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7.2 Métallisation du moule organique à l’interface air-eau

7.2.2 Diffraction et réflectivité des rayons x et fluorescence

7.2.2.1 Mesures de GISAXS et suivi in situ de la croissance de l’argent

la couche de copolymères, nous avons réalisées, in situ, des mesures de GISAXS à l’interface air-eau. Le film de copolymères est déposé à l’interface d’une solution aqueuse à pH = 9 contenant des ions argent avec une concentration de 10−4 mol/L. Celui-ci est irradié une première fois à

Lors de cette expérience, nous avons installé un détecteur de fluorescence x directement sur le capot de la cuve de Langmuir. Cela nous a permis de suivre in situ l’évolution de la densité des ions d’argent proche de l’interface via l’irradiation du faisceau de rayons x, en mesurant la fluorescence x des atomes Ag (figure 7.14).

Figure 7.14: Suivi in situ de l’évolution temporelle de la quantité des atomes d’argent à l’interface par la mesure de la fluorescence de l’atome d’argent (à 3.1 Kev).

La figure 7.14 montre l’accroissement de l’intensité de la fluorescence de l’atome argent en fonc-tion du temps à aire moléculaire constante correspondant à une pression de surface de 0.5 mN/m. On remarque, qu’après 10 minutes d’irradiation du système par les rayons x, l’intensité de la fluorescence x est constante. Nous pouvons donc considérer que tous les ions argent présents dans la zone irradiée sont réduits sous forme d’argent métallique.

Seules les courbes de GISAXS obtenues après la saturation de l’intensité du spectre de fluores-cence d’argent seront présentées dans cette partie. Ce choix est motivé par le fait que, lors de cette expérience, nous avons utilisé un détecteur linéaire 1D qui mesure l’intensité I(Qz) pour un seul Qxy. L’acquisition d’un spectre 2D (Qxy , Qz) nécessite donc un balayage angulaire. Le temps caractéristique d’un tel balayage, lors de nos mesures, était d’environ 15 à 20 minutes. Si, lors de l’acquisition, l’échantillon avait physiquement évolué, la mesure aurait donc été faussée puisque les différents points auraient été mesurés à des temps différents.

Lors des mesures sur les échantillons irradiés, les intensités I(Qxy) des spectres, intégrées selon (QZ) de QZ = 0 jusqu’à 0.8 Å−1

, sont très supérieures à celles des moules organiques, présentées dans le chapitre précédent (6.1.2.2.2). L’augmentation de cette intensité s’explique par le très fort contraste électronique des nanostructures d’argent par rapport à celle des éléments légers constituant les copolymères. Nous avons donc tout d’abord cherché à estimer les contributions respectives de la partie organique et des objets inorganiques à l’intensité diffusée à l’interface air-eau. Pour une comparaison rigoureuse, il aurait fallu pouvoir mesurer l’intensité de la couche

de copolymères en présence d’ions argent, ce qui n’est pas possible, du fait de la réduction des ions d’argent par le faisceau de rayons x. Nous avons alors choisi de comparer nos spectres avec l’intensité diffusée par le moule organique sans ions argent dans la sous-phase. Bien que les conformations des chaînes de copolymères soient différentes (voir partie 7.1.2), les intensités doivent être du même ordre de grandeur car les pré-facteurs de contraste sont les mêmes. Ces intensités diffusées par la couche de copolymères étaient d’ailleurs du même ordre de grandeur pour toutes les pressions de surface sans ions argent.

Sur la figure 7.15, nous représentons deux spectres de GISAXS d’une monocouche de copolymères à pH = 9, comprimée à une même pression de surface de 3 mN/m, sans (courbe bleue) ou en présence d’ions argent réduits (courbe grise).

Figure 7.15: Spectres de GISAXS d’une monocouche de copolymères à pH = 9, comprimée à une même pression de surface de 3 mN/m, sans (courbe bleue) ou en présence d’ions argent réduits (courbe grise).

