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Les méthodes de mesures indirectes donnent une information quantitative d’une grandeur physique ou chimique de l’objet ou de la population d’objets observé. Une formule théorique reliant la grandeur physique mesurée avec la taille de l’objet est alors appliquée. Cependant, ces formules sont systématiquement utilisées en faisant une hypothèse forte sur la forme du ou des objets observé(s), donnant ainsi accès à une taille dit « équivalente » correspondant à la taille d’un objet équivalent ayant cette forme.

Dans cette section, plusieurs méthodes de mesures indirectes couramment utilisées dans l’industrie, basées sur des principes physiques différents (diffusion photonique, diffusion X, spectrométrie de masse…), seront présentées.

3.1.1 Diffusion dynamique de la lumière / Dynamic Light Scattering (DLS)

Mesurande : fluctuation d’intensité lumineuse.

La DLS est une méthode d’analyse indirecte des particules en suspension dans un solvant [60–62]. Cette méthode est relativement répandue dans le monde industriel, notamment car la mesure est simple à mettre en place, nécessite un appareillage au coût modeste et une faible quantité de suspension. Cette technique est tout à fait adaptée au suivi qualité ou au suivi de synthèse chimique. Lorsque le faisceau monochromatique cohérent d’un laser traverse une suspension contenant des nanoparticules, celui-ci est diffusé. Dans un fluide, sous l’effet de l’agitation thermique, les particules sont soumises à un mouvement Brownien. Ce mouvement va induire des fluctuations de la lumière diffusée. Les petites particules ayant un mouvement Brownien rapide diffusent la lumière à des angles importants avec une faible intensité, à l’inverse des grosses particules. Une fonction d’autocorrélation comparant le signal d’entrée avec les variations d’intensité permet d’obtenir un temps caractéristique, noté τ, directement lié à la vitesse des particules en suspensions.

La relation entre le coefficient de diffusion D et ce temps caractéristique s’écrit de la manière suivante :

𝐷 =𝑞²

32 Avec q fonction de l’indice de réfraction du milieu, de la longueur d’onde et de l’angle de diffusion du laser.

Le rayon hydrodynamique des particules en suspension RH peut ainsi être déduit à partir de la relation

de Stokes-Einstein :

𝑅𝐻=6𝜋𝜂𝑘𝐵𝑇

𝑠𝐷 (2)

Avec kB la constante de Boltzmann, T la température du milieu et ηs sa viscosité.

RH correspond au rayon d’une sphère dans laquelle le solvant ne pénètre pas. En comparaison avec le

rayon réel des particules, RH est donc surévalué puisqu’il tient compte du rayon de la particule auquel

s’ajoute une partie de la double-couche ionique, présentée sur la Figure 9. Une présentation plus détaillée de la double-couche sera effectuée dans la section 1.2.1 du Chapitre 2.

Figure 9 : Représentation d’une particule entourée de la double couche ionique. Figure tirée de [63].

Certaines précautions sont à prendre en compte concernant les échantillons pour la mesure DLS. Les suspensions doivent être transparentes, la présence de contamination doit être limitée au maximum et l’indice de réfraction du liquide doit être connu [64]. De plus, les étapes de préparation des suspensions (dilution, sonication, filtration…) peuvent avoir une influence sur le résultat de la mesure. Pour finir, il est à noter que lorsque l’échantillon est multimodal, les petites particules diffusent moins la lumière que les plus grosses. Ainsi, le signal provenant des grosses particules masque celui issu des plus petites, la suspension apparaissant alors comme monomodale avec un diamètre hydrodynamique correspondant à celui des grosses particules.

De plus l’instabilité des suspensions peut également avoir une influence sur le résultat de la mesure DLS. Ainsi, Langevin et al [65] ont effectués une inter comparaison entre différents laboratoires sur la mesure de nanoparticules (NPs) de silice et de polystyrène par DLS. Leurs résultats soulignent à quel point il est important d’établir des procédures opérationnelles communes adaptées avant les mesures.

33 En effet, pour des particules de silice de diamètre moyen certifié par DLS égal à (19,0 ± 0,6) nm, une partie des participants obtenaient une mesure DLS proche de 40 nm. Cet écart entre le diamètre mesuré par DLS et celui certifié était attribué à l’agglomération des particules en suspension.

3.1.2 Diffusion de rayons X aux petites angles / Small angle X-Ray Scattering

(SAXS)

Mesurande : intensité de diffusion X.

La technique SAXS est fondée sur la mesure de la diffusion des rayons X à de très faibles angles, généralement entre 0,1° et 5°. Le signal SAXS permet de récolter des caractéristiques structurelles de l’ordre de la gamme nanométrique, soit de 1 nm à 100 nm. Cette technique est par conséquent particulièrement adaptée pour mesurer des objets ayant des dimensions de cet ordre de grandeur comme des composés biochimiques (protéines [66, 67], molécules [68]…) ou encore des nanoparticules [69–72].

Les courbes représentant l’intensité diffusée I(q) permettent de déterminer l’information liée à la taille des particules selon l’équation :

𝐼(𝑞) = 𝑐 ∫ 𝑛(𝑟)[𝐹(𝑞𝑟)]∞ 2

0 𝑆(𝑞𝑟)𝑑𝑟 (3)

Avec c le facteur d’échelle, n(r) la distribution en taille des particules, F(q) le facteur de forme de l’objet et S(q) le facteur de corrélation interparticulaires égal à 1 dans un système suffisamment dilué. De plus, lorsque l’ensemble des particules constitutives de l’échantillon a la même morphologie, leur forme peut être déterminée au travers du paramètre F(q) soit directement à partir des courbes dans le cadre de forme simples, soit en appliquant une approche dépendante d’un modèle [73].

