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CHAPITRE V : ACTIVITE PHYSIQUE ET SYSTEME NERVEUX AUTONOME

4. EXERCICE AIGU ET SNA

4.2. Mécanismes d’ajustements de l’activité autonome cardiovasculaire à l’exercice

Les adaptations cardiovasculaires survenant à l’exercice sont déterminées pour grande part par des mécanismes adaptatifs gouvernés par le système nerveux végétatif. Celui-ci intègre des informations d’ordre mécanique, métabolique, et chimique en provenance de muscles actifs, des baro et chémorécepteurs afin de déclencher des réponses réflexes cardiaques et vasomotrices présentées ci-avant. Ces régulations sont supervisées des centres encéphaliques d’origine corticale, hypothalamique

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et bulbaire qui influencent et ajustent finement les mécanismes réflexes sous-jacents. Les ajustements autonomiques à l’exercice sont décrits par Fisher et al. (2015).267

4.2.1. Rôle de la commande centrale

Le réseau végétatif central, composé notamment des cortex insulaire et cingulaire, jouent un rôle important dans les ajustements cardiovasculaires à l’effort. Les premiers éléments ayant mis sur la piste d’une contribution centrale des régulations cardiovégétatives à l’exercice proviennent d’observations faites sur l’élévation de la fréquence cardiaque dans les quelques secondes précédant un exercice ou à son amorce.140–142 Ces réponses, considérées comme trop rapides pour être expliquées par des mécanismes réflexes issus des muscles actifs, suggèrent la mise en jeu de processus neuraux proactifs ne pouvant émerger que des centres supérieurs. Des preuves de ces mécanismes ont été apportées par des travaux ayant montré une élévation de la fréquence cardiaque lors de taches de contractions volontaires sous blocage pharmacologique de la plaque motrice.268 Le retrait du tonus parasympathique expliquant la hausse initiale de la FC en début d’exercice a donc été attribué à l’intervention de la commande centrale, laquelle contribuerait également à l’augmentation anticipée de la pression artérielle.269,270 Par ailleurs, le réseau végétatif central assure également le contrôle du travail cardiovasculaire au cours de l’exercice en palliant aux potentiels déficits pouvant se produire au sein des circuits infracorticaux. A l’exercice dynamique, le blocage expérimental de la jonction neuromusculaire entraine une hausse de la fréquence cardiaque et de la pression artérielle qui ne peut donc s’expliquer que par l’intervention des centres supérieurs.271,272

4.2.2. Réflexes initiés par les muscles squelettiques actifs

Un ensemble d’afférences mécaniques et métaboliques naissent de l’activation des muscles impliqués par l’effort et sont le point de départ de multiples réponses communément rassemblées sous le nom de « exercise pressor reflex ».273 Celui-ci regroupe deux réflexes fondamentaux : le mécanoréflexe et le métaboréflexe. Le mécanoréflexe est activé par les déformations mécaniques induites par des changements de pression ou l’étirement musculaires.274 Ce réflexe est donc activé principalement immédiatement au début de l’effort, dès l’instant où les contractions musculaires provoquent la distorsion des récepteurs mécaniques. En revanche, le métaboréflexe275 n’est déclenché que lorsque les produits du métabolisme commencent à s’accumuler au sein des muscles actif. Ce qui implique un délai d’activation dû à l’inertie des systèmes bioénergétiques. Les afférences mécaniques et métaboliques sont majoritairement transmises par les fibres non myélinisées de groupe III et IV, respectivement.276

Le mécanoréflexe

Bien que l’augmentation initiale de fréquence cardiaque soit attribuée pour partie à une diminution du tonus vagal médiée par les centres supérieurs, des travaux ont démontré qu’il était possible d’obtenir de telles adaptations même en l’absence de commande centrale. Ainsi, chez l’animal comme chez l’humain, des stimuli mécaniques isolés évoqués au niveau du muscle squelettique induisent une inhibition de l’activité parasympathique cardiaque.277,278 De plus, ces mêmes stimuli pourraient parallèlement favoriser l’augmentation de l’activité musculaire sympathique,279–281 renforçant ainsi les réponses hémodynamiques liées à l’exercice. Au cours de l’effort d’intensité constante, il apparait une augmentation de l’activité des mécanorécepteurs musculaires qui serait possiblement due à

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l’accumulation des sous-produits du métabolisme musculaire. Cette sensibilisation a été mise en évidence par plusieurs travaux ayant montré une augmentation de la fréquence de décharge des mécanorécepteurs musculaires en condition d’ischémie ou en présence de produits du métabolisme tels que l’ATP.276,282,283 En somme, le mécanoréflexe jouerait un rôle majoritaire à l’initiation de l’effort en favorisant l’inhibition parasympathique cardiaque. Au cours de l’effort, il favoriserait le maintien du tonus sympathique local sous l’effet de l’activité métabolique.

