Dans cette sous-section, nous allons montrer que si dans un ´etatΦ, l’´electron et le noyau sont localis´es dans une r´egion finie de l’espace, on peut distinguer, dans ce mˆeme ´etat Φ, les photons “proches” de l’´electron et du noyau des photons “´eloign´es”. Il semble en effet naturel que les photons “´eloign´es” de l’´electron et du noyau n’interagissent que “faiblement” avec ces derniers, si bien que leur contribution `a l’´energie deΦn’intervienne, `a une erreur n´egligeable pr`es, qu’au travers de l’op´erateur d’´energie du champ libre, Hf(m). Le fait que les photons soient consid´er´es comme massifs sera un point crucial de notre d´emonstration en raison de l’estimation valable uniquement pourm >0:
qN 6 1
mqHf(m). (3.22)
Commenc¸ons par d´efinir une fonction localisant l’´electron et le noyau dans une r´egion finie de l’espace : soitφ1 ∈C∞0 (R6)telle que :
D´efinissons ensuite les objets qui vont nous permettre de localiser les photons : soient j1, j2 ∈C∞0 (R3)telles que :
Puis de la mˆeme fac¸on que pour φ1,T, soit pour tousQ > 0, y ∈ R3 eti ∈ {1,2}, ji,Q(y) = ji(y/Q). On obtient alors une isom´etrie partielleUQdeFsdansFs⊗ Fsen posant :
UQΩ := Ω⊗Ω,
UQa∗(f1). . . a∗(fn)Ω :=c∗Q(f1). . . c∗Q(fn)Ω⊗Ω, (3.23) avec :
c∗Q(fi) := a∗(j1,Qfi)⊗I+I⊗a∗(j2,Qfi). (3.24) Remarquons que d’apr`es la proposition 1.7, (3.23) est suffisant pour d´efinir UQ sur Fs tout entier. Par ailleurs, le fait queUQsoit une isom´etrie partielle se montre directement en utilisant l’´egalit´ej12+j22 = 1et les relations canoniques de commutation(1.30).
D´efinissons un op´erateur auto-adjoint agissant dansL2(R6;Fs⊗ Fs)`a l’aide de la proposi-tion suivante :
Proposition 3.4 Supposons que(H0)est v´erifi´ee. Soit la forme quadratiqueq˜HeV
U(m)d´efinie sur Q(p21+p22)∩Q(U+)∩Q(Hef(m))par :
˜
qHeUV(m)(Φ,Ψ) = X
j=1,2
1 2mj
([(pj−qjAj)⊗I]Φ,[(pj −qjAj)⊗I]Ψ) + (Hef(m)1/2Φ,Hef(m)1/2Ψ)−((−V)1/2Φ,(−V)1/2Ψ)
−((U−)1/2Φ,(U−)1/2Ψ) + ((U+)1/2Φ,(U+)1/2Ψ),
(3.25)
o`u nous avons pos´eHef(m) :=Hf(m)⊗I+I⊗Hf(m). Alorsq˜
HeUV(m)est ferm´ee et semi-born´ee inf´erieurement ; on noteHeUV(m)l’op´erateur associ´e `aq˜HeV
U(m) par la proposition 1.2. De plus, C∞0 (R6)⊗DS⊗DS est un cœur deHeUV(m), et on a sur cet ensemble :
HeUV(m) =HUV(m)⊗I+I⊗Hf(m). (3.26) D´emonstration
Il suffit d’adapter le travail effectu´e pour d´efinirHUV dans la sous-section 2-4.1.
Le r´esultat principal de cette sous-section est alors le suivant :
Th´eor`eme 3.5 Supposons que(H0)est v´erifi´ee. Soitm >0et soitΨ∈Q(HUV(m)). On a : qHV
U(m)(φ1,TΨ, φ1,TΨ) =qHeV
U(m)(UQφ1,TΨ,UQφ1,TΨ) +ν(Q, T, m)h
aqHV
U(m)(Ψ,Ψ) +bkΨk2i
, (3.27)
o`ua, bsont des constantes positives ind´ependantes deQ, T, m, et o`u pour tousT, m >0fix´es : ν(Q, T, m) →
Q→∞ 0.