Cette méthode présente plusieurs avantages : elle nécessite très peu de préparation d’échantillon, notamment pour les suspensions colloïdales qui peuvent être examinées en l’état. De plus, comme présenté par Pauw et al [74], la méthode est extrêmement répétable et reproductible. En effet, leurs travaux présentent les mesures réalisées par différents laboratoires sur une même suspension très monodisperse de nanoparticules d’argent par SAXS. En utilisant une méthode de traitement des données commune, l’écart type entre les différentes mesures est évalué à 0,67 nm pour un diamètre moyen de 5,64 nm.

Cependant, cette méthode affiche ses limites lorsque l’on souhaite caractériser des suspensions polydispersées. En effet, de la même manière que la technique de diffusion dynamique de la lumière, la technique est très sensible à la présence de particules avec un diamètre élevé, particulièrement lors de l’évaluation du diamètre moyen. De plus, cette méthode n’est plus utilisable lorsque les dimensions des particules à étudier sont supérieures à 200 nm.

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3.1.3 Spectromètre de masse à plasma à couplage inductif / Single Particle

Inductively Coupled Plasma Mass Spectrometry (sp-ICPMS)

Mesurande : concentration massique élémentaire.

La méthode sp-ICPMS est une technique d’analyse indirecte individuelle de particules présentes en suspension. La technique consiste à envoyer, au travers d’un capillaire, une faible quantité de suspension dans une torche à plasma afin de vaporiser les éléments présents pour produire un nuage d’ions. Ce plasma est ensuite analysé par spectroscopie de masse pour séparer et quantifier les ions (Figure 10).

Figure 10 : Principe de la spectrométrie de masse à plasma à couplage inductif. Figure extraite de [75].

Le terme « Single Particle » de la méthode provient du fait qu’en diluant suffisamment la suspension, en utilisant des temps d’intégration courts (< 10 ms) [76] et en n’envoyant qu’une faible quantité de suspension, chaque nuage d’ions provient, théoriquement, de la vaporisation d’une seule particule. Ainsi, en envoyant continûment une partie de la suspension aqueuse dans le système, chaque impulsion sur le signal obtenu par spectrométrie correspond à la vaporisation et l’ionisation d’une « unique particule ». Le nombre d’impulsions pendant le balayage ne doit cependant pas dépasser 1200 impulsions/minutes [77].

L’intensité de chaque pic est directement liée au nombre d’atomes de la particule, permettant, au travers de plusieurs hypothèses, d’en déduire une taille pour chaque objet. La première hypothèse est que la densité des particules est connue. Ensuite, les particules étudiées sont supposées sphériques. Pour finir, il est assumé dans cette technique que chaque pic est attribué à une seule particule.

35 La taille minimale mesurable avec cette technique est directement liée à la sensibilité du détecteur et à l’élément chimique observé. Dans le cas de l’analyse des particules de SiO2, des difficultés de mesure,

liées à un bruit de fond élevé, apparaissent lorsque la taille des particules est inférieure à 90 nm. Ces difficultés apparaissent en-dessous de 20 nm pour des particules d’or et d’argent [78]. Par exemple, dans l’étude de Linsinger et al [79] sur des particules d’argent de différentes tailles, un biais proche de 20 nm est observé sur la mesure des particules de taille 20 nm par SP-ICPMS tandis qu’aucun biais n’est présent pour les particules de 40 nm. De plus cette technique est limitée aux éléments détectables en ICPMS, ce qui exclut par exemple les particules organiques.

3.1.4 Sédimentation par centrifugation en phase liquide / Centrifugation Liquid

Sedimentation (CLS)

Mesurande : vitesse de sédimentation.

La CLS est une méthode de mesure séparative indirecte fondée sur la vitesse de sédimentation d’objets présents dans un fluide, sous l’effet d’un champ d’accélération centrifuge [80]. Le mesurande, déterminé en CLS, est le diamètre de Stokes dStk correspondant à la vitesse de chute dans un liquide

d’une sphère de diamètre équivalent et est égal à :

𝑑𝑆𝑡𝑘 = √(𝜌18𝜂ℎ𝑐ℎ𝑢𝑡𝑒 𝑠− 𝜌𝑙)𝑔𝑡

(4) Avec ρs et ρlrespectivement la masse volumique effective de la particule et celle du liquide, η la

viscosité du fluide, hchute la hauteur de sédimentation dans un temps t, et g l’accélération

gravitationnelle.

Parmi les différentes méthodes accessibles, la sédimentation centrifuge à disque est la plus répandue [81]. La technique consiste à créer un gradient de densité de saccharose dans le disque centrifuge en introduisant des concentrations de plus en plus faibles au cours du temps. La suspension à étudier est introduite par-dessus ce gradient. Sous l’effet des forces centrifuges et de leur taille, les particules vont se séparer sur le disque. L’évolution de la concentration en particules à une position donnée est suivie à partir d’un détecteur de lumière ou de rayons X.

Cette méthode permet de mesurer des particules de tailles comprises entre 20 nm et 1000 nm. Le principal avantage de cette méthode, en plus de ne nécessiter quasiment aucune préparation d’échantillon (mise en suspension des particules) est que la présence d’agrégats/agglomérats ne perturbe pas la mesure.

La limite principale de la méthode, comme pour la plupart des méthodes indirectes, est qu’une morphologie non sphérique introduit un biais sur la mesure. De plus, il est impossible de mesurer la taille des particules dans les agrégats/agglomérats.

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