement sexuel.

4.24 Allègement du fardeau de la preuve (Q 46-48)

108 décisions donnent des indications relatives au fardeau de la preuve.

Dans 50 cas (46.2%), la partie demanderesse, qui doit prouver les faits dont elle se prévaut (art. 8 CC), n’a pas bénéficié de l’allègement du fardeau de la preuve prévu par l’article 6 LEg.

60 Arrêt du Tribunal fédéral 4C.289/2006 du 5 février 2007, consid. 3.1, qui renvoie notamment à l’ATF 126 III 395, consid. 7b/bb.

61 Rapport CF évaluation LEg, 3077. Voir aussi FREIVOGEL, p. 1349.

62 Rapport CF évaluation LEg, 3075.

63 Pour plus d’explications sur la maxime inquisitoire pure ou sociale (atténuée) en procédure civile, voir DIETSCHY, p. 137-150.

64 Voir aussi KÄLIN/LOCHER, Rapport de synthèse, p. 63.

65 Rapport CF évaluation LEg, 3075.

22 L’absence d’allègement s’explique, dans la plupart des cas (37), par le fait que les plaintes portaient sur des actes de harcèlement sexuel ou des refus d’embauche discriminatoires, qui n’entrent pas dans le champ d’application de l’article 6 LEg.

Dans 13 cas, toutefois, l’allègement du fardeau n’a pas été appliqué alors qu’il aurait dû l’être. 5 cas avaient pour objet une discrimination salariale, couverte par l’article 6 LEg. Dans 8 cas, l’absence d’allégement est due au fait que le licenciement discriminatoire a été examiné sous l’angle du Code des obligations uniquement et non de la LEg, pourtant applicable d’office comme lex specialis (infra 4.36) Dans 58 décisions (sur 108, soit 53.8%), le fardeau de la preuve a été allégé.

Dans la majorité des cas (31 sur 58, soit 53.4 %), la vraisemblance n’a pas été admise et la demande a été rejetée. Dans moins de la moitié des cas (27 sur 58, soit 46.6%), la première étape de la vraisemblance a été franchie avec pour résultat un renversement du fardeau de la preuve, à charge de la partie employeuse. Dans 10 cas, celle-ci est parvenue à apporter la preuve d’un motif objectif justifiant la différence de traitement. La discrimination n’a donc pas été prouvée. Dans 17 cas (sur 58, soit 29.3%), aucun motif objectif n’a été retenu et la discrimination a été prouvée. La preuve d’une discrimination fondée sur le sexe reste ainsi difficile même dans les cas où l’allégement prévu à l’article 6 LEg est appliqué.

Tableau n° 11 Allègement du fardeau de la preuve (art. 6 LEg)

A l’instar de ce qui avait été souligné lors de l’évaluation de la loi sur l’égalité66, nous constatons que la plupart des jugements ne distinguent pas clairement les deux étapes du raisonnement relatif à l’allégement du fardeau de la preuve, à savoir l’étape de la « vraisemblance » (indices à apporter par la partie employée) et celle du « motif objectif justificatif» (preuve complète à charge de la partie employeuse)67. La formation du jugement en deux phases permet pourtant de garantir l’application des différents degrés de preuve exigibles68.

4.25 Actions en prévention, cessation et constatation (Q 49 et 50)

Les actions en prévention, cessation et constatation de l’atteinte prévues à l’article 5 alinéa 1, let. a-c LEg, sont peu fréquentes.

Sur les 190 décisions analysées, seul 1 cas portait sur une action en prévention (interdiction d’un licenciement). 3 cas avaient pour objet une action en cessation fondée sur la LEg (art. 5 al. 1 let. b), dont 2 ont permis d’obtenir la réintégration de la personne licenciée. 11 cas mentionnaient une action en

66 Rapport CF évaluation LEg, 3075-3076.

67 Un constat similaire est fait dans les Etats membres de l’Union européenne: GOLDENMAN, p. 24-25.

68 Voir WYLER, N 12 ad art. 6 LEg.

23 constatation, dont 5 émanaient d’organisations, non habilitées à agir en paiement d’une indemnité (art.

