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Limitations lors d’une régulation en boucle ouverte

6.4 Les zéros à non minimum de phase

6.4.3 Limitations lors d’une régulation en boucle ouverte

L’objectif de ce chapitre est de modéliser les différents transferts des deux démons- trateurs support de la thèse présentés au chapitre 4. La méthode d’identification retenue s’appuie sur la théorie des sous-espaces, qui est présentée en préambule de ce chapitre, puis mise en œuvre sur les deux systèmes considérés. Le chapitre se termine par un des- criptif des limitations engendrées par la présence de zéros à non minimum de phase et leur impact sur le problème considéré dans ce manuscrit.

6.1

Théorie des sous-espaces

L’identification par la méthode des sous-espaces permet d’identifier des modèles conti- nus ou discrets à partir de données temporelles ou fréquentielles. Le principal avantage de cette approche est qu’elle ne fait pas appel à des méthodes d’optimisation paramé- trique. On élude ainsi tous les problèmes de paramétrisation du modèle notamment dans le cas multivariable, on s’affranchit également des problèmes de convergence liés aux al- gorithmes itératifs dont elle ne fait pas usage. D’autre part les modèles obtenus le sont directement dans l’espace d’état. L’approche fréquentielle est particulièrement bien adap- tée pour les systèmes avec une forte densité modale et des modes faiblement amortis [21]. C’est l’ensemble de ces éléments ainsi que plusieurs tentatives fructueuses sur des sys- tèmes acoustiques [22], [23], qui nous ont fait opter pour la méthode d’identification des sous-espaces avec une approche fréquentielle dans le domaine continu. Les stratégies de commande présentées dans la suite seront en effet formulées dans le domaine continu.

Ainsi dans cette partie consacrée à la théorie de l’identification par la méthode des sous-espaces, nous nous limiterons au cas d’une approche fréquentielle dans le domaine continu. Le lecteur intéressé par les approches temporelles pourra se référer à [24], [25] et [26]. Les explications données ici sont elles tirées de [27] et [21].

6.1.1

Position du problème et notations

Le problème à traiter est le suivant, considérons un système continu avec m entrées, l sorties et n états :

(

˙x(t) = Ax(t) + Bu(t)

y(t) = Cx(t) + Du(t) (6.1)

Les matrices système ont pour dimensions :

A ∈ Rn×nB ∈ Rn×mC ∈ Rl×nD ∈ Rl×m

Considérons que l’état initial du système est nul x(0) = 0, et appliquons la transformée de Laplace sur (6.1), on obtient :

(

sX(s) = AX(s) + BU (s)

Y (s) = CX(s) + DU (s) (6.2)

La réponse fréquentielle du système est la suivante :

H(s) = C (sI − A)−1B + D (6.3) Considérons maintenant que U (s) ≡ Im (Im désigne la matrice identité de dimension

m×m). Ceci conduit à la matrice de transfert qui n’est autre que la transformée de Laplace

de la matrice de réponse impulsionnelle (matrice des réponses obtenues en appliquant tour à tour sur chaque entrée une impulsion de dirac). On peut dans ce cas réécrire (6.2) de la manière suivante :

(

sXH(s) = AXH(s) + BIm

H(s) = CXH(s) + DIm

(6.4) La matrice XH(s) est ici de dimension n × m, sa kième colonne correspond à l’état du

système si on applique une impulsion de dirac sur la kième entrée.

Problème. Le problème d’identification fréquentielle dans le domaine continu consiste

donc, à partir de la réponse fréquentielle du système H(jωk) mesurée en N pulsations ωk

(k = 1, · · · , N ), à trouver les matrices système A, B, C et D.

Pour résoudre ce problème, introduisons les quelques matrices suivantes. Considérons tout d’abord la matrice d’observabilité étendue O :

O =      C CA · · · CAi−1      ∈ R(l×i)×n (6.5)

On parle de matrice d’observabilité étendue car l’indice i est supérieur à l’ordre du système

n : i > n.

On introduit ensuite la matrice triangulaire inférieure de Toeplitz Γ :

Γ =          D 0 0 · · · 0 CB D 0 · · · 0 CAB CB D · · · 0 .. . ... ... . .. ...

CAi−2B CAi−3B CAi−4B · · · D

         ∈ R(l×i)×(m×i) (6.6)

Cette matrice contient les paramètres dits de Markov : D, CB, CAB, jusqu’à CAi−2B.

