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5. Circulations de fluides associées aux intrusions sableuses

6.2. Genèse des injectites

6.2.3. Mécanismes déclencheurs

- Augmentation du volume de fluide

La seconde cause de surpression dans les bassins sédimentaires est liée à la génération des hydrocarbures, plus particulièrement lors de la métagenèse (Osborne et Swarbrick, 1997, Swarbrick et al., 2002, Mourgues, 2003). La métagenèse, i.e. la dernière phase d’évolution du kérogène, se produit à des profondeurs d’environ 3500 - 4000 m et induit une augmentation de volume de l’ordre de 75 à 140 %, et la catagenèse se produit à des profondeurs variant de 1500 à 4000 m selon les bassins et induit une augmentation de volume entre 25 et 50% selon la composition du kérogène (Tissot et Welte, 1984). Les mécanismes d’expansion de fluides sont essentiellement contrôlés par la température (Swarbrick et al., 2002) et se produisent principalement à des profondeurs supérieures à 1 km (> 50°C). Cependant, un premier palier de déshydratation des smectites, i.e. d’un relâchement d’une énorme quantité de fluide, se produirait dans le premier kilomètre entre 25 et 60°C (Colton-Bradley, 1987; Dubacq et al., 2010). Les quantités maximum d’eau libérées sont obtenues pour les smectites riches en Ca et atteindraient plus de 30% d’augmentation du volume de fluide (Vidal et Dubacq, 2009; Dubacq et al., 2010), bien plus que les 1-2% suggérés par Osborne et Swarbrick (1997). Parce que la porosité/perméabilité des chenaux est plus grande que les argiles environnantes, cela crée un chemin naturel pour les fluides qui vont s’accumuler dans les chenaux et voir leur pression augmenter.

D’après la méthode de Hillier et Cosgrove (2002), la profondeur d’enfouissement de la source de sable au moment de l’injection a été estimée à 300 - 600 m. Par conséquent, la mise en surpression de cette source n’a pas pu être induite par le craquage des huiles ou du gaz, ou encore par les transformations smectite-illite qui se font au-delà de 2 km d’enfouissement (Swarbrick et al., 2002). Cependant, la première phase de déshydratation des argiles de la roche hôte, riches en Ca-smectite, a pu avoir son importance dans la mise en surpression. Les cheminées carbonatées retrouvées dans le Gargasien supérieur de la zone d’étude, situées quelques mètres sous le corps sableux source, témoignent de la circulation de méthane à très faible profondeur (Mostefaï, 1997). Ces cheminées peuvent aussi témoigner de conditions de surpression dans les sédiments marneux (Clari et al., 2009), responsables de glissements gravitaires (Mourgues et Cobbold, 2003; Cobbold et al., 2004; Mourgues et Cobbold, 2006). Les cheminées carbonatées de la zone d’étude, et plus généralement du bassin Vocontien, sont généralement recouvertes par des slumps d’épaisseur métrique à décamétrique. Il se peut donc que ces slumps ce soit formés en réponse à une surpression qui a existé dans les premiers mètres des sédiments fini-aptiens. Si c’est le cas, la surpression est liée à la précipitation du ciment intergranulaire par l’oxydation anoxique microbienne du méthane, qui par conséquent a diminué la perméabilité des sédiments (Clari et al., 2009). Ainsi, même s’il n’est pas possible de savoir si la migration du méthane a pu ou non augmenter la pression du corps sableux source C1, elle pourrait être responsable d’une diminution de la perméabilité des sédiments sous-jacents, qui favorise le mécanisme de déséquilibre de compaction à faible profondeur.

6.2.3. Mécanismes déclencheurs

Les éventuels évènements déclencheurs de l’injection ont été résumés par Jolly et Lonergan (2002) ou encore Hurst et al. (2011), qui en ont identifié quatre principaux : (i) l’activité sismique (e.g Newsom, 1903; Martil et Hudson, 1989; Obermeier, 1996; Surlyk et Noe-Nygaard, 2001; Molyneux et al., 2002; Levi et al., 2006; Hurst et al., 2011), (ii) les contraintes tectoniques dans un contexte extensif (e.g. Vitanage, 1954; Harms, 1965; Scholz et al., 2009), (iii) les instabilités de pente (slumps) ou la charge d’un corps (glacier) (e.g.

Chapitre V : Dynamique de propagation d’un réseau d’injectites et processus de mise en place

 

Truswell, 1972; Taylor, 1982; Rijsdijk et al., 1999; Rowe et al., 2002; Jonk et al., 2010), et (iv) l’apport important de fluides ascendants en surpression dans un corps sableux moins profond (e.g. Cathles et Smith, 1983; Brooke et al., 1995). Dans le cas des plus larges réseaux d’injectites, le dernier mécanisme semble le plus probable car l’injection requiert une grande quantité de fluides pour transporter le sable (Hurst et al., 2003, 2011).

L’injection sableuse de Bevons s’est produite à l’Albien supérieur - Cénomanien inférieur dans un contexte extensif NW-SE lors de la phase de déformation méso-crétacé de la plateforme Provençale, connue sous le nom d’isthme durancien (Gignoux, 1925). Compte tenu du contexte tectonique et sédimentaire à cette période, nous suggérons que l’afflux de fluides ascendant en surpression le long de plans de failles est le mécanisme le plus probable à l’origine de l’injection forcée. Le diachronisme entre les sills et les dykes signifie que cet apport important de fluides s’est au moins répété deux fois. Par conséquent nous suggérons que les fluides ont circulé cycliquement le long des plans de failles par le principe des failles-valves (cf. Sibson, 1988). Les failles-failles-valves (faible perméabilité) permettent l’accumulation de fluide en périodes inter-sismiques (« fault-seal »), et libèrent massivement des fluides en surpression pendant les périodes co-sismiques (Sibson, 1995, 2007).

Fig. A5.20 (page suivante) : Schéma synthétique de formation du réseau d’injections sableuses de Bevons. (a) dépôt des sédiments marneux de l’Aptien sur un substrat calcaire faillé du Crétacé inférieur. Le chenal turbiditique C1, d’âge Albien moyen, repose très près du Clansayésien. (b) Le chenal C1 est enfoui et compartimentalisé par les failles qui continuent de jouer pendant le dépôt des sédiments, favorisant la mise en surpression des compartiments isolés dans l’encaissant argileux. Déposition à l’Albien supérieur du chenal turbiditique C3. (c) L’enfouissement du chenal C1 s’est poursuivi et la pression a continué d’augmenter. Initiation de la première phase d’injection, suite au rejeu des failles qui a permis l’afflux de fluides dans les compartiments en surpression (évènement déclencheur). Cette 1ère phase d’injection induit des sills/wings ainsi que des laccolites sédimentaires. (d) Après la 1ère phase d’injection le chenal C1 s’est remis en surpression (les failles jouant le rôle de barrière entre deux phases d’injection). Initiation de la deuxième phase d’injection, toujours en conséquence du rejeu des failles qui deviennent conduits de fluides. Pendant cette phase d’injection, les dykes se forment. (e) Réseau d’injectites de Bevons tel qu’il affleure actuellement (érosion). A noter que le chenal turbiditique C2 n’est pas représenté sur la figure pour des raisons de lisibilité.

Chapitre

Chapitre V : Dynamique de propagation d’un réseau d’injectites et processus de mise en place

 

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