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Porine Milieu extérieur

3) Les mécanismes de résistance au NO

Bien que la majorité des gènes identifiés induits par le NO soient impliqués directement dans la dégradation et le piégeage du NO, il existe également des mécanismes de résistance au NO n’agissant pas sur le niveau de NO libre dans la cellule. Un exemple est la protéine YtfE qui a été décrite dans un premier temps comme étant impliquée dans la résistance d’E.coli au NO en condition d’anaérobie (Justino et al., 2005). Ensuite, les mêmes auteurs en 2007 ont montré que l’activité de protéines à cluster fer-soufre telles que la fumarase et l’aconitase est inhibée dans un mutant nul ytfE et que cette inhibition est due à des dommages au niveau des 24

Figure 18: Localisation du gène nnrS dans le génome des protéobactéries

SM: Sinorhizobium meliloti; AT: Agrobacterium tumefaciens; BME: Brucella melitensis; BJ: Bradyrhizobium japonicum; RPA: Rhodopseudomonas palustris; SF: Sinorhizobium fredii;

RE: Rhizobium etli; BE: Bradyrhizobium elkani

D’après Rodionov et al, 2005

α-protéobactéries

β-protéobactéries

γ-protéobactéries

S. medicae

SF

nifU fixK fixL nnrS norDB

norBQBCE

nnrS hemN soxR

nirVK napADFE

RE nnrU nnrS hemN norD

clusters fer-soufre de ces protéines (Justino et al., 2007). De plus, l’addition de la protéine YtfE purifiée sur des extraits cellulaires mutants restaure l’activité de ces 2 enzymes et rétablit leur cluster fer-soufre. Ce travail a permis de conclure qu’YtfE, dont le gène est régulé par NsrR, est cruciale pour la réparation des clusters fer-soufre en réponse à un stress nitrosatif. YtfE contient 2 fers libres mais son mécanisme d’action reste à ce jour inconnu. Deux homologues de YtfE semblent aussi réparer les clusters fer-soufre endommagés par le NO : DnrN de Neisseria gonorrhoeae et ScdA de Staphylococus aureus (Overton et al., 2008). En effet, ScdA est suffisant pour complémenter le phénotype d’un mutant ytfE d’E.

coli. De nombreux homologues de la famille DnrN/ScdA ont été retrouvés dans tous les

genres bactériens et aussi chez les champignons, suggérant que la réparation des clusters fer- soufre est un mécanisme important et conservé (Overton et al., 2008). Enfin, une autre protéine, nommée NnrS, qui est impliquée dans la résistance au NO de Vibrio cholerae agirait aussi en réparant les clusters fer-soufre de protéines (Stern et al., 2013). NnrS a aussi été décrit chez Neisseria meningitidis pour être un facteur important dans la colonisation des cellules épithéliales de l’hôte (Jamet et al., 2013). NnrS dont le gène appartient au régulon NorR de Vibrio cholerae, est prédite pour être une protéine transmembranaire et contenir un hème et un atome de cuivre (Pei et al., 2014). Cette protéine qui est conservée chez les bactéries (surtout chez les protéobactéries) est souvent retrouvée dans le même locus génomique que les gènes de la dénitrification suggérant un rôle de NnrS dans cette voie (Figure, 18 ; Bartnikas et al., 2002; Rodionov et al., 2005). De plus nnrS est localisé à proximité des gènes codant pour d’autres systèmes de dégradation du NO tel que hmp (Figure 18). Enfin, certaines bactéries contiennent 2 copies du gène nnrS comme S. meliloti et

Burkholderia pseudomallei, mallei et cepacia (Rodionov et al., 2005).

Comme cela a été vu précédemment, les cytochromes oxydase respiratoires qui sont des enzymes vitales sont inhibées par le NO via une métal-nitrosylation (cf Intro I-4). Chez Vibrio

fischeri, une bactérie symbiotique du calmar, il a été montré qu’en réponse au NO, le gène aox codant pour une oxydase respiratoire alternative est activé via le régulateur NsrR (Dunn et al., 2010). Cette protéine AOX dont le donneur d’électron est la quinone au lieu du

cytochrome pour les cytochrome oxydases communes, est résistante au NO ; par conséquent elle permet d’assurer un maintien énergétique de la bactérie en présence de NO et un bon déroulement de l’interaction symbiotique (Dunn et al., 2010). De la même façon, en réponse au NO, E. coli induit l’expression d’une quinone oxydase qui est aussi plus résistante au NO que les oxydases respiratoires classiques (Mason et al., 2009).

Enfin, un autre mécanisme d’adaptation des bactéries au NO est l’induction d’un système de dormance qui correspond à un état latent des bactéries (arrêt de la division des bactéries et mise en veille du métabolisme). En effet, par exemple, en réponse au NO synthétisé par les macrophages, la bactérie Mycobacterium tuberculosis va induire l’expression de gènes impliqués dans la mise en place d’un système de dormance tels que les gènes de synthèse du tréhalose, un osmoprotectant ou encore les gènes codant pour des protéines chaperonnes. La régulation de ces gènes fait intervenir un système à 3 composants, DosS,T et R (Voskuil et al., 2003). Dans cet état physiologique de dormance, la bactérie peut survivre des dizaines d’années dans les macrophages et lorsque les conditions deviennent propices, reprendre une division et engendrer la maladie.

En conclusion, les bactéries ont su s’adapter au NO et à ses dérivés. En général, une bactérie possède plusieurs de ces mécanismes qui sont souvent regroupés dans une même région génomique (Figure 18). Cette multiplicité de mécanismes de défense contre le NO suggère une grande importance du contrôle du niveau de NO dans la vie de la bactérie et soulève la question de la redondance fonctionnelle de ces systèmes. A l’heure actuelle, dans la majorité des cas, la mutation perte de fonction d’un gène codant pour un de ces systèmes conduit à un phénotype. Néanmoins, le phénotype d’hypersensibilité d’un mutant nnrS chez

Vibrio cholerae n’est visible que dans un fond génétique hmp (Stern et al., 2013).

Ces mécanismes de dégradation/ piégeage et de résistance au NO participent au pouvoir pathogène de certaines bactéries mais ont également un rôle majeur en vie libre. La récente découverte de NO dans les interactions symbiotiques laisse à supposer que les bactéries symbiotiques ont aussi su développer une réponse adaptée au NO.