Trois matrices supplémentaires sont également introduites :

Hc=       H(jω1) H(jω2) · · · H(jωN) (jω1)H(jω1) (jω2)H(jω2) · · · (jωN)H(jωN) .. . ... . .. ...

(jω1)i−1H(jω1) (jω2)i−1H(jω2) · · · (jωN)i−1H(jωN)

      (6.7) Ic=       Im Im · · · Im (jω1)Im (jω2)Im · · · (jωN)Im .. . ... . .. ...

(jω1)i−1Im (jω2)i−1Im · · · (jωN)i−1Im

      (6.8) Xc=h XH(jω1) XH(jω2) · · · XH(jωN) i (6.9) Ces trois matrices sont complexes comme l’indique l’exposant c, on a en effet :

− Hc∈ C(l×i)×(m×N );

− Ic∈ C(m×i)×(m×N );

Dans la suite nous utiliserons également ces matrices réécrites de la manière suivante :

H =h Re(Hc) Im(Hc) i∈ Rli×2mN (6.10)

I = h Re(Ic) Im(Ic) i∈ Rmi×2mN (6.11)

X =h Re(Xc) Im(Xc) i∈ Rn×2mN (6.12)

Dans ces expressions Re(·) et Im(·) désignent respectivement la partie réelle et ima- ginaire de ·.

Enfin, dans la suite nous utiliserons l’opérateur ΠP qui projette l’espace ligne d’une

matrice sur l’espace ligne de la matrice P :

ΠP = PT(P PT)−1P (6.13)

Ainsi la projection Q/P de l’espace ligne de la matrice Q sur l’espace ligne de la matrice P s’écrit de la manière suivante :

Q/P = QΠP = QPT(P PT)−1P (6.14)

L’orthogonal de l’espace ligne de P est noté P⊥ et la projection sur cet ensemble est notée ΠP⊥. Une expression possible pour cette projection s’écrit comme suit :

ΠP= (I − ΠP) (6.15)

6.1.2

Algorithme d’identification par la méthode des sous-espaces

La relation entrée-sortie sur laquelle repose l’algorithme des sous-espaces que nous allons présenter est la suivante :

Hc = OXc+ ΓIc (6.16)

Elle s’obtient à partir des équations (6.4) évaluées récursivement en s = jω1, · · · , jωN.

Les matrices O et Γ étant réelles, on peut également écrire :

H = OX + ΓI (6.17)

Dans cette équation seules les matrices H et I sont connues.

Sur la base de cette équation l’algorithme des sous-espaces procède en quatre princi- pales étapes :

− Supprimer l’influence du terme ΓI ;

− Estimer l’ordre du système et l’espace colonne de la matrice OX ;

En déduire les matrices A et C

Utiliser A et C pour calculer B et D

Nous détaillons ci-dessous ces différentes étapes puis nous résumons brièvement l’algo- rithme des sous-espaces.

6.1.2.1 Suppression de l’influence du terme ΓI

Pour faire disparaitre le terme ΓI dans l’équation (6.17), on la projette sur I⊥, on obtient ainsi :

H/I= OX/I+ ΓI/I

= OX/I⊥ (6.18)

6.1.2.2 Détermination de l’ordre et de l’espace colonne de OX

Sur la base de l’expression (6.18), on peut désormais déterminer l’ordre du système. En effet, on a rg(O) = rg(X/I) = n. Dès lors, d’après (6.18) :

rg(H/I) = n (6.19) Par ailleurs cette même expression nous permet d’écrire :

espace colonne(H/I) = espace colonne(O) (6.20) La détermination de H/I⊥ est donc la clé de cette seconde étape de résolution. Une voie numériquement stable et efficace pour cela consiste à calculer une décomposition QR de la matrice hIT HTi: h IT HT i=h Q 1 Q2 i " R11 R12 0 R22 # (6.21) D’après cette factorisation, on a :

H/I= RT22QT2 (6.22)

L’ordre s’obtient ensuite en appliquant une décomposition en valeurs singulières sur le résultat précédent : H/I⊥ =h U1 U2 i " S1 0 0 0 # " V1T VT 2 # (6.23) L’ordre est donné par le nombre de valeurs singulières de S1 non nulles.

