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Cette section introduit le montage mis en place pour la détection du méthane sur puce, les tests en espace libre pour confirmer le bon fonctionnement de l’équipement et de traitement de signal pour la détection directe et un algorithme de correction des franges d’interférence.

2.7.1 Montage expérimental de détection de méthane sur puce

Le schéma pour la détection de méthane sur puce est présenté à la figure 2.11 et contient le système de caractérisation optique qui est identique au montage décrit à la section 2.5.1. Les éléments suivants sont ajoutés pour permettre aux guides d’onde fabriqués sur puce d’être dans un environnement contrôlé où la concentration de méthane est stable, connue et peut être variée. Une bonbonne de mélange de 5% de méthane (CH4) dans une base de diazote

N2 (Praxair, AR-ME5C-K, norme certifiée) sert de source de méthane et une bonbonne de

diazote pur (Praxair) permet de diluer le mélange pour diminuer la concentration de méthane. Le diazote est un gaz inerte qui ne possède pas de pic d’absorption dans la région de 1653 nm. Chaque bonbonne possède un régulateur (Swagelok, double étage) pour contrôler la pression à la sortie, puis achemine le gaz par tuyau jusqu’à un capteur de pression pour mesurer la pression des gaz à l’entrée du débitmètre. Un débitmètre (Matheson gas, modèle 7300 série 2) analogique permet de contrôler le débit de chaque gaz et de les mélanger. Le mélange est ensuite conduit à un débit constant à une chambre de gaz où est située la puce. La chambre de gaz est fabriquée par impression 3D et comprend deux trous pour des fibres optiques, en plus d’une entrée et d’une sortie pour des tuyaux de gaz. La sortie de gaz est évacuée par une hotte d’échappement.

2.7.2 Test et caractérisation du montage en espace libre

Dans le but de tester et caractériser le montage expérimental pour la détection de méthane par spectroscopie d’absorption avec diode laser accordable, des mesures d’absorption en espace libre pour différentes concentrations de méthane sont effectuées. Les modifications suivantes sont faites au montage expérimental. Les fibres lentillées sont remplacées par des fibres avec connexion APC connectées à des collimateurs qui sont placés aux extrémités d’un tube (Thor- labs) de longueurL=11.7 cm. Le tube est troué pour insérer des tuyaux de gaz d’entrées-sortie

et agit ainsi comme chambre de gaz cylindrique.

Le signal de transmission obtenu en voltage en fonction du temps est converti en puissance de sortie en fonction de la longueur d’onde à partir d’un script utilisant les données de calibration

Contrôleur de diode laser Contrôleur de polarisation Générateur de signal en dent de scie Photodétecteur Oscilloscope Puce sous test Platine de translation linéaire 3 axes Platine de translation linéaire 3 axes Fibre à maintient de polarisation lentillée Ordinateur Diode laser Chambre de gaz Hotte d’échappement CH4 5% N2 100 % Capteur de pression Capteur de pression Régulateur Régulateur Fibre lentillée Débitmètre Débitmètre

Figure 2.11 – Schéma du banc de mesure pour la détection de méthane sur puce parTDLAS. Flèches rouges : signal optique. Flèches bleues : signal électrique. Flèches oranges : gaz

du laser et du photodétecteur. La courbe de transmission est mesurée pour différents débits de méthane et de diazote. Un script permet de calculer la concentration de méthane résultante en fonction du débit mesuré et de la pression d’entrée des deux gaz, ainsi que des tables données par le fournisseur du débitmètre. Les spectres de transmission obtenus pour différentes concentrations de méthane sont présentés à la figure 2.12a. Ces courbes sont ensuite traitées pour déterminer la variation de puissance, en utilisant un ajustement avec un profil de Voigt qui est approprié pour les spectres d’absorption des gaz, tout en compensant pour la pente résiduelle de la modulation d’amplitude. La fonction de Voigt est le produit de convolution des fonctions gaussiennes et lorenztienne, qui permet de prendre en compte les phénomènes de collisions des molécules et de l’effet Doppler, tous deux importants dans l’élargissement des raies d’absorption dans des conditions atmosphériques.

