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4. Flore et végétation

4.3. Lisières

Au sein des interfaces forêt-prairie, les lisières possèdent des végétations intercalaires plus ou moins développées. Au sein du PNRL, les manteaux arborescents externes aux forêts (Corylo-Populion) sont principalement constitués d'essences pionnières et nomades telles que l'érable champêtre (Acer campestre), le frêne (Fraxinus excelsior) ou encore le peuplier tremble (Populus tremula) (Rameau et al. 1989). Les fourrés ou manteaux arbustifs, comprennent soit des groupements arbustifs subatlantiques collinéens de l'alliance du Rosion micranthae (Rameau et al. 1989) dominés par des espèces mésoxérophiles et calcicoles, notamment au sein des côtes calcaires, soit des groupements arbustifs subatlantiques et médioeuropéens du Rubo-Prunion spinosae dominés par des espèces plus mésophiles et neutrocalcicoles à acidiclines, lesquels sont majoritaires au sein des plaines argileuses. Au sein des côtes

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calcaires, les ourlets préforestiers accueillent des espèces calcicoles à neutrophiles, parfois xérophiles du Geranion sanguinei, mais la plupart du temps plutôt mésophiles du Trifolion medii (Rameau et al. 1989). Au sein des plaines argileuses, les ourlets comprennent de nombreux éléments basiques à neutres du Fragarion vescae.

A côté de cela, au sein des lisières forestières les plus humides, des éléments de l'Alno-Padion (Rameau et al. 1989) tel que l'aulne (Alnus glutinosa) et le frêne (Fraxinus excelsior) peuvent dominer la lisière forestière, surtout en cas de présence d'un fossé bordier. Dans ce cas, une phase pionnière transitoire de type mégaphorbiaie collinéenne subatlantique, mésotrophe à eutrophe (Thalictro-Filipendulion ulmariae, Rameau et al. 1989) occupe alors le plus souvent la lisière de prairie adjacente.

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1. Sélection des interfaces forêt-prairie (sites d'étude)

Dans cette thèse, l'objectif principal a été d'étudier les effets de l'habitat (forêt, prairie) sur l'hétérogénéité des conditions environnementales et sur l'assemblage des communautés végétales. Au sein des interfaces forêt-prairie, nous avons vu en introduction que les effets de l'habitat peuvent se traduire sous forme de patrons spatiaux, en raison d'un effet lisière, mais aussi sous forme de patrons temporels, en raison d'un effet histoire. Afin d'étudier les liens environnementaux et floristiques entre effet lisière et effet histoire, nous nous sommes intéressés aux interfaces forêt-prairie et particulièrement aux interfaces ayant subies un déplacement de leurs lisières par afforestation ou déforestation au cours des deux derniers siècles. Par conséquent, trois types d'interfaces forêt-prairie ont été sélectionnés dans cette thèse : (i) des interfaces forêt-prairie stables dans l'espace et dans le temps depuis 1830, (ii) des interfaces forêt-prairie issues d'un déplacement de lisière suite à une processus d'afforestation, et (iii) des interfaces forêt-prairie issues d'un déplacement de lisière suite à un processus de déforestation.

Données historiques

Au sein du PNRL, le croisement des minutes de la carte d'Etat-Major, levées aux alentours de 1830, avec les cartes d'occupations du sol les plus récentes, vectorisées entre 1997 à 2014, nous a permis de localiser les quatre histoires d'habitat nécessaires à la sélection des trois types d'interfaces forêt-prairie. Lorsque les interfaces forêt-prairie sont stables depuis 1830, les deux habitats sont anciens et leurs lisières respectives sont anciennes. Au contraire, lorsque les interfaces forêt-prairie sont issues d'afforestation ou de déforestation, seul un des deux habitats est ancien et présente une lisière ancienne, tandis que l'autre habitat est récent et présente une lisière récente. Les interfaces forêt-prairie sont alors composées de quatre histoires d'habitat (forêt ancienne, forêt récente, prairie ancienne, prairie récente), issues de la combinaison entre deux habitats (forêt, prairie) et deux histoires (ancien, récent).