Sur la base de cette décomposition on peut également déterminer une estimation de la matrice d’observabilité étendue. On choisit ˆO de la manière suivante :

ˆ

O = U1S 1/2

1 (6.24)

6.1.2.3 Détermination de A et C

À partir de ˆO, on peut aisément obtenir la matrice C. D’après la définition (6.5) de la matrice d’observabilité, on a en effet :

C = ˆOl premieres lignes (6.25)

Pour la détermination de A on introduit les matrices ˆO et ˆO. Il s’agit de la matrice ˆ

O privée de ses l dernières (respectivement premières) lignes. On a dès lors la relation évidente :

ˆ

OA = ˆO (6.26)

D’où l’on obtient :

A = ˆO+Oˆ (6.27) L’exposant (·)+ désigne la pseudo-inverse de Moore-Penrose.

6.1.2.4 Détermination de B et D

Sur la base de la connaissance de A et C on peut désormais déterminer B et D. Ces deux matrices sont les solutions de l’équation linéaire suivante :

" LR LI # = " MR MI # " B D # (6.28) Où L ∈ ClN ×m et M ∈ ClN ×(n+l) sont définies comme suit :

L = LR+ jLI =    H(jω1) · · · H(jωN)    (6.29) M = MR+ jMI =    C(jω1In− A)−1 Il · · · · C(jωNIn− A)−1 Il    (6.30) 6.1.2.5 Récapitulatif de l’algorithme Algorithme. Identification fréquentielle :

Construire les matrices I et H à partir des pulsations ωk et des données fréquentielles

H(jωk) ;

Calculer H/I(factorisation QR) ;

Calculer la décomposition en valeurs singulières de H/I;Déterminer l’ordre ;

Calculer ˆO ;

Déterminer A et C ;En déduire B et D.

6.1.3

Mise en œuvre numérique

L’algorithme que nous venons de présenter s’implémente correctement pour des ordres

n (et i) faibles. Quand les ordres considérés sont plus grands les matrices H et I font

intervenir des grandes puissances de jωk ce qui les rend très mal conditionnées. Dès lors

on ne peut implémenter numériquement tel quel l’algorithme précédent sans rencontrer d’importants problèmes numériques.

Il existe des solutions à ce problème (que nous ne détaillons pas ici) ; l’une d’elle présen- tée dans [27] consiste à déterminer une base où les matrices H et I sont bien conditionnées au travers d’une récursion dérivée des polynômes de Forsythe. Une autre voie présentée dans [21] consiste à implémenter la version discrète de cet algorithme et à utiliser ensuite la transformée bilinéaire pour revenir dans le domaine continu.

6.2

Démonstrateur IRCCyN Box

L’identification de la matrices de transferts acoustiques entre les différents hauts-parleurs et les différents microphones du démonstrateur IRCCyN Box consiste à rechercher un modèle multivariable de dimension 2×3. Comme l’indique la section précédente, ce modèle a été obtenu dans le domaine continu par identification fréquentielle grâce à la méthode des sous-espaces.

Nous avons déjà partiellement justifié ce choix ci-dessus, mais précisons ici un peu les raisons qui l’ont motivé. La méthode des sous-espaces tout d’abord permet d’identifier des systèmes d’ordre relativement élevés et fortement résonnant [22]. Le modèle est obtenu directement dans l’espace d’état. Bien qu’elle permette de travailler sans paramétrisation, nous imposons ici une forme modale pour le modèle, ceci afin d’avoir une interprétation directe des paramètres sous forme de fréquences propres et d’amortissement et de se rap- procher ainsi de la physique. Elle a également été choisie en vue d’obtenir ultérieurement des régulateurs parcimonieux en calculs et lisibles. Le choix de l’approche fréquentielle se justifie lui par des spécifications fréquentielles, plage de fréquence, écart avec la réponse en fréquence du système. . . Enfin le choix de travailler dans le domaine continu permettra par la suite lors de la phase de conception de la loi de commande de s’affranchir des réflexions liées à la discrétisation et de se concentrer sur les performances atteignables.

6.2.1

Multi-modèle

La méthode des sous-espaces permet de traiter indifféremment le cas monovariable ou multivariable. Les différents transferts de l’IRCCyN Box partagent un certains nombre de dynamiques. Il s’agit en effet des transferts d’une même cavité. Dès lors, on retrouve les mêmes modes acoustiques sur chacun de ces transferts. Ils sont toutefois plus ou moins visibles en fonction de la position des actionneurs et des capteurs. Ainsi, l’identification multivariable est tout indiquée ici afin de tirer au mieux parti des dynamiques partagées entre les différents transferts.

