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MESURES ET ACTIONS DE SANTE PUBLIQUE DESTINEES A DES GROUPES SPECIFIQUES

L’analyse des données actuelles sur la problématique de la carence en fer au cours de la grossesse, en France, comme dans l’ensemble des pays industrialisés, met en évidence :

1. que l’alimentation habituelle ne permet pas de couvrir les besoins physiologiques en fer

particulièrement élevés au cours des deux derniers trimestres de la grossesse, et ce d’autant plus que la majorité des femmes enceintes débutent leurs grossesse avec des niveaux de réserves en fer faibles ou nuls,

2. la fréquence élevée des carences en fer au cours de la grossesse, qui concerne plus de

2/3 des femmes enceintes, et leur intensité entraînant une anémie ferriprive chez 20 à 30 % d’entre elles,

3. les conséquences néfastes des anémies ferriprives sur le déroulement de la grossesse

et l’issue de la gestation (à la naissance et à distance) et les possibles effets délétères de la carence en fer en elle-même, en dehors de tout retentissement sur l’hématopoïèse,

4. la difficulté de prédire précocement (notamment par un dosage unique de ferritine

sérique) le risque de carence en fer et d’anémie ferriprive en fin de grossesse,

5. l’efficacité et l’innocuité de la supplémentation en fer précoce des femmes enceintes pour

maintenir un statut en fer adéquat chez la mère et l’enfant tout au long de la grossesse et dans les suites de l’accouchement.

Dans ce contexte, il apparaît souhaitable de proposer:

une supplémentation (systématique ou orientée) en fer des femmes enceintes (à des

doses de 30 à 50 mg de fer élément par jour en fonction du contexte clinique plus ou moins évocateur de facteurs de risque associés), prescrite dès le début de la grossesse, à prendre au cours des repas (pour diminuer le risque d’effets secondaires),

un dépistage de l’anémie par la mesure du taux d’hémoglobine dès le début du 2ème

trimestre de la grossesse, permettant en cas d’anémie de proposer une supplémentation martiale de l’ordre de 60 à 120 mg de fer/j (selon l’intensité de l’anémie),

des conseils nutritionnels tout au long et dans les suites de la grossesse : consommer

des aliments riches en fer, tels que les légumes secs et légumineuses (lentilles, poix, haricots secs), abats et viandes,... et une quantité adéquate d’aliments contenant du fer héminique de bonne biodisponibilité (viande, poisson), et des activateurs de l’absorption du fer non héminique (sources de vitamine C comme les fruits et légumes, viandes, poissons), et éviter la

consommation excessive (notamment au cours des repas) des aliments contenant des inhibiteurs potentiels de l'absorption du fer non héminique (comme le thé ou le café).

Ces recommandations devraient permettre de réduire la prévalence des carences en fer au cours de la grossesse et leurs éventuelles complications avec la meilleure efficacité et au moindre coût.

4.2. Amélioration du statut en folates des femmes en âge de procréer, notamment en cas de désir de grossesse

Compte tenu des arguments sur l’augmentation du risque de malformation congénitale du tube neural en cas de déficience en folates au moment de la conception, une supplémentation par 400 µg d’acide folique est souhaitable chez toute femme consultant un professionnel de santé dans le cadre d’un projet de grossesse. Une action d’information sur cette problématique doit être

développée auprès de toutes les jeunes filles (une brochure récemment mise au point par les ministères de la santé et de l’agriculture peut participer à cette information, mais elle ne peut, à elle seule, être considérée comme suffisante au succès de cette information). Cette

supplémentation (et donc l’information des femmes à risque) est impérative chez les femmes ayant des antécédents de grossesses ayant abouti à une malformation et chez celles qui prennent un traitement interférant sur le statut en folates (neuroleptiques, anticancéreux,…). Des conseils nutritionnels particulièrement destinés aux femmes en âge de procréer porteront notamment sur l’importance de la consommation de légumes verts " à feuilles " (tels que les

laitues et les épinards) et les fromages à pâtes persillées (type Bleu). En cas d’utilisation de céréales petit-déjeuner prêtes à consommer, l’utilisation de formes enrichies en folates peut contribuer à améliorer les apports. L’enrichissement de certains aliments courants en folates peut être également envisagé (à condition qu’une communication adaptée rappelle que ces aliments ne sont pas destinés à se substituer aux sources alimentaires naturelles de folates, mais doivent venir en sus).

4.3. Promotion de l’allaitement maternel

Les mesures prises en France pour limiter les actions de promotion des laits pour nourrissons dans les maternités doivent être complétées par des programmes visant l’implication de tous en vue de l’augmentation rapide de la prévalence de l’allaitement à la naissance et de sa durée. Les actions en direction des professionnels de la santé apparaissent primordiales afin de fournir aux mères un contexte favorable à leur mise en confiance dans leur capacité d’allaiter, tant durant la grossesse qu’à la maternité et après le retour à domicile. Une surveillance régulière de la prévalence de l’allaitement à la naissance et durant les premiers mois de vie est indispensable pour adapter les actions de promotion de l’allaitement sur des bases objectives.

