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2.2 Expoitation directe de la carte des distances : le cas particulier de la segmentation

2.2.2 Ligne de Partage des Eaux et distance de Mahalanobis

Lorsqu’il est possible de travailler à partir d’un unique échantillon de référence (ce qui est souvent le cas en médical car on focalise souvent sur un seul organe ou sur une seule pathologie), alors le calcul de la distance de Mahalanobis fournit une carte topographique suffisante pour pouvoir segmenter les images multivaluées. Le paradigme de segmentation est donc très simple. Il se fait en deux temps : un, le calcul de la carte des distances ; deux, le calcul de la LPE sur la carte des distances.

FIG. 2.14:Représentation de l’inondation des bassins versants. La Ligne de partage des eaux est l’en-semble des points de séparation des eaux provenant de différents bassins. Elle est localisée sur la crête du relief. La stratégie combine une approche région et une approche frontière : la croissance s’effec-tue autour des minimums régionaux (ou plus généralement de sources d’inondation prédéfinies) et la rencontre à lieu sur les lignes de crête de l’image gradient.

A titre d’exemple, nous illustrons maintenant le fonctionnement et les performances de cet algo-rithme dans le cas d’images couleur. Nous aborderons en fin de chapitre les applications médicales.

Quelques exemples couleur Comme il a été mentionné au chapitre 1, le choix de l’espace colorimé-trique est un point important pour l’analyse des images couleur. Cependant, en ce qui nous concerne, ce choix rentre dans un problème plus général. En effet, nous avons montré au paragraphe 2.1.1 que les classes doivent être contenues dans des hyperellipses afin de pouvoir être séparées par la distance de Mahalanobis. Par conséquent, nous devons regarder la représentation de l’image dans l’espace des caractéristiques afin de mesurer la complexité du problème (figure 2.16).

Si les classes sont vraiment mélangées, il faut étudier d’autres alternatives comme le choix d’un autre système colorimétrique ou le fait d’ajouter d’autres critères (nous illustrerons les possibilités en la matière dans le paragraphe suivant dans le cas de la segmentation d’images texturées).

L’exemple de la figure 2.15, montre que malgré le passage à la carte des distances, la segmentation n’est pas immédiate. L’objet est trop complexe. La nécessité d’une régularisation est évidente, car sans cette étape, les contours obtenus directement à partir de la carte des distances seraient particulièrement fluctuants. Ainsi, avant de segmenter l’image, la carte des distances est filtrée (en l’occurrence par fer-meture morphologique) de telle sorte que la ligne de partage des eaux produite soit plus régulière ; le processus de segmentation sera plus également plus robuste.

2.2. Expoitation directe de la carte des distances : le cas particulier de la segmentation 71 Le choix de la fermeture morphologique est un choix très classique, car cet opérateur permet de fermer des contours qui ne l’étaient pas et pour lesquels la ligne de partage des eaux donne des résultats extrêmement imprécis. Des choix plus judicieux qu’une simple fermeture peuvent être imaginés (et notamment le recours à une fermeture visqueuse : confer section 2.4). Dans le cas présent, notre souci n’est pas la régularisation de la segmentation, mais la définition et l’expérimentation d’un paradigme.

FIG. 2.15:Segmentation par calcul de la ligne de partage des eaux sur la carte des distances. En haut, l’image originale, la carte des distances et sa représentation 3D. L’échantillon de référence est l’écureuil (zone triangulaire verte représentée en superposition sur l’image). Cette zone sert également de source d’inondation lors du calcul de la ligne de partage des eaux. En bas, trois résultats de la segmentation par LPE sur le gradient de la carte des distances. En fonction des différentes fermetures (disque de taille 0, 10, 20, 30), le résultat est plus ou moins grossier. Une fermeture avec un disque de taille 20 (troisième image) permet d’approcher au mieux la forme recherchée.

L’exemple présenté en figure 2.15 illustre bien les performances de la segmentation obtenue via la carte des distances. Rapportées à une représentation scalaire par simple projection (sans prise int{egration d’information sur la nature statistique des régions), ces images sont extrêmement difficiles à segmenter : la plupart des algorithmes classiques (sans sur-paramètrage) échouent. On peut à titre d’exemple com-parer les segmentations obtenues via la carte des distances et via une analyse par composante : voir les figures 2.16 et 2.17.

Les exemples des figures 2.18 et 2.19 montrent l’impact du choix de la métrique sur les résultats. La distance de Mahalanobis pour les raisons que nous avons détaillées semble de loin une excellente métrique. À titre d’illustration, nous présentons les résultats en utilisant deux métriques et l’image en niveaux de gris. Dans tous les cas, la même stratégie de segmentation est utilisée.

FIG. 2.16:Afin de comprendre la complexité du problème, il faut transposer l’image dans l’espace des caractéristiques. Dans cet exemple, deux classes sont représentées dans l’espace RGB. Les deux classes sont correctement séparées et peuvent être incluses dans des hyperellipses. Par conséquent, la carte des distances constituera un support favorable à une segmentation.

FIG. 2.17:Segmentation obtenue sur chaque composante vectorielle (dans la représentation RGB). Sur cet exemple, les mêmes marqueurs que ceux utilisés en figure 2.16 sont retenus. Dans chaque cas, la ligne de partage des eaux est calculée sur le gradient de l’image.

