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0.5 Conclusion

1.1.4 Limite thermodynamique

Dans cette sous-section, on introduit la notion de la limite thermodynamique et on discute ensuite différents enjeux de la physique statistique qui sont reliés avec cette limite. On pose finalement le problème général et entour des questions plus abordables qu’on va réellement traiter dans la suite.

Comme on l’a déjà indiqué dans la sous-section 1.1.2, une des questions clés de la physique statistique est d’expliquer des propriétés fondamentales de la composition de la matière au niveau macroscopique. La première condition nécessaire est la stabilité (voir aussi (1.18)). Si E(Λ) est l’énergie d’un système (sans vraiment préciser pour le moment la nature ainsi que la définition de cette énergie ; il peut s’agir de l’énergie interne ou de l’énergie libre, par exemple) dans le domaine Λ, on demande :

E(Λ)

|Λ| > −C pour une certaine constante C qui ne dépend pas de Λ.

La stabilité de la matière justifie pourquoi un système ne s’effondre quand le nombre de particules croît. Une condition plus exigeante demande que non seulement l’énergie par unité de volume soit bornée inférieurement, mais qu’elle ait une limite quand le domaine tend (dans un sens à préciser) vers l’espace entier, i.e., que la limite suivante existe :

lim

|Λ|→+∞

E(Λ)

|Λ| . (1.25)

La condition (1.25) est nécessaire pour expliquer le fait que les particules quantiques qui forment la matière restent ensemble et ne se dissocient pas. Supposons que (1.25) n’est pas vraie. Alors

devient grand quand Λ tend vers l’espace Rd entier, où 2Λ est le domaine deux fois plus grand que Λ. Mais cela veut dire que soit une grande quantité d’énergie est nécessaire pour diviser le système en deux parties, soit cette énergie est libérée. Ceci contredit l’observation que les objets macroscopiques sont stables.

Dans la thermodynamique, la propriété de type (1.25) est fortement liée au fait que certaines quantités physiques (telles que l’énergie interne, la capacité calorifique, l’énergie libre et ainsi de suite) sont supposées extensives, c’est-à-dire, additives par rapport au volume du système. De point de vue mathématique, ce n’est pas du tout évident ni automatique. La limite thermodynamique qu’on va introduire tout de suite est la manière mathématiquement rigoureuse de vérifier qu’une quantité est extensive.

Pour la définition de la limite thermodynamique, on suit essentiellement [Rue99]. La définition et la discussion des différentes propriétés de base de la limite thermody-namique peuvent être trouvées également dans des œuvres ou articles variés tels que [Rue99, LSSY05, Gri65, LL72].

Dans notre définition, on demande que le nombre de particules n qui se trouvent dans le domaine Λ soit proportionnel au volume. C’est une hypothèse raisonnable du point de vue physique. Cela correspond à l’ensemble microcanonique.

Un autre point de vue consiste à regarder l’ensemble grand-canonique. Dans ce cas, on ne fixe pas un nombre de particules n proportionnel au volume |Λ| mais on optimise par rapport à ce nombre. Pour l’énergie fondamentale, par exemple, on définit :

Eω(Λ) = inf

n∈NEω(Λ, n), (1.26) et on démontre ensuite que la limite de Eω(Λ)/|Λ| existe pour Λ → ∞. Afin de justifier l’hypothèse physique que le nombre de particules est proportionnel au volume, on dé-montre ensuite que le nombre de particules n qui minimise (1.26) est proportionnel à |Λ| dans la limite Λ → ∞. C’est, en particulier, l’approche qui a été utilisé par C. Fefferman dans [Fef85], G. M. Graf et D. Schenker dans [GS95], C. Hainzl, M. Lewin et J. P. Solovej dans [HLS09a, HLS09b] et X. Blanc et M. Lewin dans [BL12], où ils considèrent la limite thermodynamique pour la densité de l’énergie libre dans l’ensemble grand-canonique. La comparaison entre l’ensemble canonique et grand-canonique pour les interactions de Cou-lomb est faite par E. H. Lieb et J. L. Lebowitz dans [LL72]. On traite le cas de l’ensemble grand-canonique dans Annexe A.

