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Les mathématiques comme indicateur de la situation de l’enseignement professionnel dans

CHAPITRE 2 : LA FILIERE PROFESSIONNELLE DE PRODUCTIQUE USINAGE

2.2. Continuités et tensions dans l’histoire de l’enseignement professionnel

2.2.3. Les mathématiques comme indicateur de la situation de l’enseignement professionnel dans

Sido (2008) rend compte de l’hésitation historique qui a présidé à l’institutionnalisation scolaire de l’enseignement professionnel en France entre 1945 et 1953. Fallait-il rattacher les filières professionnelles99 au primaire ou au secondaire ? Dès le début de son intégration dans le système scolaire national, trois groupes sociaux-professionnels, les enseignants du primaire, ceux du secondaire et les acteurs du monde économico-industriel, ont confronté leurs arguments, débattant de la place de l’Enseignement Technique Court et dans celui-ci, en particulier, de la fonction des mathématiques.

Sido (ibid.) décrit trois positions initiales relatives à l’enseignement des mathématiques dans l’enseignement professionnel :

− Une première position, celle des instituteurs qui avaient été impliqués dans l’éducation post- primaire, est favorable au rattachement des centres d’apprentissage professionnel à l’enseignement primaire ;

− une deuxième position, celle du patronat100, attend des ouvriers qualifiés moins « manuels », donc plus capables de prendre des décisions à partir d’informations chiffrées ou graphiques, de changer de poste de production et de communiquer avec les cadres ayant fait des études supérieures;

− Une troisième position, celle de l’institution, qui prône un enseignement des mathématiques spécifique aux Centres d’apprentissage, est favorable au rattachement de ces derniers à l’enseignement secondaire.

Sido liste les raisons qui, dans les années 1950, justifient la position des enseignants du premier degré consistant à vouloir rattacher les filières de formations professionnelles à l’enseignement primaire :

− Des similitudes de finalités, de méthodes et de contenus avec l’enseignement primaire ; − L’utilisation d’une pédagogie active et des choix de problèmes pris dans la vie courante, un

programme de mathématiques proche de celui du certificat d’études primaires, fondé sur la pratique des opérations usuelles, du système métrique et du mesurage ;

− L’attachement des enseignants, dans ce cas majoritairement des instituteurs, à certaines valeurs. A cette époque, le Certificat d’Études Primaire incarne l’une de ces valeurs : d’abord parce qu’il valide l’acquisition de connaissances élémentaires du point de vue de l’élève, ensuite parce qu’il atteste de l’efficacité professionnelle des instituteurs impliqués ;

99

En employant l’expression filière professionnelle, nous faisons un anachronisme puisque la continuité collège- lycée n’était pas établie. Nous avons néanmoins opté pour cette expression parce qu’il y a bien une continuité du cursus scolaire et afin d’éviter d’introduire les dénominations historiques qui n’auraient servi qu’une fois dans notre propos. Ici, il faudrait utiliser centre d’apprentissage professionnel.

100

120 − Le fait que la majorité des élèves (84 %) entrant en Centre d’Apprentissage professionnel

provienne de l’enseignement primaire (Figure 13).

Figure 13 : L’origine des élèves dans les centres de formation professionnelle de l’après-guerre en 1945.

Graphique réalisé à partir des données de Sido, 2008 p. 3.

En 2015, l’affiliation de l’enseignement professionnel à l’un ou l’autre niveau du système éducatif n’est plus un enjeu structurel comme il pouvait l’être en 1945. Les filières professionnelles existent et fonctionnent. Notre intérêt pour les arguments évoqués ci-dessus s’explique parce qu’ils nous permettent d’une part d’éclairer la culture professionnelle et les représentations d’arrière-plan, parfois anciennes mais souvent encore vivaces, qui perdurent dans les valeurs, postures et habitus professionnels des enseignants des filières professionnelles ; d’autre part de resituer l’enseignement professionnel dans le système scolaire français, et de mieux percevoir les lignes de fracture et de soudure qui expliquent les secousses et les reconfigurations régulières de système, et tout particulièrement de sa région la plus neuve : l’enseignement professionnel.

