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Mauvaise simulation de la circulation de fond

4.2 Analyse d'une simulation globale inter-annuelle

4.2.3 Mauvaise simulation de la circulation de fond

Dérive des caractéristiques des masses d'eau de fond

A partir du diagnostic de volume, nous avons détecté la présence d'une dérive importante des masses d'eau profonde, avec une perte de 6.7 Sv d'AABW (table 4.2) correspondant à

un aaissement moyen de la surface neutre 28.2 kg.m−3 de 100 m en 10 ans. An de mieux

caractériser cette dérive, nous présentons sur la gure 4.6 une comparaison entre les champs de température au fond de la n de la simulation G70 (2001) et de la climatologie WGHC [Gouretski and Jancke, 1998].

La diérence entre la température de fond du modèle et de la climatologie met en évidence un biais majeur dans le Bassin Australo-Antarctique, avec un écart dépassant souvent 0.5°C (gure 4.6). On y observe ainsi l'absence d'AABW aux températures inférieures à 0°C dans le modèle, alors que ces eaux froides tapissent normalement la totalité du fond du bassin. Un biais chaud apparaît aussi dans le Bassin de Weddell-Enderby, quoique de moindre intensité (∼ 0.2°C). Dans les autres bassins profonds (Crozet, Perth) situés plus au Nord, il n'y a pas de biais signicatif des propriétés de fond. Le biais chaud du Bassin Australo-Antarctique résulte d'une dérive régulière des propriétés hydrologiques (gure 4.7), de l'ordre de 0.1 °C/decade, soit

-0.015 kg.m−3/decade. Cette dérive s'explique par l'absence d'une source d'eau de fond froide

qui équilibrerait la pénétration de la chaleur au fond par diusion.

Le fait que le biais soit maximum dans le Bassin Australo-Antarctique montre que les sources d'AABW y sont particulièrement mal représentées dans le modèle. La majorité des AABW proviennent d'eaux denses formés sur le plateau continental Antarctique qui plongent le long

Bottom temperature (2001) −0.5 −0.5 0 0.5 0.5 0.5 0.5 1 1.5 1 1 0.5 0.5 0.5 0 20oE 30oE 40oE 50oE 60oE 70oE 80oE 90oE 100oE 110oE 120oE 70oS 65oS 60oS 55oS 50oS 45oS 40oS 35oS 30oS −1 −0.5 0 0.5 1 1.5 2

Climatologic bottom temperature (WGHC)

−0.5 −0.5 0 0.5 −0.5 1 0.5 1.5 0.5 0 0 0.5 0 0.5 0.5 0.5 0.5 20oE 30oE 40oE 50oE 60oE 70oE 80oE 90oE 100oE 110oE 120oE 70oS 65oS 60oS 55oS 50oS 45oS 40oS 35oS 30oS −1 −0.5 0 0.5 1 1.5 2

Bottom temperature anomaly (G70−2001 minus WGHC)

20oE 30oE 40oE 50oE 60oE 70oE 80oE 90oE 100oE 110oE 120oE 70oS 65oS 60oS 55oS 50oS 45oS 40oS 35oS 30oS −1 −0.8 −0.6 −0.4 −0.2 0 0.2 0.4 0.6 0.8 1

Figure 4.6: Comparaison des températures au fond entre (en haut à gauche) la simulation G70 et (en haut à droite) la climatologie WGHC. Le diérence entre G70 et WGHC est d'autre part présenté sur la gure du bas. La température au fond de la simulation G70 est une moyenne sur la période 1992-2001, soit après ∼40 ans de dérive du modèle.

1955 1960 1965 1970 1975 1980 1985 1990 1995 2000 2005 −0.6 −0.4 −0.2 0 0.2

temperature at bottom (3900m): 89.5°E, 62°S

1955 1960 1965 1970 1975 1980 1985 1990 1995 2000 2005 28.28 28.3 28.32 28.34 28.36 neutral density

été identiés. 60 % des AABW sont formées en mer de Weddell [Orsi et al., 2002], tandis que le reste est principalement formé en mer de Ross et au large de la Terre Adélie [Rintoul, 1998, Orsi et al., 2002]. En supposant que la principale source d'AABW du Bassin Australo-Antarctique se trouve en Terre Adélie, le fait que la dérive des températures de fond soit maximal dans ce bassin indique que la plongée de l'AABW en Terre Adélie est particulèrement mal simulée.

La plongée des eaux profondes le long du talus Antarctique est rendue dicile dans les modèles de circulation générale parce qu'elle ne peut se faire qu'à deux conditions :

 An de plonger, des eaux très denses doivent se former sur le plateau continentale, ce qui nécessite une bonne représentation des vents côtiers antarctiques (vents catabatiques), des processus de formation de la glace de mer (génération des polynies) et de transport de la glace de mer et des icebergs [Mathiot, 2009].

