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III. ANALYSE BIBLIOGRAPHIQUE

III.3. Production et turnover de racines fines

III.3.5. La méthode des carottes séquentielles

La méthode directe la plus couramment utilisée est celle des carottes séquentielles de sol,

(‘sequential soil coring’ selon la terminologie anglaise) qui est basée sur des changements des

masses de racines vivantes et/ou mortes échantillonnées pendant au moins un an (Nadelhoffer

et al., 1985; Ostertag, 2001). Selon Bakker (1998), la fréquence des prélèvements racinaires

est fonction de la variabilité de la masse racinaire au cours d’une période d’étude. L’existence

d’un pic unimodal pour cette biomasse permet de limiter les prélèvements à quelques périodes

correspondants au maximum et au minimum de biomasse racinaire (Burke et Raynal, 1994 ;

McClaugherty et al., 1982; Vogt et al., 1986). En cas d’absence d’unimodalité,

l’échantillonnage doit être plus fréquent (Persson, 1983). Plusieurs méthodes de prélèvement

de carottes de sol sont en effet utilisées comme la tarière hollandaise et l’extraction des

monolithes.

On peut recenser au minimum trois méthodes de calcul de la production racinaire à partir des

carottes séquentielles. Ces méthodes tiennent compte soit de biomasse seule, soit de la

biomasse et de la nécromasse, soit d’une combinaison de la biomasse, la nécromasse et la

décomposition racinaire :

- La méthode dite de ‘maximum-minimum’ ne tient compte que de la variation saisonnière de

biomasse (Persson, 1983). La production est définie comme la différence entre la valeur

maximale et minimale de biomasse racinaire au cours d’une période d’étude (une année en

général).

Il existe cependant plusieurs variantes de cette méthode, dont celle introduite par Persson

(1978) qui estime la production en sommant toutes les variations positive de biomasse au

cours d’une période d’étude.

- La méthode dite d’équilibre de transfert (balancing transfert): c’est une matrice de décision

qui prend en compte la variation de la biomasse et la nécromasse entre deux dates de mesure

(Tableau III-1, Fairley et Alexander, 1985; Hendricks et al., 2006).

Tableau III-1: Matrice de décision illustrant les différentes équations utilisées pour estimer la production (P), la

mortalité (M) et la décomposition (D) racinaire (d’après Fairley et Alexander, 1985).

Biomasse

croissance Décroissance

∆Βmort > ∆Βvivant ∆Βvivant > ∆Βmort

croissance

P = ∆Βvivant + ∆Bmort M = ∆Βmort D = 0 P = ∆Βvivant + ∆Bmort M = ∆Βmort D = 0 P = 0 M = -∆Βvivant D = -∆Βvivant - ∆Βmort

Nécromasse

décroissance

P = ∆Βvivant M = 0 D = -∆Bmort P = 0 M = -∆Βvivant D = ∆Bvivant - ∆Βmort

- La méthode des flux compartimentés (compartment-flow method) consiste à distinguer deux

compartiments (racine vivante et morte) et trois flux (production, mortalité et décomposition)

(Santantonio et Grace, 1987). Cette approche se justifie par le fait que la croissance, la

mortalité et la décomposition de racines fines ont lieu simultanément chez certaines espèces.

Production Mortalité Décomposition

Pj Mj Dj

Ce modèle peut se résumer comme suit :

Soit j un intervalle de temps, défini de i à i+1,

La décomposition Dj de racines qui s’est produite à cet intervalle de temps est :

(

k j

)

i j i

e

y

D = 1−

Equation III-7

Avec yi la quantité de racines mortes à l’instant i et kj le coefficient de décomposition

Racines

vivantes

Racines

mortes

M

O

S

La production Pj et la mortalité Mj pour l’intervalle de temps j se déduisent de la

décomposition Dj, de la biomasse et la nécromasse racinaire par les équations suivantes :

j i i j

y y D

M =

+1

− +

Equation III-8 j i i j

x x M

P =

+1

− +

Equation III-9

Avec yi et y

i+1

, les quantités de racines mortes des mois i et i+1, et xi et xi+1 sont celles de

racines vivantes au cours de la même période.

