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Chapitre IV. Système en cascade, vers un système couplé

IV.2. Etude d’un réacteur couplant toutes les étapes de formation du 5-HMF

IV.2.3. Limitation du système : l’agitation

Afin de valider l’hypothèse selon laquelle la principale limitation lors de la mise en œuvre de la catalyse hybride dans le réacteur coaxial est la diffusion des espèces et notamment du fructose et du complexe au sein du réacteur, une expérience de transport du fructose est réalisée. Le D- fructose est initialement placé dans la phase aqueuse donneuse. La vitesse de répartition du D- fructose et du complexe dans les différentes phases au cours du temps est déterminée.

L’expérience est menée avec une phase aqueuse donneuse formée par 50 mL de Tris-HCl 100 mM pH = 8,5 contenant 100 mM de D-fructose, une phase aqueuse réceptrice formée par 55 mL de tampon citrate de sodium 100 mM pH = 3 et une phase organique constituée de 100 mL de MIBC contenant 100 mM de 3,4-DCPBA et 200 mM d’Aliquat336®. Le tout est maintenu à 70°C. L’agitation est effectuée à 180 rpm par une pale d’agitation plongée dans la phase organique, au plus près de la phase aqueuse donneuse. Ainsi au cours de l’expérience, le D- fructose est extrait dans la phase organique à l’interface avec la phase aqueuse donneuse sous la forme du complexe [D-fructose-3,4-DCPBA]- puis relargué dans la phase aqueuse réceptrice à l’interface avec la phase organique (Figure 87).

Figure 87. Schéma du transport du D-fructose dans le réacteur coaxial.

Le suivi de la concentration en D-fructose dans les phases aqueuses est réalisé au cours de l’expérience par HPLC permettant le calcul du rendement d’extraction et de relargage du D- fructose. Les résultats sont présentés Tableau 30.

Temps d’extraction du Rendement

D-Fru Rendement de relargage du D-Fru Rendement global de relargage du D-Fru (h) (%) (%) (%) 0 0,0 ± 0,0 0,0 ± 0,0 0,0 1 3,3 ± 1,1 0,0 ± 0,0 0,0 3 7,9 ± 0,5 37,0 ± 12,8 2,9 5 20,0 ± 12,7 31,1 ± 19,4 6,2 7 45,1 ± 11,9 21,8 ± 7,9 9,8

Tableau 30. Rendements d’extraction et de relargage du fructose au cours du temps dans le réacteur coaxial. Vaqdonneuse=50 mL (Tris-HCl pH 8,5 100mM) [D-Fru]i=100 mL, Vaqréceptrice= 55 mL (tampon citrate pH = 3,

100 mM), Vorg=100 mL (MIBC), [3,4-DCPBA]=100 mM, [Aliquat336®]=200 mM, 70°C, 180 rpm.

Le rendement d’extraction augmente au cours du temps pour atteindre 45,1% après 7h. Le rendement de relargage, calculé à partir du D-fructose extrait dans la phase organique est de 37% à 3h, 31,1% à 5h et 21,8% à 7h. L’observation du rendement global de relargage (calculé à partir de la quantité initiale de D-fructose dans la phase aqueuse donneuse) montre une augmentation au cours du temps pour atteindre 9,8% après 7h de réaction.

Cette expérience peut être comparée à l’expérience de transport de monosaccharides menée par Karpa et al. dans une géométrie de réacteur identique.[120] L’expérience ayant obtenu le meilleur résultat en terme de relargage de fructose a été réalisé avec une membrane organique composée de 60 mL de 1,2-dichloroéthane contenant 10 mM de PBA et 10 mM d’Aliquat336®. La phase aqueuse donneuse est composée du tampon phosphate de potassium 100 mM à pH = 11

contenant 6 mM de chacun des monosaccharides : fructose et glucose. La phase aqueuse réceptrice est composée de tampon phosphate de potassium 100 mM à pH = 6. Le tout réalisé à 22 °C. Après 5 à 6 h d’expérience, le flux de monosaccharides dans la phase aqueuse réceptrice est de 18,2 × 10−7mol.s-1.m-2 pour le fructose, pour une interface phase aqueuse réceptrice/phase organique de 18,1 cm2. Dans le cas du réacteur coaxial, la surface de l’interface entre la phase aqueuse réceptrice et la phase organique est de 40 cm². Après 5 h d’expérience, le flux de fructose dans la phase aqueuse réceptrice est de 47 × 10−7 mol.s-1.m-2. Une valeur plus de deux fois supérieure à celle de l’expérience de Karpa et al. pour une surface deux fois plus grande. Cependant, le transporteur n’est pas le même, ni la température, ni l’agitation, ni les concentrations en espèces utilisées ; ce qui rend toute comparaison plus poussée difficile. La vitesse de l’extraction du D-fructose met en évidence une limite due à la faible agitation des phases : seulement 3,3% sont extraits après 1 h et 45% après 7 h de réaction, correspondant à la valeur maximale atteinte en seulement 30 minutes en Eppendorf (chapitre III).Le rendement du transport étant proportionnel à l’agitation.[116] ; il est nécessaire d’optimiser ce paramètre.En effet, seule la phase organique est directement agitée par la pale. Les phénomènes de diffusions sont donc dominants dans les phases aqueuses.[155],[156] Cette hypothèse est validée par la faible reproductibilité des résultats, caractérisée par les valeurs de l’écart type variant de 0,5% à 12,7%, qui traduisent un contrôle difficile de l’extraction du fructose dans le réacteur coaxial. La valeur atteinte par le rendement de relargage du D-fructose, 37% maximum, est inférieure au 61,8% atteints en 1 heure lors de l’étape 2 du système découplé (ce chapitre : partie IV.1.3.) et bien inférieure aux 90% atteints lors des tests en Eppendorf en 1 heure (chapitre III, partie III.2.2.). Ce résultat met encore en évidence une limitation due à la faible agitation utilisée dans le réacteur. De plus, dans les différentes mises en œuvre de l’extraction du fructose (Eppendhorf, réacteur Radley® et réacteur coaxial) il est possible de calculer les vitesses initiales d’extraction et de les mettre en relation avec les surfaces des interfaces. Les résultats sont donnés dans le Tableau 31.