On constate que l’intensité diffusée de la courbe grise est supérieure d’environ 5 décades à celle de la courbe bleue. Compte-tenu de cette grande différence d’intensité, on peut considérer que la contribution de la partie organique est négligeable, et que l’on observe uniquement le signal de la partie inorganique du système.

Sur la figure 7.16a, nous présentons les différentes courbes de GISAXS réalisées sur une mono-couche donnée de copolymères, déposée sur une sous-phase aqueuse à pH = 9 contenant des ions argent, et comprimée à différentes pressions de surface. Cette couche est initialement irradiée par le faisceau rayons x à une faible pression de surface de 0.5 mN/m.

(a) (b)

Figure 7.16: Spectres de GISAXS d’une monocouche de copolymères à pH = 9 en présence d’ions argent réduits obtenus à différentes pressions de surface. (a) à Q = 0.5 mN/m, à

Q = 10 mN/m et à Q = 3 mN/m (b) à Q = 0.5 mN/m et ajusté avec le facteur de forme de boules poly-disperses dans l’approximation de Born.

La forme de la courbe obtenue à la pression de 0.5 mN/m est caractéristique d’un facteur de forme de nanostructures 3D : elle présente un plateau de Guinier à petits vecteurs de diffusion (Qxy), suivi d’une cassure de pente et d’une décroissance en Q−4 à grands Qxy. Le spectre ne présente pas les extinctions caractéristiques d’un facteur de forme de sphères. Cette absence ne pouvant s’expliquer par la résolution expérimentale, l’allure du spectre peut donc correspondre soit à celle d’objets 3D non parfaitement sphériques, soit à celle de sphères présentant une cer-taine poly-dispersité en taille.

Nous avons choisi d’ajuster cette courbe par le facteur de forme de sphères poly-disperses, dans l’approximation de Born, avec une distribution en taille lognormale. Les résultats donnent un rayon de sphères de r0 = 25 Å avec un sigma de 0.3, soit une valeur moyenne de rayon rmoyen = 28.5 Å (figure 7.16b).

Ce résultat montre que les structures métalliques formées par irradiation au voisinage du moule organique sont des colloïdes d’argent de quelques nanomètres. A ce stade, il n’est pas possible de déterminer s’ils sont formées d’argent métal pur ou d’oxyde d’argent. Par ailleurs, compte-tenu des résultats de SNR, il est probable que ces colloïdes soient situés sous la couche de copolymères effondrée à l’interface.

Lorsque l’on comprime le film jusqu’àQ= 10 mN/m, on remarque que la courbe obtenue présente des fluctuations importantes en intensité dans la gamme de Qxy étudiée (voir figure 7.16a). A cette pression, le film de copolymères est extrêmement rigide (voir partie isotherme 7.11). Il est probable que ce film soit formé de domaines constitués de colloïdes d’argent qui se réorganisent au cours du temps. Il est donc possible que le nombre de domaines irradié fluctue au cours du

temps, ce qui donne lieu à ces fluctuations d’intensité.

Néanmoins, bien que celle-ci soit bruitée, sa forme ressemble fortement à celle obtenue à faible pression de surface 0.5 mN/m. En revanche, on remarque que l’intensité diffusée a diminué d’un facteur 2 après la compression du film. Cela peut s’expliquer par une expulsion très importante d’une partie des nanostructures métalliques, de l’interface vers la sous-phase, sous l’effet de l’augmentation de la pression de surface. En effet, si la taille et le contraste des nanostructures n’évoluent pas, l’intensité est directement proportionnelle au nombre d’objets à l’interface. Ainsi s’il n’y avait pas eu d’expulsion vers la sous-phase, l’intensité aurait augmenté puisque la densité d’objets dans le plan aurait été supérieure.

Cette hypothèse d’expulsion d’une partie des nanostructures métalliques lorsque l’on comprime le film à 10 mN/m, est en accord avec les résultats des mesures de réflectivité de neutrons (SNR) montrant qu’une partie des chaînes de PS et de PAA plongent sous l’interface.

