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Nos nouveaux modes de vie et les progrès scientifiques ont développé l’usage de nouveaux produits par l’homme, pour lui et pour l’animal. En effet, nous avons de plus en plus recours à des médicaments ou autres produits issus de la recherche pharmaceutique. Nous consommons ces produits de manière directe (médicaments, hormones de contraception, hormones de croissance), comme indirecte (en mangeant des aliments eux-mêmes nourris aux hormones de croissance comme les stéroïdes, ou aux organismes génétiquement modifiés, les

fameux OGM). De fait, ces produits se retrouvent dans les eaux via les matières fécales, animales et humaines.

Etant donné les prix pratiqués pour des analyses d’hormones, de médicaments ou d’OGM dans les eaux, aucune étude n’a été réalisée et publiée sur ce sujet à Mendoza, mais sans forcément présenter des données permettant un diagnostic, il nous apparaît important de présenter les risques induits par nos nouveaux modes de vie sur la qualité biologique de l’eau, en dehors des bactéries. Or, nous ne savons pas comment épurer ces produits qui passent pourtant par nos stations de traitement des effluents domestiques.

L’Argentine n’est pas un pays très consommateur en hormones contraceptives, le risque de pollution n’est donc pas aussi important que dans les pays du Nord. Néanmoins, cet Etat agricole est très gourmand en soja et maïs génétiquement modifiés, qui entrent pour partiedans l’alimentation de bétail. L’Argentine, 2ème pays au rang mondial des surfaces plantées en OGM court-elle un risque de pollution de sa ressource en eau ?

4-2-1- Les produits pharmaceutiques

Selon le site de radio Canada (www.radio-canada.ca/nouvelles/Science-Sante/), « un

seul nanogramme (ng) d’hormones stéroïdes dans un litre d’eau est suffisant pour modifier le fonctionnement du système endocrinien des poissons. Résultats : une fertilité moindre et une féminisation des mâles ». Or, « l’eau que l’usine d’épuration de Montréal rejette dans le fleuve peut contenir jusqu’à 90 ng/l de certains composés d’œstrogènes ».

La pollution par les produits pharmaceutiques est une modification des écosystèmes par des perturbateurs endocriniens des xéro-hormones (GENIN et al., 2003). Cette pollution des eaux des rivières a deux origines majeures : d’une part l’absorption par les êtres humains de produits pharmaceutiques comme les antibiotiques (mais ce qui inquiète le plus est l’utilisation de produits hormonaux comme les contraceptifs féminins (225 millions de femme en consommeraient)) ; d’autre part, les hormones viennent des stéroïdes apportés par les éleveurs au bétail, notamment en élevage industriel. Selon l’Agence de l’Eau Seine-Normandie (www.eau-seine-normandie.fr), la plus concernée par ce problème en France, en 2002, 800 t de produits pharmaceutiques ont été consommées en France par les hommes, et 1300 t par les animaux. Parmi ces produits, les hormones contraceptives et de croissance.

Or, quelle est la conséquence pour le milieu ? L’une d’elle est la féminisation des organismes males, par l’arrivée d’œstrogènes dans les eaux (SALOMON, 2008a). A titre d’exemple, en 1992, certains scientifiques se sont aperçu de modification chez les reptiles vivant autour du lac d’Apopka, en Floride : « les alligators mâles dignes de ce nom ont

disparu. Ces derniers sont dotés d’un tout petit pénis et ne s’intéresse pas à leurs congénères femelles » (GENIN et al., 2003). De nombreuses études réalisées en Allemagne, en Suède, au

Danemark, au Canada ou aux Etats-Unis démontrent très nettement la présence de dérivés pharmaceutiques dans les eaux (Ibid.).

Mais les impacts sur les êtres humains commencent aussi à se faire ressentir. On observe une croissance du nombre de cancers de la prostate et des testicules chez les hommes, des cancers du sein chez les femmes, et une puberté plus précoce chez les jeunes filles. (www.médecines-douces.com). Les concentrations en antibiotiques dans les eaux impliqueraient également le développement de micro-organismes résistants (SALOMON, 2008a).

Pour revenir au cas argentin, l’usage de la pilule contraceptive reste modéré. En effet, elle n’est que très rarement remboursée par l’assurance santé (équivalent de la Sécurité

Sociale et des mutuelles) et son usage n’est pas culturel dans tous les milieux de la société. Selon le Centro Latinoamericano Salud y Mujer (CELSAM, Centre latinoaméricain santé et femmes), seuls 39 % des Argentines de moins de 20 ans utilisent un contraceptif anti-grossesse (www.cimacnoticias.com) ! Les méthodes contraceptives sont limitées selon ce centre, que ce soit une contraception anti-MST ou anti-grossesse. Les hormones d’origine humaine ne sont donc pas ce que l’on peut considérer comme un fléau environnemental, à l’inverse des conclusions publiées sur les pays du Nord.