Présélection sous SIG

Au sein des interfaces forêt-prairie, en plus des effets intrinsèquement induits par les habitats, peuvent s'ajouter des effets extrinsèques, liés à des facteurs spatiaux modulant les effets habitat (nature de l'interface, surface et forme des patchs d'habitat) ou à des facteurs environnementaux indépendants des occupations du sol actuelles (géologie, topographie, etc...), lesquels sont bien souvent hérités d'une disposition non aléatoire des occupations du sols au sein des paysages. En premier lieu, notre but a été d'éviter l'influence de facteurs extrinsèques parmi les effets lisière et les effets histoire étudiés. Par conséquent, les 3 types d'interfaces forêt-prairie ont été présélectionnés sous SIG d'après un ensemble de critères spatiaux et environnementaux permettant d'homogénéiser le jeu de données (Tableau 2). Seuls les filtres environnementaux intrinsèques, c'est-à-dire les facteurs environnementaux liés aux habitats (intensité lumineuse, propriétés des sols, etc...) ont été conservés. Le climat, relativement homogène au sein du PNRL, n'a pas été retenu comme critère de sélection.

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Tableau 2. Critères environnementaux utilisés pour la sélection des interfaces forêt-prairie. Critère Caractéristiques Intérêt

Interface Sélection des forêts et prairies se jouxtant ou situées à moins de 10 m l'une de l'autre (en raison des approximations cartographiques)

Identifier et maximiser le nombre potentiel de sites (interfaces forêt-prairie) Surface Sélection des forêts et prairies de surface ≥ 1 ha Garantir une zone de cœur d'habitat hors effet lisière Géologie

Sélection des interfaces uniquement sur marnes argileuses (Wöevre, Pays des étangs), en excluant les contextes géologiques particuliers telles que les zones salinifères (Saulnois)

Eviter les substratums trop calcaires et trop acides et autres particularités géologiques

Topographie Sélection des interfaces situées en position de bas de pente et thalweg par utilisation d'un indice de position topographique (TPI)

Limiter l'effet extrinsèque de la topographie

Hygrophilie Sélection de prairies méso-hygrophiles à mésophiles (excluant les habitats trop humides et trop secs) à partir des données du PNRL

Eviter les milieux extrêmes et optimiser le nombre potentiels de sites Gestion Sélection de prairies de fauche (excluant les pâturages) et de forêts matures (excluant les

régénérations) par photo-interprétation

Limiter les effets extrinsèques liés à la gestion et/ou à la

perturbation intra-habitat Sélection sur le terrain

Afin de limiter l'influence de possibles facteurs extrinsèques non directement liés à l'effet lisière ou à l'effet histoire, nous avons réduit l'hétérogénéité des lisières étudiées en sélectionnant les interfaces forêt-prairie selon leur origine, leur stabilité temporelle et spatiale et leur physionomie. Quel que soit le type d'interface (stable, afforestation, déforestation), seules ont été retenues les interfaces (i) anthropogéniques, (ii) contraintes par la fauche, (iii) intensivement gérées, mais (iv) structurées verticalement par une strate arborée, arbustive et herbacée en lisière de forêt (Figure 24).

Figure 24. Clé dichotomique des interfaces entre milieux fermés (forêts) et milieux ouverts (cultures, pelouses, prairies...).

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Au sein de chaque habitat, toutes hétérogénéités micro-topographiques (bosses ou creux), quel que soit leur origine (drains, mardelles, artéfacts de guerre, etc...) ont également été soigneusement évitées. De même, toutes perturbations récentes au sein des habitats (chablis et exploitation en forêt, traces de pâturage en prairie) et toutes interférences entre forêt et prairie (passage d'un ruisseau, d'une route ou d'un chemin) ont aussi été évitées. Par ailleurs, afin d'éviter l'auto-corrélation spatiale dans nos analyses, seules les interfaces dont les habitats appartiennent à des parcelles (de forêt ou de prairie) distinctes et espacées au minimum de plusieurs centaines de mètres, ont été retenues. Chaque interface forêt-prairie correspond ainsi à un site particulier. Après vérification sur le terrain, tous les sites non conformes aux critères énoncés ont été exclus. Au final, sur 113 interfaces forêt-prairie présélectionnées à partir d'un SIG, seules 22 interfaces ont été retenues, dont 11 au sein de la partie ouest du PNRL (4 interfaces stables, 4 issues d'afforestation et 3 issues d'afforestation) et les 11 autres dans le partie est (4 interfaces stables, 3 issues d'afforestation et 4 issues de déforestation).

Les 22 interfaces forêt-prairie que nous avons sélectionnées : (i) possèdent toutes des habitats de surface au moins égale à 1 ha, (ii) sont situées exclusivement au sein des plaines marno-argileuses de la Woëvre et du Pays des étangs, lesquelles sont parfois surmontées de placages de limons, (iii) sont positionnées au sein des thalwegs et bas de pente, mais dans des situations méso-hydriques (ni trop humides, ni trop sèches), et (iv) sont exemptes de toutes hétérogénéités micro-topographiques et perturbations récentes.