7 LEg).

4.26 Action en paiement du salaire dû (Q 51-56)

Sur 190 décisions analysées, 67 avaient trait à une plainte pour discrimination salariale. 8 d’entre elles étaient rendues suite à des actions d’organisations en constatation de la discrimination (art. 7 LEg).

59 avaient pour objet une action en paiement du salaire dû (art. 5 al. 1. let. d LEg) intentée par une (53 cas) ou plusieurs (6 cas) personnes. Dans 45 cas, la somme demandée était indiquée dans le jugement et varie entre CHF 4'000.- et CHF 409'000.- (pour une personne).

Sur 59 décisions, 45 (soit 76.3%) étaient défavorables à la partie employée. 14 (soit 23.7%) étaient favorables à la partie employée qui, sous réserve d’une exception69, obtenait un montant se situant entre CHF 7'046.- et CHF 35'898.-, avec intérêts.

4.27 Indemnité pour discrimination à l’embauche (Q 57-62)

En cas de refus d’embauche discriminatoire, la loi sur l’égalité prévoit une indemnité spéciale (art. 5 al.

2 et 13 al. 2 LEg), qui ne peut excéder un montant correspondant à trois mois de salaire (art. 5 al. 4 LEg).

Au total, seules 11 décisions (dont 3 relatives à une même affaire) avaient pour objet une plainte individuelle pour discrimination à l’embauche. Dans 7 décisions, le montant de l’indemnité demandée était connu. Il s’élevait, en moyenne, à CHF 42'270.-

Dans 6 cas (sur 11), la partie employée avait été déboutée de ses prétentions relatives à une discrimination à l’embauche.

Dans 3 cas, la partie demanderesse s’est vu allouer une indemnité, dont le montant moyen s’élève à CHF 7'762.- Les 2 autres cas avaient été conciliés.

4.28 Indemnité pour licenciement discriminatoire (Q 63-69)

La loi sur l’égalité prévoit une indemnité (punitive et réparatrice) pour licenciement discriminatoire (art.

5 al. 2 LEg) qui, à l’instar de celle prévue par le Code des obligations en cas de licenciement abusif (art.

336a CO), doit être fixée compte tenu de toutes les circonstances et est plafonnée à six mois de salaire (art. 5 al. 4 LEg).

Une indemnité a été demandée dans 59 décisions (sur les 67 relatives à un licenciement discriminatoire, voir supra 4.20). L’action était toujours intentée par une seule personne. Dans 39 cas, le montant demandé était indiqué. Il correspondait, en moyenne, à 5.7 mois de salaire (à savoir presque le maximum prévu par la loi).

Dans 33 cas (sur 59), aucune indemnité pour licenciement discriminatoire n’a été octroyée. Dans 26 cas, une indemnité a été allouée. Elle s’élevait, en moyenne, à CHF 12'868.- et correspondait à 3.1 mois de salaire.

40 cas précisent la ou les dispositions légales sur la base desquelles la prétention au versement d’une indemnité pour licenciement a été analysée par le tribunal.

69 Voir www.gleichstellungsgesetz.ch, BS/Fall 49 (Diskriminierende Nichtzahlung einer Abgangsentschädigung für eine Personalfachfrau).

24 Tableau n° 12 : Sur quelles bases légales se fonde le tribunal lorsqu’il examine la demande d’indemnité relative à un licenciement discriminatoire ?

Nombre de cas (n = 40) Bases légales discriminatoire a été analysée sous l’angle du Code des obligations et non sous l’angle de la loi sur l’égalité, qui aurait pourtant dû être appliquée comme loi spéciale. Dans 4 cas, l’analyse sur la seule base du Code des obligations a eu pour conséquence la non-application de l’allègement du fardeau de la preuve prévu à l’article 6 LEg (voir supra 4.15) 70.

