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2.4 Les applications au contrôle de moteurs

2.4.1 Méthodes de contrôle

Condition préalable à l’utilisation d’un algorithme de commande prédictive, l’obtention d’un modèle repose sur la connaissance des processus physiques mis en jeu dans le moteur. Depuis les années 60, divers modèles de moteurs ont été proposés, comme par exemple le modèle de Borman pour les moteurs diesels (Borman 1964). Nous présentons ici le modèle de Jankovic, qui est le plus utilisé aujourd’hui pour les moteurs turbo-diesels. Nous aborderons ensuite des techniques de contrôle, dont certaines qui utilisent ce modèle.

2.4.1.1 Modèle de Jankovic

Le modèle de Jankovic exprime les variations de pression, de masse de gaz et de pro- portions de gaz brûlés à l’intérieur des collecteurs d’admission et d’échappement à partir des caractéristiques physiques du moteur et des différents débits contrôlés (Jankovic et Kolmanovsky 2000). Il existe une première version de ce modèle, dite d’ordre complet :

˙ m1 =Wc+Wegr−We ˙ m2 =We−Wegr−Wt+Wf ˙ p1= γR V1 (WcTc+WegrTegr−WeT1) ˙ p2= γR V2 ((We+Wf)Te−WegrT2−WtT2) ˙ F1 = Wegr(F2−F1) −WcF1 m1 ˙ F2 = We[15.6(1−F1) + (AF+1)F1]/(AF−1) −WeF2 m1

où m1 et m2, p1 et p2, F1 et F2 sont respectivement les masses de gaz, la pression et la

proportion de gaz brûlés dans les collecteurs d’admission et d’échappement. V1et V2, et T1

et T2 sont le volume et la température de chacun des collecteurs. Tc est la température du

compresseur, Tela température à l’échappement et AF le ratio air/carburant. Issues de la

thermodynamique, γ et R sont respectivement la capacité thermique spécifique du système et la constante spécifique des gaz. Enfin, Wc, Wegr, We, Wt et Wf sont les débits massiques,

respectivement dans le compresseur, dans la vanne EGR, dans le moteur entier, dans la turbine et de carburant. Ils sont pour la plupart manipulables à l’aide d’effecteurs et constituent donc les entrées du moteur pour ce modèle.

Cependant, trop lourde du fait de ses trop nombreux paramètres et de sa complexité calculatoire, cette version n’est jamais utilisée. En effet, il faut en estimer correctement la valeur de ses paramètres afin que le modèle corresponde parfaitement à l’instance de moteur contrôlée et à l’utilisation qui en est faite, ce qui est un problème très compliqué lorsque ces paramètres sont nombreux. En outre, elle demande des mesures très difficiles à obtenir sur un moteur réel (par exemple la proportion de gaz brulée dans chacun des collecteurs). Aussi cette version est généralement laissée de côté. On lui préfère une plus simple, ne comprenant

que trois paramètres et s’intéressant uniquement aux variations de pression. Cette version, appelée modèle d’ordre 3, s’exprime ainsi :

˙ p1 =k1(Wc+u1−kep1) + ˙ T1 T1 p1 ˙ p2 =k2(kep1−u1−u2) + ˙ T2 T2 p2 ˙ Pc = 1 τ(ηmPt−Pc)

où Pc et Pt sont la puissance du compresseur et celle de la turbine, ηm est le rendement

mécanique du turbo, u1 et u2 sont les variables contrôlées (en fait les débits EGR et de la

turbine, u1 =Wegr et u2=Wt). Les trois coefficients k1, k2et kesont les paramètres du modèle

à définir par l’utilisateur. Pour simplifier un peu plus le modèle, les termes T˙1 T1p1 et

˙ T2

T2p2sont

souvent ignorés. En effet, ils sont proches de zéro, la température variant peu dans les plages de fonctionnement considérées par la plupart des méthodes de contrôle.

Le nombre de paramètres est réduit, mais leur estimation demeure un problème délicat. Divers algorithmes de régression peuvent être utilisés comme le classique algorithme de Gauss-Newton (GNA, Wang 2012) ou encore l’algorithme de Levenberg-Marquardt (LMA, Moré 1978) mais sont difficiles à mettre en œuvre avec un vrai moteur.

Pour être optimale, la valeur des paramètres devrait changer selon la plage de fonctionne- ment du moteur considérée. En effet, le régime, la charge, ou encore le débit de carburant impactent directement le comportement du moteur et ainsi la conformité du paramétrage du modèle. En outre, il faudrait réajuster ces paramètres au cours de la vie du moteur pour en suivre l’usure et l’encrassement. Néanmoins, cela n’empêche pas ce modèle d’être utilisé pour le contrôle d’un moteur dans des situations bien définies.

2.4.1.2 Contrôle prédictif appliqué aux moteurs

Comme dans tout contrôleur prédictif basé sur un modèle, la principale difficulté est de gé- rer la non linéarité du modèle. En effet, celle-ci rend très complexe le problème d’optimisation visant à calculer les actions à effectuer. Diverses solutions ont été entreprises.

Par exemple, la commande prédictive généralisée non linéaire à temps continu (NCGPC) modifie le vecteur de sortie du modèle de Jankovic en choisissant d’autres variables à obser- ver. Ce changement est principalement motivé par l’impossibilité de mesurer les variables initialement impliquées. La loi de commande est ensuite calculée en s’appuyant sur une matrice de découplage, sur une extension bien choisie du vecteur d’états du modèle (afin de rendre la matrice inversible) et sur les séries de Taylor (Dabo et al. 2008).

Une autre approche combine des modèles linéaires locaux (relativement à l’espace d’états du moteur), et passe de l’un à l’autre à la volée en fonction de l’état courant du moteur pour y appliquer une commande prédictive classique (Ferreau 2006).

Ces méthodes sont efficaces et capables d’être exécutées par un calculateur embarqué. Cependant, elles se limitent à certaines fonctions du moteur (par exemple la vanne EGR

pour la NCGPC), le contrôle global étant réalisé par un assemblage ad hoc de telles méthodes. Elles ne sont possibles que parce qu’il existe un modèle du moteur qu’elles considèrent, et applicables à la condition que celui-ci soit bien paramétré.

D’autres applications incluent des réseaux de neurones (Ouladsine, Bloch et Dovifaaz 2005), ou encore de la logique floue (Nikzadfar, Noorpoor et Shamekhi 2012) mais restent cantonnées à un contrôle local, d’un seul actionneur (un seul bloc fonctionnel) et sujettes à une paramétrisation importante.