mon
salon...Quand
il n'y a pas de joliesfemmes,
leshommes
s'ennuient.Pour
vous, monsieur Bridel, je vous écrirai... Ah!Ah
! vousviendreztout seul. (ALucienne.)iSe soyez pas jalouse,ma
chérie... Elle est délicieuse.A
dimanche,ma
petite Lucienne...A
di-manche
Estelle... (Elleles embrasse.) Jeme
re-tire, j'aiune
foule de visites...Ne
vousdé-12
134 PETITES FOLLES
rangez pas, je vous en prie...
Au
revoir, aurevoir...
Au
revoir, vous.(Elleserre vigoureusementla mainde Bridelet disparait dansun grandfroufrou.)
SCÈNE XIV
Les Mêmes, moins Madame
LEMOUTIER MADAME
VARINOIS, i\\nv^ une socoiidede silcnci'.Voilà
une femme
exceptionnellement in-telligente! (Se tournant versBridel:) N'est-ce pas?lîRIDKL, iidniiiucinent.
Tout à fait.Oh!je suis tout à fait de votre avis.
MADAMi-: VARINOIS
Un
esprit!un
entrain !1$RI1)EL, toujours avec iioiiie.
J'ai renconlré dans
ma
vie bien deslemmes
remarquables, mais j'avoue quecelle-là...
ACÏIC II, SCÈNE XIV 135
MADAME
YARINOISCe sera
une
société très agréable, pour Lucienne etpour Estelle...BRIDEL
Absolument
la société qu'il leur faut.MADAME
YARINOISJe vois avec plaisir,
mon
gendre, que vous devenez raisonnable.LUCIEX-NE, à Riidel.
Quand
vous aurez finide vousmoquer
dema mère
î... (A M""-^ Varinois.)Tu
ne vois doncpas que Monsieurraille ?Oh
! vousma-niez l'ironie de la façon la plus spirituelle.
C'est
une
justice à vous rendre.BRIDEL, les bras croisés, àM'"» Varinois, semeUanten colère,peu àpeu.
Alors,
madame,
sérieusement, vous avez supposéune
minute que je laisseraisLucienne fréquenter cette grue?
136 PETITES FOLLES
MADAME
VARINOIS, indignée.Qu'est-ce quevous osez dire ?
BRIDEL
Ma
parole, il faut que vous soyez arrivée àun
degré effrayant d'inconscience!...(AEstellequifaitminedeseretirer:)Vous pouvez écouter ce queje vais dire...
ESTELLE J'aime autant pas.
(Elle sort.)
LUCIENNE Moi non plus.
BRIDEL, la retenantparla main.
Je vous
demande
pardon.Nous
allons nous expliquer, puisque l'occasion s'en pré-sente. Jecommence
à croire qu'ilyaun
petitmalentendu
entre nous. Asseyez-vous. (Il s'essuiele frontavec son mouchoir.) Vous voyez, je suis très calme.LtClENNE
Vous
êtes ridicule!ACTE II, SCÈNE XIV 137
MADAME
VARIXOISOh
! oui.BRIDEL
Je le sais. Néanmoins, permettez-moi de vous poser quelques questions...
Vous
êtes bien décidéeà allerdinerdimanche
prochain chez M™^ Lemoutier?LUCIENNE Parfaitement.
BRIDEL
Bon.
Vous
êtes décidée à continuer vos coquetteries avec tous les jeunes gens que vous présentera votre excellentemère
?MADAMl-; VARLNOIS
Ah!
ça!...LUCIENNE
- Tais-toi, je t'en prie...
BRIDEL
Et avecM. Toury enparticulier?
MADAME
VARINOIS Mais...1-2.
138 PETrriîS folles
LUCIENNE, à M-"^' Vaiinois.
Tais-toi, je t'en prie...
imiDKL Voulez-vous
me
répondre?LL'CIKNNi;
Je vous répondrai
quand
vousme
poserez des questions qui ne seront pas injurieuses.lîRIDEL
Je vais vous en poser encore
une
qui ne Test pas, ou,du
moins, je le pense. Voulez-vousm'accompagner
en Espagne où je suis obligé de partir ces jours-ci?LUCIENNE Non.
iîrii)i:l
Jevous avertis que jenepartirai pas sans vous.
LUCIENNE C'est votredroil.
ACTE II, SCÈNE XIV 139
BRIDKL
Etque sije ne pars pas, je
manque
uneaffaire très importante.
LUCIENNE
Je ne vous aijamais
accompagné
dans ce genre de voyages que vous faites tous les ans. Quelle lubie vous prend aujourd'hui?BRIDEL
Autrefois, en effet, je vous laissais à Paris; mais, àcette époque, j'avais confiance en vous.
LUCIENNt:
Vous
ne l'avez plus?BRIDEL Plus
du
tout.LUCIENNE C'est fâcheux.
BRIDEL
C'est
comme
ça... Encoreune
question140 PETITES FOLLES
et, cette fois-ci, ce sera ladernière. Désirez-vous divorcer?
LUCIENNE
Je vousassure que vous êtes fou>
BRIDEL
Je
me
mets entièrement à votre disposi-tion. iXousjoueronsune
des comédies qu'on a l'habitude de jouer dans ce cas-là.Nous
avons justementun
avoué dans la famille, profitons-en.Quant
à moi, j'ai assez demener
l'existence que vousme
faitesmener
depuis quelque temps ; j'ai assez de la têtepommadée
de M.Toury
; j'ai à m'occuper d'autre chose que deme demander
chaque matin si vous prendrezun amant
dans l'après-midi1 (Mouvementde Lucienne.) Ça m'é-nerve ! Ça m'énerve!..,Recommencez
à vous conduirecomme une femme
qui se respecte, ou bien alors mettez-vous franchement à vagabonder. Mais, dépêchez-vous ! Car je veux bien être cocu, mais je ne veux pas devenir enragé!ACTE II, SCÈNE XIV 141
LUCIENNE
Oh!
MADAME
YARINOIS, se levant.Vous
avez des expressions d'une vulgarité dégoûtante !LUCIENNE
Jamaisjenevous pardonnerai ce que vous venez de
me
dire!BRIDEL
Vous m'y
avez contraint. Je vais donc préparer notredéménagement
; vous voudrez bienme
faire savoir ce que vous aurez décidé.(IIrentre chez luiparl'escalier.)
MADAME
VARINOIS Je suis... je suis étourdie... Et toi ?LUCIENNE Moi,
maman
?MADAME
VARINOIS Oui.142 l'ElTlKS FOLLF.S
Moi, je ne suis qu'une chose, c'est que
mon
marime
payera ce pelit accès d'élo-quence!(Elle se dirige vers un bureau qui est du côté de Tescalier, près du pied.)
.MADAMK VARINOIS
Que
fais-tu?LLT.IHNNE Je vais écrire une lettre.
.MADA.Mi: VARINOIS
Tu
n'a pas besoin demoi
? LUCIENNE Non, merci.MADAME
VARINOIS. à la pinte.Et ce Denoizeau qui n'arrive pas !...
Pourvu que le baron...
(Elle sort.)
ACTE II, SCÈNE XV 143
SCÈNE XV
LUCIENNE, seule, puis
EDMOND
LUCIENNE; elle est prête à écrire, très nerveuse, fé-brile. Elle ala plume àlamain, réfléchit un instant, puis elle fait un geste de décision et commence.
«