Le métaboréflexe

Les réponses végétatives induites par l’activité métabolique sont de latence supérieure à celles provoquées par le mécanoréflexe.284 Ce constat est cohérent avec l’inertie nécessaire à l’accumulation des métabolites au cours de l’effort. Par conséquent, le rôle du métaboréflexe à l’initiation de l’exercice est considéré comme négligeable devant celui du mécanoréflexe et de la commande centrale. Les produit métaboliques issus du travail musculaire tels que l’acide lactique, l’adénosine, le potassium ou encore les ions hydrogènes sont le point de départ du métaboréflexe.285–292 Ils déterminent principalement une augmentation de la pression artérielle, bien qu’une forte activation du métaboréflexe puisse aussi induire une hausse de l’activité cardiaque qui peut s’opposer au retour de l’activité parasympathique en fin d’effort.293 De façon intéressante, il semblerait que ce soit l’association de plusieurs métabolites plutôt que leurs effets pris isolément qui soit déterminante dans les réponses métaboréflexes.294 Mentionnons aussi que le métaboréflexe peut également être initié à partir d’afférences issues des muscles respiratoires médiées par le nerf phrénique.295,296

4.2.3. Baroréflexe artériel

Le baroréflexe artériel joue un rôle fondamental dans les adaptions cardiovasculaires à l’exercice. Il permet d’ajuster la pression artérielle grâce à un déplacement de son point de consigne aux niveaux exigés par l’intensité de l’exercice. Ce reparamétrage de la valeur consigne, proportionnelle à l’intensité de l’effort, est déterminée par l’effet combiné des ordres émanant des centres supérieurs ainsi que des afférences métaboliques et mécaniques provenant des muscles actifs.267 Un tel réajustement est nécessaire à l’augmentation du débit cardiaque qui accompagne l’exercice. L’activation de la commande centrale ainsi que les afférences mécaniques et métaboliques musculaires pourraient modifier la régulation baroréflexe au début de l’exercice, mais rien n’indique si cette adaptation est dûe à une réduction de la sensibilité baroréflexe ou bien à un réajustement rapide du point de consigne à des valeurs plus élevées. La commande centrale peut induire un déplacement bidirectionnel de la courbe baroréflexe alors que les afférences musculaires ne peuvent induire qu’un décalage vers la droite.297

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Figure 44. Réajustement de la valeur consigne du baroréflèxe artériel à l’exerice pour différentes intensités. D’après Raven, 2006.298

4.2.4. Baroréflexe cardiopulmonaire

Les barorécepteurs situés dans les grosses veines systémiques, les vaisseaux pulmonaires ainsi que les parois du cœur apportent un degré supplémentaire de précision au contrôle de la pression artérielle à l’exercice. Ainsi, au tout début de l’effort, on observe une inhibition brève de l’activité musculaire sympathique, en raison de la mise en tension des barorécépteurs cardiopulmonaires. Ces derniers sont notamment sensibles à la position du corps à l’exercice, laquelle est déterminante dans la répartition des volumes central et périphérique. Ainsi, la fréquence cardiaque est typiquement plus basse lors d’un exercice réalisé en position couchée que lorsqu’il est effectué en position debout. Par ailleurs, les données actuelles indiquent que le baroréflexe cardiopulmonaire, comme son homologue artériel, subit un réajustement de sa valeur de consigne afin de subvenir aux exigences hémodynamiques imposées par l’exercice. De plus, plusieurs études montrent que le gain du baroréflexe artériel peut donc être modulé par le niveau d’excitation des barorécepteurs cardiopulmonaires, indiquant des interactions complexes entre les deux systèmes. Enfin, le rôle du baroréflexe cardiopulmonaire relève d’une importance majeure en condition de stress thermique ou de déshydratation, lorsque la réduction du volume plasmatique induite par la sudation provoque une baisse du VES et du débit cardiaque associée à une augmentation de la fréquence cardiaque et de la concentration en noradrénaline circulante (dérive cardiovasculaire).267

4.2.5. Chémoréflexe artériel

Bien que les mécanismes du chémoréflèxe et son implication dans la régulation des systèmes cardiovasculaires, ventilatoire, et autonome soient bien connus, son rôle dans l’ajustement des réponses autonomes cardiovasculaires à l’exercice est peu décrit. Des travaux rapportent que

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l’inhibition pharmacologique du chémoréflexe (par injection intraveineuse de dopamine) pendant un exercice dynamique des membres inférieurs induit une augmentation du flux sanguin fémoral et de la conductance vasculaire mais n’a pas d’influence en condition de repos. Des études chez l’animal indiquent également que l’inhibition du chémoréflexe carotidien cause une vasodilatation au niveau des membres postérieurs à l’exercice. Bien que des travaux supplémentaires soient nécessaires, ces découvertes suggèrent que le chémoréflèxe jouerait un rôle restrictif sur le débit sanguin musculaire en induisant une vasoconstriction au sein des muscles squelettiques lorsque la disponibilité en O2 vient à tarir.267

Figure 45. Evolution du contrôle autonomique de la fréquence cardiaque au cours d'un effort aérobie d'intensité modéré et durant les 30 premières minutes de récupération. D'après Fisher, 2015.267

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Figure 46. Vue d’ensemble des mécanismes d'ajustement de l'activité autonomique à l'exercice. D'après Michael, 2017.255

5. ENTRAINEMENT ET SNA