Après la décompression de la couche à Q = 3 mN/m, on retrouve de nouveau une courbe non bruitée comme celle obtenue à Q = 0.5 mN/m (courbe grise sur la figure 7.16a). Ce résultat confirme que les fluctuations observées à haute pression sont directement liées à la rigidité du film à l’interface. Cette courbe ressemble également au facteur de forme d’objets 3D. En effet, elle est caractérisée par un plateau de Guinier, suivi d’une cassure de pente avec une décroissance en Q−4 (figure 7.17). On remarque que cette cassure de pente est décalée vers les petits Qxy, par rapport à celle observée à 0.5 mN/m et que l’intensité du plateau est similaire à celle mesurée à 10 mN/m. Ces résultats indiquent, d’une part, que la taille des objets à l’interface augmente, et d’autre part, que l’expulsion des nanostructures sous l’effet de la pression de surface est définitive. Aux plus petits Qxy, l’intensité présente une remontée quand I(Qxy) tend vers 0, ce qui est la signature d’une agrégation des nanostructures formées par irradiation dans le plan, probablement induite par la compression de la monocouche.

Figure 7.17: Spectre de GISAXS d’une monocouche de copolymères à pH = 9 en présence d’ions argent réduits et comprimée à Q = 3 mN/m. Elle est ajustée avec le facteur de forme de boules poly-disperses dans l’approximation de Born.

La figure 7.17 montre l’ajustement du spectre GISAXS obtenu à 3 mN/m par un facteur de forme de sphères avec une poly-dispersité lognormale, dans l’approximation de Born, donnant un rayon r0 de 30 Å et un sigma de 0.3, soit une valeur moyenne de rayon moyen rmoyen = 35 Å. L’augmentation de la taille des objets à l’interface peut être due à différents mécanismes. Parmi les scénarii possibles, on peut supposer que lorsque nous continuons à irradier avec le faisceau de rayons x une zone donnée de l’échantillon, cela peut induire un accroissement de la taille des colloïdes adsorbés sous la surface, ou alors, qu’au fur et à mesure, ces derniers coalescent et forment des objets plus gros. A la fin de ce chapitre nous discuterons de manière plus détaillée des interprétations possibles.

Il est amusant de mentionner qu’à la fin de chaque expérience de rayons x, nous observons un fil métallique flottant à l’interface air-eau (voir figure 7.18a). Ce dernier représente l’empreinte du faisceau incident des rayons x qui a réduit les ions argent adsorbés au voisinage de la couche de copolymères. Nous avons déposé ce fil sur un substrat solide par transfert Schaefer afin de le caractériser par microscopie AFM (voir figure 7.18b).

Cette image AFM réalisée sur une zone du fil montre la présence d’agrégats de forme sphérique or-ganisés en phase bi-continue. Ces agrégats correspondent probablement aux colloïdes métalliques formés après la réduction des ions argent, comme le montrent les mesures de GISAXS décrites ci-dessus. Notons que cette organisation en phase bi-continue a été précédemment observée sur une monocouche de copolymères formée à basse pression (à 3.8 mN/m) et à pH = 9 sans la présence d’ions argent (voir figure 6.40a). Nous pouvons alors déduire que cette organisation est liée au copolymère et non pas à la formation des colloïdes d’argent. Toutefois, nous remarquons

que la taille des domaines de cette phase a augmenté en présence des colloïdes métalliques. Cette étude par microscopie AFM nous permet de constater que la structure dans le plan des chaînes de copolymères n’a pas été influencée par la présence d’ions argent bien que la structure perpendiculaire au plan ait varié, comme le montrent les mesures de réflectivité de neutrons. Par ailleurs, cette étude met en évidence la présence de nanostructures métalliques de forme sphérique, ce qui est en accord avec les mesures GISAXS.

Figure 7.18: (a) Photo du fil métallique formé à l’interface air-eau dans la zone irradiée. (b) Image AFM (3 µm*3 µm) de topographie en milieu liquide du fil métallique déposé sur un substrat solide.