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Enfin, la collection lithique du site inclut au moins une pipe à plate-forme en stéatite, ou peut-être en argile réfractaire (planche II, doc. 11.a, b, c et d), représentée par quatre fragments. Ces derniers portent tous des incisions, mais j’ignore si ces marques sont accidentelles ou réellement décoratives. Trois fragments sont localisés (carte 4) au centre du site, en périphérie du foyer préhistorique (puits 3L-26 et 3L-26). La pipe à laquelle ils correspondent y est peut-être associée, ce qui la ferait remonter à 260 de n.è. (terminus ante quem), à une date où la sphère d’interactions Hopewell est toujours effective. Si tel était le cas, elle serait la seule pipe véritablement hopewellienne connue sur BhFl-1, et non une simple supposée imitation (Chapdelaine 1982). Il ne s’agit cependant que d’une supputation. S’il fallait s’en tenir à la thèse actuelle, nous aurions davantage à faire à un réseau post- hopewellien, dont Pointe-du-Buisson serait un terminus (Chapdelaine 1982 : 213), et qui pourrait impliquer la circulation d’«émissaires» (ibid. : 207 ; Kostiw 1995 : 41). La plupart des pipes à plate-forme retrouvées sur ce complexe de sites ont été mises au jour dans des dépotoirs datant du Sylvicole moyen tardif. Elles pourraient être des imitations, produites dans des matériaux non locaux, de pipes hopewelliennes. L’origine de la stéatite (à moins qu’il ne s’agisse d’argile réfractaire) utilisée dans la confection de la pipe à plate-forme de la station 3-arrière n’a pas été clairement localisée, mais il se peut qu’il faille regarder du côté des sources du Québec méridional et de la Nouvelle-Angleterre (Harnois 1995 : 69).

4.3 Des activités multiples

En plus des indices que l’on doit aux registres osseux (pratiques halieutiques, confection de vêtements) et céramique (confection de poterie, cuisine), le registre lithique nous renseigne sur tout un éventail d’autres activités qui ont été accomplies par les occupants préhistoriques qui se sont succédés sur la station 3-arrière. Des activités de taille ont donc eu lieu (éclats, préformes, outils taillés, percuteurs). On y a probablement poli des outils (polissoir rainuré). On a aussi chassé dans les environs (pointes), travaillé l’os, le bois (pièces esquillées), les viandes et les peaux (grattoirs et racloirs). On y a aussi concassé (meule à main, meule dormante et pilon). Du bois a pu y être évidé, voire abattu (haches). Finalement, peut-être y a-t-on même fumé, et accompli quelque rite. Il faudrait en outre rappeler que les vestiges organiques se sont décomposés. Toujours est-il qu’une grande partie des activités du quotidien sont représentées sur BhFl-1d’ par un large pan de la culture matérielle des populations de la préhistoire récente. Il a dû faire bon vivre en ces lieux.

Planche I (lithique)

Doc. 1. a, b,c : pointes lancéolées ; d,e : pointes à encoches latérales, f : pointe Rossville (ou Jack’s Reef).

Doc. 2. pointe Jack’s Reef à encoches en coin, retravaillée à l’extrémité di l

Doc. 3. pointe à encoches latérales ou pédoncule (pointe Lamoka de l’Archaïque terminal ?).

Doc. 4. pointe à encoches latérales (pointe Lamoka de l’Archaïque terminal ?).

Doc. 5. a : grattoir Meadowood ; b, c, d, e : grattoirs divers.

Planche II (lithique)

Doc. 7. a : foret ; b : perçoir. Doc. 8 : a, b, c, d, e, f, g : pièces esquillées.

Doc. 9. meule à main sur meule dormante. Doc. 10. polissoir rainuré.

Doc. 11. a, b, c, d : fragment de pipe à plate-forme en stéatite ou en argile réfractaire ; e : fragment d’objet poli en stéatite ou en argile réfractaire ; f : fragment d’objet poli en stéatite ou en argile réfractaire de la station 3-avant.