III.3.5.1. La méthode de carotte de recolonisation

Une autre méthode directe couramment utilisée est la méthode de carottes de recolonisation

‘ingrowth cores method’ qui consiste à prélever les carottes de sol dans les trous rebouchés

sans racines initialement après un prélèvement et à évaluer la production à différents

intervalles de temps (Cuevas et Medina, 1988; Persson, 1983; Steele et al., 1997). Comme

pour les carottes séquentielles, cette méthode s’appuie sur la variation de masse racinaire au

cours du temps.

Deux modes d’installation des carottes de recolonisation sont souvent utilisés (Hendricks et

al., 2006; Neill, 1992). Le premier dit à ‘long terme’ consiste à mettre en place une série de

carottes de recolonisation au début d’une étude, et d’en prélever un certain nombre à un pas de

temps préalablement défini. Le temps de résidence des carottes augmente au cours de l’étude.

Le second dit à ‘court terme’ permet d’installer, au cours du temps, un nombre limité de

carottes de recolonisation et de les prélever selon le pas de temps défini. Dans ce cas, le temps

de résidence des carottes reste stable au cours de l’étude.

La production racinaire est estimée en utilisant diverses approches (Hendricks et al., 2006) : (i)

la somme des biomasses moyennes des carottes à ‘court terme’, (ii) le maximum de la

biomasse des carottes à ‘long terme’ (iii) la moyenne de la biomasse des carottes de la

dernière série de carottes à ‘court terme’.

Dans le cas où les carottes des recolonisation installées au même moment ont des temps de

résidence différents, la production est considérée comme la différence de biomasse entre deux

dates de récolte successives (Vincent et al., 2006).

III.3.5.2. Le rhizotron et le minirhizotron

Ce sont deux méthodes d’observation directe de la dynamique de croissance du système

racinaire. Ces méthodes non destructives permettent le suivi de la croissance individuelle des

racines. Ainsi, elles permettent de caractériser au cours du temps, l’élongation, la durée de vie,

la mortalité et la durée de vie des racines (De Ruijter et al., 1996; Lauenroth et Gill, 2003). Le

rhizotron consiste en une surface vitrée (ou en plexiglas) placé au contact du sol et permettant

de suivre la croissance des racines (Green et al., 2005; Jourdan et Rey, 1997; Swords, 1998).

Au cours de la dernière décennie, la méthode du minirhizotron s’est largement développée

devenant auprès de nombreux chercheurs la méthode favorite d’estimation de la production de

racines fines (Hendricks et al., 2006; Lopez et al., 1998; Rytter, 2001; Tierney et Fahey,

2002). C’est une méthode visuelle d’étude de la dynamique de croissance racinaire à travers

un tube transparent inséré dans le sol. L’inclinaison du tube est souvent variable selon les

étude (généralement entre 0 et 45° par rapport à la verticale, De Ruijter et al., 1996; Tierney et

al., 2003). Une grande portion du tube est insérée dans le sol alors que la partie extérieure est

recouverte d’un plastique opaque pour se soustraire des effets de la pluie et de la lumière. Les

images du minirhizotron (racines en croissance et mortes) sont souvent prises avec une

caméra ou un scanner. Différents logiciels développées (‘Rhizogen’ pour les plants agricoles

et ‘Root’ou ‘RhizoDigit pour les écosystèmes forestiers) permettent une analyse des ces

images (Hendrick et Pregitzer, 1992; Jourdan, 2005). Le rhizotron et le minirhizotron

permettent une estimation de la production en longueur de racines. Plusieurs méthodes ont été

développées permettant de convertir la production en longueur en production en masse

(Bernier et al., 2005; Metcalfe et al., 2008; Steele et al.,1997). Cependant, l’utilisation de ces

méthodes nécessite en plus du suivi de la croissance racinaire, des mesures de diamètre et de

masse racinaire. Toutes les méthodes de conversion présentent chacune des limites puisque

des résultats contradictoires sont obtenus lorsqu’elles sont utilisées conjointement dans une

même étude (Metcalfe et al., 2008).