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Méthodes d'exploration du contrôle traductionnel : le Translatome

CHAPITRE I. INTRODUCTION

4. Méthodes d'exploration du contrôle traductionnel : le Translatome

Le translatome définit l’ensemble des ARNm associés aux ribosomes au cours de la synthèse protéique (King & Gerber, 2016). Il permet d’évaluer le répertoire des protéines qui sont réellement exprimées dans une cellule. Plusieurs méthodes existent pour explorer avec précision la régulation de l’abondance des protéines : le « Polysome profiling », le Ribosome profiling » et le «Translating ribosome affinity purification » (TRAP) (King & Gerber, 2016). Parmi ces technologies, les plus couramment utilisés sont le « Polysome profiling » et le Ribosome profiling » (Figure 1.22).

4.1 « Polysome profiling »

Les ARNm activement traduits sont liés à plusieurs ribosomes formant le polysome. Les polysomes sont séparés des ARN libres, des sous-unités ribosomales 40S, 60S et des monosomes 80S par ultracentrifugation en gradient de sucrose (Masek et al., 2011) (Figure 1.22A). L’analyse est basée sur le déplacement d’un ARNm dans le gradient polysomal indiquant une modification dans le statut de traduction de cet ARNm. Les changements dans le niveau total d’ARNm sont mesurés pour étudier la relation entre la transcription et la traduction dans différentes conditions. Après l’isolement de l’ARN à partir des fractions du gradient, la distribution des ARN spécifiques dans le gradient peut être évaluée par différentes méthodes : Northern blot, RTqPCR, ou au niveau global par le microarray ou le RNA-Seq (Spangenberg et al., 2013).

La plupart des études génomiques ont utilisé le « Polysome profiling » pour comparer l’état de traduction des ARNm dans différents types cellulaires en condition non stimulée ou stimulée (Bjur et al., 2013; Colina et al., 2008; Herdy et al., 2012b; Larsson et al., 2010; Piccirillo et al., 2014). En ce qui concerne le translatome des macrophages, plusieurs études ont mis en évidence les changements dans l’efficacité traductionnelle des ARNm spécifiques à travers cette approche (Kitamura et al., 2008; Liepelt et al., 2014; Schott et al., 2014). Par exemple, pour identifer les mécanismes par lesquels l’IL-10 inhibe la production du TNFα dans les macrophages, le « Polysome profiling » a permis de démonter que l’IL-10 régule la traduction du

traductionnelle du Tnfa. De plus les auteurs ont pu mettre en évidence que l’IL-10 inhibe la traduction du TNFα via la déphosphorylation de MNK1 par SHIP1. Ces résultats ont été confirmés in vivo par l’utilisation de souris déficientes pour SHIP1 (Chan et al., 2012).

4.2 « Ribosome profiling »

Cette technique est basée sur le séquençage profond des fragments d’ARNm protégés par le ribosome qui persiste après le traitement du lysat cellulaire par des antibiotiques et des nucléases et permet de mesurer les positions exactes et les densités ribosomiques le long des molécules d’ARNm présentes dans une cellule (Figure 1.22B) (Ingolia et al., 2012). Une étude a utilisé cette approche en combinaison avec le séquençage d’ARN à haut débit pour investiguer le rôle de l’IFN-γ dans la régulation des réponses inflammatoires dans les macrophages (Su et al., 2015). Cette approche a fourni un translatome complet en quantifiant les fragments d’ARN protégés par le ribosome. L’analyse a été basée sur la comparaison de l’abondance de l’ARNm et les ARNm traduits activement dans les macrophages activés par le TLR2, traités ou non avec l’IFN-γ. Les changements dans le taux de traduction ont été obtenus en divisant les changements dans l’abondance de l’ARNm par les ARNm hautement traduits. Ce calcul a permis de connaître l’efficacité traductionnelle. Le traitement par l’IFN-γ a induit des changements significatifs dans l’efficacité traductionnelle de près de mille gènes. Ainsi, le Ribosome profiling a révélé un rôle important de l'IFN-y dans la modulation de la traduction de l'ARNm au niveau du génome (Su et al., 2015).