Mise en œuvre Surface (cm²) Vitesse initiale d’extraction (μmol/min) Vitesse initiale d’extraction (μmol/min/cm²) Eppendorf 0,79 1,48 1,87 Radley® 79 9,5 0,12 Coaxial 38 2,75 0,07

Tableau 31. Aires des surfaces d’extraction et vitesses initiales d’extraction dans les différentes mises en œuvre expérimentales.

Entre les expériences dans le réacteur Radley® et en Eppendorf, la surface d’échange est divisée par 100 pour une vitesse d’extraction divisée par 6,5. Entre les expériences dans le réacteur Radley® et dans le réacteur coaxial, la surface est divisée par 2 et la vitesse d’extraction est divisée par 3,5. La vitesse initiale d’extraction augmente lorsque la surface de l’interface entre la phase organique et la phase aqueuse augmente. Les différentes agitations ne sont pas les mêmes et le rendement d’extraction est dépendant de la vitesse d’agitation, ainsi la comparaison entre les 3 mises en œuvre n’est qu’à titre indicatif. [116] Cependant dans le cas du réacteur coaxial, l’augmentation de la vitesse initiale par rapport à la mise en œuvre en Eppendorf est

inférieure au résultat attendu.

Cette étude, bien que montrant une limite due à l’agitation des phases, a permis de démontrer la mise en œuvre du système de membrane liquide pour le transport du D-fructose.

IV.3. Conclusion

Le système en mode « cascade » est découplé en 3 étapes physiquement distinctes : isomérisation et extraction simultanée, relargage, déshydratation. La première étape, l’isomérisation du D-glucose et l’extraction simultanée du D-fructose formé est réalisé dans les conditions optimales déterminées dans le chapitre précédent. La phase aqueuse est ainsi composée de 100 mM de D-glucose dans un tampon Tris-HCl 100 mM à pH = 8,5. La phase organique est constituée de MIBC contenant le transporteur (3,4DPCBA) et le contre-ion (Aliquat336®) à un rapport molaire 1/2 pour des concentrations de 100 et 200 mM respectivement. Cette étape est réalisée à 70°C. L’expérience d’isomérisation simultanée à l’extraction réalisée durant 90 minutes a permis de déplacer l’équilibre thermodynamique de la réaction d’isomérisation de 18,2% en atteignant 64,1% de conversion du D-glucose. Par conséquent, la mise en œuvre du relargage simultané du fructose dans une seconde phase

aqueuse (réceptrice) devra permettre la régénération du couple transporteur-contre ion dans la membrane liquide organique, permettant un déplacement plus important de l’équilibre thermodynamique grâce au transport continu du fructose. La troisième étape, la déshydratation du fructose en 5-HMF est réalisée dans les conditions déterminées dans le chapitre III par introduction de Dowex®Monosphere®650C à une quantité correspondant à 3 fois le nombre de H+ (de sites acides) nécessaire pour réaliser la réaction de déshydratation du D-fructose, à 80 °C. 18h de réaction semble être le meilleur compromis entre productivité et pureté avec une sélectivité de 80,3% et un bilan carbone supérieur à 90%. Ce temps de réaction permet d’obtenir un rendement de déshydratation de 13,5%. Un rendement qui est conforme (et même légèrement supérieur) aux attentes à la suite des 9,2% de rendements obtenus dans le chapitre III après 7h30 de déshydratation.

Un réacteur coaxial a été mis en œuvre pour réaliser le transport du fructose simultanément aux réactions d’isomérisation et de déshydratation. Un rendement d’isomérisation de 70,1% avec un transport de fructose (extraction) de 50,2% et un rendement global en 5-HMF de 4,1% ont été obtenus. Le réacteur coaxial mis en place a permis, dans le cadre de l’étude du transport de fructose sans catalyse, un rendement d’extraction de 45% après 7h et un rendement de relargage de 21,8% du fructose extrait. Le rendement d’extraction et la vitesse d’extraction sont inférieurs à ceux obtenus lors de la mise en œuvre en cascade, indiquant une limitation due à la mauvaise agitation des phases. De plus cette géométrie de réacteur ne permet pas de thermostater indépendamment les deux phases aqueuses. Cependant, même si des verrous restent à lever, une première preuve de concept d’une catalyse hybride a ici été obtenue avec le réacteur coaxial.

Afin de parvenir à une meilleure maîtrise des réactions en termes de contrôle des températures et de l’optimisation de l’agitation des différentes phases, un second réacteur est spécialement conçu et étudié dans le chapitre suivant.

Chapitre V. Catalyse hybride dans le réacteur

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