Un algorithme permettant de calculer une fonction de distribution pseudo-Voigt de type THC τV oigt[93;94], qui est une approximation du profil de Voigt utilisant une combinaison linéaire

des courbes gaussienne et lorentzienne plutôt que leur convolution, est utilisée pour faire l’ajus- tement de la raie d’absorption avec les données. Les paramètres de sortie de cette courbe sont l’amplitude AV oigt, la position du centre de la courbe x0, l’écart-type de la partie gaussienne

(a) Spectre de transmission présentant les données brutes pour différentes concentrations

(b) Absorbance en fonction de la concentration

Figure 2.12 – Mesures de TDLAS directe en espace libre

pour la convolution σV oigtet la largeur totale à mi-hauteur de la courbe lorentzienne γV oigt

Avec τV oigt(λ, [AV oigt, x0, σV oigt, γV oigt]), on obtient ensuite facilement et précisément la puis-

sance de sortieP au centre de la raie d’absorption, et ce pour chaque mesure avec une variation

de la concentration. La puissance d’entréeP0 est également connue. L’absorbanceA, calculée avec l’équation 1.3, est donnée en fonction de la concentration de méthane à la figure 2.12b. La pente correspond à L=0.0453 (%−1), ce qui donne=0.0372 (%−1cm−1). Avec le modèle

numérique (voir Sec. 2.6), on obtient th=0.00367 (%−1cm−1) avec les paramètres d’entrée

appropriés (P0=5.18 mW, L=11.7 cm, γ=1, αprop=0 dB/cm), ce qui est en accord avec les mesures expérimentales.

Cette concordance confirme la méthodologie et le montage expérimental, les scripts de trai- tement de donnée, le choix d’un ajustement par fonction de Voigt et le modèle numérique de

TDLAS.

On note également que les valeurs des paramètres de sortie de l’ajustement de la fonction de pseudo-Voigt τV oigt obtenue à partir de ces données expérimentales sont données au tableau

2.4. Ces valeurs seront utilisées dans la section suivante. Paramètres Valeurs de sortie

x0 (nm) 1653.72

σV oigt (nm) 0.06532

γV oigt(nm) 0.0201

Table 2.4 – Paramètres de sortie de l’ajustement de courbe d’absorption par fonction de pseudo-Voigt τ pour des mesures en espace libre avec une concentration de C=5%

2.7.3 Algorithme de correction des franges d’interférence variant temporellement

Idéalement, il est possible d’extraire la concentration du gaz présent en réalisant un ajustement avec profil de Voigt sur le signal d’absorption. Cette méthode a été démontrée comme étant efficace à la section précédente avec un montage en espace libre. L’utilisation d’un guide d’onde intégré en photonique sur silicium pour la spectroscopie d’absorption avec diode accordable directe souffre toutefois de fortes franges de Fabry-Pérot variant temporellement (voir section

2.5.3). Une méthode conventionnelle de récupération de la concentration de gaz en présence d’artéfacts constants, consiste à soustraire le signal de référence (sans la présence du gaz) acquis préalablement au signal d’absorption (en présence du gaz) [21]. Cette méthode est toutefois inefficace dans le cas d’étude puisque les artéfacts, ici les franges d’interférences, varient temporellement en fonction de la température du guide d’onde.

Dans cette section, une méthode numérique permettant de diminuer l’effet limitant des franges d’interférence variant temporellement sur les mesures est présentée. La méthode implémentée a été développée par IBM et nommée Dynamic etalon fitting-routine (DEF-R). Elle est ex- pliquée conceptuellement dans [39] (Matériel supplémentaire) et en détail dans le brevet [95]. Le but visé est d’obtenir des mesures d’absorption spectroscopique plus fiables, précises et stables. Le principe de cette technique est d’ajuster dynamiquement le signal de référence au signal d’absorption pour corriger les franges d’interférences en les soustrayant, plutôt que de soustraire un signal de référence fixe. Pour un signal d’absorption suffisant et une dérive et modification des franges d’interférence limitée, il est donc possible d’extraire le signal d’absorp- tion du bruit causé par les franges d’interférence qui dérivent. Le principe de cet algorithme est présenté schématiquement à la figure2.13.

Les paramètres libres d’ajustement utilisés dans la transformation adaptative du signal de référence (λscan) sont les suivants.

— δt: Décalage horizontal. Les variations thermiques créent des variations dans l’intervalle

spectral libre ISL, causant un décalage en longueur d’onde des franges d’interférence. — γt: Étirement horizontal. Permet de compenser pour les variations de second ordre de

( scan)

[ (scan)] Signal de référence

Signal de référence transformé

Fonction d’absorption de Voigt ajusté ( scan) Étirement vertical offset Décalage vertical offset Inclinaison de la pente t Décalage horizontal

t Étirement horizontal

Voigt

A Amplitude de la

fonction pseudo-Voigt

( scan)

Signal d’absorption ajusté

Figure 2.13 – Schéma du principe de l’algorithme de correction de franges DEF-R. Un signal de référence est transformé et additionné à la courbe d’absorption du gaz ajustée à un profil de pseudo-Voigt. Les paramètres libres de ces deux courbes sont optimisés pour ajuster le signal d’absorption ajusté résultant au signal d’absorption mesuré. La transformation du signal de référence permet de corriger la variation spectrale et d’amplitude des franges d’interférence au cours du temps de l’acquisition des données. L’amplitude de la fonction pseudo-Voigt ajustée permet de calculer la concentration du méthane mesurée.