Maintenant, dans le cas où plusieurs objets sont recherchés dans l’image, le problème est un peu plus complexe puisque plusieurs références statistiques doivent être simultanément prises en compte. Dans

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(i) (ii)

(iii) (iv)

FIG. 2.18:Comparaison des segmentations obtenues via différentes cartes de distance. (i) est l’image originale, les marqueurs intérieurs et extérieurs sont superposés en rouge à l’image. (ii) est le résultat obtenu via la distance de Mahalanobis (l’échantillon de référence est le marqueur rouge sur le chien). (iii) est le résultat de la segmentation via la distance euclidienne. (iv) est la segmentation obtenue par segmentation d’une unique composante (meilleur résultat de la figure 2.17).

ce cas, le paradigme de segmentation par ligne de partage des eaux doit être reformulé sur le modèle des approches de type SRG, de l’anglais « Seeded Region Growing » initialement introduites par Adams et Bischof en 1996 [1]. Tout comme dans le calcul de la ligne de partage des eaux, des sources pointant sur les zones à segmenter sont définies, les points libres de l’image sont agrégés aux sources dont ils sont les plus proches. A l’origine, Adams et Bischof proposent une distance au sens de la valeur moyenne. Contrairement aux cas précédents, chaque source définit une référence statistique pour le calcul des distances : les sources sont ainsi mises en compétition (voir figure 2.20). Les références statistiques sont fixées à l’initialisation et ne croissent pas avec le temps : cela n’aurait comme conséquence que de niveler les statistiques et donc de rendre plus difficile la décision pour la croissance. Cet algorithme de

(i) (ii)

(iii) (iv)

FIG. 2.19:Segmentation obtenue par calcul de la ligne de partage des eaux sur l’image gradient de la carte des distances de Mahalanobis ((ii)), euclidiennes ((iii)), ou encore en ne retenant qu’une seule composante de l’image couleur ((iv)). (i) est l’image originale ; les marqueurs sont superposés en rouge à l’image.

segmentation est illustré en figures 2.21, 2.22, 2.23 et 2.24]. La distance de Mahalanobis propose une normalisation par la variance ce qui induit une bonne robustesse au bruit.

Cas d’une image multivaluée formée par analyse granulométrique Comme il a été dit en intro-duction, les images couleur ne sont pas les seuls exemples d’images multivaluées. A titre d’illustration, nous présentons ici un exemple de segmentation de texture recourant à une analyse granulométrique et statistique. La technique utilisée ici pour l’analyse de la texture a été proposée par Dougherty [42]. Elle prend le nom de local pattern spectrum. Elle est fondée sur une analyse granulométrique de l’image combinée à un calcul des moments statistiques locaux. L’analyse granulométrique consiste à appliquer sur l’image des ouvertures de taille croissante ce qui permet de représenter l’image pour différentes échelles de taille. Plus la taille de l’ouverture augmente, plus la représentation est grossière. Le « pattern

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FIG. 2.20:Modification du protocole de croissance de région dans le cas où chaque source définit une référence statistique. Chaque région grossit à un rythme fixé par la distance statistique des points libre à la source.

FIG. 2.21:Image originale avec les deux mar-queurs initiaux. Un bruit gaussien est ajouté à l’intérieur et à l’extérieur. Les algorithmes de segmentation classiques peu robustes au bruit échouent.

FIG. 2.22:Résultat obtenu par calcul directe de la ligne de partage des eaux. Sans pré-traitement particulier, l’algorithme échoue.

FIG. 2.23: Résultat obtenu par SRG classique (utilisant la distance à la moyenne comme cri-tère d’évolution).

FIG. 2.24: Résultat obtenu en conditionnant la croissance de région par la distance de Mahala-nobis à chaque source.

spectrum » [78] consiste à construire une courbe granulométrique associant à chaque échelle de repré-sentation (chaque taille d’ouverture) le ratio 1 −

A0 où Aλest l’aire de l’image à l’échelle λ et A0l’aire de l’image originale. La dérivée de cette distribution est une densité de probabilité. Le local pattern

spectrumest construit sur le même principe, mais l’analyse est rendue locale en considérant une fenêtre centrée sur chaque de l’image. Ensuite les trois premiers moments statistiques sont calculés. Ainsi, pour chaque résolution et en chaque point de l’image, un vecteur de dimension 3 est obtenu qui caractérise la texture à laquelle le point appartient.

Le local pattern spectrum conduit donc à la formation d’une pile d’images à valeurs vectorielles, les vecteurs étant de dimension (3 × N) (3 moments calculés pour N tailles d’ouvertures différentes pour l’analyse granulométrique). Sur l’exemple de la figure 2.252, N = 5. Cette image multivaluée est ensuite segmentée par calcul de la LPE sur la carte des distances, trois sources (trois références statistiques étant mises en compétition), une dans chaque texture. Le résultat obtenu est présenté en figure 2.25.

FIG. 2.25:Segmentation d’une texture après décomposition en plusieurs résolutions selon la méthodo-logie proposée par [42]. L’image segmentée est constituée de vecteurs de dimension 15. Trois marqueurs locaux (quelques pixels) sont positionnés dans les 3 zones d’intérêt.

2.2.3 Conclusion

Les exemples présentés dans cette partie montrent clairement que la distance de Mahalanobis est une mesure de similarité robuste ; les images que nous avons présentées correspondent à des problèmes

rela-2Nous remercions Lucas Tamarit et Michel Kocher de l’école d’ingénieur de Genève (EIG) pour nous avoir fourni cette image.

2.3. Filtrage morphologique des images multivaluées via la transformation de rang 77