4.29 Indemnité pour harcèlement sexuel (Q 70-73)

La loi sur l’égalité prévoit une indemnité pour harcèlement sexuel (art. 5 al. 3 LEg) d’au maximum six mois de « salaire moyen suisse ». En pratique, toutefois, les tribunaux prennent comme base de calcul le « salaire médian suisse », moins élevé que le salaire moyen. En 2014, le salaire médian suisse s’élevait à CHF 6'427.-71 (soit CHF 38'562.- pour six mois), alors que le salaire moyen suisse était de CHF

7'308.-72 (soit CHF 43'848.- pour six mois).

Une indemnité pour harcèlement sexuel (art. 5 al. 3 LEg) a été demandée dans 30 décisions (sur les 35 recensées sur ce thème). Dans 3 cas, la partie demanderesse faisait valoir uniquement son droit à la réparation du tort moral (art. 49 CO), sans évoquer une indemnité pour harcèlement sexuel (art. 5 al. 3 LEg).

La somme demandée sur la base de l’article 5 alinéa 3 LEg était indiquée dans 24 décisions. Les prétentions fondées sur cette disposition se sont élevées, en moyenne, à CHF 25'535.- (soit entre 4 et 5 mois de salaire médian suisse). La plupart du temps, le montant requis paraît avoir été déterminé en fonction du salaire effectif de la demanderesse et non sur la base du salaire moyen ou médian suisse.

Dans 23 cas (sur 30, soit 76.6%), aucune indemnité n’a été allouée sur la base de l’art. 5 al. 3 LEg.

Dans 7 cas (23.4%), le tribunal a alloué une indemnité qui s’élevait, en moyenne, à CHF 13'464.- (soit un peu plus de 2 mois du salaire médian suisse).

70 Un constat similaire avait été fait lors de l’évaluation de la loi sur l’égalité, cf. Rapport CF évaluation LEg, 3077. Voir aussi RAMSEYER/MÜLLER, p. 1338-1339; FREIVOGEL, p. 1350.

71 Office fédéral de la statistique > Trouver des statistiques > Travail et rémunération > Salaires, revenu professionnel et coût du travail > Niveau des salaires – Suisse.

72 Selon les informations données par l’Office fédéral de la statistique, section Salaire et conditions de travail, le 27 avril 2017.

25 4.30 Dommages-intérêt et tort moral (Q 74-81)

La loi sur l’égalité réserve les « droits en dommages-intérêts et en réparation du tort moral » (art. 5 al.

5 LEg).

Des prétentions en dommages-intérêts ont été formulées dans 14 décisions. Parmi ces décisions, seules 3 (dont 2 relatives à la même procédure) allouent des dommages-intérêts (environ CHF 5'000.- pour chacune des deux affaires).

La réparation d’un tort moral (art. 49 CO) lié à une discrimination est demandée dans 29 cas.

Seul 1 jugement alloue une indemnité pour tort moral. Dans cette affaire, le tribunal n’a pas retenu l’existence du harcèlement sexuel allégué mais a jugé qu’il y avait eu un harcèlement psychologique justifiant l’octroi d’une indemnité pour tort moral à hauteur de CHF 9'000.-

4.31 Cumul d’indemnités (Q 82)

Les tribunaux font rarement usage de la possibilité de cumuler les diverses indemnités prévues par la LEg. Une telle pratique restrictive est sans doute due, en partie, à l’issue – souvent défavorable à la partie demanderesse – des actions fondées sur cette loi (voir infra 4.35).

Sur les 190 décisions, seules 3 procèdent à des cumuls.

2 décisions (rendues dans le cadre de la même affaire) octroient à la partie employée le paiement du salaire dû (art. 5 al. 1 let. d LEg) ainsi que des dommages-intérêts (art. 5 al. 5 LEg).

Dans un autre cas, la partie demanderesse a obtenu le paiement du salaire dû (art. 5 al. 1 let. d LEg) et une indemnité pour licenciement discriminatoire (allouée sur la base de l’art. 336a CO).

