• Aucun résultat trouvé

Manifestations orales des maladies rénales chroniques chez les enfants 53 

2.  Recension des Écrits 5 

2.4.  Manifestations orales des maladies rénales chroniques chez les enfants 53 

2.4.1. Importance du suivi dentaire chez les patients atteints d’une MRC

Un patient urémique ou atteint d’une maladie rénale chronique présente souvent des manifestations orales. Il est donc essentiel d’accorder à ces patients un suivi étroit de leur santé buccodentaire qui peut aussi affecter leur santé en général.(61) Entre autres, il est connu que le statut dentaire des patients urémiques est altéré de façon significative par rapport à celui des sujets normaux.(62) Nous savons qu’il existe un lien entre le taux d’urémie du patient et l’état de sa santé buccodentaire. Malheureusement, les conséquences de la dialyse sur la santé buccodentaire sont encore trop peu connues.(63)

2.4.2. Manifestations orales des maladies rénales chroniques

Parmi les différentes manifestations, on retrouve : pâleur des muqueuses orales, stomatite urémique, pétéchies, ecchymoses (64, 65), inflammation gingivale(65-69), hyperplasie gingivale (65, 69-71), perte d’attache parodontale (65, 66, 69, 72-75), hypoplasie de l’émail (65, 76, 77), oblitération pulpaire(75, 78, 79) et diminution de la prévalence à la carie (64, 65, 67, 69, 74, 77).

2.4.2.1. Inflammation et hyperplasie gingivale

Les infections locales au pourtour des dents ou sous les dents sont une source possible de maintien d’une inflammation systémique de bas grade qui peut entraîner à long terme des maladies cardiovasculaires.(80) Les patients traités pour une MRC et surtout ceux qui ont subi une transplantation rénale prennent plusieurs types de médicaments qui peuvent avoir des effets significatifs sur différents organes. (10, 61, 63) Par exemple, certains médicaments sont connus pour causer de l’hyperplasie gingivale et donc, complexifier et contribuer à la détérioration de l’hygiène orale. (61, 81) On retrouve une plus grande prévalence d’hyperplasie gingivale conséquemment à une hyperplasie interstitielle en réponse à la cyclosporine A et/ou la nifédipine.(82, 83) La combinaison de ces deux médicaments augmente d’ailleurs le degré d’hyperplasie gingivale par rapport à l’utilisation d’un des deux médicaments seulement. Il est possible de diminuer l’hyperplasie gingivale par l’utilisation de chlorhexidine. L’efficacité serait plus grande avec la chlorhexidine en gel par rapport au rince-bouche, mais le gel n’est malheureusement pas disponible au Canada. On rapporte aussi une nette amélioration lorsque la cyclosporine A est remplacée par le tacrolimus.(84, 85) L’hyperplasie gingivale d’origine médicamenteuse est aussi aggravée par une hygiène orale déficiente et une accumulation de plaque. Par contre, il est difficile de savoir si l’hygiène insuffisante est une conséquence ou une cause de l’hyperplasie gingivale.(86) Le côté inesthétique de l’hyperplasie gingivale peut avoir des répercussions tragiques sur l’adhésion d’un patient à ses traitements. En effet, certains jeunes patients essayent d’ajuster leurs doses de médicaments antirejet dans l’espoir de réduire leur hyperplasie gingivale.(83)

Figure 10. Hyperplasie gingivale d’origine médicamenteuse (87)

2.4.2.2. Stomatite urémique

Les muqueuses plus fragiles, la douleur orale, la perte de dents et les fractures dentaires diminuent aussi les chances de retrouver une bonne santé dentaire et systémique, sans compter une contribution possible à la malnutrition.(69, 88) La stomatite urémique est une observation clinique peu commune associée à l’urémie.(89) Il existe quatre types de stomatites urémiques décrites dans la littérature : érythémo-pultacée, ulcérative, hémorragique et hyperkératosique. Les lésions sont souvent très douloureuses et se produisent surtout sur la surface ventrale de la langue et sur les muqueuses antérieures.(89)

Ces lésions sont résistantes aux traitements lorsque les niveaux sanguins d’urée demeurent élevés, mais guérissent spontanément en 2 à 3 semaines suivant un rétablissement de la fonction rénale normale.(5)

Davidovich & al ont étudié les manifestations orales et parodontales des enfants,

adolescents et jeunes adultes souffrant d’insuffisance rénale.(61) Sur un groupe de 97 sujets recevant des traitements dans un département de néphrologie pédiatrique par rapport à un groupe de 38 sujets sains, les auteurs ont pris plusieurs mesures en lien avec la santé buccodentaire : indice de plaque, indice gingival, nombre de sites avec saignement au sondage, profondeur du sondage, récession gingivale, perte clinique d’attachement parodontal, hyperplasie gingivale, et indice CAO(s). On y constate que la durée de la dialyse et de la phase terminale d’insuffisance rénale ont une corrélation statistiquement significative avec l’indice gingival, la profondeur du sondage et la perte d’attache. De plus, la durée de la dialyse est aussi en lien avec l’indice de plaque, le saignement, l’hyperplasie gingivale, la récession gingivale et l’hypoplasie de l’émail.

2.4.2.3. Manifestations parodontales

Toujours dans l’étude de Davidovich & al, on remarque des évidences que les maladies parodontales sont significativement plus importantes chez les patients atteints d’une MRC que les sujets normaux en regard à la perte d’attache, la récession et la profondeur du sondage. La progression des maladies parodontales serait reliée à une mauvaise hygiène orale, le statut urémique du patient et la durée de la maladie rénale.(61)

2.4.2.4. Hypoplasie de l’émail et prévalence à la carie

Chez les patients pré-dialysés, une modification de leur diète est recommandée afin de diminuer l’apport protéique et de favoriser la prise de glucides, qui peut aussi altérer leur santé dentaire en augmentant leur risque carieux.(91) De plus, on remarque qu’une des conséquences des maladies rénales chroniques et de leurs traitements est le développement d’hypoplasie d’émail causé par un défaut lors de la formation de l’émail et sa minéralisation. L’hypocalcémie, la diminution des niveaux sériques de 1,25- dihydroxycholecalciferol, l’augmentation des niveaux sériques de phosphate inorganique et de parathormone seraient la cause de l’interruption de la formation d’améloblastes entraînant les défauts de l’émail. On pourrait donc croire que les patients atteints de maladies rénales sont à haut risque de caries.(83) Pourtant, ils présentent moins de caries que les enfants en santé, possiblement grâce à un effet inhibiteur provenant des niveaux d’urée dans la salive.(77, 92, 93) D’ailleurs, on constate une augmentation du risque carieux chez les enfants greffés avec succès. L’hypoplasie présente dans les puits et fissures de la surface des dents facilite une accumulation de la plaque dentaire cariogène. Comme les surfaces sont rugueuses, elles sont aussi plus difficiles à nettoyer.(83)