La d´emonstration est bas´ee sur [GLL01, Lemme A.1] ; nous la r´e´ecrivons au sens des formes quadratiques en justifiant rigoureusement les questions de domaines. Commenc¸ons par un lemme permettant de comparer les ´energies associ´ees `aHf(m)etHef(m):
CHAPITRE 3. PREUVE DE L’EXISTENCE D’UN ´ETAT FONDAMENTAL 63 Lemme 3.6 Soientm >0etΨ∈Q(Hf(m)). On a :
qHf(m)(Ψ,Ψ) =qHe
f(m)(UQΨ,UQΨ) +ν1(Q)
qN(Ψ,Ψ) +kΨk2
, (3.28)
o`uν1 v´erifie :ν1(Q) →
Q→∞0.
D´emonstration
Observons tout d’abord que si Ψ ∈ Q(Hf(m)), il est clair, dans la mesure o`u j1, j2 ∈ L∞(R3), queUQΨ∈Q(Hef(m)). Cherchons alors une expression de la diff´erenceq˜Df(m)d´efinie surQ(Hf(m))par :
˜
qDf(m) :=qHf(m)−qU∗
QHef(m)UQ. (3.29)
Consid´erons(fi)i>0 une base orthonormale deL2(R3)telle que pour tous i> 0etλ ∈ {1,2}, fi(·, λ)∈ H1(R3). En particulier, on a ainsiωm(−i∇)fi ∈ L2(R3)pour touti >0. Utilisant la d´efinition deHf(m), on observe que pour tousi1, . . . , in∈N:
h
Hf(m)− UQ∗Hef(m)UQ
i
a∗(fi1). . . a∗(fin)Ω
=UQ∗
n
X
l=1
c∗Q(fi1). . .[a∗([j1,Q, ωm(−i∇)]fil)⊗I+I⊗a∗([j2,Q, ωm(−i∇)]fil)]
×. . . c∗Q(fin)Ω⊗Ω,
(3.30)
o`u le crochet [j1,Q, ωm(−i∇)]d´esigne le commutateur de j1,Q etωm(−i∇) et de mˆeme pour le second crochet. Notons h1,Q := [j1,Q, ωm(−i∇)], h2,Q := [j2,Q, ωm(−i∇)]pour simplifier l’´ecriture. On en d´eduit l’´egalit´e des op´erateurs suivants sur l’espace vectoriel engendr´e par les
´el´ements de la formea∗(fi1). . . a∗(fin)Ω: Hf(m)− UQ∗Hef(m)UQ
=UQ∗ X
l>0
[a∗(h1,Qfl)⊗I+I⊗a∗(h2,Qfl)] [a(j1,Qfl)⊗I+I⊗a(j2,Qfl)]UQ. (3.31) On note Df(m) := Hf(m)− UQ∗Hef(m)UQ l’op´erateur d´efini sur DS. En utilisant l’isomor-phismeIdonn´e dans la proposition 1.10, il reste simplement :
Df(m) = UQ∗IX
l>0
a∗(h1,Qfl⊕h2,Qfl)a(j1,Qfl⊕j2,Qfl)I−1UQ. (3.32) Soit alorsΨ∈Q(Hf(m))etΨq ∈DS tel queΨq →ΨetqHf(m)(Ψ−Ψq,Ψ−Ψq)→0quand q → ∞. PuisqueΨq ∈DS, on peut ´ecrire en utilisant(3.31):
hΨq, Df(m)Ψqi=X
l>0
a(h1,Qfl⊕h2,Qfl)I−1UQΨq, a(j1,Qfl⊕j2,Qfl)I−1UQΨq
. (3.33) Notons pour simplifierΨeq :=I−1UQΨq. Le terme du produit scalaire apparaissant dans(3.33) et correspondant `a la(n+ 1)ecomposante deΨeqdansFs(L2(R3))s’´ecrit alors :
(n+ 1)X
l>0
Z
R3n
h1,Qfl⊕h2,Qfl,Ψe(n+1)q (·, k1, . . . , kn)
L2(R3)
×
j1,Qfl⊕j2,Qfl,Ψe(n+1)q (·, k1, . . . , kn)
L2(R3)
dk1. . . dkn.
(3.34)
Remarquons que dans la derni`ere ´egalit´e (3.34), nous avons utilis´e implicitement l’isomor-phisme(1.65)et la notation (1.66). Par ailleurs, on peut montrer queh1 eth2 se prolongent `a des op´erateurs born´es deL2(R3)v´erifiant :
kh1,Qk=k[j1,Q, ω(−i∇)]k6 C
Q , kh2,Qk=k[j2,Q, ω(−i∇)]k6 C
Q, (3.35)
o`uCest une constante positive. Commeh1,Q,h2,Qsont de plus sym´etriques, et comme(fl)l>0 est une base Hilbertienne deL2(R3),(3.34)se simplifie en :
(n+ 1) X
λ,λ0=1,2
Z
R3n
hλ,QΨe(n+1)q ((·, λ), k1, . . . , kn), jλ0,QΨe(n+1)q ((·, λ0), k1, . . . , kn)
L2(R3)dk1. . . dkn.