En vue de procéder à l’identification multivariable, plusieurs jeux de données expéri- mentales ont été mesurés. Si les conditions expérimentales sont comparables, les mesures acoustiques sont alors correctement reproductibles. En revanche, si les conditions de tem- pérature sont significativement différentes, la comparaison des données expérimentales montre certains écarts sur le gain et la phase. On donne à titre d’illustration en figure6.1 la superposition de trois Réponses en Fréquences Mesurées (RFM) pour le transfert entre le haut-parleur HP2 et le microphone M1.

Ce sont ces écarts qui nous ont conduit à considérer plusieurs modèles pour représen- ter le système et à utiliser une approche multi-modèle comme préconisé dans le cahier des charges du chapitre 3. Dans la suite trois modèles seront utilisés pour représenter l’IRCCyN Box. Au cours de ce chapitre nous ne détaillerons l’identification que d’un seul de ces modèles, qui sera considéré comme le modèle nominal. Il s’agit sur la figure 6.1 du modèle correspondant à la mesure RFM3.

−10 0 10 20 30 40 50 A m p li tu d e (d B ) 100 200 300 400 500 600 700 800 900 1000 −180 −90 0 90 180 P h a se (d eg )

R´eponse en Fr´equence Mesur´ee (RFM) entre HP2 et M1

Fr´equence (Hz)

RFM1 RFM2 RFM3

Figure 6.1 – Réponses en fréquence mesurées entre le haut-parleur HP2 et le microphone

M1

6.2.2

Résultats

Les dynamiques du système acoustique ont été identifiées sur la plage [20-1000] Hz. Le choix de cette plage de fréquence a une influence directe sur l’ordre du modèle (plus la plage d’identification est large plus le modèle doit avoir un ordre élevé). Dans le cas présent un ordre n = 80 a été utilisé. Cette plage d’identification a également une influence sur la bande passante du régulateur qui sera calculé sur la base de ce modèle. En effet le régulateur ne devra pas agir en dehors de la plage de validité du modèle.

L’indicateur utilisé pour évaluer la qualité de l’identification est défini de la manière suivante :

f it = 100 1 − kH(jω) − ˆH(jω)k2 kH(jω) − H(jω)k2

!

(6.31) Nous donnons dans le tableau 6.1, la valeur de cet indicateur pour chacun des six transferts monovariables du modèle multivariable.

fit HP1 HP2 HP3

M1 86.2326 84.1038 91.1196

M2 84.6231 88.8484 91.1542

À titre d’illustration nous comparons en figure6.2, la réponse en fréquence déduite des données mesurées expérimentalement et la réponse en fréquence du modèle identifié pour le seul transfert entre le haut-parleur HP2 et le microphone M1 (transfert pour lequel le

f it est le moins bon).

−20 0 20 40 60 From: HP 2 To: M1 A m p li tu d e (d B ) 200 400 600 800 1000 1200 1400 −180 −90 0 90 180 P h a se (d eg )

Diagramme de Bode n = 80 (FIT : 84.1038)

Fr´equence (Hz)

Mesure Mod`ele

Figure 6.2 – Comparaison de la réponse en fréquence mesurée avec le modèle identifié Le modèle multivariable ainsi obtenu ne contient aucun zéro multivariable. En re- vanche, les différents transferts monovariable contiennent chacun des zéros à non mini- mum de phase. Par exemple les zéros à non minimum de phase de la plage [20-500] Hz du transfert entre les haut-parleurs HP1 et HP2 et le microphone M1 sont donnés dans

le tableau 6.2.

Nous évoquerons à la fin de ce chapitre les influences de ces zéros sur les performances atteignables.

6.2.3

Discussion sur les chemins primaire et secondaire

L’identification présentée ci-dessus permet d’obtenir un modèle multivariable global du démonstrateur IRCCyN Box, indépendamment du rôle joué par les différents actionneurs. Par la suite, lors des tests de contrôle sur l’IRCCyN Box l’un des haut-parleurs devra être utilisé pour émettre la perturbation. Les transferts entre ce haut-parleur perturbateur et le ou les différent(s) microphone(s) de contrôle constituera donc « le chemin primaire », dont on aura la pleine maitrise. Ainsi, sur l’IRCCyN Box on pourra traiter les différents cas d’étude résumés sur les schémas 3.1 et3.2.