— βof f set : Décalage vertical. Permet d’accommoder les variations temporelles de la puis-

sance du laser et de l’efficacité d’injection. Le montage expérimental avec coupleurs de bords et fibres lentillées pour l’injection est susceptible de dériver en position dû aux vibrations et aux variations mécaniques et thermiques du montage. De plus, le flux chaotique et variable de gaz dans la chambre de gaz peut amplifier cette variation dans la position des fibres lentillées. La puissance injectée fluctue, faisant varier verticalement le signal acquis.

— ζ : Étirement vertical. Compense les variations d’amplitude des franges d’interférence, pouvant entre autres être causées par des variations de la polarisation d’entrée. — λof f set : Inclinaison de la pente. Permet de prendre en compte les anomalies provenant

de la variation de l’amplitude résiduelle de modulation du signal.

Dans le cas du signal d’absorption mesuré, ici dénoté P(λscan), avec un gaz de concentration C inconnue et des franges d’interférence, on s’attend à mesurer un signal de la forme :

où φ(λscan)est le signal d’absorption ajusté, τ(C, λscan)est la raie d’absorption du gaz ajustée

à un profil de pseudo-Voigt (voir section 2.7.2) dépendant de la concentration, et Γ [(λscan)]

est le signal de référence transformé. Puisque les franges d’interférence initiales dominent le signal d’absorption dans le cas étudié, les valeurs des paramètres d’ajustement x0, σV oigt et

γV oigt sont les valeurs obtenues expérimentalement en espace libre (voir tableau 2.4). Elles

sont également fixées pour σV oigt et γV oigt, tandis que x0 est limité à une variation de 0.1 nm

pour pouvoir compenser les variations environnementales et de mesure. L’amplitude AV oigt

de la fonction de pseudo-Voigt τ est laissée comme autre paramètre libre, qui dépend de la concentration du gaz, car c’est le paramètre d’intérêt pour des applications de détection de gaz.

La transformation Γ du signal de référence (λscan)(zéro-gaz, spectre des franges) en fonction

de la longueur d’onde d’émission balayée de la diode laser (λscan) est donnée mathématique-

ment par : Γ [(λscan)] =  ¯ (λscan· 1 γt + δt) − h(λscan)i 

×ζ +h(λscan)i+[λof f set· λscan+ βof f set] (2.4)

où ¯(λscan) est l’interpolation par spline cubique du signal de référence et h(λscan)i est la

moyenne de l’amplitude du signal de référence.

Les paramètres libres AV oigt, δt, γt, βof f set, ζ et λof f set sont résolus pour maximiser l’ajus-

tement du signal d’absorption mesuré P (λscan)avec la courbe ajustée du signal d’absorption

φ(λscan) (somme du signal de référence transformée Γ [(λscan)]et du signal ajusté de la raie

par fonction pseudo-Voigt τ(λscan)). La régression de cette courbe non-linéaire est obtenue avec

la méthode des moindres carrés. Des valeurs initiales et des limites inférieures et supérieures pour les paramètres libres sont données au problème.

Au niveau de l’implémentation, le problème des moindres de carrées est résolu de façon itérative pour chaque ensemble de données de spectre acquis périodiquement à des temps ti, où i est

l’itération. Le premier spectre au temps t0correspond au signal de référence, sans gaz, (λscan).

Les valeurs initiales des paramètres libres sont appliquées pour la première itération au temps t1. Les valeurs optimales de sortie des paramètres libres calculés par le problème des moindres

carrés de l’itération tisont ensuite utilisées comme valeurs initiales du problème pour l’itération

suivante ti+1, augmentant la robustesse et diminuant le temps de calcul de l’algorithme.

On obtient ainsi Γ [(λscan)], τ(λscan)) et φ(λscan) pour l’ensemble des spectres mesurés aux

temps ti, tel que présenté à la figure2.14. La fonction d’absorption de Voigt ajustée (figure2.14

(c)) permet d’obtenir la variation de puissance au centre de la raie d’absorption du méthane ∆τ, égale au paramètre libre de l’amplitude de la fonction de pseudo-Voigt AV oigt, et ce en

fonction du temps. La figure2.15montre ce résultat, obtenu avec les données et les résultats de l’algorithme DEF-R présentés à la figure 2.14. Pour cette exemple, un guide d’onde en ruban de la puce # 2 d’une largeur deW=600 nm, d’une longueur d’environL=5.8 cm, injecté avec

