A. Méthodes appliquées aux phytolithes
4. Mesures électrocinétiques
Dans cette étude, des mesures électrocinétiques ont été effectuées sur des phytolithes
dans le but de contraindre leur chimie de surface, leurs réactions surfaciques et aussi de
déterminer le pH de leur point isoélectrique (IEP). Ce pHIEP correspond au pH pour lequel la
charge de la surface des phytolithes sera nulle c'est-à-dire qu’elle aura autant de sites
surfaciques chargés positivement que négativement.
Il est bien connu qu’au voisinage de surfaces chargées électriquement, il va se
développer une charge opposée en solution ; les molécules d’eau vont alors s’orienter en
rapport avec la charge dipolaire. En soumettant à un champ électrique les phytolithes en
solution, qui sont des particules solides, cette double couche électrique va alors se scinder en
deux zones distinctes avec les ions fortement liés à la surface qui accompagnent la particule
dans son mouvement à l’intérieur du champ électrique alors que les autres ions faiblement liés
de la double couche se séparent progressivement de la particule. Le plan délimitant ces deux
zones est appelé plan de cisaillement. Ce plan est souvent considéré comme étant très proche
du plan correspondant au début de la couche diffuse (plan externe de Helmholtz). Les
mesures électrocinétiques permettront donc de déterminer la charge développée au niveau de
ce plan. Le potentiel à la surface de la particule n’étant pas accessible par mesure directe, il en
sera déduit par la mesure expérimentale du potentiel zêta correspondant à la différence de
potentiel entre les deux zones.
Plusieurs techniques de mesures utilisent les propriétés électrocinétiques des surfaces
de particules. Il existe le potentiel de sédimentation, d’écoulement, l’électroosmose et
l’électrophorèse, cette dernière étant celle utilisée dans ce travail.
* Principe de l’électrophorèse
Le principe des mesures par électrophorèse consiste à soumettre une particule à un
champ électrique. La particule chargée migrera alors vers l’électrode de charge opposée à une
vitesse proportionnelle à sa charge électrique résiduelle, correspondant à la charge existant au
niveau du plan de cisaillement. La mesure de la vitesse de migration de la particule permet de
Matériels et Méthodes
déterminer sa mobilité électrophorétique correspondant au rapport entre la vitesse de la
particule et le champ électrique appliqué. La valeur de la mobilité électrophorétique dépend
de la force ionique de la solution qui a pour effet de plus ou moins exprimer la double couche.
Afin de s’affranchir du phénomène d’électroosmose, induit par le champ électrique
dans la cellule de mesure en quartz, les mesures des mobilités électrophorétiques doivent se
faire au niveau des plans stationnaires, qui sont au nombre de deux, correspondant aux plans
dans la cellule où la vitesse du fluide est nulle. Cela permet ainsi à la mobilité
électrophorétique de ne dépendre que de la charge au niveau du plan de cisaillement de la
particule.
* Détermination du potentiel zêta (ζ)
La valeur du potentiel zêta des particules est déterminée à partir des valeurs de mobilités
électrophorétiques par l’utilisation de l’équation de Smoluchowski-Helmholtz.
)
4
(
)
(
η
π µ
ε
ζ
×
×
= E
(1)
où ζ correspond au potentiel zêta (mV) et ε,η, et µE représentent respectivement la constante
diélectrique de la solution, la viscosité et la mobilité électrophorétique. En dépit de sa
simplicité, cette équation est largement utilisée pour calculer les potentiels zêta à partir des
mobilités électrophorétiques de quartz (Li and De Bruyn, 1966 ; Kosmulski et al., 2002), de
silices (Gun’ko et al., 2005 ; Xu et al., 2003), de carbonates (Pokrovsky et al., 1999) et de
matériels biologiques (Van der Wal, 1997 ; Wilson et al., 2001).
L’utilisation d’équations plus complexes pou calculer les potentiels zêta de suspensions de
phytolithes n’est pas envisageable en raison de l’absence d’information sur la conductance de
la surface et des formes irrégulières des phytolithes empêchant l’utilisation de la théorie de la
migration électrocinétique de particules sphériques.
* Appareillage utilisé
Les mesures des mobilités électrophorétiques des phytolithes ont été réalisées en utilisant
un microélectrophoremètre, « zêtaphoremètre IV » Z 4000 de la société CAD instrumentation
(Figure 31). Cet appareil est constitué d’un microscope optique équipé d’un laser de 2 mW
He/Ne et surmonté d’une caméra vidéo CCD, reliée à une unité centrale où un logiciel
Matériels et Méthodes
d’analyse d’images va permettre de calculer la mobilité des particules en fonction de leur
trajectoire dans le capillaire (cellule en quartz). Ce capillaire est équipé à ses extrémités
d’électrodes en Pd où sera appliqué le champ électrique lors des mesures (80 V/cm
alternativement dans les deux directions).
Figure 31. Photographie du « zêtaphoremètre IV » Z4000 de CAD instrumentation
Avant de procéder aux mesures, des réglages préliminaires de l’appareil sont nécessaires.
1) Il faut d’abord se positionner au niveau du plan stationnaire supérieur, pour cela il faut
déterminer dans un premier temps la position de la paroi supérieure du capillaire puis rentrer
cette donnée dans le logiciel de calibration qui calculera ensuite la position du plan
stationnaire supérieur où il faudra se positionner pour effectuer les mesures.
2) La conductivité doit être étalonnée car lors des mesures de mobilités
électrophorétiques, la conductivité de la solution est aussi mesurée. L’étalonnage s’effectue
avec une solution de chlorure de potassium (KCl) à 0.01 mol/L.
Dans cette étude, la microélectrophorèse a été utilisée pour déterminer le potentiel zêta de
phytolithes en fonction du pH et de la force ionique dans le but de quantifier le pH du point
isoélectrique (pH IEP) correspondant au pH où le potentiel zêta est égal à zéro.
Matériels et Méthodes
Dans le cas des phytolithes de bambous, les expériences ont été menées dans des solutions de
force ioniques allant de 0.001 à 0.05 mol/L (NaCl, HCl et NaOH) et de pH allant de 1.5 à 11.
Pour ce qui est des autres phytolithes, la force ionique a été fixée à 0.01 mol/L (NaCl, HCl et
NaOH), le pH des expériences a varié de 1 à 11.
Trois mesures sont effectuées pour chaque pH en renouvelant la solution à chaque mesure.
Les incertitudes sont données par la dispersion des points expérimentaux et sont de ± 10 %.
Dans le document
Cycle biogéochimique du silicium dans les environnements superficiels continentaux : Impact des plantes terrestres
(Page 41-44)