 Ensuite, ces eaux denses s'écoulent le long du talus en plumes benthiques très énergé-tiques progressivement modiées par l'entraînement des LCDW au-dessus [Gordon et al., 2004]. Ces processus ne-échelle et hautement non-hydrostatiques ne peuvent pas être directement représentés dans un modèle de circulation générale et la paramétrisation de ces processus de plongée reste très insatisfaisante pour l'instant, en particulier dans les modèles à coordonnées z. Il semble d'autre part que la marée puisse aussi jouer un rôle important pour favoriser la formation de ces plumes.

La gure 4.8 montre la structure verticale des masses d'eaux à la frontière est du domaine (120°E). C'est par cette frontière que les eaux de fonds formées en mer de Ross et en Terre Adélie entrent normalement. La climatologie WGHC [Gouretski and Jancke, 1998] fait apparaître très clairement la présence d'une poche d'eau très froide (<0°C) de 1000 m d'épaisseur en moyenne, plaquée contre le talus antarctique et s'étendant sur l'ensemble du Bassin Australo-Antarctique. Cette poche à une salinité légèrement <34.7 et une densité neutre >28.3 kg m−3.

En comparaison, on ne trouve quasiment pas de masse d'eau de densité neutre >28.3 kg m−3

dans G70. Un courant profond est normalement associé à la présence de ces eaux denses le long du talus antarctique. Ce courant bifurque au sud du plateau de Kerguelen, avec une partie qui remonte le long du anc est du plateau de Kerguelen pour former le courant de bord ouest d'un gyre cyclonique profond (voir chapître 3.3.1). Ce courant profond peut atteindre des vitesses importantes (> 10 cm s−1), formant un maillon essentiel de la circulation et la ventilation de l'AABW dans l'océan mondial. Son absence dans G70 implique ainsi que la boucle profonde de la circulation méridienne de l'Océan Austral est probablement assez peu réaliste dans le modèle .

ORCA025-G70 CLIMATOLOGIE WGHC

Figure 4.8: Comparaison entre G70 et la climatologie WGHC à 120°E, le long de la frontière est du domaine.

Impact de la dérive profonde sur la circulation du CCA

Nous allons maintenant voir que la mauvaise représentation de l'AABW dans le modèle a aussi des implications fortes sur la circulation horizontale. En 2006, plusieurs simulations inter-annuelles au 1/4° ont été menées simultanément an de comparer diérents jeux de forçage ainsi que diérents scénarios de rappel T/S. L'objectif principal était l'étude de leur impact sur l'intensité de la cellule méridienne Atlantique et sur les dérives T/S [Barnier et al., 2007]. La première simulation, menée au LEGI a déjà été présentée en longueur, puisqu'il s'agit de G70.

Ici, nous nous intéresserons particulièrement à la simulation KAB001 menée à l'IFM-GEOMAR, Kiel, qui se diérencie de G70 par :

 l'utilisation du jeu de forçage CORE au lieu du jeu DFS3.

 la prescription d'un rappel 3D en T/S dans les régions polaires, et notamment au sud de 50°S (temps de rappel : 180 jours). La climatologie utilisée pour le rappel est WOA98 [Levitus et al., 1998].

puis-Figure 4.9: Transport [Sv] au Passage de Drake dans les simulations G70, KAB001 et KAB002. Extrait de Barnier et al. [2007].

qu'elle permet d'obtenir une sortie de modèle dont les champs T/S restent proches de la clima-tologie imposée en rappel. En particulier, ce rappel empêche la dérive des propriétés des masses d'eau profondes autour de l'Antarctique. Notons que cette simulation a été utilisé par Durgadoo et al. [2008] an de décrire la structure du courant autour de Conrad Rise. La circulation qu'ils décrivent est en excellent accord avec celle proposée par Roquet et al. [2009].

L'évolution du transport du CCA modélisé est montrée sur la gure 4.9. Au début de la simulation, on observe une diminution rapide du transport dans G70 tandis que dans KAB001, le transport reste stable autour de sa valeur initiale de 155 Sv. Après la phase de diminution rapide au cours des 10-15 premières années de simulation, le transport dans G70 se stabilise aux alentours de 115 Sv. En fait, une simulation plus longue a montré que le transport dans G70 ne se stabilise pas vraiment, mais que la diminution devient assez lente passée la période initiale de spin-up. An de vérier que la stabilisation du transport dans KAB001 est bien dûe au rappel T/S, une simulation supplémentaire KAB002 a été eectuée, consistant à arrêter le rappel T/S à partir de l'année 1985 de KAB001. L'évolution du transport de KAB002 est aussi montrée sur la gure 4.9, avec une courbe très comparable à la période de spin-up de G70, ce qui conrme bien le lien entre la présence d'eaux denses le long du talus antarctique et le transport du CCA. Ce lien n'est d'ailleurs pas étonnant, puisque des eaux denses le long du talus permettent d'intensier le gradient méridien de densité au travers de l'Océan Austral. Et par géostrophie, ce gradient méridien contrôle l'intensité du CCA.

4.3 Tests de sensibilité sur une conguration régionale de