Dans 1 cas, l’indemnité pour licenciement discriminatoire (art. 5 al. 2 LEg) a été demandée en sus de celle pour harcèlement sexuel (art. 5 al. 3 LEg). Le Tribunal n’a toutefois alloué que l’indemnité pour harcèlement sexuel. En effet, le licenciement signifié durant la grossesse était nul au sens de l’article 336c al. 2 CO et ne pouvait donc pas donner droit à une indemnité pour licenciement discriminatoire.

Enfin, dans 1 cas de harcèlement sexuel (avéré), un tribunal a refusé d’octroyer une indemnité pour tort moral (art. 49 CO) en plus de l’indemnité pour harcèlement sexuel (art. 5 al. 3 LEg), au motif que l’atteinte à la personnalité n’était pas suffisamment grave.

Illustration n° 3 – Tribunal du travail de Zurich, 23 février 2009, ZH AN07841 : Mme T., employée dans un Bar-Gelateria, est harcelée sexuellement durant des semaines par deux collègues de travail. L’employeur n’ayant pris aucune mesure pour prévenir le harcèlement sexuel et y mettre fin, le Tribunal le condamne au versement d’une indemnité d’environ 2.5 mois de salaire moyen suisse (art. 5 al. 3 LEg). En revanche, le Tribunal considère que l’atteinte à la personnalité de T. n’est pas suffisamment grave pour justifier l’octroi d’une indemnité pour tort moral en sus de l’indemnité pour harcèlement sexuel. En effet, il s’agissait avant tout d’un harcèlement verbal. T.

n’avait été harcelée physiquement « que » par des attouchements sur la poitrine et le derrière. En outre, le médecin-traitant de T. avait uniquement constaté que ces agressions avaient causé une atteinte à la santé sans donner des indications quant à l’intensité de l’atteinte.73

4.32 Rapport avec d’autres prétentions de droit du travail (Q 13)

Souvent (75 cas), la partie qui se plaint d’une discrimination au sens de la LEg fait valoir des prétentions uniquement fondées sur cette loi.

73 Résumé sur www.gleichstellungsgesetz.ch, Fall ZH/200 (Sexuelle Belästigung einer Angestellten in Gelateria).

26 Toutefois, il est aussi fréquent (79 cas) que la plainte pour discrimination s’accompagne d’autres prétentions de droit du travail (généralement liées à la résiliation des rapports de travail), ce qui a des conséquences sur les frais de justice (voir infra 4.33).

4.33 Frais de justice et dépens (Q 83-85)

Dans les litiges fondés sur la LEg, le principe de la gratuité de la procédure au niveau cantonal a pour conséquence qu’il n’est perçu de frais judiciaires (art. 95 al. 2 CPC) ni dans la procédure de conciliation (art. 113 al. 2 let. a CPC), ni dans la procédure au fond (art. 114 let. a CPC, art. 13 al. 5 LEg).

176 décisions évoquent la question des frais judiciaires (art. 95 al. 2 CPC). Dans la grande majorité des cas (148 sur 176, soit 84%), les parties ont été dispensées du paiement de ces frais.

Dans 28 cas (16%), toutefois, les frais ont été mis à charge d’une partie. La perception de frais judiciaires s’explique généralement par le fait que l’action n’avait pas uniquement pour objet des prétentions fondées sur la LEg (voir supra 4.32).

Par ailleurs, le principe de la gratuité de la procédure n’empêche pas que la partie qui succombe au procès puisse être condamnée au versement de dépens (art. 95 al. 3 CPC).

La présente étude a identifié 42 décisions allouant des dépens à la partie qui avait gagné le procès.

Dans 23 cas (sur 42, soit 56%), les dépens avaient été mis à charge de la partie salariée (déboutée de ses prétentions). Le montant des dépens à verser par cette dernière variait entre CHF 1'200.- et

Dans 23 cas (sur 42, soit 56%), les dépens avaient été mis à charge de la partie salariée (déboutée de ses prétentions). Le montant des dépens à verser par cette dernière variait entre CHF 1'200.- et