On passe maintenant aux définitions et on commence par la notion de suite des do-maines qui tend vers l’infini.

Définition 1.1.25. Soient diam(Λ) le diamètre de Λ et ∂hΛ le h-voisinage de ∂Λ : ∂hΛ = ∂Λ + B(0, h),

où B(0, h) est la boule ouverte de centre 0 et rayon h.

Définition 1.1.26. Les domaines Λ tendent vers l’infini dans le sens de Fisher (voir, par exemple, [Rue99]) si

1.1. Définitions 31

et il existe une “fonction de la forme” π telle que lim

α→0π(α) = 0 et pour α suffisamment petit et tout Λ

α diam(Λ)|/|Λ| 6 π(α).

Dans la suite, on va toujours comprendre Λ → ∞ dans le sens de Fisher.

Exemple 1.1.27. Si on considère une suite des domaines parallélépipédiques, dire qu’ils tendent vers l’infini est la même chose que de dire que tous les côtés tendent vers l’infini à une vitesse comparable :

d

Y

j=1

[0, Lj] → ∞ ⇔  minjLj → ∞,

1 > minjLj/ maxjLj > 1/C.

Définition 1.1.28. La limite Λ → ∞, n/|Λ| → ρ où ρ est une constante positive (densité de particules), s’appelle la limite thermodynamique.

D’habitude, en considérant la limite thermodynamique, on s’intéresse à une quantité par particule (ou par unité de volume, ce qui est la même chose à une constante près grâce à la Définition 1.1.28).

Définition 1.1.29. Soit Xω(Λ, n; P) une variable aléatoire qui dépend de la boite Λ, du nombre de particules n et d’autres paramètres P. On dit que Xω(Λ, n, P) admet une limite thermodynamique si la limite suivante existe

lim Λ→∞ n/|Λ|→ρ L[P] Xω(Λ, n, P) n

dans un sens à préciser (presque sûr, en probabilité, dans L2). Ici L[P] est une procédure limite pour les paramètres P, c’est-à-dire, une description de comment les paramètres P évoluent quand Λ et n tendent vers l’infini.

La question générale qu’on se pose est de comprendre le comportement dans la limite thermodynamique d’un système de n particules quantiques chacune décrite par le hamil-tonien à une particule Hω, qui interagissent par le potentiel d’interactions W et qui sont restreintes dans un domaine Λ. Autrement dit, la question fondamentale s’écrit comme :

étudier Hω,](Λ, n) dans la limite Λ → ∞, n/|Λ| → ρ > 0. (1.27) En particulier, on s’intéresse comment les différentes statistiques quantiques ] vont in-fluencer ce comportement.

En ce qui concerne la limite thermodynamique de l’opérateur Hω,](Λ, n) lui-même, selon la connaissance de l’auteur, il n’y a pas de sens cohérent pour définir cette limite

(remarquons, que ces opérateurs sont définis sur les espaces de Hilbert différents de struc-ture de plus en plus compliquée).

Par contre, ce qu’on peut faire, c’est étudier différentes fonctionnelles de cet opérateur dans la limite thermodynamique. Dans la suite de la première partie, on va démontrer l’existence de la limite thermodynamique pour l’énergie par particule Eω(Λ, n, S)/n avec S/n → σ > 0 et, en particulier, l’énergie fondamentale par particule Eω(Λ, n)/n, c’est-à-dire, pour σ = 0, et pour l’entropie par particule Sω(E, Λ, n)/n avec E/n → ε. Ensuite, dans la deuxième partie de la thèse, on va décrire différentes propriétés asymptotiques de l’état fondamental pour un système des fermions.