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1.1 REVUE BIBLIOGRAPHIQUE

1.1.4 Techniques de décontamination

1.1.4.2 Méthodes de traitement des sols contaminés par des contaminants organiques

Au cours de ces dernières années, plusieurs techniques de décontamination, basées sur des principes thermiques, biologiques, physiques et chimiques, ont été développées pour le traitement des sols contaminés par des composés organiques (Bisone et al., 2013a,b; Isosaari, 2004; Khodadoust et al., 1999, 2005; Metahni et al., 2016; Paterson et al., 1999; Reynier et al., 2013b,c; Sahle-Demessie et al., 2000; US Congress, 1995; US EPA, 1992; Young et al., 2000). L’Annexe 1 présente un récapitulatif des technologies développées à ce jour pour traiter des sols contaminées par du PCP et/ou des PCDDF.

1.1.4.2.1 Traitement thermique

Les traitements thermiques sont les techniques les plus efficaces et largement utilisées pour enlever simultanément le PCP et les PCDDF présents dans des sols contaminés. Parmi les processus thermiques ex-situ, l’incinération et la désorption thermique (pyrolyse) sont appliquées au Canada et aux États-Unis à l’échelle industrielle. Le traitement thermique dépend de la température, du temps de rétention, de la concentration et du type de contaminants présents dans le sol ainsi que du taux d’humidité du sol.

L’incinération est basée sur l’utilisation de températures élevées (800 - 1 200°C) en présence d’oxygène, pour convertir les contaminants organiques présents dans les sols tels que le PCP, les PCDDF et les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAPs) en molécules simples et non toxiques (Smith et al., 2001). Les principaux produits de cette combustion totale sont le CO2, l’eau et différents autres résidus de combustion (Li et al., 2014). La destruction des PCDDF est complète (> 99%) pour des températures supérieures à 1 300°C, avec un temps de contact d’au moins 2 secondes (INSERM, 2000; Isosaari, 2004). En outre, l'incinération à haute température cause la destruction de la matière organique présente dans les sols, ce qui limite fortement la réutilisation du sol traité (Thuan et Chang, 2012).

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Les processus de pyrolyse sont basés sur la décomposition des contaminants organiques à basse température (250 - 550°C) et en absence d’oxygène. Selon Tse et Lo (2002), la désorption thermique du PCP à partir de sols contaminés augmente avec la température imposée au système. Une étude récente, réalisée à l’échelle laboratoire, a montré que la pyrolyse des sols contaminés par du PCP à 250°C permet l’enlèvement de 70% du PCP. Toutefois, ce processus de pyrolyse entraîne la formation d’une quantité importante de PCDDF dans les gaz produits (Thuan et al., 2013). La conversion des PCDDF présents dans ces gaz peut atteindre 100% à une température située entre 500 et 950°C et pour un temps de résidence de 3 secondes. Cependant, plusieurs espèces intermédiaires peuvent être formées (benzofurane et autres composés organiques volatils) (Tritz et al., 2014). En Floride (États-Unis), des sols contaminés en PCP et PCDDF ont été efficacement traités, à l’échelle pilote, par désorption thermique à 540oC (Young et al., 2000). Récemment, Lundin et al. (2013) ont observé l’enlèvement de plus de 90% des PCDDF initialement dans un sol contaminé à l’aide d’un traitement par pyrolyse à 280°C en présence de nanoparticules de fer zéro-valent (nZVI).

Les risques de formation des PCDDF et les coûts élevés de l’énergie nécessaire pour la destruction thermique de ces composés limitent l’application des procédés thermiques aux sols contaminés par du PCP et des PCDDF à des températures inférieures à 1 000°C. Il est important de noter qu’après traitement, les métaux sont encore présents dans le sol traité ainsi que dans les vapeurs, nécessitant un traitement additionnel (stabilisation/solidification ou enfouissement selon les diverses législations) ce qui augmente les coûts de traitement.