Fréquence (Hz) Zéros HP1 → M1 234.24 1.7723+1471.8i 234.24 1.7723-1471.8i 26.499 51.895+158.2i 26.499 51.895-158.2i HP2 → M1 481.95 82.972+3027.1i 481.95 82.972-3027.1i 328.04 16.438+2061.1i 328.04 16.438-2061.1i 220.57 29.76+1385.6i 220.57 29.76-1385.6i 24.244 58.945+140.46i 24.244 58.945-140.46i

Tableau 6.2 – zéros à non minimum de phase des transferts entre HP1 et HP2 et M1 sur

la plage [20-500]Hz

6.3

Démonstrateur Véhicule

Sur le démonstrateur véhicule nous avons déjà évoqué plus haut quelques constats concer- nant les réponses en fréquences mesurées sur le prototypes entre les différents haut-parleurs et microphones. Nous les rappelons rapidement ici.

Les transferts mettant en jeu les haut-parleurs avant ont un fort gain et une forte densité modale en basse fréquence.

À l’inverse, les transferts liés aux haut-parleurs arrières ont un faible gain en dessous de 80 Hz avec une coupure importante à 80 Hz.

Sur le reste des fréquences, les transferts haut-parleurs avant vers microphones avant et haut-parleurs arrières vers microphones arrières ont un fort gain. Tandis que les transferts croisés avant/arrière ont un gain plus faible.

Ces différences de gain et de densité modale entre les différents transferts rendent l’identification multivariable telle que pratiquée sur l’IRCCyN Box peu fructueuse.

Bien qu’en principe moins efficace, une approche par identification de chacun des transferts monovariable puis par réduction de l’ordre du modèle multivariable issu de ces identifications se révèle plus appropriée ici.

6.3.1

Identifications monovariable

Les identifications monovariable ont été réalisées par la méthode des sous-espaces de la même manière que pour le démonstrateur IRCCyN Box. Il s’agit donc de l’identification fréquentielle de modèles monovariables continus sous forme modale.

Les ordres des différents modèles monovariables sont donnés dans le tableau 6.3. Les valeurs de l’indicateur de qualité obtenues pour ces identifications sont données dans le tableau 6.4.

n HP1 HP2 HP3 HP4

M1 70 35 30 70

M2 80 70 40 70

M3 60 60 70 30

Tableau 6.3 – Ordre des modèles monovariables

fit HP1 HP2 HP3 HP4

M1 88.431 77.921 85.309 80.177

M2 83.364 85.723 80.023 84.042

M3 86.084 78.334 91.03 88.85

Tableau 6.4 – Indicateur de qualité de l’identification des modèles monovariables

La concaténation (brute) des modèles monovariables conduit à un modèle multiva- riable d’ordre 685. Il est bien entendu nécessaire de réduire l’ordre de ce modèle dont on sait que les différents transferts partagent certaines dynamiques.

6.3.2

Réduction du modèle véhicule multivariable

6.3.2.1 Troncature équilibrée

La réduction a été réalisée par la méthode dite de troncature équilibrée (voir notamment[20]). Cette méthode consiste à réécrire le modèle du système sous forme d’une réalisation équi- librée. Le gramien d’observabilité Woet de commandabilité Wcd’une telle réalisation sont

égaux et diagonaux :

Wo = Wc= diag (σ1, σ2, · · · , σn) (6.32)

Avec :

σ1 ≥ σ2 ≥ · · · ≥ σn > 0

Les σi sont appelées valeurs singulières de Hankel. Une valeur singulière de Hankel

faible signifie que l’état correspondant de la réalisation équilibrée est faiblement comman- dable et faiblement observable.

La troncature équilibrée consiste à supprimer les états dont la valeur singulière de Hankel est en deçà d’un certain seuil.

Notons que la réduction par troncature équilibrée nécessite le passage à une réalisation équilibrée, elle fait donc perdre la structure modale imposée durant l’identification.

6.3.2.2 Résultat

Le seuil de réduction retenu pour la suppression des états faiblement commandables et faiblement observables est 5 × 10−2. Il conduit à un modèle multivariable d’ordre 158. La comparaison de ce modèle avec les réponses en fréquences mesurées est donnée dans le tableau 6.5.

fit HP1 HP2 HP3 HP4

M1 88.3293 76.9562 84.1409 80.7295

M2 83.8304 85.7894 79.1181 83.7762

M3 81.1993 74.3320 91.0322 88.5743

Tableau 6.5 – Indicateur de qualité de l’identification du modèle multivariable réduit

On voit (par comparaison avec le tableau 6.4) que globalement la qualité de l’identi- fication n’est que peu impactée par la réduction.