Chapitre 5 : La collection céramique

Nous en arrivons au cœur de ce mémoire avec l’analyse des tessons de bord décorés de la station 3-arrière. D’abord, des remarques d’ordre général seront faites au sujet du corpus. Ensuite, la présentation des résultats de l’analyse des équivalents de vase suivra une progression chronologique. Celle-ci commencera avec les pots du Sylvicole moyen ancien, enchaînera avec ceux de la sous-période suivante, et s’achèvera avec les vases du Sylvicole supérieur.

5.1 Des tessons aux unités d’analyse

L’analyse des vestiges céramiques repose sur deux ensembles distincts : l’unité d’analyse, ou équivalent de vase, et les tessons (Petersen 1980 : 12 ; Wright 1980 : 21-22). Les remontages sont tout indiqués afin de minimiser les biais statistiques – nous travaillons sur des unités et non sur des tessons – et sont une étape nécessaire à la compréhension de l’organisation spatiale d’un site en relevant si possible des locus qui pourraient correspondre à une occupation structurelle de l’espace (Petersen 1985 : 10). Or, la carte 10 nous présente une distribution brouillonne des unités de vase. Le fait que de nombreux remontages concernent des tessons espacés de plusieurs mètres, parfois une dizaine, suggère sans nul doute que les vestiges ont été fortement perturbés. Il est donc d’emblée possible d’affirmer que, si la station 3-arrière représente un «dépotoir», celui-ci est aujourd’hui quasiment illisible et ce, même en dépit de la présence des éléments habituellement structurants que sont les foyers.

Par ailleurs, seul le remontage permet de traiter correctement une information capitale. Par exemple, une cassure au colombin et une croûte de carbonisation peuvent n’être observées que sur un tesson, alors que d’autres du même vase ne portent pas cette information. C’est le tesson porteur de l’attribut qui définira le résultat valable pour l’équivalent de vase. En outre, les remontages permettent de discuter certains attributs et de justifier des regroupements (lumping). Par exemple, sur deux tessons d’un même vase, la direction des motifs peut différer. Il en ressort donc qu’une éventuelle dichotomie déduite à l’analyse peut devenir artificielle, étant donné que l’artisan ne la considérait pas comme discriminante.

La collection comportait au départ 729 tessons de bord décorés. Mais seulement 566 d’entre eux ont pu être analysés. Ils ont été remontés en 453 unités d’analyse, ce qui correspond à un taux de regroupement d’environ 20%. Dans l’ensemble, ce corpus est composé de petits fragments de poterie, dont ≈35% ont une superficie ≤400 mm² (tab.12).

Cette fragmentation importante empêche l’analyste de rendre fidèlement compte de toute la variabilité stylistique qui les caractérisait à l’origine (Clermont et Chapdelaine 1978 : 94, 1990 : 62). Enfin, l’on peut aussi constater que la très grande majorité des équivalents de vase (≈82%) ne reposent que sur un tesson.

Tableau 12. Les tessons de bord décorés par appartenance chrono-culturelle, classes de superficie et unités de d'analyse (Sinitial = possibles vases du Sylvicole inférieur porteurs d’empreintes ondulantes + vases du

SMA) :

Puisque ce mémoire est avant tout consacré au Sylvicole moyen ancien, il a fallu distinguer les tessons qui s’y rapportent de ceux qui appartiennent à une autre tranche chrono- culturelle. L’écrasante majorité des équivalents de vase de BhFl-1d’, 413 individus, remontent au plus tard au SMA (≈91,2%). Il est possible que des vases du Sylvicole inférieur (Vinette 1) porteurs d’empreintes ondulantes soient mêlés avec les vases du SMA, d’où leur regroupement ci-dessus sous le label de «Sinitial» («Sylvicole initial»). Cependant, comme cette proposition ne peut pas être démontrée dans l’immédiat, les vases du «Sylvicole initial» seront simplement désignés comme appartenant au Sylvicole moyen ancien. Il se peut aussi que certains vases aient été attribués par défaut, et donc erronément, au groupe «Sinitial» sur la base qu’ils ne présentaient pas de caractéristiques diagnostiques des autres taxons. Ceci dit, cet impondérable ne devrait pas nuire aux tendances lourdes. Or, ce sont celles qui nous intéressent. Le SMT est représenté par 21 pots, alors que le SS l’est par 19.

Carte 6. Localisation des tessons de bord décorés et couverture approximative des tessons selon