1.1.4.2.2 Traitement biologique

La biorémédiation est une technique, ancienne et bien connue, appliquée pour traiter des sols pollués par des contaminants organiques et/ou inorganiques. Elle peut être appliquée in-situ ou ex-situ (USEPA, 1992, 1997). Ces procédés de décontamination sont basés sur la biodégradation complète ou partielle des contaminants en présence de microorganismes tels que Proteobacteria (Chen et al., 2013), Dehalococcoides (Bunge et Lechner, 2009; Liu et al., 2014; Zhen et al., 2014) ou Pseudomonas mendocina NSYSU (Kao et al., 2005; Tu et al., 2014) ou des champignons (substrat lignocellulosique, Pleurotus ostreatus, etc.) (Thwaites et al., 2007; Valentin et al., 2013). Les contaminants organiques complexes sont alors décomposés en éléments simples tels que H2O, CO2, CH4, H2 et chlorure ou convertis en matières cellulaires microbiennes (USEPA, 1992). Les procédés de biorémédiation in-situ utilisent habituellement les microorganismes existant dans le sol. Ils nécessitent, cependant, un apport en oxygène et en nutriments pour permettre le développement de la biomasse. La biorémédiation ex-situ, quant- à-elle, nécessite une excavation des sols contaminés. De plus, le traitement des eaux issues de tels procédés est nécessaire pour permettre leur rejet dans l’environnement. La biorestauration nécessite de longues périodes d’exposition, ce qui limite son application malgré les faibles coûts de la matière première. Selon Lecomte (1995), le temps d’exposition requis pour traiter des sols contaminés par du PCP et/ou des PCDDF varie de quelques semaines à plusieurs mois; en fonction de la taille de la molécule devant être dégradée.

La dégradation biologique des PCDDF peut avoir lieu par déchlorination sous des conditions réductrices et anaérobies ou par dioxygénation sous des conditions aérobies en présence de microorganismes (Chen et al., 2013; Liu et al., 2014). En outre, la déchlorination complète des molécules de dioxines et furanes conduit à la réduction de la toxicité de ces molécules (Jonhson, 2008). Toutefois, une étude récente a souligné que l’élimination des chlorures latéraux (atomes de chlore en position 2, 3 ,7 et/ou 8) diminue la toxicité de la molécule, tandis que la péri-déchlorination (atomes de chlore en position 1, 4, 6 et/ou 9) peut conduire à une augmentation de la toxicité des PCDDF produisant les molécules 2,3,7,8-TCDD/F (Kuokka et al., 2014). La formation des congénères pendant la déchlorination des PCDDF dépend de la nature

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des microorganismes utilisés, du temps d’exposition et de la température d’incubation (Zhen et al., 2014). Plusieurs études ont montré l’inefficacité de certains procédés de bioremédiation pour des cas de contaminations anciennes (Duchesne, 2013; Sahle-Demessie et al., 2000; Winquist et al., 2014;). Selon Dercovà et al. (2007), l’efficacité des procédés biologiques est inversement proportionnelle avec la concentration initiale en contaminants. De plus, ces procédés sont très sensibles à la température, au taux d’humidité, à la nature des contaminants et à la géologie/morphologie du site à remédier (Kao et al., 2005). La bioremédiation des sols contaminés par des contaminants organiques et des métaux lourds (arsenic, chrome, etc.) est souvent difficile en raison de la forte toxicité des métaux pour les microorganismes, ce qui entraîne une inhibition de la dégradation des composés organiques par des bactéries ou des champignons (USEPA, 1997). De nos jours, aucun processus biologique n’est utilisé à grande échelle pour la restauration des sols contaminés par de l’As, du Cr, du Cu, du PCP et des PCDDF. 1.1.4.2.3 Traitement chimique