4.4. Amélioration du statut en fer, en calcium et en vitamine D des enfants et des adolescents

La fréquence des déficiences en fer chez le jeune enfant et chez les adolescents (et surtout chez les adolescentes) et la nécessité d’un apport suffisant de calcium et de vitamine D (pour garantir un pic osseux optimal), justifient, à côté des recommandations nutritionnelles adaptées, l’intérêt d’aliments destinés aux populations cibles enrichis en calcium et/ou en vitamine D et/ou en fer. Une supplémentation hivernale en vitamine D (100 000 UI) des adolescentes sous contrôle médical, peut être utile dans les régions françaises de faible ensoleillement (partie nord de la France) et d’une façon générale chez les jeunes filles ayant une faible exposition solaire.

4.5. Amélioration du statut en calcium et en vitamine D des personnes âgées

Chez les personnes âgées vivant en institution, la supplémentation mixte en calcium et vitamine D doit être systématique car il est très difficile de modifier les habitudes alimentaires à cet âge et le pourcentage de sujets en déficit calcique ou vitaminique D dans ces institutions dépasse les 95 %. Cette supplémentation s’avère sans effet secondaire au long terme puisqu’il n’a été démontré aucun signe d’hypervitaminose D après trois ans d’utilisation, ni

d’hypercalciurie, ni de lithiase rénale. La posologie conseillée est de l’ordre de 1 g de calcium par jour associée à 800 unités de vitamines D. Dans ce sens, une circulaire DGS/DAS/DH doit être publiée prochainement. (cf. également " Recommandations nutritionnelles pour lutter contre les conséquences fracturaires de l’ostéoporose chez les personnes âgées, AFLAR, DGS, 2000, à paraître)

Chez les personnes âgées vivant à domicile, une supplémentation en vitamine D doit être prévue, éventuellement associée à un supplément calcique. La supplémentation de calcium dépendra des apports alimentaires de calcium des sujets âgés (évaluables simplement par l’utilisation d’un questionnaire adapté) et des possibilités d’accroître la ration calcique sous forme d’une plus grande consommation de produits laitiers et d’eaux minérales riches en calcium. Mais en revanche une supplémentation vitaminique D hivernale systématique paraît justifiée à des posologies de 400 ou 800 unités par jour de vitamine D2 ou D3. S’il n’est pas possible d’optimiser la ration calcique, il sera recommandé une des nombreuses associations calcium-vitamine D actuellement disponibles apportant soit 500 mg de calcium et 400 UI de vitamine D, soit 1 000 ou 1 200 mg de calcium et 800 ou 880 UI de vitamine D. Ces suppléments calciques, vitaminiques D, ou mixtes, doivent être prescrits au très long cours, ce qui peut poser des problèmes de compliance. Il peut être utile de varier les formes galéniques et les modes d’administration pour améliorer l’acceptabilité d’une telle prévention. Il a été démontré par ailleurs que ce type de prévention a un rapport coût/bénéfice favorable compte tenu du coût très élevé des fractures du col fémoral et du coût relativement modeste des suppléments calciques et vitaminiques D. S’il n’était pas nécessaire d’administrer le calcium quotidiennement, on pourrait avoir recours pour la vitamine D à des prises espacées par voie orale ou par voie injectable de vitamine D, mais dans

la mesure où la plupart des sujets âgés associent le déficit calcique et l’insuffisance vitaminique D, il est commode d’avoir recours à des préparations galéniques associant les deux composants. Au total, toutes les stratégies de traitement de l’ostéoporose doivent comporter d’abord un apport calcique suffisant et une normalisation du statut vitaminique D soit par l’alimentation soit par des suppléments médicamenteux.

Une formation des prescripteurs et l’utilisation de questionnaires spécifiques simples (type questionnaire de Fardelonne) devraient permettre d’évaluer la situation en ce qui concerne les apports de calcium dans ce type de population.

4.6. Lutte contre la dénutrition des personnes âgées

La lutte contre la dénutrition protéino-énergétique des sujets âgés passe par son dépistage, à tous les niveaux du système de soin (généralistes et spécialistes de ville, hôpitaux et cliniques, centres de soins, de réadaptation et de convalescence, institutions pour personnes âgées). L'évaluation de l'état nutritionnel doit faire partie de tout examen clinique. On recommande l'utilisation de l'indice de masse corporel et le suivi pondéral des patients, le poids devant être inscrit dans le carnet de santé (Ferry et al., 1996, réédition 2000).