4.3 « Translating ribosome affinity purification » (TRAP)

La TRAP permet de mesurer les niveaux d’ARNm dans des types cellulaires spécifiques tels que les neurones et les cellules souches (Heiman et al., 2014) et fournit des informations sur les protéines impliquées dans les fonctions cellulaires à un moment donné. Cette technique est capable de capturer le processus de traduction de l’ARNm d’une manière spécifque au type cellulaire. Elle est basée sur la purification par affinité des polysomes portant une sous-unité ribosomale marquée. Les ribosomes marqués par affinité par exemple avec la « Green Fluorescent Protein « (GFP) sont capturés dans les extraits cellulaires avec des anticorps spécifiques ou des ligands couplés à une matrice. Après plusieurs lavages, les ribosomes et les ARNm associés sont libérés de la matrice et les ARNm capturés sont analysés par « microarray » ou « RNA-seq ».

4.4 « Avantages et limites »

Les avantages du « Polysome profiling » sont l’identification des ARNm traduits au niveau du génome entier et la quantification du niveau d’expression de ces ARNs par le séquençage à haut débit. Le « Ribosome profiling » permet de déterminer le taux d’occupation des ribosomes par l’isolement des fragments d’ARNm protégés par les ribosomes, la position des sites d’initiation, la vitesse de traduction d’un ARNm et l’identification des ORFs et des sites d’arrêt. Le TRAP permet d’utiliser un nombre réduit de cellules <106 avec une spécifité du type cellulaire ou tissulaire. Contrairement au « Polysome profiling » et au « Ribosome profiling », le TRAP est une technique simple, peu coûteuse et robuste.

L’utilisation de ces technologies est limitée par une grande quantité de matériel de départ et possèdent un risque de contamination des fractions du gradient par les ARN ribosomaux. Le « Polysome profiling utilise des équipements spécifiques et coûteux (ultracentrifugation et système de fractionnement des ARN). Le « Ribosome profiing » nécessite plusieurs étapes de traitement des lysats par des antibiotiques et de digestion par des nucléases, d’élimination des ARNm qui ne sont pas associés aux ribosomes et de purification des ARNm liés aux ribosomes ce qui peut introduire des biais significatifs dans le profile des séquences protégés par les ribosomes. De plus, le « Ribosome profiing » ne permet pas de distinguer les monosomes et les polysomes. L’analyse des ribosomes individuels et leurs empreintes au lieu des transcrits entiers conduit à une perte d’informations et ne permet pas d’évaluer l’efficacité de la traduction des ARNm mais seulement de mesurer la densité des ribosomes sur un transcrit donné. En revanche, le TRAP nécessite une modification génétique, par exemple, l’utilisation d’un transgène pour exprimer des protéines ribosomales étiquettées et possède une faible résolution. En définitive, le Ribosome profiling révèle les changements dynamiques du translatome dans différentes conditions ainsi que les mécanismes de contrôle agissant en cis et en trans interférant avec ces modifications. Tandis que, le Polysome profiling fournit l’efficacité traductionnelle d’ARNm spécifiques en réponse aux changements biologiques et préserve l’intégrité du transcrit pour des analyses ultérieures (Masvidal et al., 2017a). Le TRAP fournit une analyse spécifique du translatome à un type cellulaire (c’est-à-dire dans un tissu, il est impossible d’isoler les ARNm liés aux polysomes dans un type cellulaire donné sans risque de contamination par les cellules environnantes). Cette approche est adaptée pour purifier des

De ce fait, notre objectif était d’évaluer les changements de l’efficacité de la traduction ce qui nous conduit à sélectionner le « Polysome profiling » pour notre étude.

Figure 1.22 Principe du Polysome profiling et Ribosome profiling.

A) Polysome profiling. Différents profiles de polysomes montrant l’efficacité de la traduction mesurée en quantifiant les ARNm traduits efficacement (l’ARN est associé à plus de trois ribosomes) indiqué par la ligne (rose en pointillée). A gauche, profile des ARNm TOP associé aux « heavy-polysomes ». A droite les ARNm associés aux « light polysomes ». Efficacité traductionnelle (vert). Inhibition de mTOR (bleu). B) Ribosome profiling. Quantité de fragments d’ARNm protégés par le ribosome. Quantification par RNA- Seq. Changements très différents dans les ARNm TOP et non-TOP. Ces changements conduisent à un biais favorisant l’identification d’ARNm TOP traduits différemment. (Masvidal et al., 2017a)

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