Selon l’USEPA, le lavage ex-situ de sols contaminés par des composés organiques en présence de solvants est considéré comme étant une technologie de décontamination viable (USEPA, 1990b,c) mais les coûts sont très variables. Au cours de ces dernières décennies, de nombreux solvants ont été étudiés, comprenant des solvants polaires (méthanol, éthanol, acétone, acétonitrile) ou des solvants apolaires (hexane, dichlorométhane) (Di Corcia, 1973; Khodadoust, 2005, 2000, 1999; Lee et al., 1998; Tsuda et al., 1999). Selon US Congress (1995), l’extraction par solvant semble être inefficace pour l’enlèvement des métaux. Jonsson et al. (2010) ont mis en évidence, à l’échelle laboratoire, l’enlèvement de près de 80 à 98% des PCDDF initialement présents dans un sol contaminé à l’aide d’une solution d’éthanol (75%). Les cyclodextrines, quant-à-elles, semblent être efficaces pour l’enlèvement du PCP initialement présent dans des sols contaminés (Khodadoust et al., 2005). Selon Sahle-Demessie et al. (2000), la solubilisation du PCP et des PCDDF, à l’échelle laboratoire, en présence de diméthyléther à 48°C est également efficace; permettant l’enlèvement de plus de 95% du PCP et des PCDDF initialement présents dans les sols. D’autres composés, tels que des rhamnolipides (Berselli et al., 2004) et des solvants polymères (l’oxyde polyéthylène et l’oxyde propylène des copolymères à blocs) (Hurter et al., 1992) peuvent être utilisés pour l’extraction des composés organiques tels que le

PCP. Récemment, Tomei et al. (2015) ont mis en évidence, à l’échelle laboratoire, l’enlèvement de 87% du PCP initialement présent dans un sol contaminé par extraction chimique en présence d’un polymère commerciale (Hytrel 8206).

La solubilisation des contaminants organiques peut également être effectuée par lavage des sols par des solutions acides, neutres ou basiques (Duchesne, 2013; Khodadoust et al., 2005). Plusieurs études, effectuées à l’échelle laboratoire, mettent en évidence que le lavage des sols dans des conditions basiques semble être très efficace pour l’enlèvement du PCP de sols contaminés (Banerji et al., 1993; Reynier et al., 2013c; Xiao et al., 2008). En effet, en milieu basique, le PCP est solubilisé sous sa forme anionique, très soluble. Due à sa faible solubilité dans des solutions acides, peu d’études ont été effectuées en présence d’acides organiques ou inorganiques pour enlever le PCP de sols contaminés (Reynier et al., 2013b; Subramanian, 2007).

De nombreuses études ont mis en évidence que l’ajout d’un surfactant à la solution d’extraction peut être efficace pour l’extraction de composés hydrophobes tels que les HAPs (Bisone et al., 2013a; Blais et al., 2011; Mouton et al., 2009a; Prak et Pritchard, 2002) ou le PCP (Olea et Gamboa, 2003; Park et Bielefeldt, 2003; Paterson et al., 1999). Ces agents sont capables de réduire la tension interfaciale entre deux phases ayant des polarités différentes comme l’eau et les contaminants organiques hydrophobes, ce qui favorise leur solubilisation. Au cours de ces dernières décennies, plusieurs surfactants ont été étudiés, à l’échelle laboratoire, pour favoriser l’extraction du PCP. Parmi ces surfactants, nous pouvons citer le Triton X-100 (Mulligan et Eftekhari, 2003; Reynier et al., 2013b), le sodium dodécyl sulfate (SDS) (Riveiro-Huguet et Marshall, 2011; You et al., 1996) et Tergipol NP10 (Park et Bielefeldt, 2003). Selon Mulligan (2005), les rhamnolipides, qui sont des biosurfactants produits par la bactérie Pseudomonas aeruginosa, sont capables d’extraire entre 60 et 61% du PCP présent dans des sols contenant initialement 1 000 mg PCP.kg-1.

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