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Mécanismes de la régulation de la transcription par Sp

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V Le facteur de transcription Sp

V.2 Mécanismes de la régulation de la transcription par Sp

Un gène cible de Sp1 est défini par la présence dans le promoteur d’un site GC capable de lier Sp1 et dont la transcription est régulée par Sp1. Les approches classiques que sont le gel retard ou l’étude de l’activité d’un gène rapporteur ont permis d’identifier un très grand nombre de gènes cibles de Sp1. Cependant, ces études utilisent des systèmes cellulaires différents dans un environnement particulier. Les analyses à grande échelle par les techniques plus récentes permettront d’identifier l’ensemble des gènes cibles de Sp1 dans un seul contexte cellulaire.

V.2.1 Séquence du site consensus

Historiquement, Sp1 a été identifié par sa capacité à lier les sites GGGCGG présents en tandem dans le promoteur de SV-40 (Dynan and Tjian, 1983b). La séquence consensus du site reconnu par Sp1 a d’abord été déterminée par des expériences in vitro comme un décanucléotide GGGG(C/A)GGGG (Letovsky and Dynan, 1989). Par comparaison de différents sites connus de haute affinité, la séquence consensus du site a ensuite été définie comme (G/T)GGG(C/A)GG(G/A)(G/A)(C/T) (Bucher, 1990) (Kriwacki et al., 1992). Une grande variabilité de séquence est tolérée au niveau du triplet situé en 3’, normalement reconnu par le ZnF 1. Cette tolérance est expliquée par la présence, dans le ZnF 1, d’acides aminés

différents de ceux présents dans le ZnF 2 ou 3 alors qu’ils sont en position critique pour établir le contact avec l’ADN (Marco et al., 2003) (Yokono et al., 1998).

De façon surprenante, Sp1 peut lier des sites dont la séquence est très éloignée de celle du site consensus : TCCTCCTCCTCC (Cohen et al., 1997) ou GGGTGACCCC (Hirano et al., 1998) avec une affinité similaire que pour le site Sp1 consensus. L’affinité de liaison de Sp1 à l’ADN ne dépend donc pas seulement de la séquence du site mais aussi du contexte chromatinien. En effet, une étude a montré que l’affinité de liaison de Sp1 à l’ADN nu est 10 fois plus grande que son affinité de liaison à l’ADN nucléosomal (Li et al., 1994). De plus, une analyse directe très élégante utilisant une combinaison de précipitation de facteurs de transcription liés à l’ADN avec des puces ADN couvrant l’intégralité des chromosomes humains 21 et 22 a identifié les sites liés à Sp1 in vivo. Parmi ces sites, environ 20% des sites liés à Sp1 in vivo ne correspondent pas à la séquence consensus qui, dans cette étude, est définie par GG(G/T) G(C/T)G GG (Cawley et al., 2004). Il pourrait être très intéressant de compiler l’ensemble des séquences des fragments d’ADN liés à Sp1 identifiés par cette étude et essayer d’en dégager une séquence consensus du site GC.

V.2.2 Localisation du site

Les sites de liaison à Sp1, lorsqu’ils sont situés dans le promoteur de gènes codants, sont majoritairement localisés dans la partie proximale du promoteur. Ainsi, une analyse bioinformatique des promoteurs de gènes impliqués dans la régulation du cycle cellulaire a montré une localisation préférentielle des sites Sp1 400 pb en amont du site d’initiation de la transcription (Elkon et al., 2003). La localisation des sites Sp1 dans le promoteur semble influencer la régulation de la transcription par Sp1.

Les gènes ne contenant pas de boîte TATA dans leur promoteur ont des sites GC environ 50 pb en amont du site d’initiation de la transcription et ces sites peuvent remplacer fonctionnellement la boîte TATA (Blake et al., 1990) (Lu et al., 1994) (Kollmar et al., 1994) en permettant le recrutement de la machinerie de transcription basale comme nous le verrons dans le prochain paragraphe. Dans les promoteurs sans boîte TATA, la localisation des sites GC proximaux par rapport au site d’initiation est essentielle puisque l’augmentation de la distance entre les sites GC et le site d’initiation est corrélée à une diminution de la transcription à partir des sites majeurs d’initiation et à une augmentation de la transcription à partir de sites mineurs d’initiation situés plus en amont (Lu et al., 1994) (Kollmar et al., 1994).