Il est nécessaire de coordonner les soins nutritionnels dans les réseaux ville-hôpital. Une sensibilisation des soignants, la recherche systématique d'une dénutrition par des moyens simples, la synergie des compétences spécialisées devraient être les éléments clés d'une bonne démarche thérapeutique. Il est nécessaire de promouvoir une alternative à l'hospitalisation et à l'institutionnalisation par une meilleure organisation des réseaux de soins et la prise en charge à domicile de la dénutrition.

Enfin il est indispensable de sensibiliser le sujet âgé et son entourage sur l'importance de sa prise en charge nutritionnelle car diverses pathologies sont associées à un risque élevé de dénutrition. Il est recommandé qu'une information adaptée aux différentes pathologies à risque de dénutrition soit communiquée au patient et sa famille lors de sa prise en charge ambulatoire. Pour le sujet âgé en perte d'autonomie et vivant à domicile, il est souhaitable d’encourager le portage des repas et une meilleure prise en charge des soins et prothèses dentaires.

La dénutrition acquise à l'hôpital et en milieu institutionnel pourrait être prévenue en améliorant la qualité, la présentation et la convivialité des repas. La grande fréquence des carences

vitaminiques (vitamine C, bêta-carotène,…) observées chez les sujets âgés en institution nécessitent, à côté d’une meilleure prise en charge de l’environnement alimentaire des sujets, le recours à des suppléments vitaminiques et/ou des aliments spécifiquement enrichis.

4.7. Lutte contre les déficiences vitaminiques et minérales et les dénutritions chez les sujets en grande situation de précarité

L’amélioration à long terme de la situation nutritionnelle des personnes en situation de précarité repose bien évidemment en premier lieu sur leur insertion sociale et l’amélioration de leurs revenus.

Des actions d’information et d’éducation nutritionnelle doivent être développées dans le cadre des différents dispositifs d’insertion, à l’intention des bénéficiaires mais aussi des animateurs de ces dispostifs.

Toutefois, la situation nutritionnelle des personnes en situation de grande précarité apparaissant comme particulièrement dégradée, il y a urgence à améliorer leur prise en charge, et notamment à mettre en place des programmes d'aide alimentaire adaptés à leurs besoins.

4.8. Lutte contre les déficiences vitaminiques et minérales chez les sujets suivant des régimes restrictifs

Il apparaît clairement que la couverture des apports conseillés en vitamines et minéraux implique un niveau énergétique suffisant et une diversité des aliments consommés. Ces conditions ne sont souvent pas remplies chez les personnes qui suivent des régimes restrictifs sur un plan

quantitatif (régimes amaigrissants par exemple) ou sur un plan qualitatif (végétariens, végétaliens,…).

Si l’apport énergétique est très réduit, il est possible de limiter les déficiences en choisissant des aliments à forte densité vitaminique et minérale, ou à teneur garantie en vitamines et minéraux, ou enrichis en vitamines et minéraux. Cependant, un régime restrictif hypocalorique, notamment

inférieur à 1 200 Kcal/j, sur un période prolongée, impose un apport supplémentaire par voie médicamenteuse en minéraux et vitamines pendant toute la durée du régime. Il est souhaitable que les suppléments apportent des doses de niveau nutritionnel et un équilibre entre les différents minéraux et vitamines.

4.9. Personnes allergiques

Outre la mise en oeuvre des recommandations du CSHPF et la mise en oeuvre de la circulaire concernant l’accueil des enfants et adolescents atteints de troubles de la santé, il apparait nécessaire :

de sensibiliser le corps médical pour qu’il assure le dépistage des familles à risque, chez

lesquelles le risque d'allergie alimentaire est multiplié par deux pendant les six premières années de vie,

d’informer des femmes enceintes et allaitantes pour leur éviter de consommer les

aliments les plus sensibilisants (œufs, arachides, poissons et éventuellement lait de vache),

de promouvoir l'allaitement maternel,

de permettre au patient allergique de choisir une alimentation appropriée

Bien que la présence d’allergènes non désirés ne puisse pas toujours être évitée, il est nécessaire que pouvoirs publics, fabricants, importateurs et distributeurs d’aliments et

associations de personnes allergiques mettent en place un étiquetage exhaustif, précis et loyal, des mesures de contrôle qui réduisent la contamination croisée et des plans de prévention des allergies, intégrant l’évaluation des méthodes de fabrication et de surveillance des ingrédients. Par ailleurs, dans les lieux de restauration collective, il semblerait intéressant de promouvoir, comme au Québec, l’affichage de messages tels que " personnes allergiques, merci de nous prévenir ".

de favoriser une alimentation adaptée chez l'enfant atopique - les évictions alimentaires

peuvent être à l’origine de carences alimentaires, notamment chez l’enfant - associée à des conseils d'ordre environnemental,

de développer la formation sur la problématique de l’allergie alimentaire de différents

professionnels : professionnels des métiers de bouche, personnel de restauration tant aux fourneaux qu’en salle, professeurs de biologie, élèves de écoles d’ingénieurs agronomes et des écoles vétérinaires…