Nous allons détailler ces trois positions dans le but de suivre l’évolution de la relation entre l’enseignement professionnel scolaire et l’enseignement des mathématiques. Et nous allons chaque fois rechercher ce qui, dans la situation actuelle, les confirme et/ou les prolonge, en essayant de voir ce qui, dans l’enseignement professionnel contemporain, et plus spécialement la filière de productique usinage qui est notre objet d’étude, se rapproche de l’enseignement primaire, de l’enseignement secondaire, ou de ce qui les prolonge d’un côté par la formation par apprentissage non scolaire, de l’autre par le cycle court des études supérieures.

Il y a donc quatre contextes de formation susceptibles d’influencer l’enseignement professionnel.

En même temps qu’elle nous a servi à mettre en lumière les continuités ou les ruptures entre la situation initiale et la situation actuelle de l’enseignement professionnel, la rétrospective historique que nous venons d’effectuer nous a fourni un cadre d’analyse en trois points : les contenus, la démarche pédagogique, les valeurs. Pour chacun de ces points, nous déterminerons des points d’affinité ou de divergence de la discipline de productique usinage avec les quatre contextes d’enseignement (primaire, secondaire, apprentissage, supérieur) avec lesquels l’enseignement professionnel s’est historiquement construit.

Continuant d’exploiter l’entretien mené avec l’enseignant de productique usinage E-pu1, nous cherchons donc à comprendre comment ce praticien de l’enseignement professionnel positionne ses interventions en mathématiques par rapport à l’enseignement primaire, Centre d’apprentissage scolaire 84%

Vie active

121 l’enseignement secondaire ou l’apprentissage professionnel. Nous croisons son point de vue individuel avec le point de vue institutionnel des textes officiels.

Parmi les aspects mathématiques discutés ci-après, nous commençons par examiner quelques- uns des contenus mathématiques évoqués par E-pu1 lors de l’entretien : le travail sur les solides et la numération décimale.

2.2.3.1. Le travail sur les solides : un faux ami de l’enseignement primaire

En productique usinage, deux objectifs de formation essentiels sont l’un de savoir interpréter/écrire un document technique relatif aux différents états de fabrication d’une pièce, l’autre de savoir régler une machine outil en vue de produire une pièce conforme au modèle décrit.

Les deux objectifs mobilisent à la fois des savoirs conceptuels et des savoirs d’actions en situation d’usinage. D’un certain point de vue, on peut concevoir que la réalisation d’une opération d’usinage est une activité de reproduction comme on en propose en géométrie dans l’enseignement primaire (réalisation de maquette à partir de patron, assemblage de solides à partir de vue, ...). En effet, les procédures recensées peuvent se fonder sur la perception, la manipulation, l’observation ou la comparaison directe.

Dans l’enseignement primaire, les procédures personnelles sont possibles car elles sont considérées comme un ressort du processus d’enseignement-apprentissage. Elles expriment un niveau de conceptualisation du sujet à un moment donné et permettent à l’enseignant d’organiser, s’il l’entreprend101, une démarche réflexive, voire d’évaluation, des diverses procédures existantes. Mais cette ressemblance est trompeuse car dans l’enseignement du lycée professionnel, les procédures correspondent à des pratiques de référence dans le domaine d’activité professionnelle. Elles ne sauraient être personnelles ainsi qu’en atteste le témoignage de l’enseignant E-pu1 :

441 Ch : donc une fois qu'ils doivent faire un travail / i ‘faut bien qu'i's fassent des choix sur le logiciel /alors comment i's font ?

442 E-pu1 : ça dépend parc ‘qu’en fait on y va par palier / sur les premières activités / euh / on va leur donner une guidance presque complète / c'est à dire nous fournissons le volume / on fournit l'enchaînement des opérations

[…]

444 E-pu1 : et il a juste à donner l'cycle à l'ordinateur […]

446 E-pu1 : un outil qu'on lui indique et avec cet outil / générer la forme qu'on lui indique /première étape / deuxième étape / i ‘va choisir l'outil pour générer la forme

[…]

448 E-pu1 : troisième étape / i' va lui choisir l'enchaîn'ment des formes / par laquelle i'commence / etc. en étant à la toute fin de la formation / où i1 est total'ment autonome / où i'va même générer le volume // mais ça / on est vraiment en fin d'formation

101

122 Dans la section antérieure L’espace de travail géométrique de la productique usinage, nous avons montré comment le langage graphique enseigné en construction mécanique était sous l’influence des pratiques sociales de référence. Nous avons situé en 1999 l’introduction du langage normalisé G.P.S.102 issu du monde de l’industrie automobile puis généralisé aux autres domaines d’activités industrielles.

