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1 Étude bibliographique

1.2 Particularités conférées par le mode de survie en biofilm et méthodes de lutte

1.2.2 Méthodes de lutte contre les biofilms

Du fait de l’importance des biofilms dans la chronicité des infections et de leur caractère récalcitrant aux traitements classiques, il est important de développer de nouvelles stratégies thérapeutiques pour lutter contre les biofilms, soit pour limiter leur formation, soit pour essayer de les réduire, voire de les éradiquer. Les principales méthodes et perspectives de lutte contre les biofilms sont décrites ci-après.

1.2.2.1 Méthodes non spécifiques

Ces méthodes regroupent toutes les mesures hygiéniques et de bonne conduite visant à prévenir la formation d’un biofilm et à le retirer ou le détruire lorsque c’est possible. Une bonne hygiène ainsi que des procédures standardisées lors de la mise en place d’un corps étranger (i.e. type cathéter ou matériel d’ostéosynthèse) devraient limiter la formation d’un biofilm. Par ces procédures, on entend le nettoyage systématique de la peau avant la pose d’un cathéter et son retrait dès qu’il n’est plus indispensable, ou son renouvellement si une utilisation de longue durée est nécessaire ainsi qu’un entrainement de la part du personnel. En effet, plus le nombre et la durée de manipulation sont limités, plus la probabilité de contamination est faible [56]. Si une infection à biofilm est identifiée et que l’état du patient le permet, une des méthodes les plus simples pour traiter consiste à agir mécaniquement sur le site d’infection pour retirer le tissu contaminé. Cela signifie retirer le matériel sur lequel le biofilm s’est développé, agir mécaniquement sur l’os après retrait de matériel d’ostéosynthèse ou débrider une plaie qui ne cicatrise pas pour ne garder que des tissus sains [12,53–55].

1.2.2.2 Méthodes préventives

Ces méthodes visent à prévenir l’attachement des bactéries sur une surface, biotique ou non, et donc à prévenir la formation d’un biofilm, soit en inhibant l’adhésion de façon non spécifique, soit en ciblant cette adhésion. Ces méthodes s’appliquent surtout aux biofilms pouvant se développer sur les surfaces artificielles.

En ce qui concerne les surfaces artificielles propices à l’adhésion des bactéries, une des pistes de recherche consiste à développer de nouveaux matériaux ou optimiser les matériaux

Réponse aux traitements et méthodes de lutte pathogènes, et donc à former volontairement un biofilm avec ces bactéries, rendant la surface indisponible pour des bactéries potentiellement pathogènes [56].

Certaines méthodes peuvent spécifiquement cibler les adhésines et empêcher la formation du biofilm en développant des molécules bloquant l’interaction de ces adhésines avec leurs récepteurs [56].

1.2.2.3 Méthodes curatives

Ces méthodes s’intéressent à la réduction voire la destruction d’un biofilm en formation ou déjà formé.

Pour les cas où le retrait d’un cathéter est inenvisageable, une des solutions proposées est la « Lock therapy » ou « thérapie verrou », qui consiste à injecter dans la lumière du cathéter une concentration très élevée d’antibiotique, d’éthanol ou d’EDTA. On obtient donc localement une très forte concentration en substances, supposée toxique pour les bactéries qui seraient localisées dans la lumière du cathéter sous forme de biofilm. Bien qu’engageante et souvent utilisée, cette solution n’est pas systématiquement efficace [56,58].

Une des stratégies consiste à viser spécifiquement la matrice pour déstructurer le biofilm et bloquer sa maturation. L’accès aux bactéries est aussi facilité pour les antibiotiques. Souvent, dans l’hypothèse d’un relargage important de bactéries du biofilm, cette stratégie de lutte s’accompagne d’un traitement antibiotique pour protéger l’organisme [57,59]. L’utilisation de protéases et de peptides antimicrobiens constitue une piste de plus en plus explorée même si le principal inconvénient des peptides est leur courte demi-vie. Pour le cas particulier des biofilms pulmonaires à P. aeruginosa, des DNAses sont utilisées pour réduire la viscosité du sputum et faciliter ensuite l’action d’un traitement antibiotique [12,56,57].

La modulation des voies métaboliques [12] et de communication des bactéries du biofilm montre in vitro de bons résultats. Les inhibiteurs du QS sont de plus en plus étudiés et développés [12,59,60] mais leur effet se limite à l’inhibition de l’attachement entre bactéries ou entre bactérie et surface. Ils diminuent la cohésion de la matrice mais n’ont aucune activité bactéricide et ne peuvent pas être utilisés seuls.

L’utilisation de protéases semblerait cibler les persisters et donc avoir un effet positif lors de traitement d’un biofilm [58,61,62]. Des vaccins anti-biofilm à S. aureus sont actuellement en cours de développement mais bien qu’ayant montré des résultats in vitro encourageants, aucun n’a démontré d’efficacité clinique lors des essais de phase III [57]. Une des hypothèses avancées est que les bactéries du biofilm sont bien trop différentes des bactéries

planctoniques et qu’un seul vaccin ne suffit pas à cibler tous les profils métaboliques de bactéries que l’on peut rencontrer dans un biofilm.

De façon plus anecdotique, certaines pistes consistent à étudier l’action d’huiles essentielles ou de nanoparticules comme les nanoparticules d’argent pour déstructurer le biofilm mais une certaine toxicité pour les cellules eucaryotes est rapportée. L’utilisation de bactéries du genre Bacterivorax ou des bactériophages semble plus prometteuse mais est encore en phase d’essai [56,61].

L’utilisation d’antibiotiques est donc actuellement la méthode de lutte contre les biofilms la plus largement répandue. Cependant, l’utilisation massive d’antibiotiques et quotidienne pour les patients atteints de mucoviscidose [34] mène inexorablement au développement de résistances et d’échecs thérapeutiques [61].

Pour limiter l’apparition de résistance au cours du traitement, des combinaisons peuvent être proposées [63], soit avec uniquement des composés antibiotiques [64], soit en combinant un antibiotique et des molécules non antibiotiques [65].

L’optimisation des traitements existants est un point critique dans la lutte contre les biofilms. Actuellement il est difficile d’évaluer correctement l’efficacité in vitro d’un traitement et de l’extrapoler aux situations cliniques. Les méthodes d’évaluation sont encore trop éloignées de la réalité. Il est donc nécessaire de faire progresser les techniques actuelles et d’essayer de standardiser les procédures permettant d’évaluer l’efficacité d’un traitement.

Méthodes d’étude de l’activité des antibiotiques

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