Figure 2.14 – Cas de figure de l’algorithme DEF-R appliqué sur des spectres mesurés sans (t=0), puis avec la présence de méthane au fil du temps. Un guide d’onde en ruban de L=5.8

cm,W=600 nm avec un revêtement enPDMSest utilisé, avec le modeTM0. La concentration de méthane est initialement nulle à t=0 (s) (ligne noire), puis à C=5% pour toutes autres

mesures. En (a), les spectres des données mesurées incluant le signal de référence à t=0 (s) ; en (b), le signal de référence transformé ; en (c), la fonction d’absorption de Voigt ajusté ; en (d) le signal d’absorption ajusté et ; en (e) les résidus de l’algorithme

Figure 2.15 – Variation de puissance au centre de la raie de la fonction d’absorption de Voigt ajusté τ(λscan) avec l’algorithme DEF-R en fonction de temps, tout d’abord sans, puis avec

la présence de méthane (C=5%). Un guide d’onde en ruban de L=5.8 cm, W=600 nm avec

un revêtement en PDMS est utilisé, avec le mode TM0. Puce #2.

le modeTM0et ayant un revêtement de polydiméthylsiloxane est caractérisé en présence d’un flux soudain de méthane ayant une concentration C=5%. Les travaux relatifs à l’ajout d’une

couche de revêtement en PDMS sont discutés à l’annexeB. On remarque que la variation de puissance est très faible jusqu’au début du flux de méthane, puis diminue exponentiellement, puis augmente lorsque le flux de méthane est coupé. Cette augmentation est causée par les fuites de gaz de la chambre de gaz qui n’est pas parfaitement hermétique, ce qui fait que la concentration de méthane dans la chambre de gaz diminue. La descente finale de puissance à t>80 s est inexpliquée. Il est possible que l’algorithme DEF-R soit incapable de s’ajuster dynamiquement assez vite pour suivre le signal de référence.

Cet algorithme est toutefois limité en précision et en robustesse ; la présence de défauts, de réflexions et de diffuseurs à différents endroits du guide d’onde crée un ensemble de franges complexes qui ont des plages spectrales libres différentes. Au fil du temps, ces franges varient à des taux différents. On remarque ainsi que les signaux d’absorption ajustés (Fig. 2.14(d)) ne sont pas identiques aux signaux d’absorption mesurés ((Fig. 2.14 (a)), ce qui limite la précision de la variation de puissance calculée ∆τ. Cet effet s’aggrave pour les mesures prises à des itérations ti élevées. Une décomposition de Fourier, une sélection du partitionnement,

puis un traitement individuel de chaque partition par l’algorithme DEF-R, ont été démontrés comme étant efficaces pour prendre en compte ce phénomène [38]. Cet ajout dans les étapes de l’algorithme n’a toutefois pas été implémenté par l’auteur, de par sa complexité.

En conclusion, bien que l’ajustement obtenu avec l’algorithme DEF-R sans la décomposition de Fourier et le partitionnement possède des résidus non négligeables dans certains cas, celui- ci permet néanmoins de corriger les franges d’interférence lorsque celles-ci varient faiblement,

d’annuler l’effet de la dérive en puissance, et de faire un ajustement de Voigt approximatif sur le signal d’absorption, tel que démontré dans le cas de figure.

Toutefois, dans la majorité des mesures prises, les franges d’interférence varient rapidement, le signal d’absorption est inférieur à l’amplitude des franges d’interférence et la stabilité méca- nique du montage est imparfaite ce qui fait varier verticalement le signal de façon importante. Par conséquent, des résultats douteux ont souvent étés remarqués, tel que des faux positifs (détection de méthane lorsque la concentration de méthane est nulle) et une diminution de la puissance de la raie d’absorption lorsqu’un flux de diazote est injecté dans la chambre de gaz. On observe également un manque de répétabilité pour le résultat de la variation de puissance ∆τ pour des conditions de mesure identiques. On note aussi que la détection, tel que présenté dans l’exemple de la figure 2.15, a seulement été obtenue pour des puces recouvertes d’une couche de PDMS, pas dans le cas d’un guide d’onde exposé à l’air pour les raisons discu- tées précédemment. Diverses améliorations doivent donc encore être apportées pour réaliser la détection de méthane sur puce avec un guide d’onde en ruban de façon répétable, stable, sans réponse douteuse et en accord avec les simulations, dans le but d’augmenter le signal à détecter ou pour diminuer le bruit et les franges d’interférence. Quelques-unes sont proposées à la section suivante. Des efforts pour les implémenter n’ont pu être réalisés puisque le laser Eblana àλ=1653 nm a cessé de fonctionner en cours de projet, rendant impossible la prise de

mesures additionnelles.

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