(3.36)
En utilisant (3.35) et le fait quekjλ0,Qk∞ = 1, on obtient que le module de(3.36) est major´e par :
(n+ 1)2C Q
Ψe(n+1)q
L2(R3(n+1))
, (3.37)
ce qui conduit en prenant la somme surn > 0, dans la mesure o`uUQ etI sont des isom´etries,
`a :
|hΨq, Df(m)Ψqi|6 2C
Q hΨq,(N + 1)Ψqi. (3.38) En prenant la limite quandq→ ∞et en utilisant(3.22), on en d´eduit :
˜
qDf(m)(Ψ,Ψ)6 2C Q
qN(Ψ,Ψ) +kΨk2
. (3.39)
On a donc bien le r´esultat.
Poursuivant la d´emonstration du th´eor`eme 3.5, il nous faut maintenant comparer les ´energies associ´ees `a(pj−qjAj)2 et(pj−qjAj)2⊗I. C’est l’objet du lemme suivant.
Lemme 3.7 Supposons que(H0)est v´erifi´ee. Soientm >0etΨ∈Q(HUV(m)). On a : k(pj−qjAj)φ1,TΨk2 =k(pj −qjAj)⊗IUQφ1,TΨk2
+ν2(Q, T, m) h
a0qHV
U(m)(Ψ,Ψ) +b0kΨk2i
, (3.40)
o`ua0, b0sont des constantes positives ind´ependantes deQ, T, met o`u pour tousT, m >0fix´es : ν2(Q, T, m) →
Q→∞ 0.
D´emonstration
Tout d’abord, siΨ ∈ Q(HUV(m)), il est clair que φ1,TΨ ∈Q(HUV(m))vue la d´efinition de φ1,T, puis que UQφ1,TΨ ∈ Q(HUV(m)⊗I)vue la d´efinition de j1,Q intervenant dansUQ. Les
´el´ements apparaissant dans(3.40)sont donc bien d´efinis et il nous faut estimer la diff´erence : Dj :=k(pj−qjAj)φ1,TΨk2− k(pj −qjAj)⊗IUQφ1,TΨk2. (3.41)
CHAPITRE 3. PREUVE DE L’EXISTENCE D’UN ´ETAT FONDAMENTAL 65 NotonsQj l’op´erateur d´efini surQ(HUV(m))par :
Qj := (pj−qjAj)− UQ∗(pj−qjAj)⊗IUQ. (3.42) On a alors :
Dj = 2Re ((pj −qjAj)φ1,TΨ, Qjφ1,TΨ)− kQjφ1,TΨk2, (3.43) et on veut majorer |Dj|. En utilisant les lemmes 2.9 et 2.10, ainsi que le fait que V +U− est relativement born´e par rapport `ap21+p22 avec borne relative 0, on montre facilement que pour toutΦ∈Q(HUV(m)):
k(pj −qjAj)Φk2 6a1qHV
U(m)(Φ,Φ) +b1kΦk2, (3.44) o`ua1, b1 sont des constantes positives ind´ependantes de m. D’autre part, en faisant commuter p1, p2 etφ1,T, on montre, de la mˆeme fac¸on par exemple que dans [CFKS87, IMS Localization Formula], que :
qHV
U(m)(φ1,TΨ, φ1,TΨ) =qHV
U(m)(φ21,TΨ,Ψ) + (|∇φ1,T|2Ψ,Ψ). (3.45) D’o`u, par(3.44)et puisqueφ1,T,∇φ1,T ∈L∞(R3):
k(pj−qjAj)φ1,TΨk2 6a2qHV
U(m)(Ψ,Ψ) +b2kΦk2, (3.46) o`u a2, b2 sont des constantes positives ind´ependantes dem. Revenant `a (3.43), il nous reste `a estimerkQjφ1,TΨk. CommeUQ n’agit que surFs, on apj− UQ∗(pj⊗I)UQ= 0, et donc :
Qjφ1,TΨ =−qj
Aj − UQ∗Aj⊗IUQ
φ1,TΨ. (3.47)
Or, vues les d´efinitions deAj etUQ, on a pour presque toutX ∈R6 et pouri= 1,2,3: Aij − UQ∗Aij⊗IUQ
(X)
=UQ∗
a∗([j1,Q−1]hi(xj − ·))⊗I+I⊗a∗(j2,Qhi(xj − ·)) UQ +UQ∗
a([j1,Q−1]hi(xj − ·))⊗I+I⊗a(j2,Qhi(xj− ·)) UQ.