Nous avons indiqué que si la normalisation G.P.S. était devenue un objet d’enseignement en construction mécanique, quinze ans plus tard, elle n’était pas forcément maîtrisée par tous les enseignants en atelier. De plus, le concept G.P.S., en tant que norme professionnelle, fait l’objet de mises à jour régulières de la part du monde professionnel. Ce que nous venons de décrire concernant l’outil conceptuel G.P.S. peut aussi s’appliquer aux outils logiciels DAO-C.A.O103. Donc, par les nécessités des mises à jour des outils conceptuels ou logiciels du monde industriel et de la formation des enseignants spécialisés, la définition des contenus enseignés en matière de dessin technique résulte d’une négociation à long terme entre les acteurs du système éducatif et ceux du monde professionnel.

Pour ces raisons, le travail sur les solides, via les tâches liées à l’interprétation ou à l’écriture de dessin technique, ne peut en aucune manière être affilié à l’activité de reproduction proposée dans l’enseignement primaire. En effet, bien que la validation visuelle ou la manipulation puissent être communes aux deux espaces de travail géométrique, la réalisation d’une figure à partir d’un modèle réel ou figural à l’école montre peu de points communs avec la réalisation d’une pièce à partir d’un modèle conceptuel technologique. Les deux tâches ne correspondent ni au même niveau de complexité conceptuelle104, ni aux mêmes enjeux de formation, ni aux mêmes outils sémiotiques.

2.2.3.2. La numération décimale : un vrai ami de l’enseignement primaire

Les connaissances relatives à la numération et aux opérations élémentaires et aux conversions dans le système métrique sont en revanche un point commun entre l’enseignement professionnel et l’enseignement primaire. Les témoignages suivants provenant de deux enseignants, E-pu1en productique usinage et E-cm en construction mécanique, le confirment :

364 E-pu1 : […] on reprend à la base hein / on reprend aux additions et soustractions / on en est là

[…]

376 E-pu1 : non/ ça d'vient une gymnastique /tout comme les unités /dixième /centième de millimètre /

etc. les fractions

102 G.P.S. : Spécification Géométrique des Produits ou Geometrical Product Specification. 103 D.A.O.-C.A.O. : Dessin Assistée par Ordinateur-Conception Assistée par Ordinateur. 104

Nous faisons allusion ici aux trois niveaux : solide nominal, solide conceptuel possible avec les notions de peau et de tolérancement, solide réel dont on se demande s’il est conforme au précédent. (Cf. L’espace de travail géométrique de la productique usinage).

123

5 E-cm : y’a d’gros problèmes en maths/ savoir mesurer/ savoir mesurer en millimètre / c’est la panique

en dehors du centimètre// les surfaces/ les volumes/ les densités// dans la plupart des métiers il y a nécessité de métrer

On notera cependant que, dans le programme de mathématiques de lycée professionnel, la liaison nécessaire (et constatée sur le terrain) entre l’enseignement professionnel et l’enseignement primaire n’est pas explicitée alors que la continuité entre le collège et l’enseignement professionnel est marquée (Figure14) :

N° de

page Référence à la continuité des apprentissages mathématiques du collège au lycée professionnel

1 La formation a pour objectifs […] de former les élèves à l’activité mathématique et scientifique par la mise en œuvre des démarches d’investigation et d’expérimentation initiées au collège ;

4

[Le] domaine [des statistique et probabilités] constitue un enjeu essentiel de formation du citoyen. Il s’agit de fournir des outils pour comprendre le monde, décider et agir dans la vie quotidienne. La plupart d’entre eux ont déjà été introduits au collège.

4 À la suite du collège, le lycée professionnel doit, en particulier, permettre aux élèves d'entretenir et de développer leurs compétences en calcul mental.

9 [En géométrie], les capacités à développer s'appuient sur la connaissance des figures et des solides acquise au collège.

17 [En trigonométrie], faire le lien, pour certaines valeurs particulières, entre le cosinus d'un nombre et le cosinus d'un angle défini au collège dans un triangle rectangle.

Figure 14 : Quelques références à la liaison collège-lycée dans le programme de mathématiques du lycée

professionnel (BOEN n°2 spécial du 19/02/2009).

