• Aucun résultat trouvé

Ph Mazet et S.Stoléru (1993) Psychopathologie du nourrisson et du jeune enfant, Paris, Masson p.82-

conscience du corps de sa mère en même temps qu'il prend conscience de son propre corps. C'est pendant cette période que l'on voit l'enfant agripper les cheveux de l'adulte, tenter de le nourrir ou de lui retirer ses lunettes ; il étire son corps pour le voir de plus loin avant de se blottir contre lui. C'est vers 8 mois que l'enfant commence à faire une nette différence entre sa mère et l'autre, c'est l'angoisse du huitième mois dont parle Spitz en tant qu'organisateur de la personnalité. Il y a là, une désadaptation progressive de l'environnement à l'enfant, et celui-ci commence à prendre conscience qu'il est dépendant de la figure parentale, d'où cette angoisse. Néanmoins il s'agit aussi d'une phase d'exploration entre le connu et l'inconnu. L'enfant va faire l'expérience de ce qui est immuable et de ce qui peut être enlevé, remis, notamment sur le corps de la mère comme des lunettes ou un chapeau... Il semble alors qu'il commence de plus en plus à se représenter dans son corps comme une unité différenciée avec une limite.

L'évolution des capacités motrices de l'enfant, va jouer un rôle fondamental dans sa prise d'indépendance et dans sa relation au monde. Entre 9 et 12 mois, c'est la première période de la deuxième sous-phase du processus d'individuation dont parle Malher. Le nourrisson va avoir accès à tout un ensemble de déplacement pour mettre de la distance entre lui et la figure maternelle et pour explorer son environnement de manière active. De plus il pourra rechercher la sécurité nécessaire auprès de ses figures d'attachement ou grâce à des objets qui auront été investis et qui auront une valeur transitionnelle ; ce que l'on appelle plus communément les « doudous ».

Précisons rapidement ce qu'est la notion d'objets et de phénomènes transitionnels :

« Winnicott désigne ainsi tous les objets (peluche, chiffon, sucette...) et plus largement les phénomènes (mélodies, rituels d'endormissement...) dont l'enfant ne peut se passer, vers la fin de la première année. Ce sont des « pré-symboles » qui figurent la présence de la mère ou d'une partie de son corps tout en ne l'étant pas. Ils rendent la séparation supportable à l'enfant »24.

Ainsi l'enfant va avoir la capacité d'attendre la réponse de l'environnement car la distance va pouvoir se créer dans l'espace mais aussi dans la relation et donc dans le temps. Bien entendu ceci sous-tend un environnement suffisamment sécurisant pour le tout petit.

L'acquisition de la marche marque également un tournant dans la vie identitaire de l'enfant, elle marque la deuxième partie de cette sous-phase, en lui permettant l'élargissement des mondes humain et inanimé et d'éprouver sous des formes multiples, l'exercice de ses facultés motrices. C'est aussi le moment où apparaît un intérêt autour des parties génitales.

La troisième sous-phase de Malher dans le processus d'individuation s'étend de 18 à 24mois et plus. Ce qui rejoint Winnicott dans le fait que ce phénomène n'a pas de fin à proprement parler, puisqu'il nomme cette phase comme la phase « vers l'indépendance ».

Cette sous-phase est caractérisée par deux attitudes : le « shadowing », où l'enfant suit « comme son ombre » les fait et gestes de l'adulte et le « darting away » qui désigne le mouvement alternatif de rapprochement et d'éloignement que l'on peut mettre en lien avec l'apparition du « non » comme troisième organisateur de la personnalité. En effet, l'apparition du langage et en particulier du « non » va être un élément majeur de la prise de distance de l'enfant vis à vis des figures parentales. Si la marche permet l'éloignement physique du sujet, le langage va lui permettre de mettre une distance psychique par l'accès au symbolisme et par la formulation de ses désirs. Il va ainsi pouvoir intérioriser les exigences de l'environnement et ses limites. La rencontre entre la réalité psychique intérieure de l'enfant et la réalité extérieure partagée par l'ensemble, va pouvoir se faire. C'est aussi à cette période que l'enfant va faire ses premières identifications, à commencer par l'identification aux figures parentales.

Enfin, la mise en perspective de ces différentes théories sur le développement affectif de l'enfant, il est important de noter que la plupart de ces théories ne sont valables que dans un environnement « suffisamment bon » dans les sens où il s'agit d'un environnement capable de

s'adapter aux besoins du nourrisson pour lui permettre de potentialiser ses processus de maturation innés. Freud quant à lui énonce qu’éduquer, tout comme gouverner et psychanalyser sont des tâches impossibles à réaliser pour l'Homme. Ainsi, nous pouvons dire que les parents quels qu'ils soient, sont les meilleurs parents qu’ils puissent être et font du mieux qu’ils peuvent. Bien souvent leur propre enfance a pu être compliquée, ce qui peut les avoir privé des ressources psychiques nécessaires pour comprendre les besoins de leur enfant et d'y répondre de manière adéquate. Nous allons nous attacher à définir les dysfonctionnements familiaux au travers de la notion des traumatismes relationnels précoces répétés et considérer quels peuvent être leurs impacts sur le développement de l'enfant.