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2.3. FONCTIONNEMENT BIOPHYSIQUE ET EPURATOIRE DES FILTRES A SABLE

2.3.2. Mécanisme biologique

Les processus biologiques sont attribués à l'accumulation dans le milieu de cellules et de leurs produits, tels que les polymères extracellulaires, c'est-à-dire à la croissance du biofilm.

2.3.2.1. Description du biofilm

La base du principe d’épuration biologique est la présence de microorganismes, et de bactéries en particulier, qui oxydent les matières organiques et azotées présentes dans l’effluent. Dans les massifs filtrants, ces microorganismes se fixent et se développent dans la matrice poreuse pour former un biofilm. L’adhésion du biofilm se fait dans un premier temps par adsorption de façon réversible sur le support, puis les microorganismes se fixent de façon permanente par des sécrétions d’exopolymères formant ainsi une matrice extracellulaire [Cha07]. Cette matrice assure aux bactéries un environnement riche en substances nutritives car elle sert de piège et de réserve de nutriments.

Les systèmes d’ANC favorisent la formation du biofilm. Les biofilms développés dans les milieux poreux participent à l'épuration des eaux usées mais contribuent aussi au processus de colmatage des filtres. Le biofilm est principalement responsable de la biotransformation, de la biodégradation, de la minéralisation et de l’assimilation des nutriments présents dans l'effluent. Il convertit la matière organique soluble et en suspension de l'eau usée en biomasse bactérienne et fongique dont dépend le reste de la communauté. En effet, les biofilms hébergent une communauté complexe de bactéries, champignons, protozoaires et macro-invertébrés. Ainsi, plusieurs niveaux trophiques coexistent dans les systèmes de traitement et la faune broutante représentée par les protozoaires, les nématodes et les rotifères se nourrissent du biofilm. Ainsi, les performances épuratoires des systèmes de traitement reposent sur l'équilibre de cet écosystème.

Partie I – Chapitre 2 : Les filtres à sable

2.3.2.2. Structure et composition

Le biofilm peut être considéré comme un gel de polymères à l’intérieur duquel se trouvent des microcolonies de microorganismes. Il présente une structure poreuse et très absorbante. Le biofilm n’est pas un empilement régulier de cellules ; en effet il présente une grande hétérogénéité, correspondant à une accumulation d’amas cellulaires reliés entre eux par des fibrilles et parcourus par un réseau de canaux où circule l’eau qui transporte les nutriments pour les cellules et qui véhicule les déchets produits par le biofilm (Figure 6).

Figure 6: Structure des microcolonies [Wan05]

Les microcolonies sont incluses dans une matrice d’exopolymères, essentiellement des polysaccharides et des protéines. La microcolonie peut être composée de 10 à 25 % de cellules et de 75 à 90 % de substances polymériques. Ces substances peuvent être produites par les bactéries, ou encore par la fixation de macromolécules provenant du milieu.

La matrice d'exopolymères se compose classiquement de divers polysaccharides, de protéines, d’acides nucléiques, d’acides humiques, de lipides et une quantité importante d’eau d’environ 95 % de la masse humide de toute la matrice. Les protéines et les polysaccharides représentent 75 à 89 % de la composition des substances polymériques extracellulaires. Le rapport massique polysaccharides/protéines est compris entre 0,25 et 0,6 dans un échantillon total de biofilm, et 84 % des protéines et 70 % des polysaccharides sont extracellulaires.

Figure 7 : Composition moyenne de biofilm de réseaux d’eaux usées [Cha07]

Canal Amas cellulaire

Partie I – Chapitre 2 : Les filtres à sable

Le biofilm présente une grande hétérogénéité en termes de structure et de composition ; en effet, une espèce de bactéries produit un type de biofilm qui varie selon les conditions physico-chimiques.

2.3.2.3. Hétérogénéité du biofilm

Le biofilm présente diverses hétérogénéités :

- Une hétérogénéité géométrique : épaisseur, rugosité de la surface et porosité du biofilm, surface du substratum recouverte par le biofilm microbien.

- Une hétérogénéité chimique : diversité liée à la composition et les conditions chimiques (présence de nutriments, produits métaboliques, inhibiteurs…), variation de pH, diversité de réactions (aérobies/anaérobies...).

- Une hétérogénéité biologique : diversité des espèces microbiennes et de leurs distributions spatiales, différences d'activité (croissance cellulaire, production de substances polymériques extracellulaires, mort cellulaire...).

- Une hétérogénéité physique : densité du biofilm, perméabilité, viscoélasticité, viscosité, propriétés des substances polymériques extracellulaires, concentration en solutés, diffusivité des solutés, présence de solides abiotiques…

2.3.2.4. Développement et croissance

La formation du biofilm sur un support est un processus composé de plusieurs phases que l’on peut décrire comme suit [Cha07] :

- Une préparation initiale de la surface (pré-conditionnement) par la formation d’une double couche électronique (par adsorption des ions) riche en nutriments nécessaire par la suite à la fixation et au développement des bactéries. Cette phase est rapide, et se réalise en quelques minutes après l'exposition à l’effluent.

- Une seconde phase, cette fois-ci plus lente que la première, où les bactéries s’attachent (phénomène réversible) et adhèrent (attachement irréversible) à la surface constituant ainsi une première couche. Cette phase a lieu après une phase transitoire de transport des cellules bactériennes vers la surface, ce transport s’effectuant par la mobilité des bactéries ou/et par le flux du fluide.

- La troisième phase correspond à la prolifération des cellules ; c’est la phase de croissance du biofilm résultant de la formation des microcolonies qui constituent des réseaux de polymères qui maintiennent l'intégrité structurale du biofilm. L'adhésion de nouvelles bactéries et de particules du liquide à la matrice continue à avoir lieu jusqu’au recouvrement total de la surface par la colonisation des structures complexes de biofilm.

- Une quatrième phase est celle de maturation du biofilm. Cette phase est caractérisée par l’apparition du phénomène de détachement du biofilm de la structure biologique. Un biofilm mature signifie que le système biologique dynamique est en équilibre entre la production des nouvelles cellules et le détachement (Figure 8). Dans les filtres à sable d’ANC, les vitesses d’écoulements des effluents sont faibles et un tel phénomène n’est pas envisageable.

Partie I – Chapitre 2 : Les filtres à sable

Figure 8 : Schéma représentant la phase de maturation du biofilm [Cha07] 2.3.2.5. Facteurs influençant la formation et l’accumulation du biofilm

La formation du biofilm est gouvernée par de nombreux facteurs physico-chimiques et biologiques. Parmi les facteurs physico-chimiques on peut citer :

- les caractéristiques de la surface d’attache et sa rugosité,

- les caractéristiques microbiennes de l’effluent, la concentration de sa charge organique et du gradient hydraulique appliquée,

- la température, le pH, l’humidité, la pression hydraulique, l’oxygénation du milieu…

L’accumulation de biofilm, quant à elle, est influencée par l’interaction entre les différents facteurs cités ci-dessus.

Dans les différents systèmes d’ANC, le biofilm évolue selon les caractéristiques des matériaux, leur mise en œuvre, les conditions et les charges hydrauliques d’alimentation et de concentration de l’effluent. Actuellement, le rôle physique des matériaux et des propriétés des filtres sur la croissance et la régulation de la biomasse est très mal connu.