L’institution est consciente des lacunes des élèves mais montre ici une certaine pudeur à les décrire et les n’atténue en ne remontant pas jusqu’à l’école primaire.

Les disciplines générales sont fréquemment associées à un passé scolaire rejeté, mais un déficit dans ces disciplines empêche la plupart du temps de réussir dans les matières professionnelles. Certes, des élèves et des apprentis de la voie professionnelle ont échoué au collège « à cause » des disciplines générales, mais souvent plus pour des raisons d’ordres didactique et pédagogique que pour des raisons d’ordre cognitif. (HCE, 2009 b, p. 23)

L’institution étant consciente du fait que certaines difficultés des élèves sont ancrées dans un passé scolaire de l’école primaire, elle doit néanmoins maintenir sa posture égalitariste déclarée entre les différents baccalauréats, ce qui est cohérent avec l’euphémisation du programme qui situe la résolution de ces difficultés dans la continuité avec le collège.

Concernant la question qui nous intéresse, nous pouvons dire qu’une partie de l’enseignement de mathématiques mis en œuvre dans les disciplines spécialisées (aussi bien productique usinage que construction mécanique) est affilié à l’enseignement primaire au sens où l’effort enseignant porte sur des savoirs fondamentaux (écriture décimale, opérations élémentaires, conversions). Cependant, cette affiliation, bien qu’acceptée par les enseignants, est cachée au sens où le travail de médiation sur les savoirs mathématiques effectué par les enseignants de l’enseignement professionnel n’est pas évoqué dans les documents officiels.

124 Poursuivant la mise en perspective de l’enseignement professionnel par rapport aux quatre contextes de formation (enseignements primaire, secondaire ou aux formations situées à leurs marges), nous envisageons à présent notre deuxième axe descriptif, celui de la démarche pédagogique.

2.2.3.3. La démarche pédagogique : entre la démarche inductive et le tutorat

La pédagogie active relève d’une démarche constructiviste, où l’on s’assure que l’élève a l’occasion, avec ses pairs, de s’approprier le problème, d’exprimer ses représentations ou procédures puis de s’en distancier pour éventuellement les remanier. Cette démarche est décrite dans la séquence conversationnelle qui suit entre l’enseignant E-pu1 et la chercheuse Ch :

317 Ch : […] ils sortent des documents qui contiennent des erreurs ? 318 E-pu1: tout l' temps […]

321 Ch : […] et comment vous les corrigez alors ? directement sur les imprimés

322 E-pu1 : soit je signale l'erreur soit si el'e met pas en jeu la sécurité des matériels / des fois on les laisse louper […]

324 E-pu1 : dire bon ben voilà ça march' pas / ensuite on s'pose / on analyse // c'est justement not' credo/ apprendre en faisant

325 Ch : on les laisse aller jusqu'au bout d'leurs choix quoi

326 E-pu1 : voilà //et ensuite / on voit ensemble pourquoi le choix / il a été mauvais 327 Ch : O.K /et est-ce qu'ils arrivent bien à verbaliser euh ?

328 E-pu1 : non

329 Ch : la raison de l'erreur ?

330 E-pu1 : non / ils ont beaucoup d'mal / ils ont beaucoup d'mal par manque de maîtrise technique /comme i's ont un manque de maîtrise technique des outillages / i's ont du mal à pointer l'élément qui a fait que euh on est hors qualité

La prévalence d’une pédagogie active est un point de continuité avec l’enseignement primaire et, sans doute, un élément différenciateur entre le lycée général et le lycée professionnel. Cependant, les problèmes abordés en lycée professionnel ne sont pas comparables à ceux de l’école primaire. D’une part, l’espace de travail géométrique est plus complexe qu’à l’école primaire : comme nous l’avons déjà signalé, l’espace affine euclidien exploite la relation de Pythagore, les vecteurs, les déplacements mais il est vrai que les procédures de vérification peuvent être directes. D’autre part, les problèmes sont issus de la vie courante ou du domaine d’activité professionnelle. Or, dans la filière de productique usinage, les problèmes technologiques nécessitent d’être familiarisé avec le questionnement technologique, ce qui n’a rien de spontané. Le témoignage d’E-pu1 indique d’ailleurs que la pratique réflexive sur une erreur peut s’avérer difficile.