Par ailleurs, l’Argentine est un des premiers producteurs de viande. Le bœuf est l’animal roi de la Pampa, mais on trouve de très nombreuses volailles, nomment les poulets dans tout le pays et des ovins en Patagonie. Pour l’heure, le pays n’est pas un gros utilisateur d’hormones de croissance animales. Mais quel sera l’impact de la mondialisation sur le recours aux produits pharmaceutiques ? Ce sont des questions auxquelles nous ne pouvons répondre aujourd’hui. Mais il ne faut pas croire que l’Argentine soit en retard sur ces questions scientifiques. En effet, les Argentins ont créé Pampa Mansa, une vache clonée qui produit du lait contenant des hormones de croissance humaine qui pourrait soigner le nanisme (CLARIN, 2003). L’absence de garde-fous pose des questions sur le recours aux traitements hormonaux dans ce pays, permis notamment grâce aux progrès scientifiques sur les OGM.

4-2-2- Les OGM en Argentine

En 1996, la firme Monsanto choisissait l’Argentine pour introduire son soja transgénique Round Up Ready (RR). C’est un soja transgénique qui possède un gène lui permettant de résister au Round Up, puissant herbicide, également développé par Monsanto. Selon VIOLLAT (2006) « l’argument de vente est simple : moins de pulvérisations

nécessaires, moins de dépenses et plus de rendements ». En vendant en plus son herbicide au

tiers de sa valeur, Monsanto a subventionné les agriculteurs argentins pour développer son soja, passant de 6 millions d’ha en 1996, à 15,2 millions en 2006 (Ibid.), faisant de l’Argentine le second pays utilisateur d’OGM après les Etats-Unis.

En soi, Mendoza n’étant pas une province de production de soja ou de maïs, les OGM n’envahissent pas ses terres. De même, l’élevage est résiduel à Mendoza, donc les risques de pollution par les effluents animaux sont là aussi limités. Le risque provient donc avant tout le de consommation humaine. La viande consommée par les Mendocinos peut avoir été nourrie au soja et au maïs OGM et ces organismes génétiquement modifiés pourraient se retrouver dans les effluents domestiques. Le risque principal pour les eaux est donc celui-ci.

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La pollution biologique, celle des éléments du vivant, matières animales et végétales, concerne donc la pollution bactériologique, hormonale et génétique. On peut même y ajouter les marées vertes et l’eutrophisation, pollution bio-physique, que nous traiterons avec les nutriments et l’oxymétrie en partie III.

Si nous ne disposons de données sur la pollution aux hormones ou aux OGM, les données sur la bactériologie sont plus complètes. En effet, grâce à la base de données de l’INA, soit des analyses de coliformes fécaux et totaux, et des bactéries aérophiles mésophiles dans les eaux de surface, et à la cartographie réalisée par MASTRANTONIO (2006), nous avons pu proposer certaines hypothèses quant à la pollution des eaux par les bactéries. Il s’avère que deux sources principales de pollutions se dégagent : un système de collecte et de

traitement des eaux usées domestiques qui aurait besoin d’être amélioré, et un Système de traitement des eaux usées agro-alimentaires inefficace.

L’augmentation du nombre de bactéries depuis le barrage de Cipolletti jusqu’à la sortie de l’agglomération démontre un problème de pollution domestique. Peut-on attribuer ces sources de pollution bactérienne à des fuites dans les canalisations souterraines, ou au non raccordement au réseau collectif de certaines habitations, notamment les plus précaires ? Toujours-est-il que l’agglomération a un impact sur la qualité de l’eau. Par ailleurs, les rejets des stations d’épuration semblent aussi affecter la qualité de la ressource. Néanmoins, c’est nettement moins clair, puisque les différences de débits d’amont en aval par le système de gestion des quantités turno chico-turno grande, rend difficile l’évaluation de l’impact de ces stations. En revanche, l’impact industriel sur le collecteur Pescara et son exutoire le canal Auxiliar Tulumaya est particulièrement important. Le Système Pescara inauguré en 2004 révèle une efficacité et un gaspillage d’argent public… au moins sur ces paramètres.

Chapitre 5 :