(3.48)
En utilisant une nouvelle fois l’isomorphisme donn´e dans le lemme 1.10, on en d´eduit : kQjφ1,TΨk2 =qj2
3
X
i=1
Z
R6
UQ∗I
a∗([j1,Q−1]hi(xj − ·)⊕j2,Qhi(xj− ·)) +a([j1,Q−1]hi(xj − ·)⊕j2,Qhi(xj− ·))
I−1UQφ1,T(X)Ψ(X)
2dX.
(3.49) L’estimation des op´erateurs de cr´eations et d’annihilation en fonction de l’op´erateur du nombre de photons donne alors (´etant entendu que ces op´erateurs agissent ici dansFs(L2(R3)⊕L2(R3)) et qu’il s’agit donc d’adapter, de mani`ere ´evidente, la proposition 1.9) :
kQjφ1,TΨk2 64qj2
3
X
i=1
Z
R6
φ1,T(X)2h
[j1,Q−1]hi(xj − ·)⊕j2,Qhi(xj − ·)
2
×qN(I−1UQΨ(X),I−1UQΨ(X)) +kΨ(X)k2i dX.
(3.50)
Maintenant on constate, de la mˆeme fac¸on que dans la proposition 1.10, que :
qN(I−1UQΨ(X),I−1UQΨ(X)) =qN(Ψ(X),Ψ(X)). (3.51) En utilisant alors les faits queφ1,T = 0surB(0,2T)c et j1,Q−1 = 0 = j2,Qsur B(0, Q), on peut obtenir, `a partir de(3.50), l’in´egalit´e suivante :
kQjφ1,TΨk2 6C
3
X
i=1
Z
B(0,Q−2T)c×{1,2}
|hi(y)|2dy
qN(Ψ,Ψ) +kΨk2
, (3.52)
o`uCest une constante positive, et en supposant ici queQ >2T. Or, commehi ∈L2(R3)on a, pourT >0fix´e :
Z
B(0,Q−2T)c×{1,2}
|hi(y)|2dy →
Q→∞ 0. (3.53)
Ainsi, en utilisant l’estimation : qN 6 1
mqHf(m) 6 1 m
h a3qHV
U(m)+b3i
, (3.54)
o`ua3etb3sont des constantes positives ind´ependantes dem, et en ins´erant(3.46)et(3.52)dans (3.43), on obtient le r´esultat annonc´e.
Appliquons pour conclure les deux lemmes que nous venons de d´emontrer afin d’obtenir le th´eor`eme 3.5 :
D´emonstration du th´eor`eme 3.5
Soient doncm >0etΨ∈Q(HUV(m)). Notons : ν(Q, T, m) =e qHV
U(m)(φ1,TΨ, φ1,TΨ)−q
HeUV(m)(UQφ1,TΨ,UQφ1,TΨ). (3.55) En d´eveloppantqHV
U(m), on trouve :
eν(Q, T, m) =qHf(m)(φ1,TΨ, φ1,TΨ)−qHe
f(m)(UQφ1,TΨ,UQφ1,TΨ)
+k(pj −qjAj)φ1,TΨk2− k(pj−qjAj)⊗IUQφ1,TΨk2. (3.56) Nous avons utilis´e dans cette ´equation le fait que (U +V)− UQ∗(U +V)⊗IUQ = 0 dans la mesure o`uUQ n’agit que surFs. En appliquant les r´esultats des lemmes 3.6 et 3.7, il vient imm´ediatement (en utilisant une fois encorekφ1,Tk∞ 61) :
|ν(Q, T, m)|e 6ν1(Q)
qN(Ψ,Ψ) +kΨk2
+ν2(Q, T, m)h a0qHV
U(m)(Ψ,Ψ) +b0kΨk2i
. (3.57) Une nouvelle utilisation de(3.54)permet alors de conclure.
CHAPITRE 3. PREUVE DE L’EXISTENCE D’UN ´ETAT FONDAMENTAL 67