Si les sites proximaux contrôlent l’initiation de la transcription, les sites GC plus distaux sont impliqués dans la régulation de l’efficacité de la transcription (Patel and DiMario, 2001).

V.2.3 Mécanisme d’action

V.2.3.a Recrutement de la machinerie de transcription basale

L’initiation de la transcription par la RNA pol II nécessite l’assemblage coordonné de multiples facteurs généraux constituant la machinerie de transcription basale pour contrôler efficacement la synthèse des ARN. La boîte TATA au niveau d’un promoteur est reconnue par un complexe multiprotéique appelé TFIID qui est responsable du recrutement de la RNA pol II. Le complexe TFIID contient des TBP (TATA-box binding protein) et des co-facteurs nommés TAF (TBP-associated factor). En absence de boîte TATA, Sp1 facilite le recrutement de TFIID au promoteur (Smale et al., 1990) par interaction directe avec TBP ainsi que des TAF (tableau 4). De plus, Ryu et al. ont identifié un complexe CRSP (Co-factor required for Sp1) constitué de neuf protéines requis pour l’activation efficace de la transcription par Sp1 en coopération avec le complexe TFIID in vitro (Ryu et al., 1999). Ainsi en absence de boîte TATA, Sp1 va permettre l’initiation de la transcription (Blake et al., 1990) (Lu et al., 1994) (Kollmar et al., 1994). La capacité de Sp1 à recruter constitutivement la machinerie de transcription basale peut aussi permettre la stimulation rapide d’un promoteur en réponse à un stimulus comme c’est le cas pour le promoteur A20 en réponse au TNF- (Ainbinder et al., 2002).

V.2.3.b Recrutement d’enzymes modifiant la chromatine

L’activité transcriptionnelle de Sp1 dépend aussi de l’état de compaction de la chromatine qui est régulé notamment par acétylation/déacétylation des histones par le système enzymatique HAT/HDAC. Sp1 peut interagir directement avec des HAT ou des HDAC généralement via son domaine de liaison à l’ADN (tableau 4).

L’association du domaine de liaison à l’ADN de Sp1 avec p300 augmente la capacité de Sp1 à lier l’ADN de façon indépendante de l’activité acétyltransférase de p300 (Suzuki et al., 2000).Par contre, l’association de Sp1 avec HDAC corrèle avec l’inhibition de son activité

Facteur interagissant avec Sp1 domaine de Sp1 impliqué dans l’interaction

références Machinerie de transcription basale

dTAF110 transactivation B (Gill et al., 1994)

hTAFII130 transactivation A et B (Tanese et al., 1996)

hTAFII55 C-terminal (Chiang and Roeder, 1995)

CRSP (Ryu et al., 1999)

TBP (Emili et al., 1994)

Enzymes modifiant la chromatine

HDAC1 domaine de liaison à ADN (Doetzlhofer et al., 1999)

(Kang et al., 2005)

HDAC2 N-terminal (Won et al., 2002)

HDAC3 (Huang et al., 2006)

p300 (HAT) domaine de liaison à ADN (Suzuki et al., 2000)

Facteurs de transcription

c-Myc C-terminal (Gartel et al., 2001)

E2F-1 domaine de liaison à ADN (Rotheneder et al., 1999)

(Lin et al., 1996)

KLF6 C-terminal (Botella et al., 2002)

Oct-1 transactivation B (Strom et al., 1996)

p53 transactivation A ou B ou

domaine de liaison à ADN

(Ohlsson et al., 1998)

p65 de NFB domaine de liaison à ADN (Perkins et al., 1994)

Smad –2, -3 et -4 transactivation B (Feng et al., 2000)

(Datta et al., 2000)

YY1 C-terminal (Lee et al., 1993)

GATA-1 domaine de liaison à ADN (Merika and Orkin, 1995)

MEF-2 (Krainc et al., 1998)

Facteur viral E2 (Li et al., 1991)

Autres facteurs cellulaires ne liant pas l’ADN

BcoR, NcoR et SMRT N-terminal ID

domaine de liaison à ADN

(Lee et al., 2005)

mdm2 domaine de liaison à ADN (Johnson-Pais et al., 2001)

p74 dom N-terminal (Murata et al., 1994)