On donne en figure 6.3, la comparaison entre la réponse fréquentielle mesurée, le modèle monovariable et le modèle multivariable réduit et ce dans le cas où l’identification multivariable est la moins bonne à savoir le transfert entre le haut-parleur HP2 et le

microphone M3. −100 −80 −60 −40 −20 0 From: HP 2 To: m3 A m p li tu d e (d B ) 100 200 300 400 500 600 700 800 900 1000 −180 −90 0 90 180 P h a se (d eg ) Diagramme de Bode Fr´equence (Hz) Mesure

Mod`ele mono (fit = 78.3338) Mod`ele multi r´eduit (fit = 74.332)

Figure 6.3 – Comparaison des modèles monovariable et multivariable et de la réponse en fréquence mesurée (transfert HP2 M3)

Comme pour le démonstrateur IRCCyN Box, le modèle multivariable ne contient pas de zéro multivariable, en revanche les différents transferts monovariable contiennent cha- cun des zéros à non minimum de phase.

6.3.3

Multi-modèle

Contrairement au cas de l’IRCCyN Box, on ne dispose pas sur le démonstrateur véhicule des données nécessaires (RFM obtenues dans différentes conditions d’environnement) à la mise en œuvre l’approche multi-modèle.

6.3.4

Discussion sur les chemins primaire et secondaire

Le modèle que nous venons de présenter est un modèle du chemin secondaire uniquement. En effet, sur véhicule nous ne maitrisons bien entendu pas la perturbation. Bien qu’on ne puisse mesurer la perturbation, on pourrait toutefois utiliser un modèle de perturbation. Supposons en effet qu’on dispose d’une mesure yp(t) de la perturbation faite sur véhi-

cule. On peut en calculer le spectre Sypyp(jω). Ce spectre vérifie la propriété suivante : Sypyp(jω) = |H(jω)|

2

(6.33) Où H est la transformée de Fourier de la réponse impulsionnelle h(t) du filtre vérifiant :

yh(t) =

Z

h(t − τ )b(τ )dτ (6.34) Avec b(τ ) un bruit blanc centré et yh(t) un signal de même spectre que yp(t) :

Syhyh(jω) = Sypyp(jω) (6.35)

Trouver le filtre H(s) est un problème dit de factorisation spectrale qui admet une solution dans le cas d’un spectre rationnel si la condition de la Paley-Wienner est respec- tée :

Z ∞

−∞

log10Syhyh(jω)

1 + ω2 dω > −∞ (6.36)

Les méthodes de factorisation spectrale (telle que celles présentées dans [28] ou [29]) n’ont pas été mises en œuvre dans ce travail. En effet l’obtention de spectres de perturba- tion qui soient représentatifs n’est pas un problème aisé du fait des nombreux paramètres pouvant rentrer en ligne de compte (revêtement de la chaussée, charge du véhicule, tem- pérature, vitesse du véhicule. . . ). Il faudrait de plus envisager une factorisation spectrale dans le cas multivariable [30]. De telles méthodes pourraient toutefois s’avérer être des outils précieux de modélisation de la perturbation.

Dans la suite de ce manuscrit, nous considérerons pour l’application industrielle ne disposer que du modèle du chemin secondaire, sans modèle du chemin primaire ni modé- lisation de la perturbation.

6.4

Les zéros à non minimum de phase

Les zéros à non minimum de phase sont connus pour introduire un certain nombre de li- mitations sur les performances intrinsèquement atteignables par régulation. Les livres [20] et [31] donnent une vue d’ensemble sur ces limitations dans le cas monovariable et multi- variable. Nous nous appuyons sur ces références pour décrire ici brièvement les principales limitations fréquentielles que nous pouvons observer au travers du présent problème de contrôle actif acoustique. Nous évoquons ces limitations essentiellement dans le cas mo- novariable et nous contentons de quelques commentaires sur le cas multivariable.

6.4.1

Limitations dans le cas monovariable

6.4.1.1 Stabilité interne

Soit un système monovariable G(s) ayant un zero z dans le demi-plan droit :

G(z) = 0 (6.37) Pour garantir la stabilité interne de la régulation, il ne faut pas d’annulation de z par un pôle instable dans le régulateur K. Ceci implique qu’on retrouve le zéro à non minimum de phase dans le transfert de boucle L(s) :

L(z) = 0 (6.38) Dès lors d’après la définition de la fonction de sensibilité S(s), on a :

S(z) = 1 (6.39) Ainsi, pour garantir la stabilité interne, la valeur de S(z) est contrainte à 1. On doit donc bien s’attendre à devoir faire des compromis sur les performances atteignables au niveau des zéros à non minimum de phase.

6.4.1.2 Limitation de la bande passante de l’asservissement