Par cette démarche, les enseignants de l’enseignement professionnel combinent la condition scolaire et la condition d’apprentissage. Il est important de souligner que « le milieu professionnel est un partenaire à part entière de la formation des élèves, même s’il n’en a pas la responsabilité principale comme c’est le cas pour les apprentis » (HCE, 2009 b, p. 7). Les lycées professionnels bénéficient par ailleurs d’une certaine autonomie pour combiner les temps de stage en entreprise et les temps de formation scolaire. De plus, la formation

125 professionnelle scolaire peut parfois être mise en œuvre de façon originale, à partir de commandes authentiques tout en restant dans l’établissement :

Des formules du type « entreprises d’entraînement pédagogique permettent d’engager les jeunes dans une activité professionnelle encadrée, mais réelle : les lycées hôteliers accueillent de vrais clients dans un « vrai » restaurant, et les lycées professionnels agricoles ont leur exploitation. (ibid., p. 7).

Ainsi, à la fin de la partie 2 (chapitre 5), nous analyserons un corpus de données de productique usinage relatif à la fabrication d’un prototype appelé « détecteur de houle », commandé par l’Institut Robert Hooke105 de l’université de Nice Sophia Antipolis au lycée professionnel dans lequel nous avons enquêté.

La pédagogie active dans l’enseignement professionnel scolaire est aussi rendue possible par la limitation des effectifs :

Les effectifs des classes permettent une prise en charge plus individualisée et la mise en œuvre d’un enseignement qui fait appel à la participation. L’effectif moyen par classe en LP est inférieur à 19, quand il est proche de 28 en LEGT ; seulement 6 % des classes de LEGT ont moins de 15 élèves, ce qui est le cas de presque 33 % des classes en LP. (ibid., p. 7).

Les deux classes de productique usinage que nous avons visitées comptaient effectivement moins de 15 élèves.

La démarche pédagogique décrite est dans la continuité de l’enseignement primaire mais cela, là encore ne permet pas d’affilier directement l’enseignement professionnel à l’enseignement primaire. La place de l’enseignement professionnel semble davantage se situer entre l’apprentissage professionnel et l’enseignement primaire.

Pour finir, nous abordons le troisième volet de notre comparaison, celui des valeurs transmises par l’enseignement professionnel sur les relations entre l’individu (l’élève, l’enseignant, la collectivité) et le savoir, théorique ou pratique : ces valeurs permettent-elles de situer l’enseignement professionnel par rapport aux enseignements primaire, secondaire ou supérieur ?

2.2.3.4. Valeurs actuelles attachées à l’enseignement professionnel

Convenons qu’une valeur dans un groupe social résulte de la tension ressentie entre un phénomène jugé comme positif par ce groupe et l’effort qu’il consent pour que ce phénomène se réalise, ou inversement de son effort pour éviter la réalisation d’un phénomène qu’il juge négatif. La valeur est positive dans le premier cas et négative dans le second.

Nous avons repéré deux valeurs positives dans les différents discours recueillis auprès des enseignants de l’enseignement professionnel.

La première valeur positive est associée à l’atelier, ce qui est une valeur directement inspirée du milieu professionnel (celui de l’apprentissage sur le terrain) comme le montre l’extrait

105L’Institut Robert Hooke, « chargé de développer un enseignement culturel des sciences », est un service général de l’Université de Nice (http://irh.unice.fr ).

126 suivant dans lequel l’enseignant E-pu1 décrit l’usage « mixte » qu’il fait de l’atelier ou de la salle de classe attenante :

169Ch : […] alors maintenant on va parler de de l'enseignement lui-même parce que jusqu'à présent on a parlé des élèves et de//de la matière// alors/ enseignez-vous en atelier seulement ? ben/ là je vois que non (Ch désigne la salle de classe attenante à l’atelier, dans laquelle se déroule l’entretien)

170 E-pu1 : c'est toujours mixte

171Ch : toujours mixte/ dans tous les ateliers ?

172-174 E-pu1 : oh en production souvent oui […] euh//ça se prête plus trop à de la techno magistrale

comme on a pu faire à une certaine époque //donc on est beaucoup sur le concept apprendre en faisant/ sur la découverte/ l'expérimental on va plutôt leur faire essayer des choses et ensuite un petit bilan en classe mais assez rapide

E-pu1 a un regard réflexif sur sa pratique enseignante : il parle de concept d’apprendre en faisant qu’il généralise aux praticiens d’atelier (on collectif). Nous constatons également qu’une valeur