Bromiley, 1991; Daniel, Lohrke, Fornaciari, & Turner, 2004; Love & Nohria, 2005; Wefald,
Katz, Downey, & Rust, 2010), la performance en contexte de récession (Latham & Braun,
2009), la prise de risque (Bromiley, 1991; Singh, 1986), les comportements politiques et
stratégiques (Bourgeois & Singh, 1983; Cyert & March, A Behavioral Theory of the Firm,
1992/1963), la croissance de l’organisation (Mishina, Pollock, & Porac, 2004; Penrose, 1959),
le risque de déclin organisationnel (Wiseman & Bromiley, 1996), la formation de
joint-venture internes (Zajac, Golden, & Shortell, 1991), la capacité d’adaptation aux changements
environnementaux (Cheng & Kesner, 1988; 1997; Meyer, 1982), ou encore la vulnérabilité de
l’organisation au risque de rachat (Davis & Stout, 1992).
138
Notre intérêt se porte particulièrement sur la relation entre slack et innovation (Bourgeois,
1981; Bourgeois & Singh, 1983; Bourgeon & Demil, 1999; Bradley, Shepherd, & Wiklund,
2011 ; Geiger & Cashen, 2002; Geiger & Makri, 2006; Herold, Jayaraman, &
Narayanaswamy, 2006; Lawson, 2001; Nohria & Gulati, 1996; 1997; Richtnér & Åhlström,
2006; 2010 ; Rosner, 1968 ; Singh, 1986).
Cette littérature fait débat puisque le sens de cette relation a successivement été reconnu
comme positif, négatif et curvilinéaire. Les points de vue quant à la capacité, des managers de
l’organisation le plus souvent, à utiliser de façon efficiente des ressources en excès pour
innover divergent en effet.
D’un côté, les tenants de la théorie économique considèrent que le point d’équilibre se
caractérise par un niveau de slack nul (Cyert & March, A Behavioral Theory of the Firm,
1992/1963). Les auteurs de la théorie de l’agence (ex. Jensen & Meckling, 1976) conviennent
que l’organisation se compose de coalitions, et qu’elle se comprend comme un système fait de
relations entre principaux et agents : dans ce cadre, les agents sont en mesure d’accumuler du
slack afin de poursuivre leurs intérêts propres au lieu de se comporter en faveur de
l’organisation. Si la résolution du conflit d’agence n’incombe pas au slack, c’est à travers la
mise en place de mécanismes incitatifs (qui visent à faire converger les actions des agents vers
les intérêts des principaux) que le slack se voit réduit. Le slack témoigne donc en cela d’une
inefficacité organisationnelle, et ne constitue qu’un coût pour l’organisation. Concernant
l’innovation, il semble que le slack encourage une forme d’indiscipline dans le financement
des activités de R&D : il permet en effet aux agents de poursuivre des projets qui leur plaisent
particulièrement, plutôt que de se concentrer sur les projets décidés par les principaux et jugés
comme effectivement créateurs de valeur.
De l’autre côté, plusieurs arguments viennent soutenir l’effet positif du slack sur l’innovation.
Le slack rend l’organisation moins sensible aux risques et à l’incertitude contenue dans tout
projet innovant (ex. Bourgeois, 1981; Geiger & Cashen, 2002; Nohria & Gulati, 1996; Singh,
1986) ; il facilite aussi l’innovation dans le sens où il induit un assouplissement du contrôle,
ce qui fournit aux acteurs un pouvoir discrétionnaire (relatif) et leur permet de développer de
nouveaux projets (ex. Herold, Jayaraman, & Narayanaswamy, 2006; Nohria & Gulati, 1996) ;
il participe enfin au développement d’une culture de l’expérimentation (ex. Bourgeois, 1981;
Geppert, 1996; Singh, 1986).
139
Nohria & Gulati (1996) s’efforcent de réconcilier ces deux approches en montrant que la
relation entre slack et innovation prend la forme d’un « U inversé » : l’augmentation du slack
favorise l’expérimentation, mais le rendement des expérimentations étant décroissant, les
possibilités d’innovation de l’entreprise se réduisent peu à peu. En effet, au fur et à mesure
que le slack se développe, les organisations constatent un « laisser-aller » en termes
d’allocation des ressources (détérioration de la discipline) : les acteurs ont tendance à
augmenter les investissements dans des projets à faible rendement. Geiger & Cashen (2002)
apportent des précisions sur cette relation curvilinéaire en tenant compte des différentes
formes de slack: la relation entre slack disponible et innovation, et slack récupérable et
innovation prend la forme d’un « U inversé », alors que l’innovation croit avec le slack
potentiel.
Nous observons que les travaux se focalisent plutôt sur la contribution du slack à l’innovation
comprise dans sa dimension organisationnelle (i. e. en termes de résultat innovant). Les
articles de Geiger & Makri (2006), Richtnér & Åhlström (2006) et Voss, Sirdeshmukh, &
Voss (2008) se différencient sur ce point : ces études portent en effet sur l’influence du slack
(de nature financière) sur les activités d’exploration et d’exploitation dans des organisations
fortement intensives en R&D (Geiger & Makri, 2006) ; sur le développement des nouveaux
produits (Richtnér & Åhlström, 2006) ; et sur l’influence du slack financier et humain sur les
activités d’exploration et d’exploitation (Voss, Sirdeshmukh, & Voss, 2008). Ces
contributions nous apparaissent en cohérence avec notre volonté d’étudier le processus
intrapreneurial (davantage que celles précédemment citées qui s’attachent à l’innovation en
tant que résultat).
Au-delà de ce débat, les recherches récentes dépassent l’idée de s’avoir si c’est l’abondance
ou la rareté du slack qui favorise la performance, et préfèrent s’attacher à la manière
(comment, où et quand) avec laquelle ces ressources sont mobilisées pour envisager son lien
avec la performance (Vanacker, Collewaert, & Paeleman, 2013). Aussi, le fait d’avoir des
ressources ne suffit pas pour en tirer de la valeur (Sirmon, Hitt, & Ireland, 2007). Concernant
le slack, le slack financier en l’occurrence, il est alors explicité que l’environnement dans
lequel il est mobilisé influence son effet sur la performance (Bradley, Shepherd, & Wiklund,
2011; George, 2005) ; en ce sens les auteurs montrent que la relation entre slack et
performance est d’autant plus forte lorsque l’environnement de l’organisation est décrit
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comme hostile. En outre, la capacité des managers à appréhender le dynamisme du marché
influence la façon dont ils allouent le slack (Simsek, Veiga, & Lubatkin, 2007) ; du fait de
cette « capacité de jugement » vis-à-vis de l’environnement, les managers parviennent à
allouer du slack vers des projets entrepreneuriaux prometteurs (et de favoriser en cela
l’entrepreneuriat organisationnel) : ils permettent ainsi au potentiel de performance
« contenu » dans ces ressources excédentaires de se réaliser.
Ces contributions permettent donc de dépasser les questionnements relatifs (1) à la
Dans le document
Processus intrapreneurial : entre temps alloué et temps autosaisi.
(Page 138-141)