PML domaine C-terminal (Vallian et al., 1998)

protéine pocket p107 (Parakati and DiMario, 2005)

L’association du domaine de liaison à l’ADN de Sp1 avec p300 augmente la capacité de Sp1 à lier l’ADN de façon indépendante de l’activité acétyltransférase de p300 (Suzuki et al., 2000). Par contre, l’association de Sp1 avec HDAC corrèle avec l’inhibition de son activité transcriptionnelle (Doetzlhofer et al., 1999; Kang et al., 2005). Deux mécanismes ont été

proposé : soit les HDAC se lient au niveau du domaine de liaison de l’ADN de Sp1 et inhibent sa liaison à l’ADN (Kang et al., 2005), soit les HDAC se lient au niveau de la région N-terminale de Sp1 mais n’affectent pas sa liaison à l’ADN (Won et al., 2002). Dans ce dernier cas, les mécanismes d’inhibition de l’activité transcriptionnelle de Sp1 pourraient impliquer le recrutement des HDAC au niveau des promoteurs et une déacétylation locale de la chromatine.

V.2.3.c Co-facteurs

(i) Facteurs liant l’ADN

Sp1 peut réguler la transcription par coopération avec d’autres protéines dont la plupart sont des facteurs de transcription. Certains sont des facteurs de transcription exprimés ubiquitairement, d’autres des facteurs spécifiques à certains tissus tels que GATA-1 ou MEF-2 ou des facteurs viraux tels que le facteur enhancer viral E2 du virus BPV-1 (Bovine Papillomavirus type 1) (tableau 4). Le domaine d’interaction de Sp1 avec ces facteurs a parfois été identifié et il s’agit principalement du domaine C-terminal de Sp1 qui inclue son domaine de liaison à l’ADN et son domaine de transactivation D (tableau 4).

L’association de Sp1 avec ces facteurs de transcription peut activer en synergie la transcription des gènes par différents mécanismes. En utilisant un système de gène rapporteur, une étude élégante les a décrit comme mécanismes utilisés par Sp1 et le facteur viral E2 pour activer la transcription en synergie dans différents contextes de promoteurs (Li et al., 1991). Lorsque les sites de Sp1 et du facteur viral E2 sont dans la partie proximale du promoteur, Sp1 peut faciliter la liaison de E2 au niveau de son site pour lequel il a normalement une faible affinité. L’activité transcriptionnelle de Sp1 peut aussi être stimulée par le facteur E2 de façon indépendante de la liaison de E2 à l’ADN. Par contre, lorsque le site du facteur E2 est localisé en aval du gène rapporteur, l’activation de la transcription par E2 requiert la présence de sites GC dans la partie proximale du promoteur. Dans ce cas, Sp1 et le facteur enhancer distal E2 interagissent physiquement pour former une boucle d’ADN (Li et al., 1991).

Cependant, l’association de Sp1 avec des facteurs de transcription n’est pas toujours synonyme d’activation synergique de la transcription. Sp1 peut inhiber l’activité d’un autre facteur de transcription et réciproquement. Par exemple, l’expression ectopique de Sp1 inhibe

la répression de la transcription du promoteur IGF-I (Insulin-like Growth Factor) par p53 (Ohlsson et al., 1998). Au contraire, l’expression de c-Myc réprime le promoteur p21 alors que celui-ci ne contient pas de sites de liaison à c-Myc. Puisque c-Myc s’associe avec le domaine de liaison de Sp1, il est possible dans ce cas que c-Myc séquestre Sp1 inhibant ainsi son activité transcriptionnelle (Gartel et al., 2001).

(ii) Autres facteurs

Finalement, Sp1 est aussi capable d’interagir avec des protéines cellulaires qui ne lient pas l’ADN (Tableau 4) et avec des protéines cellulaires non identifiées de 74 kDa (p74) (Murata et al., 1994) ou de 20 kDa nommée Sp1-I (Chen et al., 1994). L’association de Sp1 avec ces facteurs inhibe l’activité transcriptionnelle de Sp1 vraisemblablement par inhibition de sa liaison à l’ADN (Parakati and DiMario, 2005) (Chen et al., 1994) (Johnson-Pais et al., 2001).

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